Contenu du sommaire : Les inflations

Revue Revue d'économie financière Mir@bel
Numéro no 153, 1er trimestre 2024
Titre du numéro Les inflations
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  • Introduction - Hans-Helmut Kotz, Jean-Paul Pollin p. 9-29 accès libre
  • Histoires d'inflations

    • Origine et persistance de l'inflation : quelques enseignements de l'histoire - Maxime Menuet p. 33-48 accès réservé avec résumé avec résumé en anglais
      Cet article propose de passer en revue quelques grandes idées économiques sur l'inflation et de les mettre en relation avec les faits historiques. Nous montrons que la période allant du xve au xxe siècle est loin d'être un long chemin triomphant pour la théorie quantitative. L'étude du xxe nous enseigne que l'inflation peut être la conséquence de guerres, de contrôles des prix en période de crise, ou de conflits de répartition au sein de la société. De plus, nous mettons en avant quelques faits stylisés, comme l'importance de l'ancrage des anticipations des ménages, ou l'impact de la politique budgétaire. Enfin, nous soulignons l'échec de la théorie macroéconomique actuelle pour comprendre l'origine et la persistance de l'inflation. Classification JEL : E31, E62, N1.
      This article reviews some of the main economic ideas on inflation and relates them to historical events. We show that the period from the 15th to the 20th century was not a long triumphal road for quantitative theory. A study of the 20th century suggests that inflation can be the consequence of wars, of price controls in times of crisis, or distributional conflicts in society. In addition, we focus on some stylized facts, such as the significance of anchoring household expectations or the impact of fiscal policy. Finally, we underline the failure of current macroeconomic theory to understand the origins and the persistence of inflation. JEL classification: E31, E62, N1.
    • L'hyperinflation : un bilan pour le centenaire de l'expérience allemande des années 1920 - Marc-Alexandre Sénégas, Patrick Villieu p. 49-68 accès réservé avec résumé avec résumé en anglais
      À l'occasion du centenaire de l'hyperinflation allemande des années 1920-1923, cet article se propose de revenir sur la manière dont l'analyse macroéconomique a pu appréhender le phénomène d'hyperinflation. Il revient sur les principaux mécanismes que la théorie a identifiés comme étant à l'œuvre derrière la genèse, le développement et la fin d'un processus d'hyperinflation. L'exemple quasi idéal typique de l'hyperinflation allemande sous la République de Weimar est ensuite mobilisé pour les illustrer. Classification JEL : E4, E5, E6, N14, N24.
      To mark the centenary of the German hyperinflation of 1920-1923, this article reviews the way in which macroeconomic analysis has been able to understand the phenomenon of hyperinflation. It reviews the main mechanisms that theory has identified as being at work behind the genesis, development, and end of the hyperinflationary process. The almost perfect example of German hyperinflation under the Weimar Republic is then used to illustrate these mechanisms. JEL classification: E4, E5, E6, N14, N24.
    • La désinflation en Italie de 1980 à 1997 - Ignazio Visco p. 69-81 accès réservé avec résumé avec résumé en anglais
      Après la forte inflation associée aux deux chocs pétroliers des années 1970, un processus graduel de désinflation s'est mis en place en Italie au cours des quinze années suivantes. Cet article examine dans quelle mesure ont compté, dans le retour à la stabilité monétaire, d'abord l'autonomie de la banque centrale, ensuite des politiques de revenus et des accords contractuels efficaces et novateurs, et enfin la mise en œuvre longtemps différée d'un contrôle budgétaire significatif. Classification JEL : E31, E58, G01.
      After the high inflation associated with the two oil shocks of the 1970s, a gradual process of disinflation took place in Italy over the following fifteen years. This paper examines the extent to which central bank autonomy, effective and innovative income policies and contractual agreements, and finally the long-delayed achievement of meaningful budgetary control all played a role in the return to monetary stability. JEL classification: E31, E58, G01.
