Contenu du sommaire : Revue de l'OFCE n°67
Revue | Revue de l'OFCE (Observations et diagnostics économiques) |
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Numéro | no 67, 1998 |
Titre du numéro | Revue de l'OFCE n°67 |
Texte intégral en ligne | Accessible sur l'internet |
Les perspectives pour 1998-1999
- Dans la tourmente financière - Division économie internationale de l'OFCE, Henri Sterdyniak, Hélène Baudchon, Odile Chagny, Bruno Coquet, Hervé Le Bihan, Catherine Mathieu, Olivier Passet, Christine Rifflart p. 9-99 Fin septembre 1998, le ralentissement s'amorce aux Etats-Unis et au Royaume-Uni ; le Japon s'enfonce dans la récession ; l'Europe continentale est en phase de nette reprise. L'extension de la crise financière se traduit par la baisse des Bourses et des taux obligataires dans les pays développés et par la contagion de la crise asiatique à d'autres pays émergents, frappés aussi par la baisse du prix des matières premières. La finance mondiale connaît depuis vingt ans un développement exubérant entrecoupé de crises récurrentes. La croissance mondiale pourrait être durablement affectée par le refus des capitaux d'investir de nouveau dans les pays émergents, par l'instabilité résultant de la globalisation financière et par la surabondance de capitaux demandant des taux de rentabilité trop élevés. Le ralentissement provoquerait une nette détente des taux courts américains. Le yen resterait à un bas niveau. Un certain attentisme monétaire paraît probable en Europe. Le dollar diminuerait jusqu 'à 1,55 DM à la fin de 1999. Une baisse supplémentaire de 5 % réduirait de 0,5 % l'activité en Europe en 1999. La chute des importations des pays émergents pèserait fortement sur la croissance du commerce mondial en 1998-1999. Selon une variante du modèle MIMOSA, la crise asiatique coûterait au total 2,4 % d'activité au Japon en 1999, 1,1 % aux Etats-Unis et 1,4 % en Europe. L'Asie en développement connaîtrait une stagnation de son activité en 1998 suivie d'une croissance de 3 % en 1999. En attendant les effets des plans structurels, la situation conjoncturelle ne cesse de se dégrader et la situation sociale reste extrêmement tendue. L'Amérique latine est fortement secouée par l'amplification de la crise. Les taux d'intérêt ont dû être fortement augmentés et les perspectives de croissance ont été encore revues à la baisse. En Russie, la chute du prix du pétrole a réduit à néant l'excédent commercial et a augmenté encore le déficit public. La chute du rouble provoque le retour d'une inflation galopante. Le PIB devrait se contracter de 5 % en 1998. La plupart des PECO connaissent une croissance vigoureuse, dont les déséquilibres semblent encore soutenables. La récession japonaise s'est encore aggravée depuis le début de l'année, malgré la mobilisation intensive des instruments traditionnels de politique économique. Les autorités n'ont pas su traiter efficacement les problèmes financiers hérités du précédent cycle de croissance. Aux Etats-Unis, la croissance était soutenue par la hausse de la Bourse, la baisse du taux d'épargne et le dynamisme de l'investissement ; ces facteurs se retournant en raison de la baisse du profit des entreprises et de la crise financière. Les exportations continuerait à se contracter. Le retournement resterait néanmoins limité grâce à une politique monétaire plus accommodante. Le taux de croissance du PIB serait ramené de 4 % en 1997 à 3,2 % en 1998 et 0,5 % en 1999. L'Europe peut-elle bâtir sa croissance sur son seul dynamisme interne ? Au premier semestre 1998 la contribution externe à sa croissance s'est affaibli mais la demande intérieure a gagné en vigueur. Les assainissements budgétaires sont achevés ; l'inflation ne constitue plus une menace ; les prix de l'énergie et des matières premières et les taux d'intérêt de long terme sont bas. Mais l'Europe souffrirait de la rechute du dollar. Dans la zone euro, la croissance serait de 2,8 % en 1998 et en 1999, ce qui est peu en période de reprise. Avec une reprise de la demande intérieure encore mal affermie, les performances allemandes resterait en retrait. L'Italie souffre de l'importance des ajustements budgétaires récents et d'une contribution particulièrement négative du commerce extérieur. L'économie britannique est soumise à des niveaux élevés de taux d'intérêt et de taux de change. La croissance ralentirait nettement en 1998 et 1999. Le refus du Royaume-Uni d'entrer dans la zone euro avant 2002 trouverait une justification a posteriori dans la persistance de son décalage conjoncturel.In the financial turmoil Forecast for 1998-1999 for the world economy Division Economie Internationale As suggested in our spring forecasts, the US and the UK are facing a slowdown ; the Japanese economy is in recession ; European growth is boosted by internal demand. But the financial crisis has developed world-wide, inducing falls in stock exchanges, spreading from Asia to other emerging countries, already hit by raw materials prices decline. Flight to quality has lead to lower interest rates. World growth could durably be affected by the financial markets instability and by the excessively high return rates required by mutual founds. The growth of the US economy would be dampened by external demand this year and internai demand next year (3.2 % in 1998, 0.5 in 1999). In the euro area, growth would settle at 2.8 % in 1998 and 1999, thanks to low interest rates and imports priées, despite a fall in the dollar.
