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Revue Revue française d'économie Mir@bel
Numéro vol. 12, no. 1, 1997
Texte intégral en ligne Accessible sur l'internet
  • Analyse économique de la notion de prix de prédation - Patrick Rey, Jean Tirole p. 3-32 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
    Cette note vise à éclairer le débat sur la notion de prix anormalement bas, les arguments avancés à ce propos recoupant notamment ce qu'il est convenu d'appeler des pratiques de prédation. En conséquence, il est proposé une synthèse sur : —la notion de prix de prédation, —ses problèmes de détection (peut-on l'appréhender indépendamment du constat d'une entente ou d'une position dominante ?) —les conditions de son appréhension, d'un point de vue économique, dans le droit de la concurrence. La première partie offre donc une synthèse de la littérature existante relative à la théorie économique de la notion de prix de prédation. Il en est ensuite discuté les implications en matière de politique de la concurrence. La conclusion rassemble les arguments évoqués et, à la lumière de la législation française actuelle, propose plusieurs conclusions susceptibles d'éclairer utilement le débat.
    This note aims at clarifying the debate on « abnormally low prices », where many arguments rely on predatory pricing behaviour. It thus offers a survey of : —predatory pricing theory, —detection problems (are they different from collusion or dominant position detection problems ?) —prédation in competition law and policy. The first part of this note thus surveys the existing literature on predatory pricing. Its implications for competition policy are then discussed. The concluding section gathers the economic arguments that have been presented and, in the light of the French competition law, offers some comments that may help clarifying the debate.
  • Analyse économique de la retraite par répartition - Olivier Davanne, Thierry Pujol p. 33-56 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
    Si chacun connaît le mode de fonctionnement des retraites par répartition, où les pensions versées sont financées intégralement par prélèvement sur les actifs, on évalue parfois mal l'ensemble des implications économiques d'un tel système. On sait que sur le long terme, si l'on considère les cotisations retraite comme une épargne forcée, la répartition offre un rendement égal à la somme du taux de croissance démographique et des gains de productivité. Comme ce rendement est généralement inférieur à celui disponible sur les marchés financiers, les cotisations retraite s'apparentent pour partie à des taxes. L'effet sur l'épargne fait l'objet de débats. La retraite par répartition a notamment des effets différents selon les catégories d'âge. Si la perspective de recevoir une retraite diminue probablement l'épargne des jeunes actifs, la répartition est favorable en revanche à l'épargne des retraités. Il paraît cependant probable que l'existence de la retraite par répartition ait un effet global net négatif sur l'épargne et le stock de capital. En répartition « pure », le patrimoine des retraités et des actifs est en effet largement composé de droits sur les régimes de retraite, qui sont sans contrepartie en termes d'investissements physiques ou financiers. Ces droits, la dette implicite du système de retraite, dépassent dans certains pays (dont la France) deux fois le montant du P.I.B., soit davantage que la totalité du patrimoine financier des ménages. Epargne et stock de capital s'en trouvent donc réduits. Mais quelles en sont les conséquences quant au bien- être des ménages ? Moins bien dotés en capital, les salariés sont moins productifs et leur rémunération réelle doit être plus basse. Cet argument est souvent employé par les défenseurs d'un système par capitalisation plutôt que d'un système en répartition. En sens inverse, la répartition présente l'avantage de protéger les retraités des risques financiers qu'ils sup- porteraient dans un système fonctionnant en capitalisation.
    Although one may be familiar with the guiding principles of a pay-as- you-go pension scheme, where benefits are financed out of contributions levied on workers, certain misconceptions may exist concerning the economic implications of such a pension system. It is well-known that, in the long run, the return on pay-as- you-go pensions - if contributions are regarded as forced savings —, is equal to the sum of the demographic growth rate and productivity gains. Since the return is usually lower than what is available with standard financial instruments, social security contributions are partly akin to taxes. The Pensions'impact upon saving is a moot point. Indeed, pay-as-you-go schemes have different implications on the various age groups. The prospects of receiving future pension benefits is a disincentive to save for young workers ; conversely, pensions increase retirees' wealth. Overall, it is likely that pay-as-you-go schemes have negatively affected savings and, subsequently, the stock of capital in the economy in most countries. Indeed, in a standard pay-as-you-go scheme, pensioners'assets mainly include certain entitlements, which correspond to the pension schemes'unfunded liabilities and are not matched by financial or real investments. These rights, the implicit debt of the pension system, exceed in certain countries (including France) twice the annual GDP, i.e. more than all the households'financial wealth... Saving and capital stocks in the economy are therefore reduced. What are the implications for households welfare ? With lower capital, workers are less productive and their salaries need to be lowered, as often stressed by those who advocate the introduction of fully-funded schemes. Conversely, pay-as-you-go systems have certain merits, and in particular, they shelter pensioners from the financial risks that they are faced with in a fully- funded scheme.