  • Inflations : des différences entre les pays et les catégories de revenus

    • La crise du coût de la vie dans la zone euro : quels enseignements ? - Helene Schuberth p. 85-98 accès réservé avec résumé avec résumé en anglais
      Cinq récits ont façonné la perception et l'évaluation de la crise du coût de la vie en Europe : la politique monétaire a été considérée comme le meilleur moyen pour ramener l'inflation à l'objectif fixé. Les décideurs politiques devraient s'abstenir de prendre des mesures directes de contrôle des prix, en particulier dans le secteur de l'énergie, afin de ne pas fausser l'allocation des ressources. Les opinions sur les causes fondamentales de l'inflation ont oscillé entre profits excessifs et revendications salariales, la préoccupation principale étant d'éviter une spirale salaires-prix. Les économies européennes, importatrices nettes d'énergie, ont été touchées par un choc négatif des termes de l'échange, les salaires ont été déflatés en utilisant le déflateur du PIB au lieu de l'IPC qui inclut les biens importés. Enfin, la politique économique devait se concentrer sur le soutien aux ménages à faible revenu. Toutefois, dans certains pays, la pensée macroéconomique établie a empêché la mise en place de contrôles stratégiques des prix et de mesures visant à interdire les prix abusifs. Classification JEL : E24, E31, E64.
      Five narratives haven't framed the perception and assessment of Europe's cost of living crisis: monetary policy has mainly been deemed as the best means to get inflation back on target. Policymakers should refrain from direct price control measures, in particular in the energy sector, otherwise they risk distorting resource allocation. Views about the fundamental drivers of inflation have shifted between excessive profit and wage claims, with the dominating concern ultimately becoming the risk of a wage price spiral. European economies, which are net energy importers, were hit by a negative terms-of-trade shock, requiring an income-distribution neutral orientation for wages on the GDP deflator instead of the CPI, which includes imported goods. Finally, policy should focus on supporting low-income households. However, in some countries establishment macroeconomics thinking prevented strategic price controls and measures to prohibit price gouging from being taken. JEL classification: E24, E31, E64.
    • Le retour de l'inflation en France - Mathieu Plane, Gaston Vermersch p. 99-118 accès réservé avec résumé avec résumé en anglais
      Après avoir atteint 5,2 % en 2022, puis 4,9 % en 2023, l'inflation en France devrait revenir en dessous des 3 % en 2024, puis converger vers les 2 % au-delà. Si l'épisode inflationniste a été d'une relative courte durée, cela s'explique, d'une part, via le reflux des prix de l'énergie ainsi que des politiques publiques actives ayant limité l'inflation énergétique et, d'autre part, via la dynamique salariale qui n'a pas suivi l'inflation, au détriment du pouvoir d'achat des salariés. Ainsi, le reflux actuel de l'inflation est peu lié à la politique monétaire et passe d'abord par la baisse des prix de l'énergie et la désindexation des salaires. Enfin, une inflation plus élevée, mais maîtrisée, permettrait d'alléger le poids de la dette, en augmentant la croissance potentielle nominale, dans une économie française très largement marquée par des emprunts à taux fixe et à maturité longue. Classification JEL : E24, E31, E61.
      After reaching 5.2% in 2022, then 4.9% in 2023, inflation in France should fall back below 3% in 2024, then converge towards 2% thereafter. The inflationary episode was relatively short-lived, but this can be explained by the decline of energy prices and active public policies that limited energy inflation, as well as by wages, which did not keep pace with inflation to the detriment of workers' purchasing power. As a result, the current downturn in inflation has little to do with monetary policy, and is primarily due to the decline of energy prices and wages not keeping up with inflation. Finally, higher but controlled inflation would make it possible to reduce the debt burden by increasing potential nominal growth in a French economy that is largely characterized by fixed-rate, long-maturity borrowing. JEL classification: E24, E31, E61.
    • Plafonnement des prix de l'énergie et allégement fiscal : la politique anti-inflationniste de l'Allemagne à la suite des chocs des termes de l'échange en 2022 - Sebastian Dullien, Silke Tober p. 119-132 accès réservé avec résumé avec résumé en anglais
      Les chocs de prix de 2022-2023 ont provoqué une inflation galopante et la stagnation économique en Allemagne. Le gouvernement allemand a réagi en adoptant diverses mesures politiques dans le triple but de stabiliser l'économie, de réduire la fracture sociale et de prévenir les effets de second tour qui risquent d'entraîner une persistance de l'inflation. Ces politiques ont été largement couronnées de succès. Compte tenu de la nature transitoire des chocs et des effets de second tour limités – contenus en partie par des mesures budgétaires ciblées dans la zone euro –, l'orientation fortement restrictive de la politique de la BCE a inutilement intensifié la faiblesse économique dans la zone euro. Classification JEL : E31, E58, E63.