- France : la croissance quand même ! - Division économie internationale, Carine Bouthevillain, Valérie Chauvin, Eric Heyer, Xavier Timbeau, Hervé Péléraux p. 101-139 La conjoncture française est sous le coup de deux forces contradictoires. D'une part, la demande intérieure est particulièrement dynamique. L'embellie de l'emploi permet à la consommation de se maintenir à un rythme de croissance soutenu. L'investissement accompagne ce mouvement et contribue à la bonne tenue de la demande intérieure. Ces éléments sont aujourd'hui inscrits dans les comptes nationaux et dans les diverses enquêtes de conjoncture. D'autre part, l'environnement international est fortement dégradé. La crise asiatique, les troubles du système financier mondial, la baisse du dollar et du yen, les risques de déflation sont à l'origine de cette dégradation. L'impact sur la croissance française est important, de l'ordre de 1,4 point de croissance. La conjonction de ces deux forces résulte en une croissance du PIB total de 3,0% en 1998 et de 2,7% en 1999. La vigueur de la demande interne permet ainsi la France de connaître, dans une situation interna tionale déprimée, un taux de croissance suffisant pour faire baisser le chômage. Il atteindrait, à la fin 1999, environ 11% de la population active (au sens du BIT) .France growth anyway Forecast for 1998-1999 Division Economie Française Two opposite forces are working on the French economy. On one side, internal demand is highly dynamic. Strong employment boosts households consumption and private investment follows. Up to date data clearly confirms this and allows to anticipate a future strong internal demand. On the other side, the foreign growth expériences a major slowdown. Asian crisis, international financial system problems, fall of the US dollar and Japanese yen, deflation threats explain the global turmoil. The impact on the French economy is important, about 1.4 point of GDP growth in 1998. Despite this, the balance of the two forces is positive for France (3.0 % in 1998 and 2.7 % in 1999) with a rate of growth in the two next years high enough to induce a diminution of unemployment. Rate of unemployed over active population should be around 11 % by late '99.
- Débat sur les perspectives - Division économie française, Michel Aglietta, Patrick Artus, Jean-Paul Fitoussi, Philippe Sigogne, Gérard Cornilleau, Olivier Passet, Christine Rifflart, Henri Sterdyniak p. 141-154 Les prévisions occupent une place particulière dans le débat public en économie. Elles sont généralement considérées comme des prédictions, qualifiées fréquemment optimistes ou de pessimistes, comme si elles dépendaient de l'humeur des équipes qui les réalisent. Certes, en un sens, la prévision est un art tant elle dépend des signes précurseurs que nous livre le présent, de l'interprétation des évolutions en cours, de la capacité des économistes de sélectionner les informations pertinentes parmi celles, multiples, dont intérêt est anecdotique. Mais elle est surtout une science puisqu'elle consiste à déduire des informations dont on dispose sur le présent une vision de l'avenir. Elle ne peut être formulée en dehors d'un cadre général d'interprétation, c'est-à-dire d'une théorie qui met en relation les informations que on privilégie et les variables que on cherche à prévoir. Parmi ces informations, certaines, cruciales, ne sont pas vraiment disponibles car, pour essentiel, elles dépendent de décisions à venir et qu'il n'existe pas vraiment de théorie permettant de déduire des données existantes ce que seront ces décisions. Il faut donc formuler des hypothèses alternatives et retenir celles qui nous paraissent les plus vraisemblables. Dès lors, les erreurs de prévision peuvent avoir au moins trois origines : une insuffisance d'information sur le présent, une mauvaise spécification théorique, la non réalisation de certaines hypothèses. De surcroît, il existe une incertitude irréductible au sens ou certains événements sont imprévisibles, alors même que leur conséquence sur l'activité économique est déterminante. Voilà pourquoi les chiffres associés à une prévi sion sont éminemment fragiles, qu'ils doivent être considérés comme conditionnels aux hypothèses que l'on formule, aux données dont on dispose et au cadre théorique dans lequel on raisonne. Il m'a donc semblé nécessaire que les prévisions réalisées par l'OFCE soient publiées en même temps qu'un débat autour de ces prévisions. Cela offre le double avantage de rendre explicite le doute inhérent à tout exercice de prévision pour les raisons déjà exposées, et de participer au pluralisme nécessaireà l'indépendance et au sérieux des études économiques. Une prévision, pour rigoureuse elle soit, n'est pas un exercice mécanique au terme duquel la vérité serait révélée, mais une « histoire » raisonnée du futur délivrant des résultats incertains. Il est utile d'en comprendre d'emblée les limites, pour ne point s'en servir comme d'un argument d'autorité, à l'instar de ce qui est trop fréquemment le cas.
