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Numéro | no 131, 2023/1 |
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- History (and stories) of off-grid technologies: a reappraisal - Olivier Coutard, Benjamin Bothereau, Joel Tarr p. 1-14
- Le confort hors réseau. Se chauffer au bois, au charbon et au pétrole dans les villes françaises au XXe siècle - Renan Viguié p. 15-31 Au XXe siècle, en France, le chauffage des logements fut profondément bouleversé par les énergies de réseau (gaz et électricité), mais aussi par l'élaboration d'autres technologies qui permirent une centralisation de la chaleur et sa diffusion dans les habitations. Dans les discours, le confort domestique devait nécessairement emprunter ces réseaux techniques et les chauffages au gaz, à l'électricité tout comme le chauffage urbain étaient présentés comme les symboles du progrès destinés à remplacer les modes de chauffage individuels. Pourtant, ces réseaux énergétiques et de chaleur ne remplacèrent pas les autres modes de chauffage : la cheminée, la cuisinière, le poêle, les radiateurs et les appareils individuels de chauffage central persistèrent durant tout le siècle incarnant, tout autant que les dispositifs connectés au réseau, le confort thermique. Cet article s'intéresse à la manière dont se maintinrent ces appareils dans les villes françaises. Il insiste sur le rôle des pratiques quotidiennes et des entreprises qui ralentirent le développement du chauffage en réseau, nuançant les représentations de la modernité des réseaux.In 20th century, in France, domestic heating was changed by network energies (gas and electricity), but also by the development of other technologies which allowed the centralisation of heat and its distribution in houses. In discourses, domestic comfort had to be supported by these technical networks and gas, electricity and district heating were presented as symbols of progress to replace individual heating methods. However, these networks (energy and heat) did not replace other forms of heating: fireplace, stove, cooker, radiators and individual central heating appliances continued throughout the century, embodying thermal comfort as much as the devices connected to the network. This article shows how these devices were maintained in French cities. It emphasises the role of everyday practices and companies that slowed down the development of networked heating.
- Entre le regain et l'incendie : l'étape oubliée du compostage industriel, voie médiane abandonnée du traitement des ordures ménagères (Île-de-France, années 1940 – années 1990) - Étienne Dufour p. 32-50 Focalisée sur les grandes innovations techniques et les trajectoires sociotechniques dominantes, l'histoire du traitement des déchets organiques urbains a partiellement négligé les techniques alternatives de recyclage agricole. Celles-ci ont pourtant perduré dans les usages jusque tard dans certains contextes territoriaux. Dans la région parisienne, entre les années 1940 et les années 1990, une partie des flux de matières résiduelles des villes de l'agglomération a ainsi continué d'être orientée, de manière assez décentralisée et en dehors des grands réseaux techniques, vers les sols cultivés des campagnes voisines. Avant que ne s'impose assez tardivement et presque sans partage le système du tout-réseau qui destine l'ensemble des ordures à la destruction-dispersion en usine d'incinération ou à l'enfouissement en décharges, ces techniques alternatives telles que le compostage ont même connu un certain regain. Le compostage industriel s'est ainsi développé de façon éphémère autour des années 1960. Cependant, il ne survit pas aux années 1970 qui reconfigurent profondément les rapports de force et la hiérarchie entre les technologies. En suivant la trajectoire de ces alternatives, une autre histoire du traitement des déchets se dessine, où villes et campagnes maintiennent de fertiles liens organiques avant que les unes et les autres ne scellent définitivement (?) leur rupture à la fin du XXe siècle. Elle permet d'esquisser quelques raisons de ce succès éphémère puis de cet échec.Since it has focused on major technical innovations and dominant socio-technical trajectories, the recent history of urban organic waste treatment has partially neglected agricultural recycling techniques. However, some of them were still in use quite recently in different territorial contexts. In the Paris region for instance, between the 1940s and the 1990s, part of the waste flows of the urban agglomeration continued to be evacuated separately from the main technical networks, and in a fairly decentralised way, towards the cultivated soils of the neighbouring countryside. Before the recent domination of a hypercentralised system that directs waste almost exclusively to destruction-dispersion by incineration, or to dumping in landfills, alternative techniques such as composting even experienced a period of revival. Industrial composting thus had a short-lived success for a few years around 1960. However, it did not survive the 1970s, a decade that profoundly reconfigured power relations and hierarchies between technologies. By following the trajectory of these recycling alternatives, another history of waste treatment takes shape, in which cities and countryside maintain fertile organic links before enacting their final (?) separation at the end of the 20th century. This perspective allows us to outline reasons for this ephemeral success and for its subsequent failure.
