Contenu du sommaire : Devenirs des sciences sociales
Revue | Revue internationale des sciences sociales |
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Numéro | no 177, septembre 2003 |
Titre du numéro | Devenirs des sciences sociales |
Texte intégral en ligne | Accessible sur l'internet |
Devenirs des sciences sociales
- Résumés - p. 413
- Editorial - p. 417
- Renforcer le rôle des sciences sociales dans la société : l'Initiative mondiale en matière de sciences sociales - Ali Kazancigil p. 425 Il semblerait qu'il y ait une inadéquation entre la demande de connaissances en sciences sociales exprimée par la société et l'offre de connaissances émanant des sciences sociales. La nécessité de réévaluer le fonctionnement des sciences sociales, ainsi que leur rôle et leur position dans la société, est la principale raison d'être de l'Initiative mondiale en matière de sciences sociales (wssi) lancée par le Conseil international des sciences sociales. Née après une série de conférences internationales de l'OCDE sur le thème « Repenser les sciences sociales », conférences également financées par la Direction générale de la recherche de la Commission européenne et par le Programme « Gestion des transformations sociales » (most) de l'Unesco, la wssi fournit un cadre flexible aux efforts visant à améliorer la qualité scientifique et à accroître la pertinence sociale des sciences sociales.
Des données plus solides pour des politiques mieux informées
- Introduction - Ekkehard Mochmann p. 429
- Les services de données en sciences sociales : historique et perspectives - Erwin K. Scheuch p. 433 L'historique de la constitution des services de données en sciences sociales qui fait l'objet de cet article n'a pas simplement pour but d'évoquer le passé mais de faire ressortir les choix stratégiques qui sont à l'origine de la situation actuelle. Pour déterminer les perspectives d'avenir, il est important de connaître ces choix. Il faut en particulier prendre conscience du fait que les archives numériques, qui constituent l'élément central de cette évolution, étaient considérées comme un simple élément de la banque de données, qui était le pilier de la recherche en sciences sociales empiriques. La consolidation de ces banques de données n'a pour ambition, ni dans le passé ni maintenant, de fournir aux sciences sociales la totalité des informations qu'elles requièrent. Ce qui compte c'est de déterminer, pays par pays, les lacunes qu'il convient de combler dans la fourniture des données et, d'une manière générale, dans les infrastructures à l'usage des sciences sociales empiriques. Il faut en outre assurer de pair l'accès à l'information et la formation aux technologies nécessaires pour l'utilisation efficace et rigoureuse de ces infrastructures. À mesure que le nombre des usagers se développe et que la technologie évolue, on peut craindre que ne se produise un certain retard dans les aptitudes des chercheurs, surtout s'agissant de l'utilisation des méthodes statistiques.
- Créer des services de données dans des démocraties nouvelles : expériences d'une étude de cas et d'exemples voisins - Adrian Dusa p. 451 En Roumanie, comme dans d'autres anciens pays communistes, il existe depuis longtemps un déficit d'informations sur la recherche sociale et les données correspondantes. Vu le besoin croissant de données de haute qualité, condition préalable pour des politiques sociales efficaces, on s'efforce de trouver, aux plans national et international, des solutions pour faire face à ce déficit. L'article résume la mise en place récente des archives roumaines de données sociales, avec l'appui de l'Institut de recherches sur la qualité de la vie (Institut de l'Académie roumaine des sciences) et de la Faculté de sociologie et de recherches sociales de l'Université de Bucarest ; on y décrit les principaux défis techniques et juridiques de cette entreprise. On y trouve aussi des indications sur les activités de coopération, les problèmes communs que soulèvent les données de sciences sociales en Europe orientale et les perspectives considérables de coopération qui permettraient d'y faire face.
- Le Programme des Centres de données de recherche au Canada. Une politique globale de la recherche empirique destinée à fonder l'action publique sur la connaissance des faits - Gustave Goldmann p. 457 Pour relever en partie les défis lancés à la recherche canadienne sur les politiques publiques, un groupe de travail mixte réuni par le Conseil de recherches en sciences humaines (CRSH) et Statistique Canada a proposé la création d'un réseau de Centres de données de recherche (CDR), qui est né officiellement en décembre 2000 avec l'ouverture du CDR de l'université McMaster, à Hamilton (Ontario). Les CDR se répartissant dans tout le pays, les chercheurs n'ont plus besoin d'aller à Ottawa pour consulter les fichiers de Statistique Canada. L'administration des CDR se conforme néanmoins à toutes les règles de confidentialité établies par la loi canadienne sur la statistique. Les CDR répondent, sur un même site, à une double nécessité : ils facilitent l'accès à des microdonnées détaillées indispensables pour mener certaines recherches essentielles en sciences sociales, tout en garantissant la sécurité et la confidentialité des informations fournies par les Canadiens.
