Contenu du sommaire : Débats

Peut-on reconstruire sans la trahir la pensée économique de Marx à partir de la théorie néoclassique ? C'est la question à laquelle a tenté de répondre John Roemer. Il fut l'un des principaux contributeurs du marxisme analytique – plus précisément du marxisme de choix rationnel –, principalement au cours des années 1980. L'objectif fondateur de ce courant a été de parvenir à des conclusions proches de celles de Marx en utilisant des outils méthodologiques différents. Le programme de recherche de Roemer se fonde sur la théorie néoclassique. Nous discutons, d'un point de vue critique, la cohérence et la pertinence de cette approche. Nous nous demandons si ce qui est remis en cause est la théorie de Marx ou la possibilité de l'associer aux outils de la théorie néoclassique.JEL Classification : B24, B41, D50, P10

La réception marxiste de la littérature managériale fut largement critique alors même qu'un grand nombre de constats sont partagés par les auteurs appartenant à ces deux corpus. Cette réception s'explique par certaines équivoques présentes dans les écrits de Marx. Il existe en effet dans son œuvre, lorsqu'il s'efforce de prendre en compte l'émergence des grandes entreprises, une tension forte entre sa volonté réaliste et son cadre analytique. Le but de cet article est de présenter sa tentative d'intégration, au sein de son schéma d'analyse de la dynamique du capitalisme, des transformations caractéristiques de l'ère dite de « la Grande Industrie », en particulier l'émergence des sociétés par actions. Pour ce faire, nous discutons des distinctions conceptuelles opérées par Marx entre le capitaliste financier, le capitaliste industriel, le directeur et le manager. Celles-ci peuvent conduire à réinterroger sa théorie de la détermination des classes sociales, comme le firent les auteurs de la « révolution managériale » ou, plus récemment, Duménil et Lévy (2011, 2018).JEL Classification : B14, B51, P12, Z13

Cet article étudie le rapport qui pourrait sembler paradoxal entre productivisme et écologie dans la pensée de Marx. Pour ce faire, nous proposons d'analyser le productivisme chez Marx comme un dispositif conceptuel combinant un aspect explicatif et un aspect normatif, dispositif dont on ne peut comprendre pleinement le sens et la portée qu'en le référant à son arrière-plan ontologique, l'être comme production. Si ce dispositif est particulièrement efficace pour comprendre les tenants et aboutissants de la pathologie productiviste qui est au cœur du mode de production capitaliste, il semble faire croire que cette critique épuise toute critique du productivisme, laissant comme point aveugle la question du productivisme dans l'horizon de l'utopie communiste.JEL Classification : B14, B24, B5

Cet article tente de mettre en évidence l'influence de Schmitt sur la théorie de Cartelier concernant le rapport salarial. Les deux auteurs remettent en cause la conception standard du salariat qui consiste à analyser ce dernier comme un simple rapport d'échange. Ils soutiennent que la rémunération du facteur de travail n'est pas un acte d'achat. Pour le comprendre, il faut remonter d'une part à leur critique des liens entre monnaie et théorie de la valeur dans l'approche standard, et d'autre part à leur adhésion à l'idée de Keynes selon laquelle la relation entre entrepreneurs et salariés est fondamentalement asymétrique.JEL Classification : B22, B50, J20, E49

Cet article traite de l'institutionnalisation du champ de la Law and Economics aux Etats-Unis de l'après-guerre aux années Reagan. Il met l'accent sur le rôle de fondations d'entreprises pro-marché dans l'essor de la Law and Economics et s'appuie sur l'analyse de trajectoires individuelles ou collectives, qu'il s'agisse de projets de recherche, de programmes de formation des juges ou encore de travaux académiques et de carrières judiciaires et administratives de théoriciens de premier plan. Il s'attache in fine à l'impact de cette institutionnalisation sur les manières de juger.JEL Classification : B21, B31, K21, N42

L'objet de cet article est d'analyser les positions de Clément Colson au sujet de l'impôt progressif sur le revenu. Nous montrerons qu'il s'oppose à la majorité des libéraux français en soutenant cet impôt et que son analyse, dans la tradition des ingénieurs économistes, est basée sur la pratique en prenant en compte le contexte de l'époque. Ainsi, on retrouve dans les développements de l'auteur la crainte envers le socialisme de même que l'inquiétude d'une trop faible natalité. L'analyse de Colson peut également être considérée comme une tentative d'introduire le marginalisme en France.JEL Classification : B1, B31