  • Le Débat sur les Retraites : Capitalisation contre Répartition - Olivier Davanne, Thierry Pujol p. 57-116 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
    Confrontée à un vieillissement marqué de sa population, la France doit continuer à ajuster son système de retraite. Compte-tenu de l'importance des enjeux, on ne peut qu'être surpris de l'absence de véritable débat public sur les orientations envisageables, ainsi que par une certaine méconnaissance des expériences étrangères. Cet article évalue les forces et faiblesses des solutions généralement proposées. Maintenir la répartition sur ces bases actuelles, ce serait condamner les générations futures à un système qui taxe fortement les jeunes actifs. Ceci rendrait notamment nécessaire un quasi doublement des cotisations, créant ainsi, au siècle prochain, le risque d'un conflit de générations qui verrait les jeunes refuser de financer les retraites des vieux. Face à ces risques, la capitalisation dans sa version pure est toutefois loin d'être une panacée. Peu efficace en matière de mutualisation des risques, elle laisse en particulier les épargnants exposés aux soubresauts des marchés financiers. La capitalisation pourrait-elle survivre à un krach boursier ou faudrait-il que la puissance publique intervienne pour compléter les revenus des retraités ? Pour pallier les défauts de ces deux systèmes, les auteurs insistent sur les avantages d'un système mixte, qui tente de combiner les avantages respectifs de la capitalisation et de la répartition. En premier lieu, les régimes de retraite par répartition devraient constituer des réserves de façon durable pour couvrir partiellement les engagements pris. Commencée suffisamment tôt, une telle politique permettrait à l'horizon de 2040 de réaliser des placements dans des actifs financiers à haut rendement pour des montants cumulés de l'ordre d'une fois le P.I.B. Les produits financiers de ces réserves contribueraient au financement des pensions au côté des cotisations versées par les actifs. Cela ne permettrait cependant pas d'éviter de nouvelles adaptations des régimes par répartition, notamment un allongement de la durée requise de cotisation pour bénéficier d'une retraite à taux plein. De telles réformes permettraient, sous l'égide de la puissance publique, de solvabiliser les régimes de retraite actuels tout en préservant un haut degré de mutualisation des risques, notamment financiers, entre générations.
    Faced with an ageing population, France will need to reform once again its pension system. Given what is at stake, an observer cannot help but be surprised by the lack of public debate on desirable policies and by a certain misunderstanding of foreign experiences concerning pension reforms This article tries to gauge the strengths and weaknesses of the pension reforms which are currently under consideration. Keeping the current pay-as-you-go pension system unchanged would be tantamount to imposing predatory taxes on workers in the future. Indeed, to achieve financial balance, pension schemes would almost have to double social security contributions. Such a doubling would create the risk of a conflict between generations where « young » workers would simply refuse to finance « elderly » ones. Alternatively, fully-funded schemes do not constitute a panacea. In particular, they do not provide an adequate tool for diversifying risks, thereby leaving households exposed to fluctuations in the financial markets. Could fully-funded pension schemes survive a market crash or would the government need to intervene to compensate retirees ? To compensate for the drawbacks of the two systems, the authors stress the advantages offered by a blended system, which combines fully-funded and pay-as-you-go features. Firstly, pay-as-you-go pension schemes need to build reserves for a long while in order to offset their existing liabilities. If initiated early enough, such a policy would allow to accumulate reserves to the order of 100 percent of GDP by 2040, invested in high-return assets. The return on these assets would, in addition to contributions levied on workers, contribute to the financing of pensions. The build-up of these reserves would not, however, suffice to rehabilitate existing pay-as-you-go schemes. Additional measures would still be unavoidable, including an increase in the duration of the contributing period required for full entitlement. Overall, under the government's aegis, reforms of this sort would allow for the restoration of the pension schemes solvability while preserving a high level of financial risk-sharing between generations.
  • Une comparaison France-Europe des taux de chômage. Structure de la population active et distribution des taux de chômage catégoriels - Yannick L'horty, Anne Saint-Martin p. 117-155 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
    La France est l'un des pays européens les plus touchés par le chômage, que l'on observe la hiérarchie des taux de chômage, celle des parts des chômeurs dans la population en âge de travailler ou celle des taux de sous-emploi (en tenant compte du temps partiel, volontaire ou contraint). Cette mauvaise performance ne s'explique pas par une structure défavorable de la population française en termes de niveaux de diplômes, de classes d'âge ou de sexe. La structure de l'offre de travail en France est dans une position intermédiaire vis-à-vis du reste de l'Europe, même si elle apparaît plus éloignée de celle des pays du nord de l'Europe continentale, que de celle des autres pays. Le handicap français ne réside pas davantage dans une structure particulière de la demande de travail. La dimension purement catégorielle du chômage n'explique qu'une fraction assez marginale des écarts de taux de chômage entre la France et les différents pays européens : le chômage d'inadéquation est un problème européen plus que national. Le chômage plus élevé de la France touche assez uniformément l'ensemble de ses segments de main-d'œuvre.
