Contenu du sommaire : Habiter les Amériques

Revue L'Ordinaire des Amériques Mir@bel
Numéro no 231, 2023
Titre du numéro Habiter les Amériques
Texte intégral en ligne Accessible sur l'internet
  • Habiter les Amériques - Guillaume Gaudin, Hilary Sanders accès libre
  • Avant-propos - Françoise Coste accès libre
  • “Vivre ensemble dans un village, dans des maisons et non dispersés” : projets, représentations et pratiques des modes d'habiter dans les missions franciscaines de Haute‑Californie, 1769‑1833 - Emmanuelle Perez Tisserant accès libre avec résumé avec résumé en anglais
    Pendant la période coloniale et jusqu'à la sécularisation de 1833, la mission franciscaine est le dispositif dans lequel la majorité de la population altocalifornienne réside. La quasi-totalité du territoire de la province est exploitée dans le cadre de la vingtaine de missions fondées entre 1769 et 1823. Souvent décrite comme un dispositif de contrôle colonial, la mission est la plupart du temps représentée par ses bâtiments centraux comme l'église et les terrains qui les entourent ; or le terroir de chacune est beaucoup plus vaste que ces seuls espaces emblématiques, avec des pâturages et des installations situées à plusieurs heures voire à un jour ou deux de déplacement. Cet article cherche, en utilisant à la fois la documentation écrite narrative, les registres paroissiaux, les analyses archéologiques et la cartographie, à montrer la variété des modes d'habiter la mission, au-delà du « quadrilatère central » afin de comprendre ces espaces non seulement comme des dispositifs coloniaux mais aussi des territoires de cohabitation et de mettre en lumière leur épaisseur, permettant des formes d'autonomie et de porosité avec les terroirs environnants, notamment avec les populations non « réduites ».
    During the colonial period and until the secularization of 1833, the Franciscan mission was the institution in which the majority of the population resided in Alta California. Nearly all of the province's territory was operated under the twenty or so missions founded between 1769 and 1823. Often described as a colonial control device, the mission is most often represented by its central buildings (with the church as the center) and the land surrounding them; yet the land of each is much larger than just these iconic spaces, with pastures and facilities located several hours or even a day or two away. This article seeks, using both written narrative documentation, parish registers, archaeological analyses and cartography, to show the variety of ways of inhabiting the mission, beyond the “central quadrilateral” in order to understand these spaces not only as colonial devices but as territories of cohabitation and to highlight their thickness, allowing forms of autonomy and porosity with the surrounding areas, especially with the non-“reduced” populations.
  • Habiter Belo Monte, éphémère communauté chrétienne dans le sertão de Canudos (Brésil, 1893‑1897) - Sébastien Rozeaux accès libre avec résumé avec résumé en anglais
    Canudos, alias Belo Monte, est le nom d'une communauté paysanne qui a connu une brève mais intense vie dans les lointains sertões de Bahia. Fondée en 1893 par un prêcheur laïc, la cité est entièrement détruite après la victoire des armées républicaines en octobre 1897. Si les sources du côté des « vaincus » manquent à l'appel, certains documents d'époque et la mémoire orale des survivants collectée après-guerre permettent néanmoins de reconstituer ce que signifiait alors « habiter Belo Monte », dans ses dimensions d'histoire matérielle, sociale, religieuse et culturelle. Outre la question de l'habitat, cruciale dans cette « ville nouvelle », habiter Belo Monte relève surtout d'un choix de vie, de l'adhésion à une expérience communautaire fondée sur le sacré, en rupture avec la république laïque et le processus de colonisation qui se poursuit depuis l'indépendance (1822) dans ces régions reculées et réputées pauvres du Brésil.
    Canudos, alias Belo Monte, is the name of a peasant community that had a brief but intense life in the remote sertões of Bahia. Founded in 1893 by a lay preacher, the city was completely destroyed after the victory of the Republican armies in October 1897. If the sources on the side of the “defeated” are missing, some documents and the oral memory of the survivors allow us to reconstitute what “living in Belo Monte” meant at that time, in its material, social, religious and cultural dimensions. In addition to the question of housing, which was crucial in this “new town”, living in Belo Monte was above all a choice of life, an endorsement of a communal experience based on the sacred, in opposition with the secular republic and the process of colonization that had been going on since the independence of Brazil (1822) in these remote and reputedly poor regions of the country.
  • (Co)Habiter la ville : les ethniques blancs et les Africains‑Américains à Boston et Chicago - Ana Artiaga accès libre avec résumé avec résumé en anglais
    À Boston et à Chicago, la deuxième moitié du vingtième siècle est caractérisée par des conflits opposant les Africains-Américains aux descendants des immigrés européens du siècle précédent autour du partage du territoire. Cet article analyse le rapport de ces groupes ethno-raciaux avec la ville, morcelée en quartiers dont les frontières participent à la définition des identités, parfois au même titre que l'appartenance ethno-raciale et le statut socio-économique. Le quartier ethnique habité par des populations issues de l'immigration européenne catholique pouvait ainsi être perçu par ses habitants comme un territoire à défendre. Entre 1950 et 1980, la lutte contre l'intégration résidentielle et scolaire et la mixité raciale qu'elle implique dans ces deux villes était ainsi menée au nom de la défense de frontières informelles au sein de la ville, ce qui a contribué à façonner les manières d'habiter l'espace urbain.
