Contenu du sommaire : Interprétations, usages et appropriations de Leo Strauss

Revue Archives de philosophie Mir@bel
Numéro tome 86, no 2, avril-juin 2023
Titre du numéro Interprétations, usages et appropriations de Leo Strauss
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  • Éditorial - p. 3-4 accès libre
  • Dossier

    • Interprétations, usages et appropriations de Leo Strauss : Philosophie et politique. Avant-propos - Bruno Quelennec p. 5-11 accès libre
    • Un jeu de miroirs transatlantique : Deux paradigmes de réception de Leo Strauss - Bruno Quelennec p. 13-33 accès réservé avec résumé avec résumé en anglais
      Partant du principe que les raisons de la politisation (ou non) de la référence théorique « Leo Strauss » ne peuvent être élucidées qu'en considérant ensemble les écrits du philosophe et les processus de réception dont ils font l'objet, cette contribution propose quelques éléments de biographie intellectuelle, distinguant six « séquences » puis elle met en lumière l'aspect « polyphonique » de l'oeuvre straussienne, semblant autoriser les lectures les plus contradictoires. Suit une exposition de deux paradigmes opposés de réception : la réception étatsunienne, rythmée par les polémiques depuis les années 1980, la réception française, assez consensuelle. À la fin du texte, nous tentons d'expliquer comment Strauss a pu devenir une figure canonique en France dans le contexte du « retour de la philosophie politique » des années 1980-1990.
      Based on the principle that the reasons for the politicization (or neutralization) of theoretical references to Leo Strauss can only be elucidated by considering together the philosopher's writings and their various receptions, this article begins with a short intellectual biography, divided into six different “sequences.” We insist on the “polyphonic” dimension of Strauss's work, which seems to authorize the most contradictory readings. In a second part, we discuss two opposite paradigms of the reception of his writings: the North American one, punctuated by polemics, and the French one, rather consensual. Toward the end of the paper, we explain how Leo Strauss could become a canonical figure in France in the context of the “return to political philosophy.”
    • La réception de Leo Strauss aux États-Unis : Politique platonicienne et libéralisme - John Rogove p. 35-61 accès réservé avec résumé avec résumé en anglais
      Cet article retrace la réception de la pensée du philosophe politique allemand Leo Strauss dans son pays d'accueil, les États-Unis. La première partie retrace sa carrière universitaire américaine, le replaçant aux côtés d'autres exilés allemands en même temps qu'elle décrit la constitution de son école à l'Université de Chicago. Elle reconstruit notamment la façon dont le souci pour sa réception par une démocratie libérale à l'égard de laquelle il était critique a façonné le contenu même de son œuvre. La seconde partie brosse le portrait de l'école straussienne en Amérique du Nord, analysant ses divers courants et les façons souvent divergentes dont ceux-ci ont interprété l'attitude de Strauss à l'égard du régime américain. La troisième partie examine l'influence que la pensée straussienne a pu avoir (ou non) sur le mouvement néoconservateur aux États-Unis et son influence politique et culturelle dans ce pays où elle est devenue définitive­ment inséparable de sa réception.
      This article retraces the reception of the thought of German political philosopher Leo Strauss in his adopted country, the Unites States. The first part retraces his American academic, putting it in context alongside other German exiles and describing the constitution of his “School” at the University of Chicago and the way in which his concern with his work's reception by a liberal democracy toward which he was critical shaped the content of that work itself. The second part describes the Straussian “school” in North America, analysing its various branches and the often divergent ways in which they interpret Strauss's attitude towards the American regime. The third part examines the influence Straussian thought has had (or has not had) on the “neoconservative” movement in the US, and its political and cultural influence in this country where it has definitively become inseparable from its reception.
