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Revue | Sociétés contemporaines |
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Numéro | no 128, 2022/4 |
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Varia
- Une mobilisation LGBT au cœur de l'État : Le cas des forces de l'ordre - Jérémie Gauthier, Régis Schlagdenhauffen, Camille Noûs p. 5-31 À partir d'une enquête par entretiens conduite entre 2016 et 2019 auprès de policiers et policières, cet article analyse l'émergence et l'institutionnalisation d'une association professionnelle LGBT au sein de la police et de la gendarmerie nationales. Née au début des années 2000 dans un environnement professionnel hétéronormé et hostile aux causes étiquetées comme « communautaristes », cette mobilisation policière atypique repose sur des pratiques militantes contraintes par l'institution tout en témoignant de l'évolution du rôle des institutions pénales à l'égard des minorités sexuelles. L'article analyse l'émergence de cette mobilisation policière, la constitution de leur répertoire tactique ainsi que l'institutionnalisation de la cause LGBT policière. Cette dernière permet de mettre en lumière certains aspects de l'actualité de la « démocratie sexuelle » ainsi que certaines de ses limites.Based on an interview survey conducted between 2016 and 2019 with police officers, this article analyzes the emergence and institutionalization of an LGBT professional association inside the police and the national gendarmerie. Founded in the early 2000s in a heteronormative professional environment hostile to causes labeled as “identity politics”, this untypical police mobilization relies on militant practices constrained by the institution while testifying to the evolving role of penal institutions towards sexual minorities. The article analyzes the emergence of this mobilization, the constitution of their tactical repertoire as well as the institutionalization of the LGBT cause within the police. The latter sheds light on certain aspects of the actuality of “sexual democracy” as well as some of its limits.
- Homosexuel·le·s et socialistes : Constitution d'un pôle électoral-partisan et institutionnalisation du mouvement gai et lesbien dans les années 1980 et 1990 - Hugo Bouvard p. 33-58 Cet article met en lumière le rôle joué par une association de militants socialistes homosexuels dans la dynamique d'institutionnalisation que connaît une partie de l'espace de la cause des gays et des lesbiennes en France pendant les années 1980 et 1990. Loin d'avoir disparu ou de s'être résumé à la lutte contre le sida, ce mouvement s'est en réalité en partie intégré au Parti socialiste, adoptant ses cadres cognitifs et adaptant son répertoire d'action. Au cours des années 1990, ce groupe de socialistes homosexuels contribue à doter le pôle associatif de l'espace de la cause des gays et des lesbiennes d'organes de représentation auprès des pouvoirs publics et à socialiser ses porte-parole aux attentes des institutions du champ politique.This paper highlights the key role played by a group of gay members of the French Socialist Party in the institutionalization of the gay and lesbian political movement in the 1980s and 1990s. Refuting scholarship that argues for the disappearance of this movement or its exclusive focus on the fight against the AIDS epidemic, I demonstrate that the movement instead partly integrated into the Socialist Party, appropriating the party's cognitive framework and adjusting its repertoire of contention accordingly. Throughout the 1990s, this group of gay socialists helped the gay and lesbian movement to dialogue with government authorities and socialized its spokespeople to conform to the expectations of the institutions of the political field.
- Vers la libéralisation ? : La répression de l'homosexualité masculine en France, de 1968 à l'apparition du VIH/SIDA - Dan Callwood, Isabelle Enderlein, Sarah Kiani, Frédéric Stroh p. 59-91 Après 1968, l'État français a engagé un processus de libéralisation juridique relatif à l'homosexualité, abolissant les peines particulières réservées aux actes homosexuels et égalisant l'âge du consentement. Cet article s'efforce cependant de montrer que, loin de régresser graduellement, l'activité policière et judiciaire de répression de l'homosexualité masculine a été remarquablement constante tout au long des années 1970 et au début des années 1980, innovant même pour s'adapter à l'émergence de nouveaux groupes politiques homosexuels et d'une scène gay commerciale et urbaine. En réponse à cette politique répressive, le mouvement de libération gay a d'abord adopté une rhétorique radicale avant de développer de nouvelles stratégies de lobbying et de solidarité mutuelle. À l'aide des statistiques officielles sur la criminalité, des dossiers judiciaires alimentant les procès et des manuels de police, cet article montre que, loin d'adopter une attitude plus libérale, la police et le système judiciaire ont continué à s'appuyer sur une conception archaïque de l'homosexualité, censée représenter un danger pour la jeunesse et l'ordre public, pour tenter de limiter sa visibilité dans la sphère publique.After 1968, the French state underwent a process of legal liberalisation with regards to homosexuality, abolishing particular punishments for homosexual acts and equalising the age of consent. However, this article will propose that, rather than a smooth decline in the repression of male homosexuality, police and judicial activity was remarkably constant throughout the 1970s and early 1980s, even innovating to adapt to the emergence of new gay political groups and gay urban commercial scene. The gay liberation movement responded to this repression by developing new tactics of lobbying and mutual solidarity. Using official crime statistics, judicial dossiers of trial cases, and policing manuals this article will show that rather than a new and more liberal attitude, the police and judiciary continued to rely upon older conceptions of homosexuals as a danger to youth and public order to attempt to limit the visibility of homosexuality in public.