      The price shocks of 2022-2023 gave rise to soaring inflation and economic stagnation in Germany. In response, the German government adopted various policy measures with the threefold aim of stabilizing the economy, reducing the social divide, and preventing second-round effects that risk inflation persisting. These policies were largely successful. Given the transitory nature of the shocks and the limited second-round effects – contained in part by targeted fiscal measures in the euro area – the ECB's strongly restrictive policy stance unnecessarily intensified economic weakness in the euro area. JEL classification: E31, E58, E63.
    • Aux origines de l'envolée de l'inflation aux États-Unis - Hélène Baudchon p. 133-148 accès réservé avec résumé avec résumé en anglais
      La chronologie du choc inflationniste de 2021-2022 est assez claire. Ce qui l'est moins, c'est, derrière la multitude et la confluence des sources, le rôle joué par les facteurs d'offre, d'un côté, et de demande, d'un autre côté. Une analyse simple des contributions à l'inflation américaine des principaux postes de l'indice des prix à la consommation fait ressortir la plus grande importance relative de l'inflation sous-jacente par rapport à l'inflation énergétique et alimentaire, et suggère donc, à cette aune, une inflation américaine plus tirée par la demande que par l'offre. Des analyses plus poussées viennent toutefois tempérer cette vision en faisant également ressortir l'importance des facteurs d'offre, au travers du rôle joué par la série de chocs sur les prix de l'énergie et des matières premières et le marché des biens. Il apparaît même que sans ces facteurs d'offre, l'inflation par la demande n'aurait pas été aussi forte. Si au début de 2024, le processus de désinflation est bien engagé, pour partie grâce à l'action déterminée des banques centrales, il reste encore du chemin à parcourir avant que l'inflation ne soit de retour, durablement, à la cible de 2 %. À l'avenir, celle-ci pourrait, par ailleurs, plus représenter un plancher qu'un plafond. Classification JEL : E31, E60, E64.
      The chronology of the 2021-2022 inflationary shock is quite clear. What is less so, behind the multitude and confluence of sources, is the role played by supply and demand factors. A simple analysis of the contributions of the main items of the consumer price index to US inflation highlights the greater relative importance of core inflation compared to energy and food inflation, and thus suggests that US inflation is more demand-driven than supply-driven. Other more advanced studies, however, temper this view by highlighting the importance of supply factors as well, through the role played by the series of shocks to energy, raw goods, and commodity prices. It even appears that, without these supply factors, demand-side inflation would not have been as high. While, in early 2024, the process of disinflation is well under way, partly thanks to determined central bank action, there is still some way to go before inflation returns to the 2% target on a sustainable basis. Also, in the future, 2% could be more of a floor than a ceiling. JEL classification: E31, E60, E64.
    • Choc inflationniste dans les pays émergents et en développement - Pierre Jacquet p. 149-161 accès réservé avec résumé avec résumé en anglais
      Le choc inflationniste mondial a touché les pays en développement de façon différenciée. Ses effets ont été renforcés par les réponses des politiques monétaires dans les pays développés. Il représente surtout un choc majeur, à la fois en termes d'accroissement de la pauvreté, notamment dans les pays les moins avancés, dont il souligne à nouveau la grande vulnérabilité aux conditions internationales, et en termes d'appréciation du risque et de disponibilité de financements externes, comme en témoignent les difficultés liées à la dette extérieure. Classification JEL : E31, O1, O2, O4.
      The global inflationary shock affected developing countries in different ways. Its effects were compounded by monetary policy responses in developed countries. Above all, it represented a major shock, both in terms of increased poverty, particularly in the least developed countries, whose great vulnerability to international conditions it once again emphasizes, and in terms of risk assessment and the availability of external financing, as evidenced by the difficulties linked to foreign debt. JEL classification: E31, O1, O2, O4.
  • Les approches explicatives des inflations

    • La courbe de Phillips est-elle pertinente pour comprendre le lien entre inflation et chômage ? - Christophe Blot p. 165-178 accès réservé avec résumé avec résumé en anglais
      Bien que la courbe de Phillips joue un rôle important dans les modèles macroéconomiques, les travaux empiriques ont souvent mis en évidence une baisse, voire une absence, de lien entre inflation et chômage. Cet article montre que la courbe de Phillips reste un cadre pertinent pour analyser l'inflation et comprendre le lien entre l'inflation et le chômage. L'instabilité des estimations résulte à la fois des difficultés à mesurer les tensions sur le marché du travail, ou les anticipations d'inflation, et de la non-linéarité de la courbe. De plus, les changements de stratégie de politique monétaire, à partir des années 1980, et la globalisation des économies pourraient affecter la corrélation entre l'inflation et le chômage. Classification JEL : E31, E32, E37.
