Contenu du sommaire : Transcender les frontières.Sibérie-Mongolie : des corridors de développement entre Chine et Europe

Revue Bulletin de l'Association de Géographes Français Mir@bel
Numéro no 2019/3
Titre du numéro Transcender les frontières.Sibérie-Mongolie : des corridors de développement entre Chine et Europe
Texte intégral en ligne Accessible sur l'internet
  • Transcender les frontières.Sibérie-Mongolie : des corridors de développement entre Chine et Europe - Alain Cariou p. 367-374 accès libre
  • Faire-corridor : le corridor comme agencement politico-réticulaire - Kevin Sutton p. 375-387 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
    La notion de corridor peut être entendue comme un objet ou un concept. Cet article propose de centrer la réflexion, à partir d'une entrée actorielle, sur les intentionnalités organisationnelles et organisatrices qui conduisent à appréhender la notion de corridor comme un agencement politico-réticulaire. Il n'y a effectivement pas de corridor en soi, ce qui invite à questionner le « faire-corridor ». L'analyse du système ferroviaire suisse de franchissement alpin permet de revenir sur les fondements politiques qui donnent à voir une pensée du corridor fondée sur la redondance et la répartition, et non la concentration. La dialectique réticularisation du système/axialisation des services n'est qu'en apparence paradoxale. Les dynamiques de l'organisation axiale des services de transport combiné révèlent la façon dont les opérateurs ferroviaires, dans un contexte de libéralisation, s'approprient les fonctionnalités d'un système fondé sur la connectivité. Faire-corridor, dans le cas étudié, est ainsi une autre façon de faire réseau, à partir d'une dialectique réticularité/nodalité.
    Corridors are considered as well as objects or concept. This paper proposes to think about it from an actors-based approach by dealing with organizational motivations. There are no evident corridors. “Corridor” is a political and reticular layout characterized by a high degree of connectivity of a system. Thinking about corridors needs analyses which are focalized on corridor-making process in order to evaluate the role of actors. Based on analyses of the Swiss railway Alpine crossing system, this paper aims to show how a “corridor” can be characterized by the connectivity and not by a concentration process. Dialectic between reticularization of the system and axialization of the services is not paradoxical as operators are making theirs properties of the system in a context of liberalization. Corridor-making is another way of network-making from a dialectic between reticularity and nodality.
  • La relation continentale eurasiatique dans la longue durée : de la « Route de la Soie » aux « nouvelles Routes de la soie » et aux « corridors » - Michel Bruneau p. 388-404 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
    Les liaisons marchandes et culturelles entre l'Europe et l'Extrême-Orient ont existé depuis l'Antiquité romaine et han, au cœur du continent eurasiatique le long de routes qu'on a appelé à la fin du XIXe siècle « Route de la soie ». L'expansion de l'empire russe puis de l'URSS, peuplant la Sibérie, a créé une première forme de couloir ou corridor le long des voies ferrées transcontinentales du Transsibérien. En Asie orientale, le Japon après la Seconde Guerre mondiale a impulsé la création d'un corridor maritime jusqu'aux détroits de Malacca, devenu un axe de développement et de croissance économique majeur. La forte croissance économique chinoise depuis les années 1980 a rencontré celle des Nouveaux Pays Industriels d'Asie du Sud-Est impulsée par le Japon, aboutissant à l'apparition de corridors dans la Région du Grand Mékong et à leur conceptualisation en Asie. Le projet des « nouvelles Routes de la soie », continentales et maritime, est une systématisation et une extension par la Chine, à une échelle continentale eurasiatique puis mondiale, de ces phénomènes.
    Trade and cultural links between Europe and the Far East have existed since Roman and Han antiquity in the heart of the Eurasian continent along roads that were called the Silk Road at the end of the 19th century. The expansion of the Russian empire and then the USSR, populating Siberia, created a first form of corridor along the transcontinental railway lines of the Trans-Siberian Railway. In East Asia, Japan after the Second World War spurred the creation of a maritime corridor to the Straits of Malacca, which has become a major focus for development and economic growth. China's strong economic growth since the 1980s has met that of the New Industrial Countries of Southeast Asia driven by Japan, resulting in the emergence of corridors in the Greater Mekong Region and their conceptualization in Asia. The « New Silk Roads » project, both continental and maritime, is a systematization and extension by China, on a Eurasian and then global continental scale, of these phenomena.
