Contenu du sommaire : Les syndicats à l'épreuve de l'Europe
Revue | Politique européenne |
---|---|
Numéro | N°27, hiver 2009 |
Titre du numéro | Les syndicats à l'épreuve de l'Europe |
Texte intégral en ligne | Accessible sur l'internet |
Les syndicats à l'épreuve de l'Europe
- Préambule. Les syndicats à l'épreuve de l'Europe - Patrick Hassenteufel et Jean-Marie Pernot p. 7
- Européanisation du syndicalisme, vieux débats, nouveaux enjeux - Jean-Marie Pernot p. 11
- Le salaire, au coeur de l'eurosyndicalisme ? - Anne Dufresne p. 47 Historiquement, au plan national, le salaire est au cœur de l'identité syndicale. Or, à l'échelle de l'Union européenne, les euro-syndicats ont longtemps abandonné le salaire, acceptant la convergence sur la modération salariale des années 1980. L'article se propose d'analyser la façon dont depuis, l'eurosyndicalisme tente de (re) construire l'européanisation salariale : par des initiatives de coordination des négociations collectives nationales dans les secteurs, et plus récemment encore, par la mise en place d'une nouvelle revendication : le salaire minimum européen. Ces stratégies parviendront-elles à redonner aux syndicats une légitimité suffisante leur permettant une intervention sur les salaires au niveau supranational ?Euro-Unionism and the wage At national level, the wage has historically been central to union identity. However, at European Union level, the Euro-unions relinquished the topic of pay for many years, accepting the convergence on wage restraint that emerged in the 1980s. The present article will analyse the ways in which they are now seeking to (re) construct the Europeanisation of the wage via initiatives to coordinate national collective bargaining in the sectors, and more recently, by formulating a new demand for a European minimum wage. Will these strategies enable the Eurounions to acquire sufficient legitimacy to intervene in the field of wages at the supranational level?
- L'Europe, nouvelle figure de la crise syndicale : Les syndicats face à la libéralisation du rail en Europe - Nadia Hilal p. 75 Dans le secteur ferroviaire, la directive européenne 440 de 1991 a représenté une révolution dans le mode d'organisation et de gestion du rail. Ce transfert de compétences au niveau européen a-t-il engendré un changement dans les représentations et stratégies syndicales ? Trois temps de la réponse syndicale européenne doivent être distingués. Tout d'abord, nous montrerons l'incapacité des organisations syndicales européennes à adopter une lecture commune des enjeux européens. Ensuite, avec l'accélération du processus de déréglementation les syndicats ont progressivement pris conscience de la nécessité d'agir à l'échelle communautaire. Ce deuxième temps est celui de l'organisation de mobilisations cheminotes transnationales. Enfin, aujourd'hui, devant la faible influence de ces mobilisations sociales européennes sur l'agenda communautaire, les organisations syndicales sont revenues à des stratégies nationales, la gestion des conséquences sociales de la libéralisation dans le cadre étatique, et peinent à faire face à l'éclatement corporatiste du syndicalisme national lui-même.European Union: a new cause of Trade Union crisis? European Trade Unions facing rail liberalization Since the adoption of the first European Directive for the restructuring of railway systems (the 91/440 directive) in 1991, European rail monopolies are undergoing sweeping changes. It is not an exaggeration to compare these changes to a revolution in structure and management. This article examines whether the EU policy of rail liberalisation has contributed to changes in European Trade Union strategy and discourse. Three stages within the Trade Union response need to be analysed. Firstly, we will study the Trade Union inability to give a unified interpretation of EU challenges. Secondly, the acceleration of liberalisation has meant that Trade Unions have gradually become aware of the need to take action at the European level. This has led to the organisation of European annual social protests. Finally, due to the limited influence of these social movements on the European Union agenda, Trade Unions are reverting back to national solutions, in an attempt to mitigate the social costs of deregulation.
