Contenu du sommaire : Bacon et les formes de l'expérience
Revue | Archives de philosophie |
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Numéro | tome 84, no 1, janvier-mars 2021 |
Titre du numéro | Bacon et les formes de l'expérience |
Texte intégral en ligne | Accessible sur l'internet |
- Éditorial - p. 5-6
Dossier
- Bacon et les formes de l'expérience. Nouvelles lectures - Claire Crignon, Sandrine Parageau p. 7-15
- Lire, penser, vivre : Les interactions entre "inductio" et "instauratio" dans le "Novum Organum" de Francis Bacon - Guido Giglioni, Élise Trogrlic, Claire Crignon, Sandrine Parageau p. 17-31 Cet article traite des stratégies de lecture inductive spécifiques que les lecteurs du Novum Organum sont invités à mettre en place afin de mieux saisir le sens que Bacon donne à l'induction dans cet ouvrage : un exercice d'apprentissage cognitif au cours duquel des inférences générales sont construites en faisant l'expérience directe des choses. Conséquence supplémentaire, le lecteur a également accès par l'induction à une forme de connaissance des composantes ultimes de l'être, car il découvre que toutes les choses de la nature, animées et inanimées, sont mues par des stratégies inductives de survie conformes à l'idée de Bacon selon laquelle les mouvements sont des appétits.This article suggests that in approaching Francis Bacon's Novum Organum readers should bring into play specific strategies of inductive reading to better understand what Bacon meant by induction in that work, that is, an exercise in cognitive learning in which general inferences are built through the direct experience of things. What is more, and almost as an unintended consequence, they are also inducted into the knowledge concerning the ultimate constituents of being, for they discover that all things in nature, animate and inanimate, move following inductive strategies of survival in line with Bacon's view that motions are appetites.
- Bacon et le cercle de l'expérience - Luc Peterschmitt p. 33-49 Dans cet article, nous examinons pourquoi Bacon ne justifie pas réellement les modes de l'experientia literata, sinon en donnant des exemples. Le problème est qu'il semble livrer le début de l'invention au hasard. Nous y voyons en réalité le signe du pragmatisme de Bacon. Dans l'experientia literata, la raison est par principe écartée, puisqu'on s'avance en terrain inconnu. Cependant, Bacon considère que les procédures en sont efficaces, parce qu'elles sont déjà admises : elles ont déjà fait leurs preuves, de sorte que l'on sait déjà qu'il s'agit de pratiques fructueuses. C'est que cette experientia literata témoigne d'une forme de savoir sédimenté, une « expérience » commune dont chacun peut se servir. Si elle est efficace, c'est qu'en réalité, on ne part jamais de rien dans la recherche.In this paper, my aim is to study why Bacon merely gives examples in order to justify the efficiency of the modes constituting experientia literata. The problem is the following: Bacon seems to consider that chance is what sparks invention. Yet I interpret this situation as the sign of Bacon's pragmatism. As experientia literata begins the search for the truth, reason is necessarily inadequate: experientia literata is a tool built to explore what is unknown. Bacon nevertheless considers that its modes are ef ficient, because they are already known: they have proved their value, so we know that they are fruitful practices. Thus, experientia literata is a kind of settled knowledge, a collective or common “experience” that everybody can use. Experientia literata is efficient because invention is always grounded in such knowledge.
- La fabrication de l'or dans la Sylva Sylvarum et le "Novum Organum" - François Pépin p. 51-72 La démarche de la Sylva Sylvarum semble s'écarter de la voie inductive proposée par le Novum Organum. Pourtant, l'exemple de la fabrication de l'or indique que les deux textes n'offrent pas forcément des perspectives si différentes. Cette œuvre est davantage détaillée dans la Sylva, avec un accent pratique plus prononcé. Mais, comme dans le Novum Organum, la dimension opérationnelle y est articulée à la recherche des causes générales du processus et, si la « forme » n'est pas présente comme terme, l'idée apparaît bien en arrière-fond. Cet article propose ainsi, sur la base de cet exemple, de nuancer la divergence entre l'experientia literata des histoires naturelles et l'induction vraie du Novum Organum.The Sylva Sylvarum seems to follow a specific path that is distinct from the inductive method put forward in the Novum Organum. Yet the case of gold-making suggests that the approaches presented in these two texts are not completely different. The Sylva Sylvarum gives a more detailed account of the work of gold-making and focuses more on practical issues. However, in this text as well as in the Novum Organum, the operational aspects are linked to the search for the general causes of the process. Moreover, although the concept of “form” does not appear explicitly, the idea is present in the background. Thus, this paper argues that this example urges one to reconsider and qualify the opposition between the experientia literata proposed in Bacon's natural histories and the inductive method of the Novum Organum.
