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Revue | Travail et emploi |
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Numéro | no 164-165, 2021/1-2 |
Texte intégral en ligne | Accessible sur l'internet |
- Éditorial : Des varia en ligne au fil de l'eau - p. 5
- Mais où est donc passée l'éthique du care ? : Les infirmier·es et la question de l'abord de la sexualité en oncologie - Kevin Toffel, Marion Braizaz, Angélick Schweizer p. 7-31 En dépit d'une technicisation croissante du métier qui fait écho au processus de spécialisation du champ médical, la revendication d'autonomie des infirmier·es est principalement adossée au versant relationnel de leur travail, plaçant l'« approche globale » au cœur des discours professionnels. Dans quelle mesure les savoir-faire en matière de sollicitude des infirmier·es peuvent-ils cependant survivre face aux injonctions gestionnaires qui s'appliquent désormais à grand renfort d'outils informatiques s'immisçant dans la relation soigné·es/soignant·es ? Basé sur une enquête qualitative menée en Suisse romande auprès de vingt-neuf infirmières et infirmiers exerçant en oncologie, l'article montre que le non-abord de la sexualité est un révélateur saisissant des grandes difficultés que rencontrent les soignant·es pour faire reconnaître tout un pan de leur rôle professionnel se rapportant au travail du care, qui s'avère aussi peu rentable économiquement que symboliquement.
- Les médecins du football : La fabrique des placements sur un marché du travail incertain - Baptiste Viaud p. 33-57 Cet article interroge les conditions sociales et structurelles d'ouverture des positions médicales dans le monde du football professionnel. Les logiques économiques et vocationnelles sont déterminantes, mais ne doivent pas être surestimées car elles n'agissent pas seules. Vouloir vivre du football, pour le football, ne suffit pas. Encore faut-il se faire embaucher. Les voies de l'engagement sont marquées d'une profonde diversité, qui s'explique par la multiplicité des agents recruteurs et l'absence de mandataire clairement identifié pour autoriser l'accès des médecins au sein des clubs. La saisonnalité des résultats en compétition construit en outre un calendrier des recrutements fluctuant et peu prévisible. Or ces fenêtres d'opportunité s'ouvrent à des moments spécifiques des carrières médicales, et un projet de travail dans le football qui pouvait être envisageable un temps peut s'avérer inopportun plus tard. On comprend alors, à rebours des entretiens conduits avec les médecins et au cours desquels les enquêtés sont prompts à saluer le « hasard » d'une « belle rencontre », combien sont nombreuses les conditions qui rendent possible et envisageable l'occupation de telles positions.
- Des influenceurs sous influence ? : La mobilisation économique des usagers d'Instagram - Joseph Godefroy p. 59-83 De récents travaux en sociologie se sont intéressés à des espaces numériques permettant la mise en relation entre consommateurs et travailleurs. À l'écart de ces supports, le réseau social numérique Instagram, plateforme non marchande, voit certains de ses usagers mobilisés par des entreprises dans l'espoir de mettre leur visibilité à profit. L'analyse s'appuie sur une démarche ethnographique pour étudier la mobilisation économique d'amateurs investis dans une activité de loisir en ligne. En cela, cet article éclaire le processus par lequel les « influenceurs » d'Instagram apprennent et intériorisent les éléments nécessaires à leur marchandisation. À travers une étude de cas, cet article rend compte des séquences d'interactions au cours desquelles la fabrique du statut d'influenceur se forge.
- Santé au travail, maintien en emploi et genre dans les très petites entreprises - Anastasia Meidani p. 85-110 Prenant appui sur 32 monographies, le présent article se propose d'interroger la manière dont les travailleur·ses (salarié·es ou dirigeant·es) de très petites entreprises (TPE) en exercice dans trois secteurs d'activité (le bâtiment, la restauration et la coiffure) abordent la survenue d'un événement de santé, qu'il s'agisse d'une maladie chronique, d'un accident du travail (AT) ou d'une grossesse. Côté salarié·es, plusieurs facteurs entrent en ligne de compte quand un événement de santé surgit : en particulier, les femmes et les hommes ne font pas face aux mêmes contraintes, financières notamment, et n'appréhendent pas le maintien dans l'emploi, le chômage ou la sortie vers l'inactivité de la même manière. Les dirigeant·es de TPE ont, quant à eux/elles, avant tout à cœur de préserver la santé économique de leur entreprise : pour y parvenir, ils et elles invisibilisent parfois leurs propres problèmes de santé, s'efforcent de compenser par eux/elles-mêmes ou en mobilisant des membres de leur famille les arrêts de travail de leurs salarié·es, voire évitent de recruter des candidates en âge d'avoir des enfants.