      Although the Phillips curve plays an important role in macroeconomic models, empirical studies have often shown that the link between inflation and unemployment is actually weak or even non-existent. This article shows that the Phillips curve remains a relevant framework for analyzing inflation and understanding the inflation-unemployment relationship. The instability of the estimations results both from the difficulties of measuring labor market tensions and inflation expectations, and from the curve's non-linear character. In addition, changes in monetary policy strategy since the 1980s and the globalization of economies may affect the correlation between inflation and unemployment. JEL classification: E31, E32, E37.
    • La croissance monétaire et la poussée inflationniste post-pandémie - Claudio Borio, Boris Hofmann, Egon Zakrajšek p. 179-191 accès réservé avec résumé avec résumé en anglais
      La corrélation entre la croissance de la masse monétaire et l'inflation dépend du régime d'inflation : elle est équivalente lorsque l'inflation est élevée et pratiquement inexistante lorsqu'elle est faible. Un lien apparaît clairement également dans le risque de transition d'un régime d'inflation faible à un régime d'inflation élevée à la suite de la pandémie. Une poussée de la croissance monétaire a précédé la poussée inflationniste de 2021-2022, les pays où la croissance monétaire était la plus forte ayant connu une inflation nettement plus élevée. De plus, la prise en compte de la croissance monétaire aurait permis d'améliorer les prévisions d'inflation. La désinflation, qui a débuté dans la plupart des pays au milieu de 2022, a également été précédée d'une baisse marquée de la croissance monétaire. Toutefois, sur cette deuxième sous-période, la corrélation entre croissance monétaire et inflation dans différents pays ne reste visible que si l'on inclut, dans l'échantillon, les pays ayant des taux d'inflation très élevés. Cela indique que la croissance monétaire transmet des informations sur l'inflation, mais qu'il n'est pas évident d'exploiter cette information de manière fiable. Classification JEL : E31, E51, E58.
      The strength of the link between money growth and inflation depends on the inflation regime: it is one-to-one when inflation is high and virtually non-existent when it is low. A link was also clearly visible in the risk of moving from a low to a high-inflation regime in the aftermath of the pandemic. A surge in money growth preceded the inflation flare-up in 2021-2022, as countries with stronger money growth saw markedly higher inflation. Moreover, keeping an eye on money growth would have helped to improve inflation forecasts. The disinflation that began in most countries in mid-2022 was also preceded by a marked decline in money growth. However, over this second sub-period, the cross-country link between money growth and inflation is visible only if countries with very high inflation rates are included in the sample. All this indicates that money growth does convey information about inflation, but that it cannot be easily used in a reliable way. JEL classification: E31, E51, E58.
    • Les effets hétérogènes de l'inflation en France et dans la zone euro - Erwan Gautier, Jérémi Montornès p. 193-211 accès réservé avec résumé avec résumé en anglais
      Cet article étudie les effets hétérogènes de l'inflation sur les différentes catégories de ménages en France et dans la zone euro entre le milieu de 2021 et la fin de 2023. Les différences de structure de consommation entre les ménages et la dispersion des hausses de prix entre produits sont à l'origine d'inégalités d'inflation. L'épisode inflationniste, causé par la hausse des prix importés, a principalement touché les ménages consacrant une plus grande part de leurs revenus aux produits énergétiques et alimentaires. En France, les inégalités d'inflation selon les quintiles de revenus sont restées faibles sur la période, mais les disparités par âge et par zone de résidence ont été plus marquées. La « remise à la pompe » et les boucliers tarifaires ont contribué significativement à réduire les inégalités d'inflation. Classification JEL : C43, D30, E31.
      This article examines the heterogeneous impact of inflation on different categories of households in France and the euro area between mid-2021 and the end of 2023. Differences in consumption patterns between households and inflation dispersion across products generated inflation inequalities. The inflationary episode, driven by rising prices of imported goods, mainly affected households that spend a larger share of their income on energy and food. In France, inflation differentials between income quintiles were low during this period, but differentials by age and area of residence were more pronounced. Gas subsidies and price caps significantly contributed to reducing inflation inequalities. JEL classification: C43, D30, E31.
