Contenu du sommaire : Transition numérique, une approche info-communicationnelle ?

La « transition numérique » des organisations est une tendance lourde depuis plusieurs années qui ne se confond pas avec le long procès d'informatisation. Nous considérons que les sciences de l'information et de la communication sont idéalement placées pour rendre compte des bouleversements qu'elle introduit. En effet, la généralisation du numérique rend totalement inséparables les enjeux qui étaient traditionnellement ceux de l'information, de la mise en forme du savoir, de son classement, de la découverte de nouveaux domaines et ceux de la communication, de l'engagement des interlocuteurs, de la compréhension réciproque, de la diffusion à large échelle de systèmes de représentation au service de messages politiques, citoyens, commerciaux. L'époque actuelle offre l'opportunité de nouvelles articulations conceptuelles entre ces deux courants qui permettent d'offrir un éclairage original sur les phénomènes étudiés.

Dans cet article nous proposons une analyse info communicationnelle de la transition numérique. Nous décrivons les technologies numériques en termes de dispositifs d'information et de communication et nous analysons les activités communicationnelles en utilisant la Sémiotique des Transactions Coopératives (STC) dont nous proposons une actualisation significative en introduisant les régimes de conversation. La conversation est une relation entre un ou des sujets, cadrée par plusieurs types de dispositifs qui définissent son régime: (1) un ou des types de dispositifs d'accès info-communicationnels permettant de participer à la conversation, (2) un dispositif narratif/cognitif ancré dans des formations discursives qui attribuent des rôles actantiels typifiés aux sujets et aux artefacts médiateurs, et enfin, (3) un dispositif signifiant lié à un système de signes relevant de différents niveaux de pertinence en regard des situations d'activité. L'article se conclut par la présentation d'un cas de transition numérique issu d'une innovation ascendante et transgressive basée sur l'utilisation de smartphones dans le domaine de la sécurité publique.

Ce travail de recherche s'intéresse à la transformation numérique et à ses impacts sur l'activité informationnelle des dirigeants d'un réseau télécoms. Il a été effectué au sein d'Orange, un grand groupe français de télécommunications. En s'appuyant sur les méthodologies de construction de sens et de la théorisation enracinée, nous explorons la place du facteur humain dans ce processus de transformation numérique. L'analyse des données collectées lors de 22 entretiens téléphoniques montre que la transformation numérique renforce l'autonomie et la performance des dirigeants des entités du réseau télécoms et de leurs équipes. Le possible accès à l'information à distance permet à l'activité professionnelle de s'affranchir de l'espace-temps. Cependant, le dirigeant est confronté à la complexité de gestion de l'information dans le contexte numérique et d'accompagnement des collaborateurs dans ce processus. Les résultats mettent en exergue la nécessité de développer une culture informationnelle, numérique et sécuritaire, et de prendre en compte la dimension info-documentaire, parallèlement à la mise en œuvre des projets de la transformation numérique.

Les deux études qui constituent le corpus de cet article abordent la transformation numérique de l'État sous l'angle des métiers. Censées soutenir une politique publique d'innovation, elles explicitent les compétences transversales qu'impliquent l'information et l'économie de la donnée. Le format, le lexique et l'argumentation de fiches métiers sont étudiés. L'analyse montre la prééminence d'un modèle de transition centré sur l'équipement et les tâches. Celui-ci sous-évalue le déplacement des métiers que les données induisent. Alors que ces études sont destinées aux services de ressources humaines de l'Etat, elles laissent de côté, comme allant de soi, les enjeux moraux et politiques de la transformation numérique et la réappropriation par les acteurs publics du sens de leur activité.

Ce texte met en évidence les grands questionnements actuels autour de l'industrie du futur et la nécessité de penser la place de l'humain à différentes échelles au cœur de ces reconfigurations marquées par les dimensions techniques et numériques. Nous nous appuyons sur l'expérience actuelle du montage d'un projet de recherche interdisciplinaire sur le thème de l'industrie du futur pour mettre en évidence non seulement les enjeux (sociaux, techniques, économiques, éthiques, etc.) en lien avec les transformations numériques des organisations mais aussi la place des sciences de l'information et de la communication (SIC) dans des projets de ce type. Du point de vue de la discipline, il s'agit de montrer l'intérêt d'un positionnement info-communicationnel sur ces questions. Il s'agit également de mettre en évidence les atouts des SIC pour mener une coordination interdisciplinaire. Ce qui nous conduit à proposer l'expression de « discipline frontière » pour les SIC.

De nombreux travaux de recherche s'accordent sur le caractère multidimensionnel de la transformation numérique. Cependant, il manque des cadres d'analyse permettant d'articuler clairement cette transformation, au niveau du management, avec les technologies. Dans cet article, nous nous intéressons à l'automatisation robotisée de processus (la RPA), une des technologies les plus déployées actuellement dans les entreprises. Nous proposons un cadre permettant d'observer et d'analyser les effets transformatifs de la RPA, du point de vue des changements relatifs aux mécanismes organisationnels. Prenant appui du cadre proposé, nous mettons en exergue les défis de transformation numérique dans le contexte d'un déploiement à grande échelle de la RPA au sein d'un grand groupe.