Contenu du sommaire : Stocker

Cet article s'intéresse aux réinvestissements dont font l'objet les stocks d'archives photographiques de presse. Les stratégies de valorisation numérique au sein desquelles ils sont insérés par des acteurs publics comme privés les présentent comme des documents historiques, des composants d'une œuvre artistique ou comme des objets de décoration. Quelle que soit la stratégie déployée, ils sont très largement coupés de leur fonction initiale, au détriment d'une appréhension complète.

Dans l'histoire des études de communication, les approches matérielles jouent rarement un rôle et n'ont pas été systématiquement explorées. Cet article vise à mettre au jour les premiers concepts matériels autour du journal dans les études allemandes sur les journaux au début du XXe siècle. Plus qu'aujourd'hui, les journaux étaient alors considérés comme des artefacts contenant des connaissances inhérentes qu'il fallait rendre accessibles et tangibles. Dans cette optique, les collections de journaux sont apparues comme des infrastructures et des espaces spécifiques pour l'archivage, la collecte, le stockage, la préservation et le traitement des journaux, offrant un accès matériel à la génération de connaissances. Ces développements seront étudiés en liant l'archéologie des médias et l'épistémologie historique à une perspective « pratique » d'histoire des sciences.

Cet article vise à présenter les stratégies de stockage et de diffusion d'Artpool, une archive d'art créée en 1979, lors de la période socialiste en Hongrie. Illustrant les diverses pratiques de stockage et de diffusion de matériel dans les différents contextes politiques de ces quarante dernières années – d'une archive underground créée illégalement à la muséalisation de la collection –, l'étude se penche sur le programme d'Artpool, fondé sur l'idée d'« archive active », et montre ses liens avec le concept de « stockage dynamique », introduit récemment par Wolfgang Ernst.

À l'issue d'une recherche ethnographique et au sein d'un cadre conceptuel sur l'activité instrumentée, nous avons étudié les espaces de stockage bricolés par Michel Campeau. D'une part, le photographe crée, ajoute et modifie des espaces de stockage à fonctionnement numérique ou analogique. D'autre part, leurs formes et leurs pertinences dépendent de leurs utilisations, lorsque Michel Campeau actualise les espaces de stockage en espace de travail, où les images sont vues et sélectionnées.

Depuis la création de cette radio en 1981, les membres de la communauté libertaire de Longo maï, installée près de Forcalquier (Alpes de Haute-Provence), ont stocké de nombreux documents relatifs à leur média. Leurs pratiques de stockage sont marquées par la gestion collective du média et par des réutilisations qui se sont diversifiées au fil du temps. Les localisations de ce stockage sont plurielles, entre stockage collectif, individuel et par les auditeurs, formant un stockage en archipel.

Cet article, inscrit notamment dans une approche d'archéologie des médias, analyse les spécificités de l'émergence d'un nouveau média, la plateforme de streaming musicale, à partir d'une comparaison avec la radio musicale, en prenant deux exemples français : Deezer et FIP. La comparaison s'appuie sur la notion de stockage et l'agencement du stockage avec le flux. Ce rapport entre flux et stockage permet d'expliciter le mouvement de convergence entre fournisseurs de flux musicaux et d'interroger la distinction entre ces deux logiques, qui tend à se brouiller en régime numérique.

Au cours de la dernière décennie, on a assisté en Europe à une augmentation de la construction de nouveaux centres de conservation, ultramodernes et axés sur le design. Ces entrepôts de films peuvent être redécouverts comme un environnement dynamique qui redéfinit et remodèle continuellement les artefacts qui y sont stockés. Loin du simple rangement de boîtes de films sur une étagère, la préservation des films consiste à inscrire l'objet filmique dans un réseau complexe d'infrastructures médiatiques, de procédures d'archivage, de croyances partagées et de techniques culturelles.

Les supports de stockage sont au cœur même de la pratique amateur du film de famille du XXe siècle. Au fil des années, les générations successives ont documenté et matérialisé leurs souvenirs de famille émouvants au moyen de différents supports de stockage. Des technologies de film de 35 mm à support en nitrate du début du XXe siècle aux petits formats de 9,5 mm, 16 mm et 8 mm à base d'acétate des années 1920 et 1930 ; des technologies de film à cassette Super 8 et Single 8 de la moitié des années 1960 et des années 1970, en passant par les technologies électroniques vidéo destinées au grand public des années 1980 et 1990, jusqu'aux différents supports de stockage numériques de la fin des années 1990 et des années 2000. Cet article étudie comment l'évolution de ces supports communément appelés « technologies de la mémoire » a donné forme à de nouvelles pratiques d'enregistrement de films de famille et de stockage amateur au cours de ces cent dernières années. La perspective de « longue durée » révèle l'interaction complexe entre la matérialité du film, de la vidéo et des technologies numériques en tant que supports de stockage amateurs, leur contenu enregistré et leurs pratiques d'utilisation.

