Contenu du sommaire : Contagions

Dans quelle mesure la contagion, comme phénomène organique et processus social, ressortit-elle à la logique inconsciente ? Répondre à cette question passe par une exploration sémantique précise du signifiant « contagion » chez Freud, en tant que ce phénomène renvoie à la clinique du sujet. La « contagion psychique » mise au jour depuis l'hystérie renvoie à la dialectique de l'identification, entre symptôme et lien social – puis à l'obsession de la contamination, de la paranoïa au « délire à deux ». C'est la question du tabou qui en éclaire l'enjeu symbolique. On trouve à partir de là un point de bascule dans la question majeure de la réciprocité des sentiments, en opposition à la disparité subjective. Réaborder l'amour comme « maladie contagieuse » : ce chassé-croisé, pour être vertigineux, n'en éclaire que mieux la question du lien entre affection et infection et permet de revenir à la condition pandémique qui, gommant le sexuel, n'en est pas moins éclairé par la si bien dite « maladie d'amour ».

Quand des événements fracassants tels que la pandémie de la Covid 19 impactent la collectivité, ils envahissent rêves et cauchemars de nos patients, compliquant le travail du rêve par un effet traumatique qui occupe le devant de la scène. Est-il possible de faire la part des choses entre la réalité qui s'impose dans toute sa brutalité et la conflictualité psychique qui s'en accapare ? Entre la problématique individuelle et collective ? Quelle est la fonction de tels rêves si répandus qu'ils en deviennent typiques ? L'auteure tente d'apporter quelques éclaircissements théoriques et de nombreux rêves à ces questions en se basant sur les théories freudiennes et postfreudiennes des rêves.

Dans cet article nous proposons de relier la question de la colère au transfert. Cette colère qui lors de la crise sanitaire a été particulièrement contagieuse, aussi bien dans notre quotidien qu'exprimée dans l'espace thérapeutique. Si cette crise sanitaire n'est pas responsable de l'agressivité des patients et de l'équipe que nous accompagnons et que nous présentons dans cet article, elle a participé activement aux conditions accentuant cette colère (séparation, isolement, menace de mort, angoisse). Aussi, si nous voulons soigner ces maux colériques, faut-il encore être capable de les accueillir afin de leur proposer des réponses qui usent d'autres mots. Afin de déplier cette réflexion nous nous référons à de nombreuses références psychanalytiques notamment en ce qui concernant le concept de transfert et de l'agressivité ainsi que quelques références philosophiques pour cerner l'objet qui nous intéresse : la colère.

La vie quotidienne des familles a été bouleversée durant la crise sanitaire liée à la pandémie du COVID-19. Cet article propose une revue de la littérature afin d'observer la manière dont les parents se sont adaptés en fonction de leurs réalités et de leurs ressources tant individuelles que conjugales, familiales ou sociales. Dans un contexte idéologique de « sur-responsabilisation parentale », la pandémie est venue exacerber la pression sociale et les injonctions envers les parents. De nombreuses études indiquent que les parents ont ressenti des niveaux élevés de stress, d'anxiété et d'épuisement, en particulier les figures maternelles qui ont souvent porté la double charge de poursuivre leur activité professionnelle et de garantir l'organisation et le bon fonctionnement de la famille dans ce contexte d'adversité. Dans un tel contexte, les parents se sont trouvés à risque de mettre en place des pratiques de surprotection parentale qui peuvent fragiliser l'autonomie et le bien-être des enfants, notamment des adolescents. Des conséquences positives ont été aussi identifiées chez certains parents, comme une meilleure conciliation entre vie familiale et professionnelle et une coparentalité plus équilibrée. Ainsi, certains parents ont été confrontés à des difficultés durant la pandémie qu'ils ont vécue comme une source de pression supplémentaire, alors que d'autres ont traversé cette crise de manière positive. Leur capacité d'adaptation pourrait s'avérer une ressource précieuse pour les potentielles crises à venir.

La crise climatique s'est inscrite dans la vie psychique des citoyens, elle a bien infiltré les rêves et contaminé l'inconscient. Cela est pourtant peu signifié dans le matériel psychique en séance, malgré le fait que ses effets sont omniprésents dans le monde externe. Dans cet article, le problème complexe de la crise environnementale est abordé sous un angle psychanalytique. Des hypothèses pour le désavouement généralisé dans la vie quotidienne ainsi que dans l'approche analytique de cette catastrophe pour l'humanité sont proposées. Dans la deuxième partie de l'article, l'auteur évoque des pistes pour « rêver » la relation de l'être humain avec son environnement naturel, ce qui pourrait faciliter une intégration intrapsychique et repositionner l'homme dans sa grande famille écobiologique. Ainsi le clivage résultant d'un vécu de contamination traumatisant de la vie psychique par des circonstances extérieures pourrait commencer à être levé. L'impact psychique de la crise climatique se trouve à la croisée des chemins de la psychopathologie individuelle et collective.

