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Revue Revue Française de Science Politique Mir@bel
Numéro 50e année, n°3, 2000
Texte intégral en ligne Accessible sur l'internet
  • Articles

    • La théorie de la « vitre cassée » en France. Incivilités et desordres en public - Sébastian Roché p. 387-412 accès libre avec résumé avec résumé en anglais avec indexation
      Le rôle des incivilités dans la dynamique de l'insécurité est de plus en plus discuté dans la lit­térature étrangère spécialisée. S. Roche rappelle la situation scientifique de la question, pro­pose une définition et présente des résultats nouveaux à partir d'enquêtes quantitatives fran­çaises menées ces dernières années dans plusieurs villes (à Grenoble en 1990, Saint-Etienne en 1995, Romans et Paris en 1998). On y vérifie que la présence d'incivilités est un facteur lié au sentiment d'insécurité et à la méfiance vis-à-vis des institutions publiques. Ces résultats sont ensuite présentés comme des éléments d'un modèle plus général qui fait l'hypothèse que la mul­tiplication des incivilités pousse les individus les plus sensibles à ces désagréments à chercher à les fuir en déménageant. Mais seule une petite proportion y arrivant, les autres sont frustrés et se replient, tout en cherchant isolément à attirer l'attention des « responsables » (du loge­ment, de la police, de la commune). Mais déjà la confiance qu'ils placent en eux décroît. Un « triangle des incivilités » se constitue : il combine une forte fréquence des incivilités, une crainte qui favorise le repli et une faible confiance dans les institutions. Il est alors nécessaire de se demander si certaines des conditions qui peuvent favoriser le développement de la délin­quance ne sont pas réunies.
      Le rôle des incivilités dans la dynamique de l'insécurité est de plus en plus discuté dans la lit­térature étrangère spécialisée. S. Roche rappelle la situation scientifique de la question, pro­pose une définition et présente des résultats nouveaux à partir d'enquêtes quantitatives fran­çaises menées ces dernières années dans plusieurs villes (à Grenoble en 1990, Saint-Etienne en 1995, Romans et Paris en 1998). On y vérifie que la présence d'incivilités est un facteur lié au sentiment d'insécurité et à la méfiance vis-à-vis des institutions publiques. Ces résultats sont ensuite présentés comme des éléments d'un modèle plus général qui fait l'hypothèse que la mul­tiplication des incivilités pousse les individus les plus sensibles à ces désagréments à chercher à les fuir en déménageant. Mais seule une petite proportion y arrivant, les autres sont frustrés et se replient, tout en cherchant isolément à attirer l'attention des « responsables » (du loge­ment, de la police, de la commune). Mais déjà la confiance qu'ils placent en eux décroît. Un « triangle des incivilités » se constitue : il combine une forte fréquence des incivilités, une crainte qui favorise le repli et une faible confiance dans les institutions. Il est alors nécessaire de se demander si certaines des conditions qui peuvent favoriser le développement de la délin­quance ne sont pas réunies. ?The « broken window » theory in france. public incivilities and disorders The role of incivilities in the dynamic of insecurity is increasingly debated in the foreign specialized literature. The article reviews the academic state of the issue, suggests a definition and presents new data from French quantitative surveys carried out in recent years in several cities (Grenoble, 1990 ; Saint-Etienne, 1995 ; Romans and Paris, 1998). The data show that the pre­sence of incivilities is a factor linked to the feeling of insecurity and to the lack of confidence in public institutions. The findings are then presented as elements of a more general model which hypothesizes that the increase in incivilities pushes the individuals most sensitive to incivilities to try to escape them by moving elsewhere. But since only a small minority manages to do so, the others are frustrated and withdraw while trying individually to call attention of those in charge (of housing, the police, the municipality). But their confidence in them decreases. An « incivility triangle » is formed, combining a high level of incivilities, a fear that encourages withdrawal, and low confidence in institutions. It becomes then necessary to ask if some of the conditions favoring the development of delinquency are not met simultaneously.