- Au nom de la qualité de vie : De l'entrepreneuriat créatif au travail domestique des artisanes d'art et des vendeuses sur Etsy - Anne Jourdain p. 93-120 Au nom de la « qualité de vie », des mères d'enfants en bas âge quittent leur emploi salarié pour créer une entreprise créative à domicile et ainsi mieux concilier vie professionnelle et vie familiale. L'étude de ces « mompreneurs » sur deux terrains – les artisan·es d'art et les vendeur·ses de la plateforme numérique Etsy – permet d'interroger la puissance et les effets de l'idéal post-fordiste du having it all ou de la conciliation parfaite. Entre dévalorisation du salariat et valorisation de l'entrepreneuriat créatif, cet idéal se traduit par un accroissement des inégalités genrées au sein des foyers et parmi les travailleur·ses créatif·ves. Nombreuses sont celles qui persévèrent pourtant dans ces formes de domesticité entrepreneuriale. Pour ces femmes des classes moyennes, l'aliénation par le foyer apparaît comme un moyen d'échapper aux servitudes du travail salarié, tout en valorisant une identité créative.In the name of “quality of life”, mothers of young children leave their salaried jobs to set up a creative home-based business and thus better reconcile work and family lives. The analysis of these mumpreneurs in two fields – artist-crafts(wo)men and sellers on the digital platform Etsy – allows us to question the power and the effects of the h´aving it all' post-Fordist ideal. Based on the devaluation of salaried employment and on the valorisation of creative entrepreneurship, this ideal results in increased gender inequalities within households and among creative workers. Many women nevertheless persevere in such entrepreneurial domesticity. For these middle-class women, alienation from the household appears to be a way of escaping the bondage of wage labour, while enhancing a creative identity
- Des journalistes sur-sélectionné·e·s : Parcours de recrutement au sein d'un dispositif de « diversité » dans le journalisme - Elena Louazon p. 121-155 Cet article étudie un dispositif de « diversité » mis en place conjointement par Radio France et par des écoles de journalisme pour former des étudiant·e·s. La recherche montre que le programme d'ouverture peine à contrer les effets des moments de sélection successifs pour accéder au journalisme. La forte sélectivité scolaire des écoles de journalisme, les attentes des entreprises de médias, et les pratiques de recrutement des rédacteur·rice·s en chef illustrent des contraintes structurelles au champ journalistique, qui sont autant d'obstacles à la présence ou la persistance dans la profession d'une « diversité » socio-économique pourtant souhaitée par l'ensemble des enquêté·e·s.This paper focuses on a ‟diversity” program for journalism students, co-created by Radio France and several journalism schools. It demonstrates that the program struggles to counter the effects of the many different selection procedures on students' access to the professional field. The high academic selectivity of journalism schools, the requirements of media companies, and the recruitment practices of editors-in-chief each expose the complex structural constraints at play in the French journalistic field. These constraints create important barriers to both the presence and retention in the profession of a socio-economic ‟diversity” that is, nonetheless, sought after by all parties involved.
- Une mobilisation LGBT au cœur de l'État : Le cas des forces de l'ordre - Jérémie Gauthier, Régis Schlagdenhauffen, Camille Noûs p. 5-31
En lutte
- Universities Rising : Mouvement social et réveil syndical dans les universités britanniques - Marion Lieutaud p. 157-167