    • Inflation, changement structurel et conflit de répartition : enseignements pour la politique économique - Jean-Luc Gaffard, Mauro Napoletano, Francesco Saraceno p. 213-230 accès réservé avec résumé avec résumé en anglais
      La théorie standard de l'inflation en fait un phénomène global qui ne peut durer et s'amplifier qu'en raison d'une « boucle prix-salaires », expression d'un conflit fondamental entre le capital et le travail. Sans vouloir nier cette dimension du problème, nous entendons montrer que l'inflation a aussi une dimension structurelle qui rend le conflit de répartition plus complexe à analyser et qui requiert une politique de lutte contre l'inflation ne se réduisant pas à la politique monétaire. L'enjeu est d'empêcher l'économie de basculer d'un régime de basse inflation à un régime de forte inflation, d'une inflation structurelle à une inflation globale qui serait hors de contrôle. Classification JEL : E25, E31, E52, E64.
      The standard theory of inflation is that it is a global phenomenon that can only last and intensify because of a wage price spiral that expresses a fundamental conflict between capital and labor. Without seeking to deny this aspect of the problem, we aim to show that inflation also has a structural aspect, making the distributional conflict more complex to analyse and requiring an anti-inflation policy that is not limited to monetary policy. The challenge is to prevent the economy from shifting from a low-inflation to a high-inflation regime, from structural to global, out-of-control inflation. JEL classification: E25, E31, E52, E64.
  • Quelles voies de retour vers la stabilité ?

    • Le ciblage de l'inflation en univers incertain - Pierre Jaillet, Jean-Paul Pollin p. 233-247 accès réservé avec résumé avec résumé en anglais
      Le récent choc de prix a suscité un débat sur la cible d'inflation, pilier des stratégies des banques centrales depuis les années 1990. L'article revient sur la question théorique du taux d'inflation, avant d'aborder les conditions ayant justifié le choix d'une cible de 2 % par la plupart d'entre elles. Il examine ensuite les arguments en faveur ou à l'encontre d'un changement de cette référence, avant d'évoquer quelques options stratégiques alternatives. Il en ressort que dans tous les cas de figure, les banques centrales devront justifier économiquement la pertinence et leurs politiques d'objectifs, mieux qu'elles ne le font aujourd'hui. Classification JEL : E31, E52, E58.
      The recent price shock has sparked a debate on the inflation target, which has been the main pillar of central bank strategies since the 1990s. This article looks first at the theoretical question of the inflation rate before discussing the conditions that justify the choice of a 2% target. It then examines the arguments for and against changing this benchmark, before considering some alternative policy options. The conclusion is that, in all cases, central banks will have to justify the relevance of their policy goals on economic grounds better than they do today.  JEL  classification: E31, E52, E58.
    • Inflation et pouvoir de marché des entreprises : leçons des crises récentes - Benoît Cœuré p. 249-263 accès réservé avec résumé avec résumé en anglais
      Économistes et banquiers centraux se sont interrogés sur la responsabilité des entreprises dans l'envolée de l'inflation en 2022-2023. En augmentant leurs prix de vente, les entreprises auraient contribué à la propagation, voire à l'amplification du choc de coût. Sur une longue période, des évolutions structurelles ont pu renforcer le rôle des entreprises (par opposition à celui des salariés) dans la dynamique de l'inflation, mais, à court terme, le lien entre pouvoir de marché des entreprises et transmission des chocs de coût est ambigu. Des entreprises plus puissantes facturent, certes, des prix plus élevés, mais elles ont aussi une plus grande capacité à absorber des chocs temporaires. Au total, une « boucle prix-profits » s'est bien matérialisée en 2002-2023, mais elle semble avoir été un phénomène temporaire, moins marqué en France qu'ailleurs en Europe. En 2024 et au-delà, alors que les prix de l'énergie se normalisent, que les salaires accélèrent et que l'inflation revient progressivement vers 2 %, il conviendra de suivre avec attention la normalisation des taux de marge des entreprises et d'éviter des rigidités à la baisse qui entretiendraient l'inflation. La politique de la concurrence peut jouer un rôle utile en identifiant les rentes sectorielles et en sanctionnant les comportements susceptibles d'amplifier la hausse des prix. Classification JEL : E31, E64, L1.