Dans cet article, nous aborderons la question des théories du complot et les facteurs menant certaines personnes à adhérer à ces récits. Nous examinerons d'abord les explications individuelles, en termes de déficit cognitif et/ou de psychopathologie. Celles-ci nous amèneront à interroger le lien entre niveau d'éducation et complotisme : le complotisme trouve-t-il sa source dans un déficit de pensée critique, que l'instruction scolaire pourrait combler ? Dans un troisième temps, nous soulignerons les limites d'une approche individuelle du complotisme en mettant en exergue le rôle de dynamiques collectives, qui ne sont pas réductibles à des déficits cognitifs et/ou à des troubles psychopathologiques.

Entre crise sanitaire, crise écologique, crise économique et sociale, le devenir de l'humanité nous implique dans nos choix civilisationnels et notre mode de vie. Nous traversons une zone de turbulences qui nous place au seuil d'une rupture anthropologique. De discours de la science en discours politique en discours complotiste… le virus nous contamine physiquement mais aussi psychiquement. Comment subjectiver ces mutations inédites qui nous effractent ? Face aux défis de l'humanité, la crise fait flamber l'imaginaire. La « solution » complotiste est un mécanisme de défense projectif qui cherche à l'extérieur le coupable tout désigné pour juguler l'angoisse et tourner le dos aux véritables enjeux. Le complotisme s'abreuve aux mensonges officiels pour laisser déferler le flux de sa colère qui se déploie en fantasmes élevés au rang de vérités alternatives, une construction fictionnelle qui met en péril la démocratie. Entre manipulation politique et manipulation complotiste, entre perversion d'État et fantasmes paranoïaques, le mouvement s'hystérise au fil des réseaux sociaux, et creuse le dissensus.

La gestion désastreuse de la pandémie de Covid-19 par le gouvernement fédéral du Brésil a eu pour conséquence la perte de plus de 600 000 vies. La raison principale de cette tragédie a été la position négationniste du président Jair Bolsonaro, qui a aggravé une situation politique et économique déjà précaire. Cet article la décrit, reprend quelques actes significatifs du gouvernement qu'il dirige, cite un échantillon de ses déclarations sur la pandémie, et suggère des hypothèses sur les raisons de son négationnisme. Ensuite, l'auteur propose une interprétation psychanalytique des attitudes des Brésiliens par rapport à la pandémie, qui ont dans une certaine mesure changé au fur et à mesure que se répandait la vaccination. D'après lui, cela s'explique (au moins en partie) parce que la sensation de sécurité produite par l'immunisation a remplacé avec des avantages pour l'économie psychique certains mécanismes défensifs jusqu'alors largement utilisés. Il confronte cette hypothèse à des considérations d'autres psychanalystes, et aux conclusions d'une expérimentation de l'université de Californie dont le but était d'induire les récalcitrants à se vacciner.

La plupart des épidémies transforment radicalement les sociétés. Ainsi, les vagues de pandémies de peste en Angleterre et en Europe modifièrent en profondeur les visions et valeurs politiques, économiques, philosophiques ou sociétales. Cet article tente de décrire brièvement la façon dont un virus extrêmement virulent s'incruste par contagion non seulement dans les organismes vivants mais aussi dans les structures étatiques, modifiant profondément les codes et les habitudes de fonctionnement de ces dernières, notamment dans le fonctionnement du système judiciaire qui sera plus largement évoqué ici.

Cet article interroge la transition vers l'âge adulte dans le monde occidental contemporain, où la mythique individualiste est prégnante. Nous avons voulu explorer l'impact de ce discours sur le processus d'individuation propre à l'adolescence. Pour ce faire, nous avons observé et analysé le fonctionnement trigénérationnel de 4 familles « tout-venant » avec un adolescent de genre masculin, afin de voir quelles étaient la créativité et la restructuration de leur système familial. Cette transformation a été étudiée suivant une approche systémique sous trois angles : celui de l'adolescent, du couple parental et celui des grands-parents. Notre travail a permis de mettre en évidence, à une échelle certes petite, l'importance du travail de transformation au sein de chaque famille. L'implication du groupe familial dans la transition permet de constituer une sorte de « moi-peau familial » suffisamment contenante afin d'organiser ce passage à l'âge adulte pour ces 4 adolescents.

La question de la mesure du risque de passage à l'acte est un vaste débat dont la réponse n'est jamais binaire. La réflexion menée autour de cette question a pour visée d'approcher comment l'ancrage par le soin psychique amènerait à une évolution autre que meurtrière pour le sujet. Partir d'une situation clinique permet d'articuler les différents aspects d'une rencontre avec le soin. Nous aborderons ici quelles sont les possibilités de déplacements de la violence par le soin, c'est-à-dire par la « fonction de contention du cadre coercitif » et la « fonction de contenance du cadre soignant » (Morhain, 2012)1. Nous développerons également l'aspect de la crise homicidaire comme le pendant de la crise suicidaire, ce qui permettra de venir questionner ce que le sujet cherche à atteindre dans l'autre.

Après quelques préliminaires sur la conception psychanalytique du symptôme et de ses abords cliniques, l'auteur envisage divers déterminants de quelques symptômes plus spécifiques aux patients et analysantes : la frigidité, l'anorgasmie, les saignements gynécologiques, le vaginisme et la disparition du désir. Il en envisage, dans un premier temps, les déterminants non psychanalytiques, puis ceux qui se repèrent dans les cures analytiques. Il conclut son article sur quelques implications cliniques quant aux visées et à la direction des cures d'orientation psychanalytique.