Contenu du sommaire : Cold Warriors : propagande, culture et guerre froide
Revue | Histoire@Politique |
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Numéro | no 35, mai-août 2018 |
Titre du numéro | Cold Warriors : propagande, culture et guerre froide |
Texte intégral en ligne | Accessible sur l'internet |
Dossier
- Cold warriors : culture, propagande et guerre froide. Introduction - Michele Di Donato, Gaetano Di Tommaso, Bruno Settis
- The Cultural Cold War and the New Women of Power: Making a Case based on the Fulbright and Ford Foundations in Greece - Despina Lalaki Lorsque C. Wright Mills écrit à propos de l'émergence de nouvelles élites de pouvoir dans les années 1950, il n'accorde aucune attention à la présence de femmes en son sein. Il n'a pas complètement tort. L'imbrication particulière des idéologies de leadership et de masculinité entretiennent le statu quo et perpétuent les préjugés sur l'action politique et le sexe. Afin d'aller au-delà des modèles disponibles et des images principalement masculines de l'Amérique d'après-guerre, cet article décrit le rôle des femmes dans les tentatives américaines d'après-guerre d'établir une hégémonie culturelle. Il examine le cas de l'archéologue américaine Alison Frantz et de l'administratrice grecque Ekaterini Myrivili, et sur leur travail pour la Fondation Fulbright pour la première et pour la Fondation Ford pour la seconde. Cet article entend mettre l'accent sur le rôle des femmes à la fois en tant que professionnelles mais également comme membres de groupes au capital culturel important servant à la production et à la distribution de la culture américaine pendant la guerre froide. Par ailleurs, l'article entend contribuer à l'essor de la recherche sur la guerre froide culturelle en Grèce.When in the 1950s C. Wright Mills was writing about the emergence of the new power elites he paid no attention to the presence of women in its midsts. He was not entirely mistaken. Yet there is a particular intertwining of the ideologies of leadership and masculinity which serves to maintain the status quo, the privilege of an elite and perpetuate preconceptions about political agency and gender. In an attempt to go beyond available models and predominantly masculine images of the postwar America the present article accounts for women's role in the postwar American efforts for cultural hegemony. It focuses on the cases of the American archaeologist Alison Frantz and Ekaterini Myrivili, a Greek cultural administrator and their work with the Fulbright Foundation and Ford Foundation respectively. This article seeks to stress women's role as professionals and members of status groups with great cultural capital responsible for the production and distribution of high-culture integral to the American Cold War efforts. Furthermore, the article contributes to the growing literature on the cultural Cold War in Greece.
- The Cold War in the Courtroom: Friedrich Karl Kaul in Jerusalem - Lorena De Vita Cet article examine l'histoire du juriste et journaliste est-allemand Friedrich Karl Kaul à travers la question de la dialectique entre échelles nationale et internationale. Lors du procès Eichmann, ce militant communiste de longue date (dont le parcours n'est pas dénué d'ambiguïtés) devient un cold warrior professionnel, engagé dans la construction de l'image internationale de la RDA. On le découvre ici engagé dans une mission touchant les relations entre les deux États allemands et Israël, mais aussi, évidemment, la construction de la mémoire des crimes nazis, qui trouve une forte résonance individuelle compte tenu de l'origine juive de Kaul. S'appuyant sur des sources en provenance de la RDA et de la RFA, de la CIA et des documents israéliens, cet article montre que l'engagement de Kaul dans le procès Eichmann constitue un élément d'une histoire (culturelle) transnationale de la guerre froide.This paper will trace Friedrich Karl Kaul's journey from East Berlin to Jerusalem for the Eichmann Trial, and back. What were the ‘few things' he ‘organise[d]' while in Israel? What did he aim to achieve by going to Jerusalem? What can his efforts to take part to the Eichmann trial tell us about broader historical issues? This paper will attempt to answer these questions, touching upon matters including: the relevance of the legacy of the Nazi past to the specifically German-German Cold War; individual agency in the GDR; the evolution of East German propaganda (and its, by 1960, global ambitions); and the East German room for manoeuvre vis-à-vis other Socialist countries, including the Soviet superpower. For Kaul's moves were significant beyond the GDR: they sparked alarm in West Germany; interest and suspicion in Israel; and concern in the United States – and well as in the Soviet Bloc. Based on sources from East and West Germany, CIA memoranda and Israeli documents, this paper positions Kaul's engagement with the trial as part of a transnational history of the (cultural) Cold War