      Economists and central bankers have discussed the responsibility of businesses in the inflation surge of 2022-2023. By raising their sales prices, companies may have contributed to the spread, and even the amplification, of the cost shock. Over the long term, structural changes can have strengthened the role of companies (as opposed to workers) in driving inflation, but in the short term, the link between market power and the transmission of cost shocks is ambiguous. Larger companies do charge higher prices, but they are also more able to absorb temporary shocks. In general, “profitflation” did materialize in 2002-2023, but it seems to have been a temporary phenomenon, less pronounced in France than elsewhere in Europe. In 2024 and beyond, as energy prices normalize, wages rise, and inflation gradually returns to 2%, it will be important to closely monitor the return to normal corporate margins and to avoid downward rigidities that would sustain inflation. Competition policy can play a useful role in identifying sectoral rents and punishing behavior likely to contribute to price increases. JEL classification: E31, E64, L1.
    • Inflation et politique budgétaire : à la recherche d'un nouveau paradigme - Xavier Ragot p. 265-277 accès réservé avec résumé avec résumé en anglais
      De nombreux outils fiscaux ont contribué à stabiliser l'inflation lors des crises économiques récurrentes depuis quinze ans : bouclier tarifaire, plans de relance, activité partielle, crédit d'impôts, etc. Ces pratiques sont cohérentes avec les récents travaux qui montrent que les outils budgétaires sont de puissants leviers de stabilisation de l'activité et de l'inflation. Dès lors, une nouvelle coordination pragmatique des politiques budgétaire et monétaire est nécessaire, qui doit s'adapter aux cadres institutionnels de chaque pays. En Europe, il est proposé que les instituts budgétaires indépendants, en charge d'informer les parlements nationaux, soient dotés d'objectifs d'analyse de l'inflation, avec les moyens analytiques adéquats. Classification JEL : E31, E58, E63.
      Numerous fiscal tools have contributed to stabilizing inflation during recurring economic crises over the past fifteen years: price caps, economic stimulus, paid furloughs, tax credits, etc. These policies are consistent with recent studies showing that budgetary tools are powerful levers for stabilizing activity and inflation. A new framework for pragmatic coordination of budgetary and monetary policies is therefore required, which must adapt to the institutional frameworks of each country. In Europe, it has been proposed that independent fiscal institutes that are responsible for informing national parliaments be provided with inflation analysis goals and adequate analytical resources. JEL classification: E31, E58, E63.
  • Chronique d'histoire financière

  • Finance et littérature

  • Article divers

    • Dupuit, Colson et les débuts de la SNCF : la voie vers le yield management - Joachim De Paoli p. 299-310 accès réservé avec résumé avec résumé en anglais
      Le yield management est la principale méthode utilisée de nos jours par les compagnies aériennes pour fixer leurs tarifs. Elle est souvent présentée comme une nouveauté développée à l'intérieur du secteur aérien aux États-Unis à la fin des années 1970. Cet article montre qu'elle présente pourtant d'importantes similitudes avec une théorie plus ancienne : la méthode de tarification des infrastructures exploitées en monopole proposée par Jules Dupuit en 1844, développée par Clément Colson à partir de 1890 et appliquée par la SNCF à sa création en 1937. On retrouve en effet dans le yield management l'idée de Dupuit de faire payer à chaque utilisateur un tarif se rapprochant le plus possible de la valeur d'usage accordée au transport. Pour amener les utilisateurs à révéler cette valeur d'usage, les compagnies aériennes low cost utilisent un mécanisme d'options que l'on retrouve dans les développements de Colson et dans la tarification utilisée lors de la création de la SNCF. Classification JEL : B1, B2, L92, L93, N70.
      The yield management is the main method used nowadays by airlines companies in order to set their prices. It is often presented as an innovation developed in the airline sector in the United States at the end of the 1970's. However, this paper demonstrates that it has important similarities with an older theory: the pricing method of infrastructures exploited by a monopoly proposed by Jules Dupuit in 1844, developed by Clément Colson in 1890 and applied by the SNCF (French railroad company) at its creation in 1937. Indeed, yield management is based on Dupuit's idea of charging each user a price as close as possible to the use value attributed to transportion. To get users to reveal this use value, low-cost companies use an option mechanism found in Colson's developments and in the pricing system used when the SNCF was created. JEL classification: B1, B2, L92, L93, N70.