    • Les limites de la souveraineté. Les changements juridiques dans les cas d'immigration en France et aux États-Unis - Charles P. Gomes p. 413-438 accès libre avec résumé avec résumé en anglais avec indexation
      Le contrôle exclusif de l'État sur son territoire est la caractéristique principale de la souverai­neté. La tendance commune de considérer la souveraineté comme un concept statique est conti­nuellement remise en question par les flux migratoires internationaux. Contrairement aux approches théoriques prédominantes qui renforcent le rôle de la capacité matérielle et de la logique utilitaire dans la définition des politiques souveraines de l'État, cette étude souligne le rôle indépendant des « normes » dans la configuration de ces politiques. Le principal objectif est de montrer comment, aussi bien en France qu'aux États Unis, le contrôle de l'État sur les flux migratoires est non seulement le résultat des choix politiques du Gouvernement mais aussi la conséquence des devoirs formels de l'État, imposés par les tribunaux nationaux, de respecter la connotation libérale de la Constitution qui garantit un statut légal à toutes les personnes indépendamment de leur nationalité. Au lieu de renforcer l'importance du régime des Droits de l'homme seulement sur la base d'une analyse de discours, il s'agit ici de montrer les microfon­dations de ces normes en analysant, au niveau national, le glissement de la politique juridique d'une tendance nationaliste vers une tendance plus libérale.
      The limits of sovereignty. the changes of immigration law in france and the united states The exclusive control by the state over its territory is the main feature of sovereignty. The common tendency to consider sovereignty as a static concept has been continuously challenged in theory and in practice by international migration flows. Contrary to mainstream theoretical approaches that overemphasize the role of material capacity and utilitarian logic in the defini­tion of state sovereign policies, the study stresses the independent role of « norms » in forging these policies. The main purpose is to show that both in France and the US, state control of migration flows is the result not only of political government choices but also of the formal duties of the state, imposed by national courts, to respect the liberal features of its Constitution, which provide legal status to all persons, independently of their nationality. Instead of empha­sizing the importance of the human rights regime only on the basis of a discourse analysis, the study seeks to highlight the microfoundations of these norms by analyzing, at the domestic level, the shift of judicial policies from a nationalist to a more liberal position.
    • L'intercommunalité, un pouvoir inachevé - Remy Le Saout p. 439-461 accès libre avec résumé avec résumé en anglais avec indexation
      Le développement récent de l'intercommunalité laisse à penser que ce pouvoir local est entré dans un processus d' autonomisation par rapport aux autres formes de pouvoirs locaux. L'étude sociologique des conditions et des logiques d'accès à la fonction de président d'établissement public de coopération intercommunale montre que c 'est avant tout sur le terrain municipal que se joue et se conquiert la présidence. Autrement dit, c 'est un ensemble de ressources accumu­lées sur d'autres terrains politiques et surtout sur le marché municipal qui fonde la légitimité des présidents. Aussi, loin d'être autonome, la distribution du pouvoir intercommunal reste relativement subordonnée aux autres formes de pouvoirs locaux.
      Intercommunality [in france] : an uncompleted power The recent development of inter-communal institutions suggests that this local power has entered a process of autonomization vis-à-vis other forms of local power. The sociological study of the conditions and systems of access to the office of president of an intercommunal cooperation public establishment shows that it is especially in the municipal arenas that the presidency is played out and won. In other words, the presidents' legitimacy is based upon a set of resources accumulated in other political arenas, and especially in the municipal market. Far from being autonomous, the distribution of intercommunal power remains relatively subordi­nate to other forms of local power.
  • Notes de recherche

    • L'espace politique des électeurs français à la fin des années 1990. Nouveaux et anciens clivages, hétérogénéité des électoratsé - Pascal Perrineau, Jean Chiche, Brigitte Le Roux, Henry Rouanet p. 463-488 accès libre avec résumé avec résumé en anglais avec indexation
      En utilisant l'analyse géométrique des données, cette étude tente de sortir des méthodes multi-variées classiques où l'on ne saisit que des être de raisons (électorat, facteurs, variables) pour réintroduire les individus au cœur de l'analyse. À partir de l'enquête postélectorale du CEVIPOF réalisée du 26 au 31 mai 1997, l'étude s'efforce de situer individuellement les élec­teurs dans l'espace des valeurs et des enjeux économiques et sociaux. L'analyse géométrique des données permet de dégager trois axes principaux rendant le mieux compte de la répartition des individus et des clivages d'attitudes et d'opinions qui les divisent. Le premier axe, dont la variance est la plus élevée, oppose un ensemble d'électeurs aux « attitudes ouvertes » à l'autre (que cet autre soit étranger, l'Europe ou la mondialisation), et un ensemble d'électeurs aux « attitudes fermées ». Cette opposition ne recoupe pas l'opposition droite-gauche. Les deux autres axes opposent les électeurs sur le plan des attitudes sociales et sur le plan des attitudes vis-à-vis du libéralisme. On retrouve alors une opposition droite-gauche plus classique. Sur tous ces axes, la dispersion des électeurs de chacun des grands électorals est très forte. La variance intra (à l'intérieur des électorals) est toujours plus importante que la variance inter (entre les électorals). Cette analyse géométrique des données de l'enquête postélectorale de 1997 permet ainsi de mettre en valeur deux éléments décisifs pour comprendre aujourd'hui le vote en France. D'une part, le vote agrège, derrière un même bulletin déposé dans l'urne, des valeurs très diversifiées et même contradictoires. D'autre part, l'espace politique des électeurs est assez largement différent de l'espace politique construit par les forces politiques. Ce déca­lage entre la « demande » des électeurs en termes de valeurs et d'attitudes et « l'offre politique », telle qu'elle est configurée par le système politique, est certainement un des élé­ments forts de la crise contemporaine de la représentation politique.
