Contenu du sommaire : Recensions et notices
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Revue des Sciences Philosophiques et Théologiques — RSPT ![]() |
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Numéro | tome 108, no 1, janvier-mars 2024 |
Titre du numéro | Recensions et notices |
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- La pensée grecque ou l'oubli de la chair selon Michel Henry - Martin Baudroux p. 3-36 Dans la philosophie de Michel Henry, la pensée grecque semble cantonnée au rôle de repoussoir, certes nécessaire pour élaborer en opposition une phénoménologie, d'inspiration chrétienne, de la chair, mais en elle-même sans valeur. On se propose de montrer que Michel Henry forge dans la patience, et en s'appuyant sur des sources précises que nous identifions, une pensée de la theôria grecque dont la puissance synthétique lui permet d'y reconduire non seulement Hegel et Heidegger, mais encore l'essentiel de la phénoménologie du xxe siècle. C'est finalement dans cette capture de l'être par la theôria (manifeste dès Parménide) que la modernité, dans sa « barbarie », plonge par paradoxe ses racines. Si toutefois il faut contrer la réduction hellénique de l'être à l'extériorité sans vie du monde en élaborant une pensée des Écritures, il apparaît que la Grèce henryenne est en définitive double : ce qu'elle écarte et oublie d'une part, la chair vivante, elle l'éprouve d'autre part et s'y rapporte sur le mode de l'énigme.In the philosophy of Michel Henry, Greek thought seems confined to the role of a foil, certainly necessary to eliminate in opposition a phenomenology, of Christian inspiration, of the flesh, but in itself worthless. We propose to show that Michel Henry forges in patience, and by relying on precise sources which we identify, a thought of Greek theoria whose synthetic power allows him to bring back not only Hegel and Heidegger, but also the essentials of 20th century phenomenology. It is ultimately in this capture of being by theoria (manifest since Parmenides) that modernity, in its « barbarism », paradoxically plunges its roots. If, however, it is necessary to counter the Hellenic reduction of being to the lifeless exteriority of the world by elaborating a thought of the Scriptures, it appears that Henryan Greece is ultimately twofold – what on the one hand it dismisses and forgets, living flesh; on the other hand it experiences it and relates to it in the mode of an enigma.
- Métaphysique et théologie : une somme « pour » les gentils - Emmanuel Falque p. 37-65 Thomas d'Aquin n'a pas simplement écrit une somme « contre » les gentils (contra Gentiles), mais aussi et surtout une somme « pour » les gentils (pro Gentilibus ). La raison naturelle, unique recours pour les mahométans et les païens lorsqu'il n'y a pas d'Écriture en commun (contrairement aux juifs et aux hérétiques), n'est pas que le lieu vertical de l'accès à Dieu ; elle désigne aussi le topos horizontal d'une communauté d'humanité capable de nous rassembler. La « raison » hier (Thomas d'Aquin) joue le rôle de la « finitude » aujourd'hui (Heidegger) – à savoir ce qui fait notre « en commun ». Telle est l'unique perspective d'une apologétique qui ne se tiendra plus dans une sorte de « transcendance de surplomb » (Merleau-Ponty), comme si l'absolu était immédiatement donné. On cessera alors d'opposer « métaphysique » et « théologie », dans un discours prétendument pur et faussement recherché. C'est à transformer la tradition plutôt qu'à la dépasser que nous convie la leçon du concile de Nicée (325). Le « c'est-à-dire » de la même substance du Père (homoousios ) traduit bien le biblique en hellénique, plutôt qu'il ne tente de sortir de l'hellénique comme tel. Ainsi, le fameux « ce que tous nomment Dieu » (et omnes dicunt Deum ) à la fin de chacune des cinq voies de Thomas d'Aquin indique moins l'idole d'un Dieu conceptuel à dépasser, que l'icône d'un Dieu rationnel qui, dans sa kénose, habite aussi notre propre nature pour la transformer. De la théo -logie où « seul Dieu parle bien de Dieu » (génitif subjectif), on passera donc à la théo-logie où « l'homme peut aussi, et en partie au moins, parler de Dieu » (génitif objectif). Un nouveau rapport de la métaphysique à la théologie s'instaure ici, capable d'initier une autre relation du croyant au monde.Thomas Aquinas did not simply write a summa « against » the Gentiles (contra Gentiles), but also and above all a summa « for » the Gentiles (pro Gentilibus). Natural reason, the only recourse for Mohammedans and pagans when there is no Scripture in common (by contrast with encounters with Jews and heretics), is not just the vertical location of access to God; it also designates the horizontal topos of a community of humanity capable of bringing us together. « Reason » yesterday (Thomas Aquinas) plays the role of « finitude » today (Heidegger) – namely what makes us « in common ». This is the unique perspective of an apologetics which will no longer be held in a sort of « overhanging transcendence » (Merleau-Ponty), as if the absolute were immediately given. We will then stop opposing « metaphysics » and « theology », in a supposedly pure and falsely researched discourse. It is to transform tradition rather than to go beyond it that the lesson of the Council of Nicaea (325) invites us. The « that is to say » of the same substance of the Father (homoousios) translates the biblical into Hellenic, rather than trying to get out of Hellenic as such. Thus, the famous « what all call God » (et omnes dicunt Deum) at the end of each of the five ways of Thomas Aquinas indicates less the idol of a conceptual God to be overcome, than the icon of a Rational God who, in his kenosis, also inhabits our own nature to transform it. From theo-logy where « only God speaks well of God » (subjective genitive), we will therefore move on to theo-logy where « man can also, and in part at least, speak of God » (objective genitive). A new relationship between metaphysics and theology is established here, capable of initiating another relationship of the believer to the world.
- Bulletin d'histoire des doctrines médiévales - Marta Borgo, Marc Millais, Kristina Mitalaité, Jean-Christophe de Nadaï, Adriano Oliva p. 67-127
- Bulletin d'homilétique - Emmanuel Dumont p. 129-190
- Sylvio Hermann De Franceschi, Théologies en débat. L'Église catholique post-tridentine au risque du pluralisme doctrinal dans la querelle de la grâce (XVIIe-XVIIIe siècles), Paris, Honoré Champion, (coll. « Lumière classique » 126), 2023 ; 15,5 × 23,5, 562 p, 88 €. ISBN : 978-2-7453-5927-8. - Jean-Christophe de Nadaï p. 191-196
- Simon Icard, L'Apocalypse janséniste. Port-Royal et la défense de la vérité, Paris, Éditions du Cerf, (coll. « Cerf Patrimoines »), 2023 ; 15,2 × 22,9, 264 p., 26 €. ISBN : 978-2-204-16017-9. - Jean-Christophe de Nadaï p. 196-200
- Jean-Miguel Garrigues, L'Impossible substitution. Juifs et Chrétiens (Ier-IIIe siècle*), Paris, Les Belles Lettres, 2023 ; 21,5 × 15, 234 p., 25 €. ISBN : 978-2-251-45499-3. - Jean-Dominique Bruneel p. 201-203
- Emmanuel Pisani et Zohra Aziadé Zemirili (dir.), Renouveau et dynamiques de l'islamologie en Europe, Paris, Éditions du Cerf (coll. « Théologicum »), 2023 ; 15,2 × 22,9, 248 p., 22 €. ISBN : 978-2-204-15665-3. - Jean-Marc Ghitti p. 203-204