Contenu du sommaire : Ce qu'un dieu n'est pas : les prémices de la théologie négative

Revue Revue de l'histoire des religions Mir@bel
Numéro tome 237, no 2, avril-juin 2020
Titre du numéro Ce qu'un dieu n'est pas : les prémices de la théologie négative
Texte intégral en ligne Accessible sur l'internet
  • Ce qu'un dieu n'est pas : les prémices de la théologie négative : Avant-propos - Stéphanie Anthonioz, Sebastian Fink p. 179-193 accès libre
  • What a God is Not. The Earliest Sources from a Comparative Perspective - Peeter Espak p. 195-209 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
    Cette contribution s'intéresse à la nature des dieux dans l'Orient ancien à la lumière de la théologie négative. L'analyse des sources suméro-akkadiennes datées du IIIe millénaire av. n. è. montre qu'une divinité est distincte de tout autre créature. Une divinité, bien qu'immanente et résidant à l'intérieur du cosmos, n'est pas une création seconde, elle n'est pas la création d'une autre entité. Une divinité peut être considérée comme une forme d'existence permanente dans le cosmos, tandis que toutes les autres créatures, humaines ou animales, peuvent être considérées comme des développements secondaires. Cette compréhension ancienne d'un dieu immanent en Mésopotamie n'évoluera que tardivement au Ier millénaire avec l'apparition du concept de la transcendance divine en particulier au Levant puis avec l'émergence du christianisme.
    The paper discusses the nature of Ancient Near Eastern gods from the perspective of negative theology. It is based on the analysis of several 3rd-millennium Sumero-Akkadian sources showing that a god or a higher divine creature was distinct from all other living beings. A god – although immanent and residing inside the cosmos – was not a secondary idea or a creation of another being. A god can be seen as a natural idea or permanent form of existence in the cosmos while all other creatures such as men or animals can be considered later secondary developments. This Ancient Mesopotamian understanding of an immanent god residing inside the universe would only change with later first-millennium ideas of a divine being from Israel and later in Christianity, where a new supernatural or transcendent God emerged.
  • Noms de dieux et théologie négative au Levant dans l'Antiquité - Fabio Porzia p. 211-237 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
    L'étude des noms de dieux donne accès à un véritable savoir théologique. Cette approche est a fortiori fondamentale dans l'étude de religions comme celles du Levant, pour lesquelles nous ne disposons pas toujours de sources littéraires. Après avoir montré les enjeux théologiques des noms de dieux, cet article se concentre sur des noms parlants qui ont parfois fait penser à des dieux sans nom propre, voire anonymes. En inscrivant ces noms dans le système de nomination sémitique, cet article montre que, d'une part, il est inexact de considérer ces divinités comme anonymes et que, d'autre part, les noms de dieux formés sur des noms communs comme ba‘al, 'el, 'adon, melek etc. ouvrent aux développements postérieurs de la théologie négative.
    The study of divine names gives us access to real theological knowledge. This approach is all the more fundamental for the study of Levantine religions in particular, for which we often lack literary sources. After having shown the theological potential of divine names, this paper focusses on particularly striking divine names, sometimes understood as being related to gods without a proper name or to anonymous gods. By inscribing these names back into the Semitic naming system, this paper argues that, on the one hand, it is incorrect to regard these gods as anonymous gods and that, on the other hand, divine names derived from common names such as ba‘al, 'el, 'adon, melek etc. disclose further developments of negative theology.
  • Traces of Negative Theology in the Hebrew Bible - Annette Schellenberg p. 239-257 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
    Malgré ses affirmations positives sur Dieu, la Bible hébraïque contient des textes et des traditions qui peuvent être considérés comme les traces d'une théologie négative. On pense à l'interdiction des images divines, au récit contenant l'affirmation « je suis qui je suis » (Ex 3,13), celui ne permettant à Moïse que de contempler Dieu par derrière (Ex 33), ou encore la narration concernant Élie sur le mont Horeb (1 R 19), la tradition de l'incomparabilité divine, l'incapacité humaine de discerner, enfin la juxtaposition des différentes métaphores au sujet de Dieu. Ces textes ne dénient pas la possibilité d'énoncés positifs, mais ils soulignent l'inadéquation de ces énoncés, d'une part, et, d'autre part, l'incapacité humaine à pleinement saisir Dieu.