- Sweden Goes Global: Francophonie, Palme, and the North-South Dialogue during the Cold War - Andreas Mørkved Hellenes, Carl Marklund La décolonisation et la montée du « tiers monde » ont ouvert un nouveau front dans la guerre froide mondiale. En réponse, les États neutres et non alignés ont dû faire face au choix complexe de s'adapter ou de contester l'ordre bipolaire. Dans ce contexte, la Suède a progressivement adopté une « politique étrangère active » largement orientée vers l'intérêt de la détente Est-Ouest, du dialogue Nord-Sud et de la solidarité dite du tiers monde. Le Premier ministre social-démocrate suédois Olof Palme a joué un rôle particulièrement crucial dans l'établissement des « intérêts des petits États » comme alternative discursive au bipolarisme antithétique défendu par les blocs de la guerre froide au cours de ses premiers mandats (1969–1976). En tant que tel, les activités de Palme en tant que diplomate publique dans l'univers progressiste émergeant de réseaux, forums de débat et organes d'experts ont été largement notées dans l'opinion publique mondiale de la guerre froide. Dans cet article, nous explorons deux dimensions liées à la diplomatie publique de la guerre froide de Palme : la Suède à la fois comme modèle mondial de neutralité et modèle social possible, qui doivent être interprétés du point de vue de la lutte idéologique de la guerre froide ; Palme en tant qu'intellectuel publique explorant les alternatives au bipolarisme généralisé de la guerre froide, en nous concentrant sur le début des années 1970, moment clé dans le conflit Nord-Sud de la guerre froide.Decolonization and the rise of the “Third World” opened up a new front in the global Cold War. In response, neutral and non-aligned states faced the complex choice of either adapting to or challenging the bipolar order. In this context, Sweden gradually embraced a highly profiled “active foreign policy” in the interest of East-West détente, North-South dialogue and so-called Third World solidarity. In particular, Swedish Social Democratic Prime Minister Olof Palme played a crucial role in establishing “small state interests” as a discursive alternative to the antithetical bipolarism of the Cold War during his first terms in power (1969-1976). As such, Palme's activities as a public diplomat in the emerging progressive universe of networks, debating fora and expert bodies were widely noted in the emerging global public opinion of the Cold War era. In this paper, we explore two related dimensions in Palme's Cold War public diplomacy: 1) Sweden as both a global neutral and a possible social model, both of which must be interpreted from the perspective of the ideological contest of the Cold War; and 2) Palme as a public intellectual in probing alternatives to pervasive Cold War bipolarism, focusing upon the early 1970s as a key moment in Cold War North-South conflict.
- Des cold warriors institutionnels : l'Information Research Department du Foreign Office britannique et l'Italie - Michele Di Donato, Riccardo Diego Portolani La Grande-Bretagne a joué un rôle pionnier dans la définition des stratégies de communication et de propagande philo-occidentale et anticommuniste à l'étranger pendant la première phase de la guerre froide. Cet article analyse les activités menées en Italie par le ministère des Affaires étrangères britannique à travers son Information Research Department (IRD), acteur de la production et de la diffusion à l'étranger de matériaux d'information utiles aux campagnes anticommunistes. L'article étudie l'évolution et les transformations de cette activité à partir de la naissance de l'IRD en 1948, jusqu'à sa fermeture, en 1977, en se penchant notamment sur la façon dont les messages du Département étaient adaptés à la fois au public italien et aux différentes phases de la guerre froide.During the first phase of the cold war, Britain played a pioneering role in defining strategies of international pro-western and anti-communist information and propaganda. This article examines the activities carried out in Italy by the British Foreign Office through its Information Research Department (IRD) – the main hub for the production and dissemination of information materials used for anti-communist campaigns abroad. The article examines the evolution and transformations of this activity from the birth of the IRD, in 1948, until its closure, in 1977, with a particular focus on the way in which the messages of the department were adapted to both the Italian public and the different phases of the Cold War.
