Contenu du sommaire : Phénoménologies de l'amour

L'essai analyse l'amour comme socialité dans l'histoire des sciences sociales, mettant en évidence sa dimension publique. Alors que la première partie est consacrée aux classiques de la sociologie, la deuxième partie se concentre sur les pensées des érudits contemporains et se termine par une proposition critique basée sur la surabounding et la priorité du bénéfice des autres. L'article montre comment l'amour est un ruisseau d'eau karstique qui depuis des décennies a traversé la réflexion sociologique, parfois coulant sous terre, mais souvent à la surface comme élément fondamental dans la vie sociale publique.

Les expériences amoureuses modernes offrent des perspectives intéressantes pour expliquer la complexité cognitive, affective et biopsychique de l'humain. La prise en compte du processus d'individuation dans le développement de la sociologie démontre, d'une part, les tensions complexes entre individu et société et, d'autre part, le rôle central du corps, des affects et des sensations pour gérer les possibilités de subjectivation et d'objectivation des individus, des groupes et des institutions sociales. Contre les hypothèses libérales relatives à l'individu en tant que machine simplifiée et séparée, les études de l'individuation offrent des possibilités remarquables pour une lecture inter- et transdisciplinaire sophistiquée de la société contemporaine. Les études sur le don et sur la réciprocité constituent des notions clés pour expliquer les fondements épistémologiques de cette individuation réciproque qui se révèle centrale pour refonder les socialités.

En prenant en compte l'expression de l'amour vis-à-vis de l'Argentine de la part de migrants argentins à Miami et Barcelone, cet article donne de la densité à l'analyse du sentiment amoureux dans le processus migratoire en ne se focalisant pas sur l'amour filial et l'amour romantique. Cette recherche comparative permet également de démontrer que 1) le sentiment amoureux peut se comprendre à travers l'analyse d'autres émotions, 2) le lieu d'accueil a un impact sur la construction du sentiment amoureux vis-à-vis du pays d'origine, et enfin 3) la temporalité du moment de l'enquête au regard du processus migratoire est à prendre en considération afin de comprendre le fonctionnement de ce sentiment.

Cet article explore l'amour et le fandom d'un phénomène mondial de culture populaire dans un contexte national, la musique pop coréenne (la « K-pop ») et son immense succès auprès de la jeunesse turque. Récemment, le fandom de la K-pop – qui s'étend à l'amour des séries télé, de la langue et de la culture coréennes – a été décrit dans les médias turcs conservateurs comme une tendance « alarmante » qui ne cesse de gagner en popularité parmi les adolescents. Cet article examine la façon dont les fans turcs de K-pop expriment leur investissement émotionnel et leur amour pour cette musique sur les réseaux sociaux, principalement sur Twitter et YouTube. Les questions que pose cet article sont : Comment se forment les connexions émotionnelles à travers la culture populaire dans l'axe Sud-Sud ? Ces liens mondialisés supplantent-ils les sentiments nationaux ? Quelle est la langue utilisée afin de communiquer son amour pour un phénomène planétaire ? Quelles tensions génère l'amour pour un produit mondial dans un contexte de montée de la xénophobie et du militarisme ?

L'amour et le mariage sont importants dans les stades de développement de la vie de l'être humain, en lien direct avec son bonheur personnel et la stabilité de sa famille. Depuis la « Politique de réforme et d'ouverture » en 1978, la société chinoise connaît une transformation rapide. Non seulement les opinions des gens sur le mariage et l'amour sont de plus en plus diversifiées, mais leur autonomie dans le mariage et l'amour a également été considérablement renforcée. Cette transformation s'est encore intensifiée avec l'influence de la numérisation, en particulier chez les jeunes, car ils sont plus exposés à Internet et ont désormais plus d'occasions d'approcher les gens pour comprendre leurs amoureux potentiels et/ou partenaires conjugaux, ce qui était impossible auparavant en raison des limitations physiques. Malgré l'existence de certains éléments avancés par les jeunes générations dans leur réflexion sur le mariage, la persistance de l'obéissance à l'opinion de leurs parents, qui est largement conservatrice, ne peut être ignorée, et plus vraisemblablement cette dernière reste la règle. En outre, il existe également un dilemme entre la « condition matérielle » et « l'amour » auquel sont confrontés les jeunes Chinois pas moins que les générations plus âgées. Par conséquent, dans l'article, nous analyserons la situation de l'amour et du mariage des jeunes Chinois, plus précisément, quelles sont les difficultés auxquelles ils sont confrontés, quels groupes de jeunes ont plus de mal à se marier et leur influence sociale dans l'ère du numérique ?

À de rares exceptions près dans son histoire, la sociologie a négligé l'étude de l'amour jusqu'à l'apparition, en 1982, de l'ouvrage de N. Luhmann sur L´amour passion. Depuis lors sont apparus de nombreux travaux, théoriques et empiriques, ainsi que d'importantes monographies sur ce sujet. Cette problématique des émotions amoureuses a pu ainsi prendre une place centrale dans notre discipline. En suivant, précisément, les lignes tracées par la sociologie, et à partir de quelques-uns des travaux sociologiques les plus récents qui ont analysé l'amour dans la société espagnole, j'essaie de montrer comment ils y sont institutionnalisés, formalisés ou « familiarisés » ; des manières modernes d'aimer, c'est-à-dire romantiques et confluentes ; comment ces deux types d'amour coexistent et comment ils le font ; quels sont leurs degrés de priorité première et secondaire ; enfin, j'essaierai d'expliquer, à travers les différentes visions de l'amour romantique et de l'amour confluent, les causes de cette situation. Comme nous le verrons, les deux manières modernes d'aimer sont présentes et coexistent actuellement dans la société espagnole : l'amour romantique est encore majoritaire, alors que l'amour confluent progresse sans pour autant s'institutionnaliser, selon les différentes conceptions du temps sous-jacentes à ces deux formes d'amour.

Dans la vie quotidienne en Amérique latine et dans les pays du Sud, il est possible de vérifier l'existence de milliers d'actions collectives : interdictions, pratiques interstitielles, mouvements et protestations sociales. Loin de tout romantisme, misérabilisme et populisme, la compréhension de l'esthétique de l'amour filial nous permet de rompre avec l'humanisme diminué, la résignation et la consommation mimétique comme piliers fondamentaux d'une société normalisée dans la jouissance immédiate par la consommation. Cet article cherche à faire une exposition partielle d'une ethnographie numérique/virtuel que nous avons faite dans six pays d'Amérique latine sur l'amour filial comme énergie de base qui déplace l'ensemble des pratiques interstitielles évoquées du point de vue de l'« esthétique » impliquée en elles.

Cet article retrace les circonstances qui amènent un fils, universitaire, éloigné des affaires familiales, à succéder à son père à la tête d'un grand groupe d'expertise comptable. Au travers d'une approche auto-ethnographique, il s'agit de repérer les fonctions symboliques des rituels et des rôles institutionnels. Ces rôles qu'endosse le nouveau « leader » pour construire sa légitimité mettent en évidence les mutations profondes des modes de gouvernance : « organisation » rationnelle et technique dans sa version moderne, dominée par la figure du père, l'entreprise postmoderne apparaît plus organique, fraternelle, marquée par le retour des affects et du besoin d'émotions collectives, ce que Durkheim appelait la « transcendance sociale ».