    • Modernité, tyrannie et crise : Leo Strauss en Chine - Kai Marchal, B. Quélennec p. 63-89 accès réservé avec résumé avec résumé en anglais
      Cet article se demande si un dialogue entre la civilisation chinoise et Leo Strauss est possible et à quelles conditions. Il décrit le contexte d'introduction de Strauss en Chine, en se concentrant sur Liu Xiaofeng, l'un des straussiens les plus influents de la Chine contemporaine. L'analyse de son interprétation de la critique straussienne de la modernité occidentale fait ressortir deux distorsions fondamentales : là où Strauss considérait l'« enseignement tyrannique » comme quelque chose de théorique, Liu en fait un plan d'action politique ; au lieu de reconnaître la modernité des bases idéologiques de l'État fondé par Mao Zedong, il les interprète au crible de la tradition. Cette double déformation contredit l'intention de Strauss en tant que philosophe zététique et socratique.
      This essay contemplates whether a true dialogue between Chinese civilization and Leo Strauss is possible, and if so, under what conditions. It describes the context under which Strauss was introduced to China, concentrating on Liu Xiaofeng, one of the most influential Straussians in contemporary China. An analysis of his interpretation of the Straussian critique of Western modernity reveals two fundamental distortions: where Strauss saw “tyrannical teaching” as something theoretical, Liu turns it into a blueprint for political action; and instead of recognizing the modernity of the ideological foundations of the state founded by Mao Zedong, he interprets them through the lens of tradition. This double distortion contradicts Strauss's intention as a zetetic and Socratic philosopher.
    • L'écriture réticente, condition de possibilité de la philosophie : Quatre études italiennes récentes sur Leo Strauss - Pierpaolo Ciccarelli, Pierre O. Juhel p. 91-119 accès réservé avec résumé avec résumé en anglais
      Dans cet article, je discute quatre contributions récentes sur Leo Strauss écrites par des chercheurs italiens : celles de M. Farnesi Camellone (1), de M. Menon (2), d'A. Ghibellini et la mienne (3). Il s'agit ici de clarifier les raisons pour lesquelles, dans plusieurs études italiennes des deux dernières décennies, Strauss a été étudié davantage comme philosophe que comme penseur politique au sens strict. La principale réside à mon avis dans la relation que Strauss lui-même a établie entre le « problème de la possibilité de la philosophie », relatif à la séparation de l'épistémé d'avec la doxa, et la nécessité de « l'écriture réticente ». L'écriture réticente est un outil méthodologique permettant de contrôler le conflit généré par la question philosophique de la justice, un conflit aux conséquences potentiellement exorbitantes pour la philosophie en tant que mode de vie.
      In this paper, I discuss four recent contributions on Leo Strauss written by Italian scholars: those by Mauro Farnesi Camellone (§ 1), Marco Menon (§ 2), Alberto Ghibellini, and myself (§ 3). I aim to clarify the reasons why, in several Italian studies from the last two decades, Leo Strauss has been studied more as a philosopher than as a political thinker in the strict sense. The main reason lies, in my opinion, in the relationship that Strauss himself establishes between the “problem of the possibility of philosophy,” due to the separation of episteme from doxa, and the necessity of “reticent writing.” Reticent writing is a methodical tool to control the conflict generated by the philosophical question of justice, a conflict with potentially destructive consequences for philosophy as a way of life.
    • Réception italienne de Leo Strauss : De la méfiance à la reconnaissance - Pierpaolo Ciccarelli accès libre
    • 1990-2000 : une autre réception française de Leo Strauss : Corine Pelluchon et Daniel Tanguay - David Smadja p. 121-139 accès réservé avec résumé avec résumé en anglais
      À travers la réalisation et le commentaire de deux entretiens approfondis avec Corinne Pelluchon et Daniel Tanguay, l'article décrit un autre mode de réappropriation de Leo Strauss, distinct des premières réceptions françaises assurées par Raymond Aron et Alexandre Kojève . Il fait apparaître un cadrage du philosophe différent de celui de ses contemporains. Si les deux enquêtés manifestent des dispositions théoricopratiques qui les conduisent à replacer au premier plan le problème théologicopolitique de Strauss, ce cadrage répond chez eux davantage à un intérêt d'ordre historique, orienté vers l'établissement et la traduction d'un corpus, qu'à la poursuite d'objectifs idéologiques ou politiques.