- From Establishment to Dissent: The Cases of the Litterateurs Tomas Venclova and Zviad Gamsakhurdia in Soviet Lithuania and Soviet Georgia - Vilius Ivanauskas Soviet intellectuals were closely related with indoctrination practices and the legitimisation of the regime. During post-Stalinism Soviet intellectuals experienced the impact of destalinization by opening more room for the dynamic exchange of ideas and expressions. It is important to explore the Soviet peripheries, which were important for the demise of USSR, and to track down similar manifestations in them. This article pays special attention to those controversial situations in Soviet Lithuania and Soviet Georgia, that showed the shift in ideologies, conflicts in cultural establishment and the lines of cleavage that have emerged within the dissident movements. By embracing the Cold war atmosphere in Soviet peripheries, this article analyses the trajectories of two intellectuals - the poet Tomas Venclova and the literary critic Zviad Gamsakhurdia, who came from the families of cultural nomenclatura in Soviet periphery, but who in the 70's increasingly moved to the position of dissidents and human rights activists. Bearing in mind that Gamsakhurdia adopted an increasingly harsh nationalist rhetoric and Venclova declared cosmopolitan values, though both became well-known dissidents, the analysis provides the context of cultural process and ethnoparticularism in Soviet Lithuania and Soviet Georgia, revealing the similarities and differences in Tomas Venclova's and Zviad Gamsakhurdia's relationship with the cultural establishment and dissident movement. In doing so, this article places these cases in the broader context of ethnic particularism during the Cold War. The comparison of both cases allows us to argue that cosmopolitanism, especially bearing in mind that Soviet Lithuania was more open to various ideas from the West (if compared with Georgia), felt a stronger disciplining effect than a covered nationalist position.
- Bill and Ed's Big Adventure: Cold Warriors, William Fulbright and Right-Wing Propaganda in the US Military, 1961-62 - Giles Scott-Smith Cet article analyse un épisode célèbre du début des années 1960, lorsque le Sénateur J. William Fulbright, alors président du comité sur les relations internationales au Sénat, a enquêté sur les activités de propagande anticommuniste des « ultras » de droite dans l'armée américaine. L'épisode sert à examiner le phénomène des cold warriors', ces figures qui ont associé toute leur identité politique au « combat » de la guerre froide. Une figure particulière s'est rapidement démarquée, illustrant la paranoïa qui inquiétait tant Fulbright : le général de division Edwin Walker. La dispute entre Fulbright et Walker (et leurs sympathisants au Congrès) n'était pas un moindre épisode politique, puisqu'il a bientôt impliqué le président Kennedy et son secrétaire de la Défense Robert McNamara, qui ont témoigné devant le comité d'enquête au Sénat. Il a aussi marqué la confrontation entre une position orthodoxe antisoviétique et une nouvelle vision du monde, incertaine mais plus flexible, celle de la Détente. Le cas de Walker illustre le débat et le fossé grandissant au sein de la politique et de la société américaines entre ceux qui considéraient la guerre froide comme une lutte acharnée jusqu'à la fin, et ceux qui étaient prêts à accepter l'existence de l'Union soviétique au nom d'une stable Détente. En s'appuyant sur le travail d'Anders Stephenson, cet article explore les grandes implications politiques de la dispute Fulbright-Walker dans le contexte des dynamiques changeantes de la guerre froide.Fulbright (J. William), anticommunisme, propaganda, cold warriorThis article analyses a notorious episode of the early 1960s when Senator J. William Fulbright, then Chair of the Senate Foreign Relations Committee, investigated the anti-communist propaganda activities of right-wing ‘ultras' in the US military. The episode is used to investigate the phenomenon of ‘cold warriors', those figures who associated their entire political identity with the ‘fighting' of the Cold War. One particular figure soon stood out as epitomizing the anti-communist paranoia that so worried Fulbright: Major General Edwin Walker. The contest between Fulbright and Walker (and their supporters in Congress) was not a political side-show, since it soon involved President Kennedy and saw Defense Secretary Robert McNamara testifying before a Senate investigative committee. It also marked a contest between an orthodox anti-Soviet position and the new, uncertain but more flexible world-view to be known as Détente. The Walker case encapsulated the debate and the widening divide in US politics and society between those who saw the Cold War as a do-or-die struggle to the bitter end, and those who were willing to accept the existence of the Soviet Union for the sake of a stable Détente. By drawing on the work of Anders Stephanson, this article explores the broader political ramifications of the Fulbright-Walker contest in the context of the changing dynamics of the Cold War.