  • Corridors ferroviaires Europe – Asie et coopération internationale :quelles perspectives de développement ? - Joël Forthoffer p. 405-420 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
    Le commerce international connaît une forte croissance, notamment sous l'impulsion des pays d'Asie. Les échanges Europe-Asie sont réalisés principalement par voie maritime. En effet, malgré la redécouverte ces dernières années des grands itinéraires terrestres comme le corridor transsibérien, les transports ferroviaires internationaux de marchandises ne représentent aujourd'hui qu'une faible part des volumes transportés. Les investissements d'infrastructure ferroviaire pour de nouveaux corridors dans l'espace eurasien, les efforts d'interopérabilité et d'harmonisation menées par les organisations intergouvernementales et les organismes de coopération ferroviaire seront-ils en mesure de renforcer la compétitivité du transport ferroviaire ?
    International trade is experiencing strong growth, particularly driven by Asian countries. Europe-Asia trade is carried out mainly by sea. Indeed, despite the rediscovery in recent years of major land routes such as the Trans-Siberian Corridor, international rail freight transport now accounts for only a small proportion of the volumes transported. Can rail infrastructure investments for new corridors in Eurasian space, interoperability and harmonization efforts by intergovernmental organisations and the railway cooperation agencies strengthen the competitiveness of rail transport ?
  • Les corridors ferroviaires eurasiatiques : quelle stratégie russe ? - David Teurtrie p. 421-436 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
    Sous l'URSS déjà, Moscou avait tenté de positionner le territoire soviétique comme une solution alternative à la voie maritime pour les liaisons Europe-Asie. Aussi, quand Pékin lance son projet de nouvelles routes de la soie, la Russie adopte une attitude ambivalente. Officiellement Moscou apprécie d'être associé à cette initiative, espérant pouvoir profiter de retombées économiques positives. Mais dans le même temps, la Russie craint de possibles conséquences négatives en termes de souveraineté ou de perte d'influence auprès de ses voisins. Elle tente d'orienter les projets chinois dans un sens qui lui soit favorable. Pour ce faire, Moscou dispose de plusieurs atouts : la Russie est le seul pays qui dispose d'une frontière commune à la fois avec la Chine et l'Union Européenne. De plus, elle dispose d'infrastructures ferroviaires opérationnelles contrairement à toutes les autres routes potentielles. Enfin, après des années d'attentisme, Moscou a entrepris de moderniser ses infrastructures et élabore une stratégie autonome dans la mise en place de liaisons eurasiatiques : corridor Nord-Sud vers l'Inde, projets de liaisons avec le Japon et la Corée. Ainsi, une véritable stratégie russe se dessine qui, quoique plus discrète que dans le domaine énergétique, n'en est pas moins porteuse d'importants enjeux géopolitiques et géoéconomiques.
    Already during the Soviet period, Moscow had tried to position Soviet territory as an alternative to the sea route for Europe-Asia routes. Therefore, when Beijing launched its project of new silk routes, Russia adopted an ambivalent attitude. Officially Moscow appreciates being associated with this initiative, hoping to benefit from positive economic spin-offs. But at the same time, Russia fears possible negative consequences in terms of sovereignty or loss of influence on its neighbors. It tries to orient the Chinese projects in a favorable way. To do so, Moscow has several assets : Russia is the only country that has a common border with both China and the European Union. In addition, it has operational railway infrastructure in contrast to all other potential routes. Finally, after years of waiting, Moscow has begun to modernize its infrastructure and develops an autonomous strategy in the implementation of Eurasian links : a North-South corridor to India, projects of linkages with Japan and Korea. Thus, a real Russian strategy is emerging, which, although more discreet than in the energy field, is nonetheless a major geopolitical and geoeconomic issue.