- La fabrique de syndicalistes "européens" : une enquête sur les formations européennes de la CES - Anne-Catherine Wagner p. 105 La Confédération européenne des syndicats a développé dès les années 1980 une politique de formation qui vise à « européaniser » les syndicalistes. L'étude de ces activités de formation conduit à dégager un mode spécifique d'acculturation à l'Europe. Les formations européennes visent moins à transmettre une identité syndicale commune qu'un ensemble de compétences techniques et sociales, afin de faciliter l'accès des syndicalistes aux univers institutionnels européens. Bien ajustées aux propriétés d'une élite syndicale européenne, elles permettent l'accumulation d'un capital social européen et elles consolident des réseaux transnationaux. Mais les conditions restrictives de diffusion et d'appropriation de ces ressources syndicales sont aussi révélatrices des contradictions liées à l'européanisation du syndicalisme.The Making of « European » Trade Unionists: an Investigation Into the Training Courses of the ETUC Since the 1980s, the European Trade Union Confederation has organized training courses which aim to « Europeanize » trade unionists. This article analyses these as a specific mode of acculturation in Europe. The European training courses do not consist in inculcating an identity but in transmitting technical and social skills. They allow for the accumulation of social capital and consolidation of European networks. But they also reveal several contradictions of the Europeanization of trade unionism.
- Le syndicalisme dans la "gouvernance" européenne. Formes de représentation et pratiques de défense des intérêts sociaux en questions - Hélène Michel p. 129 Le Livre blanc sur la gouvernance européenne en 2001 a promu comme principe de bonne gouvernance la participation de la société civile au processus d'élaboration et de mise en œuvre des politiques européennes. Ce faisant, il a invité les différentes institutions à mettre en place un « dialogue civil » sur le modèle du « dialogue social », comme si la frontière entre « civil » et « social » était claire et renvoyait à des organisations distinctes. Prenant pour objet les conceptions et les expériences du « dialogue civil » menées au Comité économique et social européen et à la DG Emploi et affaires sociales, cet article montre comment les syndicalistes ont été amenés à redéfinir la nature des intérêts qu'ils représentent et la manière de les défendre au niveau européen. Contrairement à une interprétation qui fait du tournant participatif une forme d'affaiblissement des organisations syndicales, désormais considérées comme des groupes d'intérêt parmi d'autres sans plus de légitimité ou de prérogatives, l'enquête sur les pratiques de représentants d'intérêts sociaux montre à quelle condition il peut devenir une opportunité pour des syndicalistes soucieux de promouvoir une conception moins institutionnelle du syndicalisme et de ses formes d'intervention au niveau européen.Trade-unionism and the new European governance: the issue of the representation and the defence ofdefending social interests The White paper on the European governance of 2001 advocated the participation of the civil society to the devising and implementing of European policies as a principle. Thus, it encouraged the different institutions to set up a « civil dialogue » like the « social dialogue », as if the borders between the two were definite and referred to distinct organisations. Based upon the conceptions and experiences of the « civil dialogue » carried out at the European Economic and Social Committee and at the Directorate General for Employment, Social Affairs and Equal Opportunities, this article shows how the unionists have had to redefine the nature of the interests they represent and the way they defend them at the European level. Contrary to the analysis which makes the workers' participation a weakening of the trade unions henceforth seen as mere interest groups among others with no more legitimacy or prerogatives, the survey on the practices of groups representing social interests show that under some conditions, it can become an asset for unionists concerned about promoting a less institutional idea of unionism and its means of intervention at the European level.
- La participation des syndicats européens aux mobilisations altermondialistes : cohésion renforcée ou miroir de la diversité ? - Loïc Moissonnier p. 153 Cet article traite de la participation des syndicats au mouvement altermondialiste au niveau européen. Nous nous intéressons exclusivement aux stratégies des syndicats membres de la CES et de la CES elle-même vis-à-vis de ce mouvement de contestation transnationale, qui est visible en Europe lors de contre-sommets et Forums sociaux depuis la fin des années 1990. Les syndicats participant au mouvement altermondialiste se réclament-ils d'une stratégie commune qui aurait pour but de renforcer la cohésion syndicale derrière la bannière de la CES ? Bien que les décisions de participer (ou pas) aux mobilisations altermondialistes reflètent une grande diversité dans les conceptions du syndicalisme en Europe, les syndicats et la CES elle-même cherchent dans ce cadre à apparaître comme un acteur homogène. Mais ces tentatives restent extrêmement limitées du fait de la participation distanciée de la CES et de son manque de leadership. Du point de vue syndical, l'émergence du mouvement altermondialiste révèle donc les faiblesses du syndicalisme s'organisant à l'échelle européenne tel qu'il a été construit depuis les années 1970.European Trade Unions and the Global Justice Movement: Strengthened cohesion or reflection of diversity? This article deals with the participation of Trade Unions in the Global Justice Movement at the European level. We examine exclusively the strategies of the Unions that are members of the ETUC and of the ETUC itself towards this transnational movement of contention, which has been visible in Europe and in the world through several counter-summits and Social Forums since the end of the nineties. Do the Unions in the Global Justice Movement refer to a common strategy which is aimed at reinforcing the cohesion of unionism behind the banner if the ETUC ? Although the decisions to participate to the movement (or not) reflect a great diversity regarding different conceptions of unionism in Europe, the Unions and the ETUC try to appear as a homogeneous actor within it. But these attempts remain very limited by the distanced participation of the ETUC and its lack of leadership. From a unions' viewpoint, the emergence of the Global Justice Movement reveals the weaknesses of organizing unionism at a European level, as it has been built since the seventies.
