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Si les accords signés au début de 1984 par le Mozambique et l'Angola avec l'Afrique du Sud ont pris le monde entier à l'improviste, ils ont peu modifié la situation interne de la République elle-même et ont par conséquent peu contribué à restaurer la stabilité de la région. Selon toute probabilité, l'Afrique du Sud sera pendant de longues années encore l'acteur déterminant en Afrique australe et en façonnera l'évolution. Mais le mot d'ordre des voisins de l'Afrique du Sud n'est plus e luta continua (la lutte continue) mais primeira a defesa (la priorité est à la défense). L'Occident devrait s'en souvenir.

En dépit des lieux communs tenaces entretenus autour de leur passivité en Afrique, les Etats-Unis recherchent depuis dix ans sur ce continent une position dominante. En Afrique australe où ils mènent le jeu diplomatique, leur ambition est d'exclure l'URSS et de subordonner à leurs objectifs les puissances européennes. Dans la Corne, ils érodent graduellement l'influence traditionnelle de la Grande-Bretagne. En Afrique francophone enfin ils exercent une influence indirecte de plus en plus grande par l'entremise de la Banque mondiale et du FMI. A supposer même qu'ils ne disposent d'aucun projet politique concret, les Etats-Unis développent sur ce continent une logique aux effets peut-être diffus et graduels, mais non moins réels.

L'Afrique est devenue un pôle d'attraction particulier pour le colonel Kadhafi. Cet intérêt du chef d'Etat libyen a pour origine son isolement au sein du monde arabe, son inclination idéologique, ainsi que le zèle missionnaire de l'insécurité qui caractérisent sa révolution dans son propre pays. Ces mêmes forces l'ont poussé à rechercher en Afrique une volonté conforme à la sienne, aussi absolue qu'il a su la développer chez lui. Il n'a pas réussi dans ce domaine. En effet, le ressentiment qu'ont suscité ses méthodes et son inaptitude à le surmonter l'ont conduit à l'échec. Comme partout ailleurs, ces facteurs ont ruiné sa politique au Tchad. Isolé par son autocratie, il n'a pu se résoudre à modifier son attitude, ce qui a pour conséquence une perpétuelle répétition de la même tactique. Certains signes montrent toutefois que la sécurité, non seulement des Etats voisins, mais aussi du propre régime de Kadhafi, commence à se trouver affectée par les conflits régionaux dans lesquels il persiste engager son pays sans résultat véritablement utile.

Un certain nombre de coups d'Etat militaires se sont produits récemment en Afrique francophone, et l'on constate que les parties occidentale et centrale du continent noir sont maintenant beaucoup plus instables qu'elles ne l'étaient il y a seulement une dizaine d'années. Les problèmes de sécurité des pays africains francophones varient de l'un à l'autre et sont d'origines diverses : rivalités ethniques ou religieuses, tendances séparatistes, subversion importée par l'immigration, mécontentement inhérent aux difficultés économiques ou aux catastrophes naturelles. S'il ne semble pas que les alliances régionales puissent prévenir la résurgence des accès de violence ou les crises à l'intérieur de ces pays, des systèmes de sécurité établis au sein d'organisations économiques peuvent, par contre, offrir quelques espérances dans la mesure où ils renforcent la confiance réciproque et constituent des structures où peuvent se résoudre les conflits. La France peut continuer à jouer un rôle stabilisateur dans cette région en encourageant l'essor de telles organisations. Les sources profondes de l'instabilité dans ces Etats risquent, toutefois, de demeurer d'ordre purement domestique.

La conquête de l'espace est un projet qui mobilise les énergies américaines depuis le début des années 60. Une coalition formée de quelques scientifiques, d'anciens militaires et d'un certain nombre d'hommes politiques a semble-t-il réussi à convaincre les plus hautes autorités américaines de la possibilité de défendre les Etats-Unis à partir de l'espace contre les missiles balistiques soviétiques. Quelles sont les chances de succès d'un tel programme ? Quelles sont les forces qui y sont hostiles ou favorables au sein même des Etats-Unis ? Quelles peuvent être les réactions des puissances nucléaires moyennes devant les projets de défense anti-missiles ?

Les inquiétudes européennes face aux initiatives américaines en matière de BMD sont prématurées, car les Etats-Unis n'ont jusqu'ici développé leurs efforts de recherche et développement qu'en réponse aux activités soviétiques en la matière. Les craintes exprimées en Europe — une déstabilisation du statu quo militaire Est-Ouest, un effondrement de l'arms control, et la neutralisation soviétique des garanties américaines en Europe et des forces nucléaires britannique et française — sont compréhensibles. Mais l'Europe et l'Amérique peuvent et doivent se préparer à travailler ensemble pour surmonter ces risques et concevoir une politique de sécurité adaptée aux menaces changeantes et aux contraintes technologiques.

Alors que le traité de 1967 avait prévu une démilitarisation de la Lune et des autres corps célestes et interdit la mise sur orbite d'armes de destruction massive, on a assisté depuis lors à une recrudescence des activités militaires dans l'espace. Les perspectives ouvertes par la défense contre missiles avec des armes à énergie dirigée et la mise au point de systèmes d'armes anti-satellites font craindre que l'équilibre sur lequel repose la dissuasion est en passe de se rompre et que les deux grandes puissances vont entrer dans une nouvelle phase de la course aux armements. Dans l'état actuel des recherches et du développement des armes nouvelles aux Etats-Unis (l'URSS se montre d'une grande discrétion sur les résultats qu'elle a obtenus dans ce domaine), il n'est pas possible de se prononcer sur la faisabilité d'un système efficace de défense contre missiles, mais on peut considérer que les techniques de destruction des engins assaillants qui exigent des explosions nucléaires comme source d'énergie contreviendraient aux stipulations du traité de Moscou d'août 1963 et du traité limitant le déploiement des ABM de mai 1972. Il importe donc de négocier des arrangements qui permettraient de faire l'économie d'une course aux armements dont les risques sont considérables.