- Améliorer la disponibilité des ressources de données qualitatives : services et besoins infrastructurels - Louise Corti p. 467 Le présent article donne une vue générale des possibilités qui se présentent et des problèmes qui se posent à un prestataire national de services de données qualitatives, et plus particulièrement de la manière dont ces possibilités et problèmes sont liés à l'accroissement des impératifs en matière d'infrastructure, en se basant essentiellement sur le cas du Royaume-Uni. En retraçant l'histoire du service des données anglais Qualidata depuis 1994, il est possible de déterminer comment les obstacles culturels et financiers majeurs ont été surmontés, et comment de nouvelles perspectives lui ont permis de prendre un nouveau départ. La deuxième partie présente sommairement le nouveau UK Economic and Social Data Service (service des données économiques et sociales du Royaume-Uni) qui est doté d'une composante particulière de données qualitatives intégrée. Elle explique les nouvelles orientations dudit service et ses prestations annoncées, et propose quelques innovations-clés dans l'infrastructure nationale qui contribueraient largement à sa réussite. Deux éléments sont particulièrement importants, à savoir la mise en place par les bailleurs de fonds de la recherche de politiques mieux coordonnées et plus directives en matière de jeux de données en sciences sociales et une stratégie de formation aux méthodes de recherche avec une coordination au plan national qui reconnaît la valeur de l'analyse secondaire des données qualitatives. Enfin, cet article nous donne des informations précises sur un projet pilote du Royaume-Uni visant à permettre la consultation en ligne de données de recherche qualitative sur l'Angleterre du roi Édouard VII.
Les sciences sociales et l'interface entre recherche et politique
- L'intégration sociale : un agenda pour la recherche et l'intervention - Bob Huber p. 467 Cet article analyse le concept « d'insertion sociale » tel qu'il a évolué au fil des conférences internationales et des sommets mondiaux de ces dix dernières années. L'insertion sociale, autrefois considérée sous l'angle de la protection sociale, mettait l'accent sur l'aide à fournir aux groupes vulnérables et défavorisés afin qu'ils s'intègrent mieux dans la société dite « normale » ; elle a été redéfinie et s'intéresse désormais à la nature même de la société et aux relations entre tous les groupes qui la composent. On est passé d'une polarisation sur certains groupes à une compréhension plus large des forces sociales qui créent la vulnérabilité et le handicap. Les conséquences de cette évolution pour la recherche en matière de politiques sociales sont décrites dans le présent article qui résume aussi les principales activités du Service de l'insertion sociale à la Division des politiques sociales et du développement social (undesa), chargé, au sein du secrétariat de l'ONU, des politiques et activités liées à la situation de groupes sociaux spécifiques, y compris les jeunes, les personnes âgées, les personnes handicapées, les familles, et les personnes dans les situations de conflit.
- La recherche en sciences sociales au sein du Groupe consultatif sur la recherche agricole internationale : une vue d'ensemble - Amir Kassam p. 493 Au milieu des années 1990, le Groupe consultatif pour la recherche agricole internationale (gcrai) a étendu sa mission au-delà des améliorations durables à apporter à la productivité et a formellement intégré une approche axée sur la lutte contre la pauvreté. Dans le même temps, le Groupe a engagé un processus visant à orienter expressément le système vers la production et l'impact. La recherche en sciences sociales est ainsi devenue partie intégrante du programme de recherche du gcrai et du processus de mise en œuvre de la recherche. Nous disposons par ailleurs de données permettant de penser que les disciplines sociales et anthropologiques irriguent désormais les activités de recherche du gcrai. Toutefois, il est nécessaire de déployer des efforts systématiques à l'appui de la formulation et de la mise en œuvre d'un programme mis à jour de recherche en sciences sociales adapté aux nouvelles vision et stratégie du gcrai. Ceci est particulièrement important pour permettre une véritable intégration de la recherche sociale dans le programme de recherche du gcrai, une nécessité fortement mise en avant par les évaluations externes réalisées ces dernières années. Le présent article souligne la nécessité de promouvoir une culture et un esprit de recherche au sein du gcrai qui assurera la promotion d'une synthèse axée sur le développement d'une recherche socialement responsable englobant les sciences biophysiques et les sciences humaines dans le cadre des processus de planification et de mise en œuvre de la recherche du gcrai à chacune des étapes de la recherche-développement dans les domaines de l'agriculture, de la sylviculture et des pêches.
