Contenu du sommaire
Revue | Revue française d'économie |
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Numéro | vol. XXXV, no 1, 2020 |
Texte intégral en ligne | Accessible sur l'internet |
- Évaluation des politiques publiques - François Langot, Pascale Petit p. 3-18
- Épargne de précaution, fluctuations macroéconomiques et politique monétaire - Édouard Challe p. 19-49 Cet article présente un nouveau modèle keynésien avec assurance imparfaite et chômage endogène, dans l'esprit de Ravn et Sterk [2017, 2020] et Challe [2020]. Sous certaines hypothèses, la dynamique du modèle se réduit à trois équations, dont la simplicité n'est pas sans rappeler celle du nouveau modèle keynésien élémentaire (où l'assurance est parfaite et où il n'y a pas de chômage). Nous utilisons ce cadre analytique pour montrer que, faute d'une politique macroéconomique adéquate, les comportements d'épargne de précaution des ménages peuvent fortement déstabiliser la demande agrégée, la production et l'emploi. On s'intéresse tout particulièrement à i) la détermination de l'état stationnaire et la possibilité de fluctuations auto-réalisatrices ; ii) l'amplification des chocs macroéconomiques (notamment de productivité) ; iii) la transmission et l'optimalité de la politique monétaire.This paper presents a New Keynesian Model with imperfect insurance and endogenous involuntary unemployment, in the spirit of Ravn and Sterk [2017, 2020] and Challe [2020]. Under a particular set of assumptions, the model's dynamics boil down to three equations, in a similar fashion as with the textbook three-equation New Keynesian model (in which insurance is perfect and there is no unemployment). We use this analytical framework to illustrate that, in the absence of suitable macroeconomic stabilization policy, household precautionary-saving behavior can significantly destabilize aggregate demand, output and employment. We pay particular attention to i) steady-state determinacy and the possibility of self-fulfilling expectations; ii) the amplification of macroeconomic shocks (notably productivity socks); iii) the transmission and optimality of monetary policy.
- Quels déterminants aux préférences pour la redistribution ? - Brice Magdalou p. 51-97 Cet article propose un survol de la littérature récente, essentiellement empirique, sur les préférences pour la redistribution. Alors que les inégalités de revenu et de patrimoine ont significativement augmenté ces dernières décennies dans la plupart des pays occidentaux, la demande de redistribution n'a pas évolué selon les prédictions des principaux modèles d'économie politique. En outre, les trajectoires sont très différentes entre les pays, souvent sans lien apparent avec celles des inégalités. L'objectif de cet article est de comprendre les raisons d'une telle hétérogénéité internationale. Pour cela nous étudions les facteurs socioéconomiques, culturels, historiques ou de conjoncture économique qui peuvent influencer ces préférences. Nous distinguons également la redistribution comme demande de couverture sociale, ou comme demande de justice sociale. Un fil directeur concerne les perceptions souvent biaisées de la réalité pouvant justifier, pour des individus ayant des préférences fondamentales identiques, un souhait de redistribution différent.This paper provides a survey of the recent literature, mainly empirical, on the preferences for redistribution. Whereas income and wealth inequalities have significantly increased in the last decades in most of the Western countries, the demand for redistribution has not changed as predicted by the main political economy models. Moreover, trajectories are different among countries, in most cases without any apparent link to the trends in inequalities. The purpose of this paper is to understand the reasons of such an international heterogeneity. We investigate socioeconomic, cultural and historical factors, as well as economic circumstances which can impact these preferences. A distinction is made between redistribution as a demand for social protection, or as a demand for social justice. Throughout the paper, a particular focus is put on the perceptions of reality, often biased, which can justify the fact that individuals, with identical fundamental preferences, can express different demands for redistribution.
