Contenu du sommaire : De quelques théoriciens et quelques praticiens de l'information-documentation

Cette recherche vise à étudier la pensée de Robert Estivals à partir du temps et de l'espace de production de la Revue de Bibliologie. Il s'agit d'une recherche méta-méthodologique, partie d'une étude plus vaste, développée entre 2017 et 2018. La méthodologie, au niveau théorique, adopte les approches info-communicationnelle sociale, historique et critique de V. Couzinet, R. Marteleto, L. Wittgenstein, P. Bourdieu, M. Foucault, M. Weber, A. Touraine, L. Boltanski et È. Chiapello, M. Blanchot. Le principal corpus de l'étude provient de deux grandes perspectives : les sources primaires du Fonds Meyriat et des sources théoriques provenant de livres et de revues scientifiques. Nous avons identifié quatre voies pour conduire une réflexion sur la pensée et l'œuvre d'Estivals : une épistémologie critique, une épistémologie sociale, la condition de la revue scientifique en tant que dispositif info-communicationnel et une approche philosophico-méthodologique basée sur la philosophie du langage.

Le rôle de Jean Meyriat (1921-2010) dans la construction de la science de l'information est examiné à partir de l'analyse de sa contribution aux « Sciences de l'écrit : encyclopédie internationale de bibliologie » (1993). Les articles qu'il a produits montrent son souci de faire connaitre aux chercheurs le vocabulaire des praticiens et à ces derniers celui des chercheurs. Ainsi il a favorisé la stabilisation des notions utilisées par chacun d'eux. Sa position dans le monde professionnel comme directeur des services de documentation à la Fondation nationale des sciences politique (Paris) le placent en médiateur documentaire et lui permettent d'utiliser les outils professionnels, notamment bibliographiques, au service du monde universitaire dont il est aussi membre comme chercheur et théoricien de l'information. Appartenant aux deux mondes il est le médiateur hybride artisan de leur rapprochement.

Cette recherche se centre sur les nombreuses constructions institutionnelles initiées par Robert Escarpit au sein de l'Université de Bordeaux de la fin des années 1950 au début des années 1980. À l'aide des archives des centres de recherche qu'il a fondés et dirigés, il s'agit de s'intéresser aux transformations des structures de la recherche en sciences humaines et sociales dans le contexte de l'émergence des sciences de l'information et de la communication en France.

Auteur prolifique, Éric de Grolier (1911-1998) a publié des centaines de textes sur divers sujets liés à ses intérêts pour la linguistique, la terminologie, la science politique, la lecture et les bibliothèques, la communication et la science de l'information (SI). L'histoire, le contenu et la structure des systèmes de classification documentaire ont été la passion d'Éric de Grolier. Dans une vingtaine de textes, portant sur la classification, publiés entre 1956 et 1992, nous avons relevé six thèmes récurrents: l'histoire du système des sciences, la taxilogie, les schémas de classification, la symbolisation et la notation, les technologies de l'information et l'avenir de la classification, la recherche en classification. Chaque thème est développé dans le but de démontrer que la place d'Éric de Grolier dans le cercle des pionniers francophones de la documentation et de la SI est pleinement méritée et que sa contribution à la réflexion sur la classification documentaire est indiscutable.

Si Eric de Grolier est reconnu comme l'un des fondateurs en France des études sur les bibliothèques et sur la classification documentaire, un aspect de son travail pionnier est resté totalement ignoré : ses études sur la propagande dont il entendait faire une « science de l'opinion publique ». Cet oubli s'explique par le fait que son travail s'est effectué sous le régime de Vichy, dans le cadre d'un organisme créé directement par le secrétaire d'État à la propagande de ce régime, ce qui l'a conduit à être moteur, à la même époque, dans un ambitieux projet d'organisation corporatiste du monde de la documentation. Cette recherche a vocation à mettre au jour cette période méconnue de la vie intellectuelle d'Eric de Grolier.

Cette recherche interroge la contribution de Gabriel Naudé (1600-1653) à une « science » des bibliothèques en émergence alors que s'opère un tournant épistémologique. Praticien érudit, préoccupé d'accès aux savoirs, pleinement engagé dans son époque, dans un contexte fracturé, il est souvent présenté comme un précurseur. Son projet bibliothécaire, tel qu'il ressort de ses écrits, notamment son célèbre Advis pour dresser une bibliothèque (1627), invite à refonder la bibliothèque, avec le catalogue et la bibliographie en instruments majeurs de cette refondation : une bibliothèque moderne, publique, universelle, ouverte sur le monde, machine culturelle au service d'une libération dans l'ordre des savoirs, et outil d'éducation à visée émancipatrice, support d'interaction et d'invention.

Cette recherche, qui s'inscrit dans un ensemble de travaux sur l'organisation des connaissances et leurs médiations au musée, mobilise la notion d'utopie documentaire et propose un retour sur trois aspects des travaux de Paul Otlet : leur rapport au musée dans son Traité de documentation de 1934, leur mise en images dans les dessins de François Schuiten et leur médiation vers les publics au Mundaneum de Mons (Belgique), lieu qui hybride musée, bibliothèque, archive et centre d'interprétation. La réflexion montre comment l'œuvre foisonnante d'Otlet, après une période d'oubli relatif, est entrée dans un processus de patrimonialisation, engendrant à son tour un processus de documentation.

Dans notre monde technologique, à l'heure de la dématérialisation, de la prolifération des écrans, nous ressentons le besoin de retrouver la relation sensible à l'objet. Les bibliothèques et les musées soignent la manière dont ils présentent des objets, ces « espèces de documents » (Otlet, 1934) révélant ainsi l'importance accordée à l'agencement de l'espace au sein des lieux des savoirs. Parallèlement, une réelle appropriation de ces espaces et de nouvelles manières d'habiter ces lieux de culture et de savoir se fait jour. Comment approcher cette ambiance faite d'énonciation et d'appropriation ? Retour sur deux textes d'E. Veron dont les méthodes et les notions inspirantes permettent de réinterroger les pratiques et usages de ces espaces ordinaires de travail et d'apprentissage dans une approche sensible.

Edson Nery Da Fonseca, bibliothécaire, bibliographe, professeur et chroniqueur brésilien, a été l'une des figures les plus en vue de l'histoire de la bibliothéconomie et de la bibliographie au Brésil. Notre recherche vise à vérifier dans sa vie et dans son œuvre, en fonction des évènements et de l'espace, les récits, les sources et les influences intellectuelles qui le distingaient dans le domaine de la bibliothéconomie. C'est pourquoi la délimitation des rôles, des actions et des réactions qui l'ont amené à donner un sens au statut de la bibliographie, sont l'objet de notre intérêt particulier. L'analyse de sa bibliographie a servi de base à l'étude.

Ce texte court discute quelques contributions d'auteurs francophones, plus particulièrement de Zygmunt Dobrowolski et de Désiré Kervégant, à la théorie classificatoire. Leurs idées sur la notation et l'expression des relations entre classes sont comparées avec des solutions similaires proposées par des systèmes classificatoires récents.