- Le débat sur l'eurocentrisme des organisations syndicales internationales : une perspective des Amériques - Thomas Collombat p. 177 Cet article traite de l'évolution de l'influence des syndicats européens sur les organisations syndicales internationales depuis la fin de la guerre froide. À cette fin, nous étudions les perceptions de syndicalistes latino-américains afin de mieux cerner la façon dont la domination européenne est vécue par les acteurs censés la subir. Cette démarche nous amène à affirmer que si l'influence européenne est toujours forte, elle a changé de nature. Elle est aujourd'hui marquée par l'expérience de l'eurosyndicalisme, qui a permis aux syndicats européens de développer à la fois une pratique de l'internationalisme syndical et des stratégies qu'ils cherchent à exporter. Nos observations en Amérique latine nous amènent également à conclure que lorsque des syndicats coordonnent étroitement leurs activités sur le plan régional, leur influence sur le mouvement syndical international en sort renforcée.The Debate on Eurocentrism in the International Labour Movement: A view from the Americas This article deals with the evolution of European influence on International Labour Movement Organizations since the end of the Cold War. The perceptions of Latin American unions'officials are analyzed, in order to understand how they react to a supposed European domination. The author argues that if European influence is still strong, its nature has changed. It has been transformed by the experience of euro-unionism, which allowed European trade unions to practice labour internationalism and provided them with strategies they can export. Observations made in Latin America also lead to the conclusion that when unions closely co-ordinate their activities at the regional level, their influence on the international labour movement is thus strengthened.
- La construction de l'Etat social minimal en Europe - Noëlle Burgi p. 201 Considéré comme un type idéal, l'État social « minimal » représente le modèle vers lequel tendent à converger les systèmes nationaux de protection sociale en Europe. Cela se traduit par la mise en question des politiques redistributives à visée universaliste au profit de politiques d'assistance aux pauvres qui, encadrés strictement, subissent un système de contraintes et de contrôles étroits. Afin de soutenir l'hypothèse que la généralisation des prestations sous conditions de ressources ne s'analyse pas comme une finalité « naturelle », une problématique centrée sur le pouvoir politique tente de cerner l'action de l'État et pas seulement sa réaction à la contrainte extérieure. Quoique verrouillée par le « nouveau constitutionnalisme » européen, l'intervention étatique contribue de façon décisive au minimalisme social, altère les fondements du pacte social démocratique et met en danger les équilibres sociaux essentiels.The Emerging Minimal Social State in Europe As an ideal-type, the « minimal » social state has become the model towards which national social protection systems are converging in Europe. This translates as a shift from the universalistic redistributive aims of the social state to policies of management of the poor who are tightly bound in administrative webs of constraint and control. Starting from the hypothesis that the generalisation of means-tested benefits cannot be understood as a « natural » adaptation to global market forces, this article reintroduces political power as an important variable, with the aim of identifying state action and not merely its reaction to external constraints. Though state autonomy is constrained by the « new constitutionalism » in Europe, state intervention has contributed in decisive manner to social minimalism, altering the foundations of the post-1945 social democratic pact and undermining the balance of social forces that it generated.
Chantiers de recherche
- Les gardes-frontières au travail. La construction de la frontière européenne - Sara Casella-Colombeau p. 233
Lectures croisées
- Nouvelles publications sur la politique internationale de l'Union européenne : nouvelles recherches ? - Franck Petiteville p. 241
Lectures critiques
- Jean-Baptiste Harguindéguy, "La Frontière en Europe, un territoire ? Coopération transfrontière franco-espagnole", Paris, L'Harmattan, 2007, 324p. - Marilyn Revaud p. 251
- Kenneth Dyson, "The Euro at ten, Europeanization, Power and Convergence", Oxford, Oxford University Press, 2008, 472p. - Hélène Caune p. 259
- Simon Hix, Abdul Noury et Gérard Roland, "Democratic Politics in the European Parliament", Cambridge, Cambridge University Presses, 2007 - Selma Bendjallah p. 265
Auteurs
- p. 275