- Décentralisation et taille optimale des collectivités locales : pourquoi, comment coopérer et avec quels effets ? - Sonia Paty, Morgan Ubeda p. 99-138 Devant l'accélération des réformes territoriales observées dans plusieurs pays décentralisés, cet article propose une analyse des phénomènes de regroupement – fusion ou coopération – observés au niveau des collectivités locales. Après avoir dressé un rapide panorama des diverses formes institutionnelles de consolidation budgétaire avec un éclairage particulier sur le cas français, nous présentons les fondements théoriques de ces mouvements de réorganisation territoriale ainsi que les facteurs qui contribuent à la formation de ces nouvelles entités locales. Nous synthétisons ensuite la littérature empirique sur les effets des fusions ou des coopérations entre collectivités locales sur les variables économiques telles que la croissance, les dépenses publiques et la fiscalité dans différents pays. Nous présentons enfin une analyse originale des effets de l'intercommunalité sur les revenus et la localisation des ménages en France.In light of the recent pace of territorial and administrative reforms in decentralized countries, this article offers an analysis of intergovernmental fusion and cooperation mechanisms. Starting with a description of the existing institutional forms of fiscal consolidation, with a special focus on the French case, we then move on to the theoretical literature that underlies this phenomenon. Then, we summarize the empirical literature analyzing the effects and determinants of fiscal cooperation regarding economic variables such as growth, public spending and local taxation. Finally, we provide novel estimates of the effects of inter-municipal cooperation on households' localization and income in France. Using an event study design and controlling for local income and population growth, we find that although cooperation significantly increased the median income of residents in cooperating municipalities (by €60 on average), it did not impact the number of households living in these municipalities.
- Le travail informel dans les pays en développement : une revue de la littérature - Julien Albertini, Kamel Ismail, Arthur Poirier, Anthony Terriau p. 139-182 La plupart des pays en développement sont caractérisés par la présence d'un large secteur informel. Son importance a engendré une littérature conséquente en économie du développement tant en termes d'évaluation qu'en termes de recommandation de politique publique. Dans cet article, nous présenterons les divers aspects abordés par cette littérature. Dans un premier temps, nous tenterons de quantifier l'ampleur de l'emploi informel dans plusieurs pays en développement et de mettre en évidence les déterminants de l'informalité. Nous présenterons ensuite les approches théoriques de l'emploi informel. Enfin, nous ferons un tour d'horizon des politiques publiques en présence d'informalité.Informality is a major feature in most developing countries. Its importance has given rise to a substantial body of literature in development economics, both in terms of evaluation and public policy. In this article, we propose a review of the literature on this topic. We first propose to measure informal employment in some developing countries and to identify the main determinants of informality. We then present the main theoretical approaches to informal employment. Lastly, we shall review the public policies in the presence of an informal sector.
- Électrification en Afrique subsaharienne : les effets sur la scolarisation des enfants et l'emploi des femmes - Émile Tenezakis, Ahmed Tritah p. 183-222 L'électrification des zones rurales est un enjeu fondamental pour le développement de l'Afrique. Nous étudions les effets de l'accès à l'électricité sur l'usage du temps, l'emploi et l'éducation des enfants et des femmes en Afrique subsaharienne. Après une présentation macroéconomique des enjeux de l'électrification de l'Afrique, nous mobilisons des données microéconomiques collectées au Rwanda pour quantifier l'impact de l'électrification des zones rurales sur l'emploi et l'éducation. Notre analyse considère à la fois les effets mesurés sur les ménages et sur les villages. Nos résultats indiquent que les ménages connectés à l'électricité allouent moins de temps aux tâches ménagères que les ménages non connectés : trois heures en moyenne en moins par semaine. En particulier, il apparaît que dans les ménages connectés, les femmes participent davantage au marché du travail et lorsqu'elles y participent, elles travaillent davantage d'heures (+ dix-sept heures par semaine). Concernant l'éducation des enfants, la connexion à l'électricité semble réduire le taux de redoublement. Dans l'ensemble, nos résultats confortent l'hypothèse que l'accès à l'électricité constitue, pour cette population, un choc de productivité positif pour la production domestique des ménages. Ces gains de productivité relâchent l'arbitrage habituel entre travailler et étudier pour les enfants, et entre emploi rémunéré et production domestique pour les femmes, facilitant ainsi leur émancipation économique.The electrification of rural areas is a fundamental issue for the development of Africa. We are studying the effects of access to electricity on the time allocation, employment and education of children and women in Sub-Saharan Africa. After a macroeconomic presentation of the challenges of the electrification of Africa, we use microeconomic data collected in Rwanda to quantify the impact of the electrification of rural areas on employment and education. Our analysis considers both the effects measured at the household and village level. We show that households connected to electricity allocate less time to household chores than households not connected: Three hours on average less per week. In particular, it appears that in connected households, women participate more in the labor market and when they participate they work more hours (17 additional hours per week). Regarding children's education, the connection to electricity seems to reduce the repetition rate. Overall, our results support the hypothesis that access to electricity is a positive productivity shock.