Contenu du sommaire : La vieillesse chez les Anciens
Revue | Archives de philosophie |
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Numéro | tome 84, no 2, avril-juin 2021 |
Titre du numéro | La vieillesse chez les Anciens |
Texte intégral en ligne | Accessible sur l'internet |
- Éditorial - p. 3-4
Dossier
- La vieillesse chez les Anciens. Enjeux antiques, débats d'actualité : Avant-propos - Vincent Darveau-St-Pierre, Laetitia Monteils-Laeng p. 5-11
- La longévité comparée des plantes et des animaux selon Aristote - Andrea Falcon, Sofía Alcaine, Laetitia Monteils-Laeng p. 13-28 Notre propos est ici d'examiner dans quelle mesure Aristote atteint son objectif. Pour ce faire, nous nous concentrerons sur l'approche explicative adoptée dans le traité De longitudine et brevitate vitae (De la longévité et de la vie brève), où Aristote se propose de rendre compte de la longévité, sans se limiter aux animaux. Nous discuterons des perspectives que peut ouvrir une telle étude commune aux animaux et aux plantes, mais aussi de ses éventuelles limites. Dans quelle mesure Aristote est-il capable de traiter ensemble la question de la longévité des animaux et des plantes ? La réponse à cette question est au cœur de notre article.My aim is to examine the extent to which Aristotle achieves his stated goal. I concentrate on the explanatory strategy adopted in the De longitudine et brevitate vitae (On Length and Shortness of Life), where Aristotle offers an account of longevity that is not programmatically restricted to animals. I will discuss the prospects, as well as the limits, of this joint study of animals and plants. How much is Aristotle really able to say on the topic of longevity that applies to both animals and plants? Answering this question is at the heart of my essay.
- Le remède hippocratique contre l'âgisme - Vincent Darveau-St-Pierre p. 29-38 En décrivant la vieillesse comme l'une des modalités d'équilibre possibles des qualités premières qui assurent une santé à l'individu, les auteurs du Corpus hippocratique évitent d'associer systématiquement le vieillissement et la dégénérescence. Cet aspect singulier du corpus comporte pour nous un intérêt éthique : il prémunit contre l'âgisme médical. Cet article aborde la question des différences physiologiques qui caractérisent chacun des âges de la vie en insistant sur le fait que cette conception favorise un traitement égalitaire des patients relativement à l'âge.By describing old age as one of the possible modalities of balance of the primary qualities that ensure health to the individual, the authors of the Hippocratic Corpus avoid systematically associating aging with degeneration. This singular aspect of the corpus has an ethical interest for us: it protects against medical ageism. This article addresses the issue of the physiological differences that characterize each of the ages of life by insisting on the fact that this conception favors an egalitarian treatment of patients with respect to age.
- Perdre des atomes : La vieillesse selon Démocrite - Isabelle Chouinard p. 39-54 Dans les fragments éthiques, Démocrite présente la vieillesse comme un âge où la modération se manifeste plus facilement que dans la jeunesse (68B294 DK). Le fait qu'il décrive aussi la vieillesse comme une « mutilation intégrale (πήρωσις ὁλόκληρος) » (68B296 DK) laisse croire que sa théorie atomiste a pu servir à rendre compte du phénomène. Comprise comme une perte d'atomes dans toutes les parties du corps, la πήρωσις entraîne avec elle des fuites d'atomes psychiques qui peuvent avoir un effet sur le tempérament des vieillards. Si cette hypothèse est juste, elle s'ajoute au nombre des liens possibles entre la théorie atomiste et les pensées morales de Démocrite.In the ethical fragments, Democritus presents old age as an age in which moderation manifests itself more easily than in youth (68B294 DK). The fact that he also describes old age as “a general mutilation (πήρωσις ὁλόκληρος)” (68B296 DK) suggests that his atomic theory may have been used to account for the phenomenon. Understood as a loss of atoms in all parts of the body, the πήρωσις in turn causes leaks of psychic atoms which can have an effect on the temperament of old people. If this hypothesis is correct, it adds to the number of possible links between the atomic theory and Democritus's moral thinking.
- De l'absence de vieillesse à la belle vieillesse : Promesses des philosophes et des médecins - Véronique Boudon-Millot p. 55-68 En partant des quatre uniques emplois d'agèrasia recensés dans l'ensemble de la littérature grecque, et en s'attachant à clarifier les liens entretenus entre agèrasia et athanasia (immortalité), mais aussi entre agèrasia et eugèria (belle vieillesse), on s'efforcera de définir quelles représentations exactes de la vieillesse véhicule le recours à ce vocabulaire, à la fois chez un médecin comme Galien et chez des philosophes comme Aristote et Philon d'Alexandrie.Based on the only four occurrences of the word agerasia (agelessness) in all of Greek literature, but also on the links between agerasia and athanasia (immortality) on the one hand, and between agerasia and eugeria (green old age) on the other, this paper tries to specify how the Greek physician Galen and the Greek philosophers Aristotle and Philo of Alexandria imagined old age and, more precisely, how they defined beautiful old age.