  • Le potentiel logistique de la Sibérie orientale dans le contexte des corridors des nouvelles routes de la soie - Alexandre Silantev, Svetlana Karkhova, Marina Maletskaya p. 437-452 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
    Le projet des « nouvelles routes de la soie » change la structure et la direction des flux mondiaux en modifiant ainsi l'importance géopolitique et géoéconomique de certains territoires et de certains pays. La Sibérie orientale se situe sur le tracé du corridor Nord Eurasien des « nouvelles routes de la soie ». Cela pose un ensemble de défis au système de transport et de logistique de la Sibérie orientale qui nécessite une compréhension scientifique. Cet article présente les résultats de l'étude du potentiel logistique de la Sibérie orientale fondé sur l'estimation des opportunités réelles et potentielles de l'organisation du transport et du transit international de conteneurs. Il présente également les résultats de l'analyse des particularités du système de transport et de logistique de la Sibérie orientale. L'article évalue les obstacles et les menaces qui peuvent entraver la réalisation de ce potentiel logistique. Sur la base des résultats de notre recherche, un ensemble de recommandations a été formulé pour les autorités russes et les entreprises opérant sur le territoire de la Sibérie orientale, mais aussi pour les investisseurs potentiels.
    The "New Silk Roads" project is changing the structure and direction of global flows, thereby changing the geopolitical and geo-economic importance of individual territories and countries. Eastern Siberia lies on the route of the North Eurasian Corridor of the "New Silk Roads". This poses a set of challenges to the transport and logistics system of Eastern Siberia that requires scientific understanding. This article presents the results of the study on the logistic potential of eastern Siberia based on the estimation of the real and potential opportunities of organizing international container transport and transit. It also presents the results of the analysis of the peculiarities of the transport and logistics system of Eastern Siberia. The article assesses the obstacles and threats that may hinder the realization of this logistical potential. Based on the results of our research, a set of recommendations has been formulated for Russian authorities, companies operating on the territory of Eastern Siberia, and potential investors.
  • Vers des corridors énergétiques eurasiatiques ? Enjeux d'intégration à l'Est de la Russie - Sophie Hou p. 453-458 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
    Cet article étudie les corridors énergétiques eurasiatiques en mettant l'accent sur les hydrocarbures et sur les perspectives russes. Si la stratégie chinoise des « Nouvelles routes de la Soie du XXIe siècle » vise à développer les réseaux d'infrastructures, notamment à l'échelle de l'Eurasie, peut-on parler de corridors eurasiatiques dans le domaine énergétique ? Jusqu'à la fin des années 2000, la Chine et la Russie, bien que voisines et complémentaires d'un point de vue énergétique, n'étaient pas reliées par des pipelines et leurs échanges énergétiques restaient limités. De plus, en Asie Centrale, les deux pays apparaissaient davantage comme des concurrents que comme des partenaires. Cependant, au cours des dernières années, des projets énergétiques ont vu le jour, débouchant sur la construction d'infrastructures de transport à travers la Sibérie orientale et l'Extrême-Orient russe. Ces infrastructures constituent des corridors incomplets dont les impacts en termes d'intégration régionale et de développement local de territoires périphériques sont limités.
    This article examines Eurasian energy corridors with a focus on hydrocarbons and on Russian perspectives. The Chinese strategy of the "New Silk Roads of the 21st Century" aims to develop infrastructure networks, particularly on the Eurasian scale, but is it relevant to talk about Eurasian corridors in the energy sector ? China and Russia are neighbouring countries that are complementary from an energy point of view. Nonetheless, they were not connected by pipelines and their energy exchanges remained limited until the late 2000s. Moreover, in Central Asia, both countries appeared to be more competitors than partners. However, in recent years, energy projects have emerged, leading to the construction of transport infrastructure across Eastern Siberia and the Russian Far East. These infrastructures constitute incomplete corridors whose impacts in terms of regional integration and local development of peripheral territories are limited.