- Bacon, Boyle et l'écriture de l'histoire naturelle - Sandrine Parageau p. 73-91 Cet article examine les règles d'écriture et de composition de l'histoire naturelle selon Robert Boyle, afin de montrer comment les principes baconiens ont été repris et révisés dans la seconde moitié du xviie siècle. On s'intéresse dans un premier temps à l'écriture des expériences et observations, dont la description constitue la matière principale de l'histoire naturelle. La composition des ouvrages d'histoire naturelle est ensuite examinée dans ses dimensions méthodologique, heuristique et programmatique. Enfin, l'article souligne l'exigence de collaboration en histoire naturelle et s'interroge sur la manière dont celle-ci se manifeste dans l'écriture et la présentation des textes.This article examines the rules for writing and presenting natural history according to Robert Boyle, with a view to showing how Bacon's principles were both followed and revised in the late seventeenth century. The article first focuses on the way of writing experiments and observations, the description of which constitutes the main material of a natural history. The composition of books of natural history is then examined in its methodological, heuristic, and programmatic dimensions. Finally, the article inquires into the principle of collaboration in natural history and the way it is rendered in the writing and presentation of the texts here studied.
- Peut-on faire une histoire naturelle de l'air ? : Francis Bacon et Robert Boyle - Claire Crignon p. 93-113 Imperceptibles, difficiles à observer, l'air et les vents ne sont pas seulement appréhendés par le recours aux instruments, au sein de l'espace fermé du laboratoire. Leur connaissance peut requérir des qualités de mémorisation et d'observation auxquelles les voyageurs, les marchands, les agriculteurs pourront, peutêtre, plus facilement prétendre que des savants experts. Partant de l'exposition du projet d'une histoire naturelle et de son application au cas spécifique de l'air et des vents dans l'oeuvre de Francis Bacon, l'article examine les moyens mis en oeuvre par les auteurs qui ont revendiqué le legs baconien (Boyle, Hooke, Childrey, Plot) afin de surmonter les obstacles qui s'attachent à la connaissance de l'air et à celle de ses effets sur le développement des maladies ou la poursuite de la santé.Imperceptible and difficult to observe, the air and winds are not apprehended by the mere use of instruments, within the closed space of the laboratory. Getting to know them requires qualities of memorization and observation, which travelers, merchants, and farmers may be more legitimately allowed to claim than experts and learned scholars. Starting from the presentation of the Baconian natural history project and its application to the specific case of the air and winds, this article examines the means used by the authors who claimed the Baconian legacy (Boyle, Hooke, Childrey, Plot) in order to overcome the obstacles to knowledge of the air and its effects on the development of diseases or the pursuit of health.
Varia
- Le Nietzsche de Georg Simmel : Théoricien de la valeur et « moraliste métaphysique » - Matthieu Amat p. 115-131 Ce texte dessine les contours de l'interprétation de l'œuvre de Nietzsche par Georg Simmel. On en tirera des éléments pour l'intelligence du projet philosophique de Simmel, comme effort pour articuler objectivité et relativité de la valeur. Mais on trouvera aussi des raisons de défendre un certain usage de Nietzsche, replacé par Simmel dans une lignée humaniste, mais sans la moindre naïveté anthropocentrique. Nous nous arrêterons particulièrement sur deux thèses de Simmel : (1) Nietzsche propose une « théorie de la valeur » objective et systématique ; (2) Nietzsche est un « moraliste » qui défend une variété particulière de « personnalisme ».This text outlines Georg Simmel's interpretation of Nietzsche's philosophy of life and value. It offers elements for the understanding of Simmel's philosophical project, as an effort to link objectivity and relativity of value. But one may also find reasons to defend a certain use of Nietzsche, whom Simmel places in a humanist lineage, but without the slightest anthropocentric naivety. We focus in particular on two of Simmel's claims: (1) Nietzsche proposes an objective and systematic “theory of value”; (2) Nietzsche is a “moralist” who defends a peculiar variety of “personalism.”
- « Anti-Darwin » : Le dernier Nietzsche face à la théorie de l'évolution darwinienne - Emmanuel Salanskis p. 133-144 Cet article vise à apporter un éclairage sur les trois textes de 1888 que Nietzsche a intitulés « Anti-Darwin », à savoir un paragraphe du Crépuscule des idoles et deux fragments posthumes. Mon objectif est plus précisément de comprendre pourquoi l'expression « Anti Darwin » apparaît seulement en 1888, sachant que Nietzsche avait déjà adressé des critiques au darwinisme dans son œuvre antérieure, mais sans recourir à cette formule spécifique. Ma thèse est que les trois textes « Anti-Darwin » font partie du projet de transvaluation générale des valeurs qui caractérise l'année 1888.This paper aims to shed light on the three 1888 texts that Nietzsche titled “Anti Darwin,” namely a section of Twilight of the Idols and two posthumous fragments. More precisely, my objective is to understand why the expression “Anti-Darwin” only emerged in 1888, considering that Nietzsche had already criticized Darwinism in his previous work, but without using this specific term. My claim is that the three “Anti-Darwin” texts are part of the project of a general transvaluation of values that characterized the year 1888.
- Le Nietzsche de Georg Simmel : Théoricien de la valeur et « moraliste métaphysique » - Matthieu Amat p. 115-131
Notes de lecture
- Notes de lecture - Claire Crignon, Laurent Gallois p. 145-152
Bulletin cartésien L