Varia
- « 10 890 tableaux, 583 sculptures, 583 tapisseries, 2 477 pièces de mobiliers anciens, 5 825 pièces de porcelaine » : le procès de l'ERR et du pillage des œuvres d'art, Paris, 1950 - Jean-Marc Dreyfus Le régime nazi a organisé le plus grand pillage d'œuvres d'art de l'histoire. La France fut, pour les services d'Alfred Rosenberg en charge de cette opération (Einsatzstab Reichsleiter Rosenberg : ERR), un terrain de chasse particulier, où au moins 100 000 œuvres furent volées, principalement à des propriétaires juifs. De nombreux historiens de l'art et directeurs de musée allemands ont apporté leurs connaissances à cette entreprise. Ils n'ont pour la plupart pas été jugés pour ces actes après la chute du Troisième Reich. Seule la France a tenté de les conduire en justice. En 1950, le tribunal militaire de Paris jugea six responsables de l'ERR. L'instruction du procès fut une occasion manquée de décrire les mécanismes administratifs du pillage et de comprendre l'idéologie qui l'a sous-tendu. Ce procès fut unique dans l'Europe de l'après-guerre, bien qu'il n'eût à l'époque qu'un faible écho.The nazi regime organised the biggest looting of art in history. France was a specific hunting ground for the services headed by Alfred Rosenberg (Einsatzstab Reichsleiter Rosenberg : ERR) in charge of this operation ; at least 100 000 works of art were looted, mostly from Jewish families. Numerous German art historians and museums curators participated into this enterprise, bringing their expertise. Most of them were not put on trial after 1945. Only France attempted to bring justice. In 1950, the Paris military tribunal judged six senior members of the ERR. The prosecution failed to describe the complex administration of looting and to understand the ideology that governed it. Even if this trial attracted little attention at the time, it was unique in post-war Europe.
- Cité rouge, cité brune, cité d'hommes : militantisme radical et processus de virilisation à Saint-Denis dans l'entre-deux-guerres - Paul Malgrati Cet article s'intéresse à l'histoire politique et masculine de Saint-Denis dans l'entre-deux-guerres. De par les effets néfastes de la guerre et du travail industriel sur la santé physique de la population masculine de la ville, les débouchés virils proposés par les radicalisations politiques de gauche comme de droite rencontrent un fort succès local du début des années 1920 à la fin des années 1930. À l'aune de cette question masculine et des réponses viriles que les partis politiques tentent de lui apporter, cette étude s'efforce de jeter une lumière nouvelle sur les revirements idéologiques de Saint-Denis dans l'entre-deux-guerres — du communisme au doriotisme.The present article is focused on the political and masculine history of interwar Saint-Denis — a working-class area in the northern suburb of Paris. Due to the undermining effects of the war and of industrial labour on the physical condition of Saint-Denis male population, the masculine prospect of bodily and moral regeneration, proposed by both left and right-wing radical political movements, met with an intense local success throughout the interwar years. At the crossroads of masculine troubles and man-up politics, this study re-investigates the ideological turnaround experienced by Saint-Denis in the interwar years — from communism to doriotism.
- « 10 890 tableaux, 583 sculptures, 583 tapisseries, 2 477 pièces de mobiliers anciens, 5 825 pièces de porcelaine » : le procès de l'ERR et du pillage des œuvres d'art, Paris, 1950 - Jean-Marc Dreyfus
Sources
- « Europeana 1914-1918 », une ressource numérique utile pour écrire l'histoire de la Grande Guerre ? - Nicolas Patin Le projet en ligne Europeana vise à partager un immense héritage culturel européen à travers des documents accessibles par milliers. Dans le cadre du Centenaire de la Grande Guerre, une plateforme dédiée, Europeana14-18, s'est muée en projet collaboratif, proposant à des citoyens de dizaines de pays de donner leurs archives de cet événement traumatique. Que peut apporter ce flot de nouvelles sources ? Quels sont les écueils de la numérisation ? Europeana 14-18 aidera-t-elle à écrire une nouvelle histoire de la Première Guerre mondiale ?“Europeana collections” is a huge online project, aiming to “share cultural heritage” of Europe, and giving access to millions of digitized items. During the Centenary of the First World War, a special platform, Europeana 14-18, turned into a crowdsourcing project, asking citizens of Europeans countries to give their archives concerning this terrible war. What can be learned from this wave of new archives? Which problems has been raised by the digitalization? Will Europeana 14-18 help researchers write a new history of the First World War?
- « Europeana 1914-1918 », une ressource numérique utile pour écrire l'histoire de la Grande Guerre ? - Nicolas Patin