  • Les flux migratoires dans l'oblast d'Irkoutsk : orientation et tendances - Alexandre Sukhodolov, Andrei Atanov, Natalia Kuznetsova, Oxana Chuprova, Tatiana Ozernikova p. 469-492 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
    Cet article analyse les flux migratoires de l'oblast d'Irkoutsk dans le contexte des mobilités nationale et internationale. A l'échelle nationale, l'oblast d'Irkoutsk reçoit des flux de migrants de la République de Bouriatie, de la région de la Transbaïkalie et des régions de l'Extrême-Orient, mais perd aussi des habitants avec des flux d'émigration vers la région de Krasnoïarsk, l'oblast de Novossibirsk et les régions centrales du pays. Pour les migrations internationales, les corridors d'immigration les plus importants proviennent des pays d'Asie Centrale, du Caucase et de la Transcaucasie, ainsi que d'Ukraine. Les flux migratoires d'autres pays sont peu importants. Les migrants originaires de Chine ont augmenté en 2017, mais leur nombre n'est pas comparable aux flux de migrants des pays d'Asie centrale et du Caucase. On constate que la région perd des populations qualifiées en âge de travailler. Les résultats de l'enquête d'opinions de la population à l'égard de la migration, sur la base des données d'enquêtes sociologiques, montrent que l'émigration peut potentiellement prendre une ampleur considérable en raison de la quête de meilleures conditions de vie et de travail hors de l'oblast d'Irkoutsk.
    This study identifies stable migration flows in Irkutsk district within the national framework of migration flows between different regions of Russian Federation. Some of the flows have been identified as facilitating population growth in Irkutsk Oblast (inflows from Republic of Buryatia, Zabaykalsky Krai, and the Russian Far East regions) and others are identified as working in the opposite direction (outflows to Krasnoyarski Krai, Novosibirsk Oblast, and central Russia regions). The analysis of international migration identifies primarily inflow migration channels from Central Asian countries, Caucasia and Transcaucasia, as well as Ukraine. Migration exchanges with other foreign countries, further afar, are very limited ; migration inflow from China has increased in 2017, but the scope of this inflow remains limited relatively to the migration inflows from neighbouring countries. The results of this study show that Irkutsk district suffers from the loss of skilled working-age population. The results of the 2018 sociological study on the attitude of the Irkutsk district population towards migration show a significant potential for further migration outflows due mostly to a search for a better life and working conditions.
  • Tolérance de la population de la région d'Irkoutsk : l'attitude envers les immigrants et les touristes étrangers - Tatiana Ozernikova, Jean-Cassien Billier, Natalia Kuznetsova, Anna Marasanova p. 493-509 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
    Cet article est dédié à l'analyse de la perception des immigrants et des touristes étrangers par la population de la région d'Irkoutsk (oblast d'Irkoutsk) et à l'estimation du degré de tolérance envers les différents groupes d'immigrants et de touristes. En se basant sur les résultats d'une enquête sociologique de 2018, il donne une estimation du niveau de tolérance ethnique. Le calcul de l'indice de tolérance ethnique de la population locale montre des attitudes contrastées envers l'origine géographique des différents flux de migrants. On identifie des groupes d'immigrants qui suscitent une attitude majoritairement négative comme les migrants des pays d'Asie Centrale, du Caucase, de la Transcaucasie et de Chine. Les contacts personnels avec les immigrants influencent non seulement l'attitude à leur égard ; mais aussi les rendent plus tolérants. On observe que les touristes étrangers suscitent moins de craintes et de réticences que les immigrants. Les flux touristiques « anciens » en provenance d'Europe, des États-Unis et du Canada, du Japon et de la Corée du Sud, suscitent, en règle générale, une attitude amicale et neutre de la part de la population locale tandis que les touristes originaires de Chine suscitent un plus grand rejet.
    This article aims to study how foreign migrants and tourists are perceived by the population living in the district of Irkutsk (Irkutsk oblast) and to analyse degrees of tolerance to different groups of migrants and tourists. The degree of ethnic tolerance was evaluated and assessed on the basis of 2018 sociological study. The calculation of the ethnic tolerance index of the local population shows contrasting attitudes towards the geographical origin of the different flows of migrants. Groups of foreign migrants which are perceived more negatively are identified as migrants from Central Asian countries, Caucasia and Transcaucasia, as well as China. Personal contacts with foreign migrants differentiate and mitigate this negative attitude. The results also show that foreign tourists are perceived with less apprehension and suspicion relatively to foreign migrants. The “old” tourist flows from Europe, USA, Canada, Japan, and South Korea are positively perceived with a friendly-to-neutral attitude. Tourists from China are poorly regarded.