- Vers une monopolisation et une renationalisation de la recherche européenne en sciences sociales ? Quelques remarques critiques sur le sixième programme-cadre - Ronald J. Pohoryles p. 519 Depuis le lancement en décembre 2002 des premiers appels à propositions concernant le « sixième programme-cadre de la Communauté européenne pour des actions de recherche, de développement technologique et de démonstration contribuant à la réalisation de l'espace européen de la recherche et à l'innovation (2002 à 2006) », il est tout à fait opportun de jeter un regard critique sur sa réalité et sur ses effets potentiels pour l'espace européen de la recherche, en particulier en ce qui concerne les sciences sociales. Dans cet article, on défend le point de vue selon lequel il n'est pas du tout garanti que le programme-cadre sera en mesure de mobiliser le potentiel de recherche à l'intérieur et à l'extérieur de l'Union européenne et d'y associer les meilleurs chercheurs européens. Il y a un certain risque que le programme-cadre aboutisse à une monopolisation des activités de recherche par les instituts de recherche nationaux et bureaucratiques (et par les réseaux qu'ils constituent) et à une plus grande pression politique sur la recherche, en particulier de la part des États membres et de leurs instituts nationaux de recherche. Cela met en péril l'espace européen de la recherche existant tel qu'il s'est constitué dans les réseaux de recherche ouverts et souples qui ont fait la preuve de leurs capacités dans les quatrième et cinquième programmes-cadres. L'auteur de l'article retrace l'histoire du sixième programme-cadre jusqu'à sa première application, il décrit le premier appel et ses effets sur la constitution de groupements, puis tire quelques conclusions préliminaires.
- L'intégration sociale : un agenda pour la recherche et l'intervention - Bob Huber p. 467
Dossiers ouverts
- Relations de genre et mouvements urbains de base - François Hainard, Christine Verschuur p. 529 Cet article, qui s'appuie sur le travail d'un réseau de sept équipes, de pays du Sud et de pays en transition, présente la recherche sur les thèmes de l'environnement, des villes et des rapports sociaux entre hommes et femmes. Celle-ci considère que le regard croisé sur ces trois thèmes apporte une perspective nouvelle utile à chacune de ces problématiques en tant que telle. Elle part du double constat que les femmes et les hommes ne sont pas concernés de la même manière par l'environnement urbain, et que des initiatives novatrices émanent souvent de mouvements de femmes soucieux de changer à la fois la situation environnementale dans les villes ainsi que leur position et leurs rôles dans les processus de décision. Or la recherche sur les questions urbaines, en dehors de recherches récentes sur l'emploi et le marché du travail, est restée myope quant aux distinctions des besoins hommes/femmes. Environnement urbain et relations de genre interpellent plusieurs variables : l'environnement, l'urbain, le genre. Si les croisements de ces approches constituent certainement une bonne part de l'originalité du travail, ils n'en complexifient pas moins la tâche, car non évidents tant méthodologiquement que conceptuellement. En effet, le parti-pris nécessaire d'une recherche-action suppose une construction de l'analyse à partir d'expériences et non strictement de principes théoriques, sans que pour autant ne soit négligée une concordance conceptuelle entre les différentes équipes de recherche. Nous nous interrogerons ici sur la gouvernance dont les femmes peuvent être acteurs en ville, ce qui met en jeu les approches de l'empowerment et des relations de genre dans le contexte du changement social, l'analyse des organisations de base, ainsi que des identités et des rôles des hommes et des femmes, la modification des rapports de pouvoir entre hommes et femmes, que ce soit au niveau domestique ou public.
- Les nouvelles guerres de cent ans - Élise Féron, Michel Hastings p. 545 Cet article défend l'idée que les conflits communautaires, dont les résurgences actuelles posent la question des identités collectives en souffrance, développeraient un imaginaire de la guerre perpétuelle. Toute leur économie interne conduirait les acteurs à s'installer dans la durée, à éterniser les oppositions en rejouant sans cesse une sorte de conflit primitif et indémodable. Ces nouvelles guerres de cent ans se fabriqueraient ainsi à partir de trois éléments principaux : tout d'abord, une ritualisation des pratiques violentes qui lierait les ennemis autour d'un pacte de cruauté réciproque ; ensuite, la mise en place d'une rhétorique de l'impossible et de l'impensable négociation qui permettrait à chacun d'inscrire son combat dans la défense indéfectible de l'honneur de la communauté menacée ; enfin, le prolongement des conflits par une routinisation des clivages, des mobilisations haineuses et des jeux de mémoire qui traversent alors toute activité sociale pour composer une sorte de société d'apartheid spontané. Ce fantasme partagé de l'impossible paix ne participerait-il pas lui-aussi et en dernière instance d'un douloureux besoin de reconnaissance ?
- L'ambivalence être/objet des organisations humanitaires : un objet de recherche pour les sciences de gestion - Erwan Quéinnec p. 557 Les organisations humanitaires sont, en France, des objets conceptuels peu étudiés par les sciences de l'économie et de la gestion, en dépit de leur forte croissance lors des vingt dernières années. Principalement structurée autour de leur ambivalence être privé-objet public, la situation de gestion de ces dernières repose sur une reconnaissance de leur « droit » à l'indétermination opérationnelle par un vaste réseau d'acteurs divers. Cette ambiguïté à usage externe fonde très largement leur prospérité institutionnelle.
- Relations de genre et mouvements urbains de base - François Hainard, Christine Verschuur p. 529
- Les numéros parus - p. 581