      By interviewing Corine Pelluchon and Daniel Tanguay and analyzing their remarks, we put forward another version of Strauss transformed by a new context of scholarly and social uses. This background differs from the context of the 1950s, which centered on the crucial role of Raymond Aron and Alexandre Kojève in introducing Straussian political thought to France. The framing that characterizes Pelluchon and Tanguay's approach is different in the sense that they do not belong to the same generation. Consequently, they endorse a historical—and non-ideological—perspective that leads them to emphasize the theological-political problem and to consider themselves mainly as introducers and translators of a new corpus.
    • Corine Pelluchon : « Strauss conduit une critique radicale mais constructive de la modernité » : Propos recueillis par David Smadja - David Smadja accès libre
    • Daniel Tanguay : « Strauss m'a appris à vivre plus librement en exil » : Propos recueillis par David Smadja - David Smadja accès libre
  • Varia

    • La « Drôle de pensée » (1675) : Ou quand Leibniz rêvait de faire de Paris une fête - Paul Rateau p. 141-157 accès réservé avec résumé avec résumé en anglais
      Dans la « Drôle de pensée touchant une nouvelle sorte de représentations », rédigée à Paris en septembre 1675, Leibniz envisage de transformer la capitale française en un grand musée des savoirs, des arts et des métiers. Il rêve d'en faire un gigantesque lieu d'exposition des connaissances et des inventions, un laboratoire d'expérimentations, où seraient également donnés spectacles, jeux et divertissements. Le texte a été écrit à la suite de la représentation d'une machine servant à marcher sur l'eau, à laquelle a assisté le philosophe. En identifiant cette machine à une lanquerre, l'article propose de réinterpréter le contenu et le but du projet esquissé dans la « Drôle de pensée ».
      In the “Drôle de pensée, touchant une nouvelle sorte de représentations,” written in Paris in September 1675, Leibniz envisions transforming the French capital into a grand museum of knowledge, arts, and crafts. He dreams of using it as a gigantic exhibition center for knowledge and inventions, a laboratory for experiments, where shows, games, and entertainment would also be held. The text was written after Leibniz attended a demo of a machine used to walk on water. Identifying this machine as a “lanquerre,” the article intends to reinterpret the contents and the goal of the project outlined in the “Drôle de pensée.”
    • Hegel et l'idée d'une logique spéculative : I. Le spéculatif et l'ontologie (dialectique)de la représentation - Fausto Fraisopi p. 159-179 accès réservé avec résumé avec résumé en anglais
      Dans cette première partie de questionnement de l'idée de logique spéculative chez Hegel, on retrace tout d'abord l'idée d'élément logique ou du « logique » ( das Logiche) chez Hegel. Cela converge vers un questionnement de l'origine du spéculatif à la fois dans l'histoire de la pensée occidentale (tant chez les Grecs que chez Augustin) et dans la pensée kantienne, qui sert de base (critique) pour l'élaboration de l'idée de logique spéculative. Cette double approche sert de description d'un horizon général et problématique au sein duquel insérer l'approche des différentes « dialectiques » de la logique hégélienne.
      In this first part of the exploration of the idea of speculative logic in Hegel, we first trace the idea of the logical element (das Logische). This converges on a questioning about the origin of the speculative element (das Spekulativ) both in the history of Western thought (especially by the Greeks and Augustine) and in Kantian thought, which serves as a (critical) basis for the elaboration of the idea of speculative logic. This double approach serves as a description of a general and problematic horizon into which the approach to the many “dialectics” of Hegelian logic can be displayed.
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