    France is one of the most dramatically concerned with high unemployment amongst European countries. This is true regardless of whether one looks at aggregate unemployment rates, at shares of unemployed workers in the total labor force, or at uderemployment rates (that take account of involuntary part-time employment). That poor performance cannot be explained in terms of mismatch. The structure of the French labor supply, in terms of either education level, age or gender, lies in a mean position vis-à-vis the rest of Europe (even though it seems to differ a bit more from those of Northern European countries). Neither can the French handicap be explained by a pecular feature of the demand for labor. Mismatch unemployment accounts for only a small fraction of the gap between the French and European unemployment rates. In fact, mismatch looks more like a European than like a national problem. Higher unemployment in France hits all categories of labor in a quite uniform way.
  • La redistribution fiscale face au chômage - Thomas Piketty p. 157-201 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
    En France, les stratégies de réforme fiscale pour lutter contre le chômage se sont concentrées sur la baisse du coût du travail à bas salaire, afin de relancer la demande pour ce type de travail. D'autres pays, dont les Etats- Unis, se sont concentrés sur la relance de l'offre de travail à bas salaire avec des mécanismes d'allégement d'impôts et de transferts fiscaux pour les bas salaires. En prenant en compte à la fois les facteurs d'offre de travail à différents niveaux de revenus et les facteurs de demande de travail pour différents types d'emplois, ce texte propose une analyse théorique de ces différents choix ainsi qu'une application numérique au cas français. La principale conclusion est que les taux marginaux effectifs extrêmement élevés (80-90 %) imposés en France sur la transition du non-emploi vers un emploi à bas salaire, même si on peut leur trouver des justifications théoriques, ont certainement atteint leurs limites, et qu'un nombre significatif de créations d'emplois pourrait être obtenu en les abaissant, par exemple en réduisant les cotisations sociales salariales au niveau du S.M.I.C. Les allégements de cotisations patronales sur les bas salaires des gouvernements Balladur-Juppé ne permettent d'agir que sur la demande, et non pas à la fois sur l'offre et sur la demande de travail à bas salaire, car ils disparaissent très vite s'ils sont utilisés pour augmenter le salaire net. Il est possible que cela en limite fortement l'efficacité.
    In France, the main objective of structural tax/benefit reform has been to cut low-wage payroll contributions, so as to cut labor costs and boost low-wage labor demand. Other countries, such as the U.S., have tried to boost low-wage labor supply by granting earned income tax credits to low-wage workers. This papers takes into account both demand and supply effects at different wage levels and offers a theoretical analysis of these strategies, as well as a numerical application to the french case. The main conclusion is that the very high effective marginal tax rates (80-90 %) imposed on low-wage workers in France, even though they admit some theoretical justifications, have problably reached their limits, and that significant job creations could be obtained by cutting those rates, for exemple by cutting the employee payroll tax imposed at the level of the minimum wage. The employer payroll tax cuts introduced by the Balladur-Juppé governments can only stimulate labor demand, since they vanish at a very high rate in case they are shifted to the employee. It is possible that this reduces dratiscally their efficiency.
  • Commentaires sur l'article de Thomas Piketty - Daniel Cohen, Dominique Bureau p. 203-213 accès libre
  • Y a-t-il des pistes pour la politique économique de la France ou de l'Allemagne ? - Patrick Artus p. 215-231 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
    Nous analysons les causes de la faiblesse de la croissance en France et en Allemagne ; malgré la vigueur des exportations, la faiblesse de la demande intérieure ne permet pas d'envisager une progression rapide de l'activité globale. L'investissement, en particulier, est insuffisant, ce qui ne résulte pas de la rigueur budgétaire en raison de ses effets probables non keynésiens. Un certain nombre de responsabilités peuvent être évoquées : niveau encore trop élevé des taux d'intérêt réels à long terme ; sous-évaluation du dollar qu'il faudrait pouvoir corriger après l'unification ; incapacité à financer les petites entreprises en forte croissance. En ce qui concerne le marché du travail, plus que d'une flexibilité accrue, les pays européens ont besoin d'une réforme de la structure de la fiscalité qui allège le coût du travail. Enfin, surtout en France, on peut s'interroger sur la pertinence du maintien d'une politique (ou d'une pratique) salariale restrictive, qui consiste à ne pas distribuer aux salariés les gains de productivité.
    We analyze the causes of the weakness of growth in France and in Germany : in spite of the strength of exports, the weakness of domestic demand does not permit a visible growth of overall activity. Investment in particular is insufficient, which is not a consequence of high fiscal policies because of the likely non-keynesian effects of these cies. A number of explanations can be listed. The level of real long term rates is still excessive, and the dollar is still undervalued, which should be corrected after monetary unification. The financing of small businesses and of startups is inefficient. As far as the labor market is concerned, continental European countries lack less an increased flexibility than a tax reform that would help reducing the cost of labor. Finally, specially in France, one can question the relevance of tight wage policies (or wage practices), which consist in not distributing productivity gains to wage earners.
  • Résumés - p. 233-239 accès libre
  • Auteurs - p. 241-243 accès libre