- Pour une réforme du financement de la Sécurité sociale - Henri Sterdyniak, Pierre Villa p. 155-205 La réforme du financement de la Sécurité sociale est nécessaire en France. Elle devrait favoriser l'emploi en diminuant le poids des prélèvements portant sur le travail. Elle rendrait plus logique notre structure fiscale en faisant financer l'ensemble des prestations universelles ou de solidarité par des impôts assis sur tous les revenus des ménages ou des entreprises, et non plus par des cotisations assises spécifiquement sur les revenus d'activité. Pour réduire le poids des charges sociales, certains préconisent une forte baisse des dépenses de protection sociale. Depuis 1983, les problèmes récurrents de financement de la Sécurité sociale s'expliquent par la mollesse de la croissance et non par une dérive des dépenses. Il n'existe pas de réforme miracle qui permettrait de faire rapidement des économies importantes, sans frapper certaines couches de la population. La réforme devrait distinguer les impôts et les cotisations sociales, seules ces dernières ouvrant des droits. Elle a déjà été mise en oeuvre par la transformation des cotisations maladie salariés en CSG, ce qui augmenté le poids pesant sur les retraités et les revenus du capital et réduit celui portant sur les salariés. Des réformes similaires ont été proposées pour les cotisations employeurs. Leur baisse est une réforme souhaitable en période de chômage de masse. Mais il serait illusoire de la compenser par une hausse de la TVA. Il serait dangereux de la compenser par une hausse de la CSG ou une baisse des prestations sociales car un tel transfert pèserait sur la demande.Deux projets s'opposent : réduire les cotisations sociales sur l'ensemble des salaires, ce qui impose de faire contribuer le profit en élargissant l'assiette des cotisations à la valeur ajoutée, ou réduire les cotisations des seuls bas salaires. Les études macroéconomiques amènent à deux conclusions simples ; l'élargissement de l'assiette se justifie dans une situation de chômage keynésien ; la baisse des cotisations employeurs doit être ciblée sur les salariés non-qualifiés si effectivement les salariés qualifiés sont en situation de plein-emploi. Le rapport Chadelat préconise d'élargir l'assiette des cotisations sociales, mais suggère un mécanisme de modulation difficile à mettre en oeuvre ; le rapport Malinvaud propose de financer la baisse des cotisations sur les bas salaires par une hausse des cotisations sur les salaires élevés, en faisant le pari que dans dix ans le plein-emploi sera rétabli en France, sauf pour une frange de travailleurs non-qualifiés. La réforme que nous proposons finalement consiste en la fusion des cotisations salariés et employeurs pour les prestations retraites, le financement des prestations maladie et famille par une CSG-ménages assise sur tous leurs revenus et une CSG-entreprises assise sur la valeur ajoutée avec une exonération de la partie des salaires inférieure au SMIC.The case for reform of the social security financing in France Henri Sterdyniak and Pierre Villa In order to reduce the social contributions paid by labour income and to favour employment without reducing the level of social benefits, France needs a reform of social security financing. All universal or solidarity benefits must be financed by a tax based on ail households or firms incomes. Employées' contributions have already been replaced by an universal proportional tax. As regards employers' contributions, two projects have been suggested. A reduction of contributions on all wages compensated by a tax on capital income could induce firms to use more labour and less capital. A progressive contribution could reduce non-qualified salaries unemployment. According to macro econometric keynesian models, the first reform could increase the level of employment by 600 000 but according to general equilibrium models, the impact would be nil on employment and négative on GDP.