Comprendre les rouages de la négociation collective et les attitudes des salarié•es envers les syndicats à partir de l'enquête REPONSE
- Négocier collectivement les salaires en entreprise : Quels effets de la (non-)mobilisation des salarié·es ? - Pierre Blavier, Jérôme Pélisse p. 111-136 Cet article porte sur les négociations salariales en entreprise dans la France contemporaine, à partir d'exploitations statistiques de l'enquête REPONSE (Relations professionnelles et négociations d'entreprise). S'inscrivant au sein d'une vaste littérature française et internationale, qu'il ne s'agit pas de recenser mais de compléter de manière originale, il interroge les prises que se donnent (ou non) les salarié·es pour négocier à ce sujet avec leurs employeur·ses, et si le fait de se mobiliser influe sur l'issue des négociations. En premier lieu, il montre que la négociation formalisée et collective des rémunérations est complètement absente de nombreux établissements. À partir d'un recodage de réponses à une question ouverte posée aux représentant·es des directions et des salarié·es, l'article éclaire les raisons énoncées par les un·es et les autres pour expliquer l'absence de tenue de ces négociations et souligne l'importance de la non-mobilisation des salarié·es, mais aussi du refus d'une partie des directions de négocier. S'intéressant dans un second temps aux situations où il y a, au contraire, négociation, la contribution montre que lorsque les salarié·es se mobilisent par des pétitions, débrayages, grèves ou manifestations au moment de ces négociations, la direction déclare beaucoup plus souvent dans ce cas plutôt que dans celui où il n'y a pas eu de mobilisation que, sans ces négociations, sa décision sur les salaires aurait été différente.
- Diversité et évolutions des attitudes des salariés à l'égard des syndicats en France - Tristan Haute p. 137-160 Cet article cherche à saisir les logiques sociales et les évolutions des attitudes des salariés à l'égard des syndicats en France. Pour ce faire, nous mobilisons les données de plusieurs enquêtes quantitatives, dont l'enquête REPONSE (Relations professionnelles et négociations d'entreprise). Saisir et analyser les attitudes des salariés à l'égard des syndicats à partir de données quantitatives pose une série de problèmes méthodologiques, mais s'avère utile pour améliorer la compréhension des dynamiques contemporaines de démobilisation des salariés au travail et en dehors. Ainsi, nous montrons, d'une part, que les salariés ont des attitudes plutôt positives à l'égard des syndicats, mais qu'une proportion croissante d'entre eux ne s'exprime pas. D'autre part, nous montrons que le fait d'exprimer ou non une opinion ainsi que la teneur de celle-ci semblent liés aux caractéristiques sociales et professionnelles des salariés. Ainsi, les salariés les plus jeunes, les moins qualifiés et ceux qui côtoient le moins les syndicats tendent à moins s'exprimer ; par ailleurs, les couches supérieures du salariat du secteur marchand ont des attitudes plus hostiles à l'encontre des syndicats que les autres, tandis que ceux ayant les attitudes les plus favorables appartiennent aux couches intermédiaires et aux classes populaires stabilisées.
- Négocier collectivement les salaires en entreprise : Quels effets de la (non-)mobilisation des salarié·es ? - Pierre Blavier, Jérôme Pélisse p. 111-136
Notes de lecture
- Travailler au musée. Publics, gardiens et conservateurs du Louvre et du British Museum : regards croisés (1946-1981) : Odile Join-Lambert, Villeneuve-d'Ascq, Presses universitaires du Septentrion, coll. « Histoire et civilisations », 2019, 312 p. - Anne Jonchery p. 161-165
- Le praticien, le patient et les artefacts. Genèse des mondes de la télémédecine : Alexandre Mathieu-Fritz, Paris, Presses des Mines, coll. « Sciences sociales », 2021, 323 p. - Marie Benedetto-Meyer p. 166-169
- Junge arbeitslose Männer in der Sanktionsspirale : Franz Zahradnik, Weinheim/Basel, Beltz Juventa, 2018, 172 p. - Hadrien Clouet p. 170-174
- Tensions et émotions dans le travail social précaire. Une sociologie des éducateurs et éducatrices dans les foyers pour enfants : Charlène Charles, Toulouse, Octarès, coll. « Travail et activité humaine », 2021, 237 p. - Arthur Vuattoux p. 175-178
- Le caché de La Poste. Enquête sur l'organisation du travail des facteurs : Nicolas Jounin, Paris, La Découverte, coll. « Cahiers libres », 2021, 384 p. - Romain Trichereau p. 179-182
- Jeunes, jolies et sous-traitées : les hôtesses d'accueil : Gabrielle Schütz, Paris, La Dispute, coll. « Travail et salariat », 2018, 244 p. - Pauline Seiller p. 183-186
- Le nouvel esprit du salariat : Sophie Bernard, Paris, Presses universitaires de France, 2020, 242 p. - Sylvie Célérier p. 187-191
- L'espace infirmier. Visions et divisions d'une profession : Philippe Longchamp, Kevin Toffel, Felix Bühlmann, Amal Tawfik, Neuchâtel, Livreo-Alphil, 2020, 258 p. - Lucile Girard p. 192-195