- La vieillesse dans le "Cato Maior de senectute" de Cicéron - François Prost p. 69-86 Le présent article étudie le traité de Cicéron intitulé Cato Maior de Senectute. Il évoque d'abord le contexte et les circonstances de la rédaction de cette œuvre, puis examine les précédents et modèles de la réflexion cicéronienne. Celle-ci se construit comme une leçon de sagesse qui mobilise les ressources propres de l'âge en vue de la réalisation du bonheur dans la vieillesse. Le discours du personnage de Caton prend la forme d'une apologie du grand âge, en réponse à quatre griefs concernant l'activité, l'état physique, les plaisirs, et l'approche de la mort. Cette leçon trouve un écho dans les suggestions modernes des éthiques du soin.This article focuses on old age in Cicero's Cato Maior de Senectute. It first takes into account the context and circumstances of Cicero's reflection on the issue, and then reviews the sources and models of the work. The content of the work is further analyzed as a lesson of wisdom, which relies on the resources available to older men in order to secure happiness. Cato's speech thus takes the form of an apology of old age under four main headings: activity, physical condition, pleasure, and the coming of death, in tune with modern approaches of the ethics of care.
- Que vaut l'expérience de la vie ? : Lucidité platonicienne, amertume aristotélicienne - Laetitia Monteils-Laeng p. 87-98 Un passage du Sophiste (234a-e) de Platon semble avancer que sous l'effet de l'âge et des épreuves subies au cours de nos actions, nos opinions se transforment, nos illusions se dissipent. La Rhétorique (II, 13) d'Aristote semble à l'inverse dévaloriser l'expérience accumulée au cours de l'existence. Quels sont les effets du passage du temps sur ce que nous pensons et éprouvons chez Platon et Aristote? Tel est le problème que se propose d'explorer cet article chez Platon et Aristote.A passage from Plato's Sophist (234a-e) seems to suggest that our opinions evolve and our illusions dissipate only with age and the trials we undergo. By contrast, in the Rhetoric (II, 13), Aristotle seems to devalue accumulated life experience. What are the effects of the passage of time on what we think and feel? This article explores this question by examining the thoughts of Plato and Aristotle.
Varia
- Reproduire l'origine : Sur deux lectures classiques du "De musica" de Plutarque - Quentin Gailhac p. 99-113 Les deux réceptions du De musica de Plutarque par Pierre-Jean Burette et Jean-Jacques Rousseau interrogent de deux manières dissemblables le rapport qu'entretiennent les découvertes musicales originaires et leur appropriation sensible à la faveur de l'usage. Pensé comme habitude par Burette, l'usage permettra d'historiciser l'origine sans radicaliser la singularité des circonstances. En refusant de conférer à l'usage une telle souplesse, au nom d'une dégénérescence irréversible de l'histoire musicale, Rousseau historicisera l'origine au point d'une non reproductibilité des circonstances.The two receptions of Plutarch's De musica by Pierre-Jean Burette and Jean-Jacques Rousseau examine in two dissimilar ways the relationship between original musical discoveries and their sensitive appropriation through usage. According to Burette, usage, thought of as a habit, makes it possible to historicize the origin without radicalizing the singularity of the circumstances. By refusing to confer such flexibility to usage, in the name of an irreversible degeneration of musical history, Rousseau historicized the origin to the point of non-reproducibility of circumstances.
- Démontrer Dieu : Leibniz et l'argument de la création continuée - Paul Rateau p. 115-152 Leibniz admet la thèse de la création continuée. Le but de cet article est de montrer les raisons pour lesquelles, à ses yeux, les tentatives de Descartes et de Weigel pour s'en servir comme preuve de l'existence de Dieu ont échoué et ce qui, dans sa propre métaphysique, empêche l'élaboration d'une démonstration pleinement satisfaisante sur son fondement. Il n'est pas sûr en effet que Leibniz soit parvenu à concilier parfaitement la nécessité de la dépendance permanente des créatures à l'égard de leur créateur – qui requiert son action continuelle – et l'exigence de l'autonomie causale des substances finies.Leibniz endorses the thesis of continuous creation. The aim of this article is to show why, for him, the attempts of Descartes and Weigel to use it as a proof of the existence of God have failed and what, in his own metaphysics, prevents the development of a fully satisfactory demonstration of the latter on that basis. It is in fact uncertain whether Leibniz succeeded in perfectly reconciling the necessity of a permanent dependence of creatures on their creator—which requires his continual action—and the requirement of causal autonomy for finite substances.
- Hegel. L'histoire du monde et la conquête des mers - Jean-Baptiste Vuillerod p. 153-169 L'article se propose de confronter les propos du jeune Hegel sur l'élément marin aux propos de la maturité tenus dans les leçons sur la Philosophie de l'histoire. Il montre que là où les écrits de jeunesse insistaient sur l'événement biblique du déluge et voyaient dans la mer un élément hostile, l'œuvre hégélienne ultérieure fait de la conquête des mers un moment fondateur de l'histoire du monde et du mouvement de l'esprit des peuples vers la liberté. Loin de se réduire au motif d'une maîtrise et d'une domination de la nature, cette conquête des mers est à comprendre comme une nouvelle alliance formée par les sociétés humaines et leur environnement naturel.This article aims to discuss how Hegel dealt with the seas in his work. It explains that the young Hegel stressed the dangerous aspects of the seas by discussing the biblical Flood, but in his mature thought, in the Lectures on the Philosophy of History, he considered the conquest of the seas as a fundamental impulse for world history and for progress toward freedom. This conquest did not mean that Hegel justified mastery and domination over nature. On the contrary, he thought that the relation to the seas was a model for a new and harmonious alliance between men and their environment.
- Reproduire l'origine : Sur deux lectures classiques du "De musica" de Plutarque - Quentin Gailhac p. 99-113
Note de lecture
- Pierre Charbonnier : d'un livre à l'autre - Bastien Massé p. 171-176