- Retraites de l'Europe - Alexis Dantec, Florian Pelgrin p. 207-228 L'Europe a des systèmes de retraite aussi différenciés que sa géographie : la situation démographique n'est pas le point de convergence souvent mis en évidence ; les parts des dépenses de retraite dans la protection sociale ou dans le PIB sont de grandeurs comparables mais restent disparates et n'évoluent pas dans les mêmes directions ; enfin les sources de financement et le niveau des pensions sont également très variables selon les pays considérés. Le principe de subsidiarité spécifie qu'une action ne doit être lancée au niveau communautaire si elle ne peut être réalisée de manière satisfaisante par les États membres, et peut donc être améliorée au niveau communautaire. En matière de retraite, il ne semble pas que l'Europe gagne, ni même n'arrive à court terme à instaurer des systèmes supranationaux. Au delà d'une utopique répartition entre les pays, la disparité des systèmes rend très difficile une réunion des régimes de base ou complémentaires. Il reste que si l'on considère que chacun des Etats ne réunit pas à assurer de « manière satisfaisante » la viabilité future de son système de retraite, le niveau communautaire pourrait intervenir pour protéger le travailleur européen. Les raisons avancées par la Commission pour qu'une directive instaurant des régimes de capitalisation s'impose à tous les États membres ne sont pas convaincantes. Même si la mobilité venait se développer, les traités multilatéraux de Sécurité sociale pourraient être améliorés. Le choix du système de retraite (entre commutatif pur et distributif pur) et des parts respectives de la protection sociale et des fonds de pension pour couvrir le retraité doivent rester du ressort national.The retirements of Europe Alexis Dantec and Florian Pelgrin The subsidiarity principle states that a decision should not be taken at the Community level if it does not better the one taken at the national level. The retirement is one of the most controversial economic and politic issue. One of the causes of difficulties for the pension system is the future ageing of the population. The lags between the European countries in this ageing process could hâve been used for a kind of mutualisation among them, but it seems to be an Utopia in the short term. The reasons given by the Commission for a generalisation of the capitalisation funding for pensions are not convincing. Even if the mobility would increase at a high level, the multilateral treaties of Social Security should be better. The choice for the kind of retirement system, especially the respective weight of capitalisation funding and pay-as-you-go, must remain a national decision.
- Réduction et flexibilité du temps de travail en Allemagne - Odile Chagny p. 229-284 Les modalités de la réduction du temps de travail en Allemagne ont été différentes dans les années quatre-vingt et dans les années quatre-vingt-dix. Dans les années quatre-vingt, l'objectif a été la réduction de la durée du temps plein avec préservation du niveau de vie. Les performances de productivité de l'Allemagne, la flexibilisation de la durée du travail et une utilisation plus intensive du capital étaient censées absorber la réduction du temps de travail. La réalité est restée en retrait par rapport aux intentions initiales. La compensation salariale n'a pas forcément été intégrale. L'examen des accords de branche et d'établissement montre que la mise en œuvre de la flexibilisation est restée limitée. L'absence de réglementation sur les heures supplémentaires a débouché sur un potentiel d'heures supplémentaires élevé. Les enquêtes disponibles sur la durée d'utilisation des équipements révèlent que les effets de taille et de structure minorent la durée d'utilisation des équipements de l'Allemagne en comparaison internationale, mais que la prédominance des entreprises travaillant avec une équipe n'a pas facilité le découplage entre durée du travail et durée d'utilisation des équipements. Le bilan en termes d'emplois de la réduction du temps de travail dans la seconde moitié des années quatre-vingt, tel qu'il ressort des études micro et macroéconomiques, est globalement positif. La modération salariale et une situation conjoncturelle favorable peuvent y avoir contribué. Enfin, le développement du temps partiel et des programmes de pré-retraites montrent que l'optique de préservation du niveau de vie associé à la réduction du temps de travail ne s'est pas appliquée à tous. Un changement de cap s'est opéré dans les années quatre-vingt-dix. La réduction généralisée de la durée du temps plein et la compensation salariale sont depuis 1993-1994 de moins en moins à l'ordre du jour. Le potentiel de flexibilité de la durée du travail s'est accru au niveau des accords de branche et d'établissement ; il a été favorisé par l'assouplissement du cadre législatif. La volonté de préserver l'emploi l'emporte désormais sur celle du maintien du niveau de vie et la stratégie de réduction du temps de travail privilégie le développement du temps partiel. Ces éléments s'inscrivent dans le cadre plus général de l'adaptation du modèle social allemand. Ils mettent surtout en relief les fragilités du mode antérieur de régulation.Reduction and flexibility of the working time in Germany Odile Chagny The reduction of the working time has been obtained through different manners between the eighties and the nineties. During the eighties, the reduction of the full time duration coupled with a safeguarding of standard of living was the main objective. Wage offsetting has not been fully implemented. The implementation of flexible working hours remained limited. The disconnection between working hours and the duration of equipment operation has not always been possible. There have been job creations. During the nineties, the protection of employment is considered as more important than stable standard of living. The development of part time work is encouraged. Central and firms agreements have more power to determine the degree of flexibility of the working time. A less constraining legislative framework has made it easier to achieve.
- Dans la tourmente financière - Division économie internationale de l'OFCE, Henri Sterdyniak, Hélène Baudchon, Odile Chagny, Bruno Coquet, Hervé Le Bihan, Catherine Mathieu, Olivier Passet, Christine Rifflart p. 9-99
- Fiche de lecture :__**__Jacques Lesourne, Le modèle français, grandeur et décadence - Jean-François Loué p. 285-296
- Réponse à une fiche de lecture - Michel Aglietta p. 297-300
- Summaries in English - p. 301-303