      The french electoral space at the end of the 1990s. new and old cleavages and electoral heterogeneity Through Geometric Data Analysis, this study attempts to move away from classic multivariate methods in which only rational constructs (voters, factors, variables) are used to reintroduce individuals into the heart of the analysis. Using the 26-31 May 1997 CEVIPOF postelectoral survey, the study seeks to locate voters individually in the space of values and economic and social issues. Geometric Data Analysis produces three major axes that account best for the dis­tribution of individuals and the attitude and opinion cleavages that divide them. The first axis, which has the highest variance, pits one set of voters with « open attitudes » towards « others » (foreigners, Europe or globalization) against another set, displaying « closed attitudes ». This contrast does not coincide with the right-left opposition. The other two axes oppose voters on the level of social attitudes and attitudes vis-à-vis market liberalism. The more classic right-left opposition appears here. On all axes, the dispersion of members of each of the major electo­rates is very high. Intra-variance (within the electorate) is always higher than inter-variance (among electorates). This geometric analysis of the 1997 postelectoral survey data highlights two elements decisive for understanding current French voting behavior. On one hand, voting aggregates very diversified and even contradictory values on single ballot papers. On the other hand, the voters' political space is different from that constructed by political forces. This dis­parity between the voters' «demand» in terms of values and attitudes and the «political supply » structured by the political system is certainly one of the strong factors of the contem­porary crisis of political representation.
    • Mesure de la volatilité électorale en France (1993-1997) - Nonna Mayer, Daniel Boy, Marc Swyngedouw p. 489-514 accès libre avec résumé avec résumé en anglais avec indexation
      L'étude mesure la mobilité électorale entre deux scrutins (élections législatives de 1993/prési-dentielle de 1995 ; présidentielle de 1995/législatives de 1997) à partir de deux enquêtes du CEVIPOF. Elle innove par sa définition extensive de la mobilité, incluant tous les choix pos­sibles, non-vote et vote blanc compris, et par la distinction qu'elle fait, à l'aide d'un modèle log-linéaire, entre les trajets statistiquement significatifs et la mobilité « normale » induite par les différences de taille entre électorats. On en retiendra que le taux de mobilité observé est élevé : un électeur sur deux environ change de vote entre deux élections. Mais celle-ci pour l'essentiel résulte de va-et-vient entre vote et abstention, ou de mouvements internes à chaque camp. La transgression de la frontière gauche-droite, malgré la percée d'un parti comme le Front national, reste marginale. Pour gagner une élection, il s'agit moins d'attirer les électeurs de l'autre bord que de convaincre son propre camp d'aller aux urnes.
      Measuring electoral volatility in france, 1993-1997 The study, based on two CEVIPOF surveys, measures electoral mobility between two elections (1993 Parliamentary/1995 Presidential elections ; 1995 Presidential/1997 Parliamentary elec­tions). It innnovates by its extensive definition of mobility, taking into account all possible choices, including non voting and invalid votes, and by differentiating, with the help of a log-linear model, between statistically significant mobility and « normal » mobility generated by the differences in the size of electorates. It shows that the rate of mobility is fairly high : half of the voters change their vote in two successive elections. But most of it consists in back and forth movements between voting and non voting, or in internal mobility, within the Left or the Right camps. The transgression of the Left/Right divide is exceptional, despite the rise of a party such as the Front national. To win an election, the problem is not so much to attract voters from the opposite side as to convince those who are on one's own side to go to the polls.
  • Lectures critiques

  • Revue des revues

  • Informations bibliographiques - p. 553-570 accès libre