    In Boston and Chicago, the second half of the twentieth century was characterized by conflicts opposing African Americans and the descendants of European immigrants of the previous century, around the sharing of territory. This article analyses the relationship of these ethno-racial groups with the city, parcelled out into neighbourhoods whose borders participated in the definition of identities, sometimes in the same way as ethnicity, race and socio-economic status. The ethnic neighbourhood, populated by the descendants of European Catholic immigrants, could thus be perceived by its inhabitants as a defended territory. Between 1950 and 1980, the battle against racial integration in housing and schools in both cities was thus fought in the name of the defense of informal borders within the city, which contributed to shaping the ways these different actors occupied the urban space.
  • Habiter le nord du Mexique : trajectoire géohistorique de la Laguna Bustillos autour des paysages agricoles et de l'eau – Chihuahua (Mexique) - Alexandra Angéliaume-Descamps, Victor Manuel Reyes, Hugo Rojas, Carlos Bravo Peña, Victor Manuel Salas Aguilar accès libre avec résumé avec résumé en anglais
    À partir d'une approche géohistorique et paysagère, le texte présente l'appropriation et la valorisation de la cuenca endoréique de la Laguna Bustillos, dans le nord semi-désertique du Mexique. En particulier, l'arrivée et l'implantation de communautés mennonites, parallèlement à la mise en place d'ejidos et de colonias agrícolas, dans le contexte de la Réforme agraire post révolution mexicaine, sont à l'origine de paysages et pratiques agricoles spécifiques entre agriculture hypertechnicisée et agriculture traditionnelle. Ces diverses formes d'agriculture développent, dans un contexte de changements globaux marqués, une forte vulnérabilité à la ressource en eau. Dernièrement, la mise en place de l'OPSE, Observatoire Participatif SocioEcologique, « Cuenca de la Laguna Bustillos », accompagné par la Red Internacional Para la Sustentabilidad de Zonas Áridas (RISZA) vise à construire la « Sustentabilidad Hídrica de la Cuenca Bustillos y su Acuífero » en s'appuyant sur la participation sociale et les services écosystémiques (SES) liés au bien être humain et semble constituer un outil d'intégration des diverses communautés agricoles.
    From a geohistorical and landscape approach, the text presents the appropriation and management of the endorheic cuenca of the Laguna Bustillos, in the semi-desert north of Mexico. In particular, the arrival and establishment of Mennonite communities, along with the establishment of ejidos and colonias agricolas, in the context of the post-Mexican Revolution Agrarian Reform, are at the origin of specific agricultural landscapes and practices. between hyper-technical agriculture and traditional agriculture. These various forms of agriculture develop, in a context of marked global changes, a high vulnerability to water resources. Recently, the establishment of the OPSE, Socio-Ecological Participatory Observatory, “Cuenca de la Laguna Bustillos” accompanied by the Red Internacional Para la Sustentabilidad de Zonas Áridas (RISZA) aims to build the “Sustentabilidad Hídrica de la Cuenca Bustillos y su Acuífero” based on social participation and ecosystem services related to human well-being and seems to constitute a tool for the integration of diverse agricultural communities.
  • Montrer l'engagement des femmes pour l'environnement au Mexique et en Argentine - Marion Gautreau accès libre avec résumé avec résumé en anglais
    Julio Pantoja, de nationalité argentine, a été photoreporter pendant une trentaine d'années. Ses thèmes de prédilection sont la mémoire liée à la dictature (1976-1983) et la défense des droits de l'homme et environnementaux. En 2007, il a réalisé le projet Las madres del monte sur la déforestation au profit d'une culture extensive de soja au nord de l'Argentine et la mobilisation des femmes vivant sur ce territoire face à ce processus dévastateur pour leur environnement immédiat et quotidien. Dans la même logique, Julio Pantoja s'est rendu au Mexique en 2011 afin de photographier des femmes activistes engagées en faveur de la protection du « maïs originel », produit de base de l'alimentation mexicaine. Ce projet, intitulé Mujer, maíz y resistencia, reprend le dispositif photographique du projet antérieur : des portraits de femmes posant sur fond clair dans des paysages. À travers l'étude de ces deux séries, nous interrogerons la façon dont le photographe souligne l'importance de l'activisme féminin face aux menaces pesant sur les habitudes alimentaires et agroforestières au Mexique et en Argentine.
    Julio Pantoja, an Argentine national, has been a photojournalist for more than thirty years. Recurrent themes in his work are the memory of the dictatorship (1976-1983) and the defense of human and environmental rights. In 2007, he produced the Las madres del monte project on deforestation for extensive soybean cultivation in northern Argentina, and the mobilization of women living in the area in the face of this devastating process for their day-to-day environment. In the same vein, Julio Pantoja travelled to Mexico in 2011 to photograph women activists committed to protecting the “original corn”, a staple of the Mexican diet. This project, entitled Mujer, maíz y resistencia, uses the same photographic device as his previous project: portraits of women posing against a light background in landscapes. Through the study of these two series, we will question the way in which the photographer underlines the importance of women's activism in the face of threats to food and agroforestry habits in Mexico and Argentina.