Le support vidéo physique s'est épanoui au sein d'un marché de masse extrêmement lucratif avant de connaître une forte contraction à la fin des années 2000, dans le contexte de la concurrence avec les plateformes qui dispensent une offre « en ligne ». Alors qu'il ne présente a priori aucun avantage, certains cinéphiles maintiennent leur consommation au nom de leur fort attachement aux objets. L'article analyse, grâce à une série d'entretiens, le comportement de ces consommateurs qui accordent une valeur à la possession de biens physiques. Il décrit la manière dont ces produits sont associés à une forte dimension symbolique, l'achat venant satisfaire des fonctions secondaires (identitaires, cinéphiliques, patrimoniales).

Cet article aborde l'histoire du CD-Rom en France en le replaçant dans la famille des disques optiques qui se développent dans les années 1980-1990, dans la convergence entre médias et informatique, et souligne son rôle de chaînon manquant dans l'histoire du numérique, au moment où se joue aussi la transition entre Minitel et Web. Si le CD-Rom a bénéficié d'un moindre intérêt historiographique, son caractère multimédia, les nouvelles formes d'écritures numériques qu'il induit ou encore les enjeux que son usage soulève (piratage, droit d'auteur, etc.) rappellent sa place dans une histoire qui va au-delà du simple stockage d'informations et de données. Il éclaire aussi l'informatisation et la numérisation des pratiques tant individuelles que professionnelles en France.

Tout comme d'autres services Internet, et alors que les technologies en pair-à-pair (P2P) rencontraient l'explosion des réseaux sociaux, le stockage n'a pas échappé aux expérimentations décentralisées et distribuées. Cet article montre comment les trois dynamiques que sont le stockage en ligne, le réseautage social et le P2P se sont concrétisées dans une startup, Wuala, entre 2007 et 2011. Il explore cette expérimentation et la resitue dans son contexte socio-historique, pour analyser les manières dont sont mobilisées les marges du réseau, entre incertitude et opportunité technique.

Cet article étudie la manière dont la série télévisée dystopique Black Mirror met en fiction les devenirs des technologies liées au stockage. À partir de l'analyse d'un corpus de trois épisodes, cet article interroge le caractère dystopique de deux innovations fictionnelles et les enjeux éthiques qui les sous-tendent, ainsi que la façon dont le stockage transhumaniste et la réactualisation des données peuvent conduire à une reconfiguration du rapport à soi, au monde et au temps.

Cet article explore l'impact en Inde de la « Bibliothèque coloniale » de l'éditeur britannique Mills & Boon (M&B), ainsi que son adaptation aux nouveaux marchés constitués au sein de ce que l'historien des entreprises Geoffrey Jones appelle les Première et Seconde économies mondialisées. À sa création en 1908, M&B s'est lancé dans la distribution d'ouvrages de romance populaire dans les territoires colonisés, créant ainsi auprès du lectorat anglophone de ces territoires une solide image de marque qui se maintient jusqu'à nos jours. Après l'acquisition de M&B par Harlequin en 1972, le groupe Harlequin Mills & Boon (HMB) s'est appuyé sur la popularité de la marque M&B pour accroître sa présence sur le marché indien anglophone. En 2008, le groupe a ouvert un bureau local à Mumbai et proposé des romances populaires écrites par des auteurs indiens pour un lectorat indien. Les stratégies employées par HMB sur ce marché offrent un aperçu des demandes d'une nouvelle génération de lecteurs en Inde et un objet d'étude permettant de mettre au jour les caractéristiques d'une première et d'une seconde économie mondialisée.

Le quotidien Gil Blas et la revue hebdomadaire illustrée du même nom rencontrent un grand succès à la fin du xixe siècle grâce à la publication de contes légers à la une. Se diffusent alors, par le texte et l'image, des représentations de la vie parisienne qui se fixeront dans les mémoires collectives. En s'appuyant sur la notion d'imaginaire médiatique proposée par Guillaume Pinson, cet article cherche à définir la manière dont on peut élaborer une histoire médiatique prenant en compte des imaginaires et des phénomènes mémoriels.