    Despite its general ease in making affirmative statements about God, the Hebrew Bible also contains texts and traditions that can be regarded as containing traces of negative theology. Most important in this regard are the prohibition of images, the statement “I am who I am” (Ex 3:13), the narration about Moses only being allowed to see YHWH from behind (Ex 33), the story of Elijah at Mount Horeb and God's unconventional theophany (1 Kgs 19), the tradition of YHWH's incomparability, reflections on the human incapacity to discern God, and the juxtaposition of different metaphors about God. None of these texts and traditions deny the possibility of affirmative statements about God. However, they point to the inadequacy of affirmative statements about God and/or the incapacity of humans to fully understand God – traces of negative theology.
  • La théologie négative dans la pensée présocratique - Alberto Bernabé p. 259-276 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
    Le but de cet article est de passer en revue les principaux témoignages disponibles qui permettent de dresser un historique de la théologie négative dans la pensée présocratique. Dans un premier temps, les philosophes reflètent une théologie négative de deux manières : 1) en attribuant des adjectifs, qui s'appliquaient aux dieux, à des principes physiques ; 2) en considérant comme de simples phénomènes naturels ce qui était auparavant et traditionnellement considéré comme des dieux. Xénophane configure une théologie négative qui consiste à critiquer la vision homérique et une théologie positive qui, dans une large mesure, reste encore négative. L'auteur du Papyrus de Derveni interprétant une théogonie orphique considère qu'Ouranos, Kronos et Zeus ne sont que des noms de l'air intelligent.
    The aim of the paper is to review the main testimonies available in order to sketch a history of negative theology in Pre-Socratic thought. In a first stage, philosophers reflect a negative theology in two ways: 1) attributing to new philosophical principles adjectives that qualified the gods; 2) considering mere natural phenomena that were traditionally considered gods. Xenophanes configures a negative theology consisting of a critique of the Homeric view and a positive theology that is still a negative theology to a large extent. The author of the Derveni Papyrus interpreting an Orphic theogony considers that Ouranos, Kronos, and Zeus are mere names for the intelligent air.
  • Negative Theology and its Interpretation as an Atheistic Attitude in 5th Century Athens - Pablo Pinel Martínez p. 277-290 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
    Dans l'article suivant, j'essaie de montrer qu'il existait probablement un lien entre la montée des idées athées à la fin du ve siècle av. J.-C., et l'existence antérieure d'une tradition de théologie négative. Cela aurait commencé avec Xénophane de Colophon, dans les écrits duquel nous semblons trouver des traces à la fois de théologie négative et de scepticisme épistémologique et théologique. Ces deux conceptions auraient permis l'apparition du doute quant à l'existence des dieux, ce qui est le mieux représenté dans les écrits de Protagoras. Cet agnosticisme aurait, à son tour, cédé le pas à l'apparition d'un athéisme positif. Cela explique peut-être aussi pourquoi la théologie a commencé à éveiller les soupçons parmi la population athénienne.
    In the following paper I try to show that there was most likely a connection between the rise of atheistic ideas towards the end of the 5th century BCE, and the previous existence of a tradition of negative theology. This would have started with Xenophanes of Colophon, in whose writings we seem to find traces of both negative theology and epistemological as well as theological skepticism. These two views would have allowed the apparition of doubt regarding the existence of the gods, which is best presented in Protagoras' writings. This agnosticism, in turn, would have given way to the appearance of positive atheism. This may explain, as well, why theology started to raise suspicions amongst the Athenian population.
  • Vision divine, interdit de représentation et via negationis dans la Bible hébraïque - Stéphanie Anthonioz p. 291-320 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
    L'enjeu de cette contribution est d'expliquer la rareté des visions divines dans la Bible hébraïque en se fondant sur l'interdiction biblique des images divines. Comment dire ce qui ne peut être représenté, ce qu'il est interdit même de représenter ? Ne faut-il pas alors confronter l'interdit de la représentation divine, qui développe le premier commandement du décalogue (Ex 20,2-6 ; Dt 5,6-10), à son contexte littéraire plus large et historique ? Les conclusions de l'étude amèneront à affiner la compréhension de l'interdit et à saisir dans une approche historique mais aussi religieuse la via negationis de la représentation divine biblique.
    The aim of this contribution is to show why prophetic divine visions are so rare in the Hebrew Bible. How can that which cannot be represented – which it is forbidden even to represent – be spoken? We must thus confront the prohibition of divine representation, which develops the first commandment found in the decalogue (Ex 20:2-6; Dt 5:6-10), and analyze it within its broader historical and literary context. The conclusions of this study will enable us to refine our understanding of this prohibition and to grasp the biblical via negativa of divine representation from a historical and also social and cultural point of view.