Contenu du sommaire : Les conflits pétroliers : 1970-1971

Fondements historiques et politiques des conflits pétroliers contemporains, par Jean-Jacques Berreby Les conflits pétroliers contemporains sont nés du système même des concessions, que les pays producteurs ont assimilé à l'exploitation coloniale. Avec la fin de la décolonisation politique, les revendications sont devenues plus pressantes pour modifier les anciennes relations. En deux décennies - 1951-1960 et 1961-1970 - les pays producteurs sont passés de la confrontation à la négociation et du partage fifty-fifty à la participation. Les conflits récents ont démontré l'importance du politique dans les relations économiques pétrolières. Contrairement à l'opinion des experts les plus réputés, l'évolution des marchés pétroliers a été déterminée par les facteurs politiques et sociologiques et non par les données techniques et économiques. Le rôle des pays producteurs s'accroît - celui des compagnies va se modifier. Les pays consommateurs doivent faire face au danger d'une collusion des pays producteurs et des compagnies. L'Europe, en particulier, doit se méfier d'une alliance entre les pays arabes et les compagnies américaines. [Revue française de science politique XXII (6), décembre 1972, pp. 1191-1204.]

La crise pétrolière internationale (1970-1971) : essai d'interprétation, par Taki Rifaï Les arguments avancés habituellement pour "expliquer" la crise pétrolière de 1970 et les accords sur les prix conclus à Téhéran et Tripoli au début de 1971 semblent peu convaincants ; l'analyse technocratique des motivations de la crise et de ses résultats souligne le caractère non économique des prix pétroliers. Le système des prix pétroliers au Moyen-Orient semble avoir été conçu et mis en place, dès l'origine, en fonction de certains impératifs stratégiques des Etats-Unis en matière d'énergie, visant à assurer la stabilité des prix intérieurs américains à un niveau élevé. Les accords de 1971 semblent découler de l'ébauche d'une nouvelle stratégie américaine face à la très grave crise énergétique qui guette les Etats-Unis dont la moitié environ des besoins pétroliers vers 1980 pourrait bien devoir être couverte par les importations. [Revue française de science politique XXII (6), décembre 1972, pp. 1205-1236.]

L'épisode de Téhéran, par Louis-Jean Duclos Dans l'immédiat les accords de Téhéran satisfont les intérêts des Etats-Unis, des Etats producteurs et des compagnies. En pâtissent les pays uniquement consommateurs. Mais l'épisode de Téhéran est aussi l'étape d'une évolution tendant à faire des Etats du Moyen-Orient qui ne sont encore que "pétrolifères" des Etats pétroliers, producteurs à part entière. L'ensemble des Etats industrialisés n'a pas à craindre de cette évolution tant que la région du golfe Persique reste politiquement divisée. [Revue française de science politique XXII (6), décembre 1972, pp. 1237-1255.] in process whereby the Middle East States which are at present only oil- bearing will become oil producing States in their own right The industrialised States have nothing to fear from this trend as long as the Persian Gulf area remains politically divided .Revue fran aise de science politique XXII 6) décembre 1972 pp 1237-1255.

Le pétrole libyen au service de l'unité arabe ? par Hubert Breton Longtemps instrument docile des compagnies pétrolières, la Libye du roi Idriss en devenant celle du colonel Kadhafi fait la démonstration de sa puissance d'Etat souverain dégagé de l'influence occidentale. Par l'utilisation diversifiée de pressions le gouvernement révolutionnaire obtient en septembre 1970 une augmentation du prix du pétrole et un contrôle sur son extraction. Ces premiers accords conçus comme la juste réparation des préjudices subis dans le passé sont suivis en mars 1971 de nouvelles exigences et d'une nouvelle victoire. Cette politique de récupération des richesses nationales, qui se veut aussi un instrument de lutte contre Israël, au service de l'unité arabe, trouve ses limites dans antisovietisme du régime. [Revue française de science politique XXII (6), décembre 1972, pp. 1256-1275.]

Le conflit pétrolier franco-algérien, par Nicole Grimaud Après seize mois de négociations, le gouvernement algérien annonce le 24 février 1971 la prise de la majorité au sein des sociétés pétrolières françaises opérant sur son sol ainsi que la nationalisation intégrale des gisements de gaz naturel et des pipelines. La crise est coûteuse financièrement pour les deux parties bien qu'à court terme l'opération s'avère avantageuse pour l'Algérie. Au plan politique, cette crise illustre l'ambiguïté et les contradictions qui n'ont cessé d'exister entre la politique de coopération et la politique pétrolière françaises. [Revue française de science politique XXII (6), décembre 1972, pp. 1276-1307.] THE FRANCO-ALGERIAN OIL CONFLICT NICOLE GRIMAUD After sixteen months of negotiations the Algerian Government announced on 24th February 1971 that it was taking up majority holdings in French oil companies in Algeria and nationalizing natural gas deposits and pipelines The crisis is financially costly for both countries though Algeria is reaping short term benefits from the operation Politically the crisis illustrates the ambiguity and contradictions that have always existed between co-operation policy on the one hand and oil policy on the other .Revue fran aise de science politique XXII 6) décembre 1972 pp 1276-1307.

L'Amérique latine face aux nouveaux aspects du problème pétrolier, par Pierre Gilhodes Trois politiques pétrolières sont possibles au Venezuela : laisser libre cours à la libre entreprise c'est-à-dire aux compagnies pétrolières américaines, éliminer ces dernières et prendre en charge directement l'exploitation ou, position intermédiaire, chercher à conserver sur place le maximum de richesses engendrées par le pétrole. C'est cette dernière politique qu'ont adoptée les trois gouvernements constitutionnels vénézuéliens depuis 1958. Aujourd'hui, les compagnies américaines peuvent craindre qu'à l'instar de certains Etats du monde arabe, le Venezuela et les autres pays pétroliers d'Amérique latine ne radicalise cette politique "réformiste". Revue française de science politique XXII (6), décembre 1972, pp. 1308-1328.]