- Only Disconnect: The Problem of Stormwater in Providence, Rhode Island - Sam Coren p. 51-65 Après avoir servi pendant deux siècles de déversoir pour des effluents toxiques, la rivière Providence (Providence, Rhode Island, États-Unis) redevient à nouveau propice à la pêche et à la baignade. Cela est dû en grande partie au Combined Sewage Overflow Abatement Project (CSOAP), un réseau de tunnels situé à environ 90 mètres sous la ville qui capte les eaux chargées des égouts après de fortes pluies. Parallèlement, une infrastructure d'espaces verts répartis dans toute la ville complète le travail du CSOAP, en détournant les eaux de ruissellement des rivières et des ruisseaux locaux tout en fournissant un habitat aux plantes de zones humides et aux pollinisateurs. Il s'agit d'une transformation remarquable, mais provisoire et, à tous égards, loin d'être achevée. En effet, on ne sait pas comment les infrastructures actuelles résisteront à des tempêtes plus fréquentes et à la montée des eaux. Et il reste à voir si la planification de la résilience donnera du pouvoir aux communautés en première ligne, comme le promet le Plan de justice climatique de la ville, ou si elle ne fera qu'accentuer le fossé béant qui sépare les riches de la ville des autres communautés. La restauration des bassins versants jette-t-elle les bases d'une ville plus juste et plus habitable, ou est-ce simplement un moyen, pour citer Erik Swyngedouw, de « soutenir l'urbanité capitaliste afin que rien ne change vraiment » ? Les constructions de zones humides, de « jardins de pluie », de sites de biodégradations et les toutes les autres propositions similaires sont-elles « triviales », comme me l'a fait remarquer un analyste, ou offrent-elles une ouverture pour réimaginer la vie urbaine ? Quels types d'avenir ce « virage vert » prépare-t-il ? Dans cet article, je vise à situer la récente émergence de l'infrastructure verte dans le contexte de l'héritage sanitaire de la gouvernance hydraulique de Providence. J'examine ensuite comment la combinaison en cours (et encore en évolution) des systèmes verts et gris de la ville permet de réassembler l'ordre hydrosocial, et avec quel effet.After serving for two centuries as a sink for toxic effluent, the Providence River (Providence, Rhode Island, U.S.) is becoming fishable and swimmable again. This is thanks in part to the Combined Sewage Overflow Abatement Project (CSOAP), a network of tunnels 300 feet below the city that capture sewage-leaden water after heavy rains. Meanwhile, green infrastructure sites throughout the city complement the work of the CSOAP, diverting surface runoff from local rivers and streams while providing habitat for wetlands plants and pollinators. It is a remarkable transformation, but tentative, and by any measure, far from complete. For it is unclear how present-day infrastructures will hold up against more frequent storms and rising seas. And it remains to be seen whether resilience planning will empower frontline communities, as pledged by the city's Climate Justice Plan, or merely deepen the city's yawning wealth divide. Does watershed restoration lay the groundwork for a more just and habitable city, or is it just a way, to quote Erik Swyngedouw, “to sustain capitalist urbanity so that nothing really has to change”? Are constructed wetlands, rain gardens, bioswales and similar interventions “trivial,” as one analyst remarked to me, or do they provide an opening to reimagine urban life? What kinds of futures is this green turn seeding? In this paper, I situate the recent emergence of green infrastructure in the context of Providence's sanitarian legacy of hydraulic governance. I then consider how the city's still-evolving combination of green and gray systems work to reassemble the hydrosocial order, and to what effects.
- Le solaire en Afrique de l'Ouest (1960-1987) : des techniques énergétiques expérimentales hors-réseau rattrapées par le réseau électrique ? - Jean Gecit, Olivier Coutard, Benjamin Bothereau p. 66-73
- « Petites lignes » ferroviaires, des infrastructures recyclables. Une exploration, Alain Guez (dir.), Paris, Éditions Recherches, 2020, 232 p. - Angelo Bertoni p. 74-75
- Flux. Comment la pensée logistique gouverne le monde, Mathieu Quet, Paris, La Découverte, 2022, 155 p. - Audrey Dupont - Camara p. 76-77