Contenu du sommaire
Revue | Revue Française de Sociologie |
---|---|
Numéro | 2001, 42-4 |
Texte intégral en ligne | Accessible sur l'internet |
- Adolescence, post-adolescence, jeunesse : retour sur quelques interprétations - Olivier Galland p. 611-640 Adolescence, post-adolescence, jeunesse, ces termes sont souvent employés de façon proche pour désigner la période de la vie qui s'intercale entre l'enfance et l'âge adulte. Pourtant, ces choix engagent, parfois de manière implicite, à des interprétations sociologiques distinctes que cet article tente d'éclairer. Pour entamer cette réflexion, on part d'un article de Parsons qui, en 1942, proposait une des premières analyses sociologiques de la « youth culture » en définissant l'adolescence comme une culture de l'irresponsabilité. Plus tard, l'apparition du thème de la « post-adolescence » prolongera cette idée. D'autres travaux proposeront au contraire de distinguer radicalement adolescence et jeunesse, définie comme « un nouvel âge de la vie ». La relecture critique de cette dernière thèse conduit néanmoins à la réviser sur deux points importants : d'une part, la « jeunesse », si elle est bien distincte de l'adolescence telle que la définissait Parsons, ne constitue pas, autant qu'on le pensait, une phase de la vie clairement séparée de celles qui l'encadrent ; sa caractéristique principale est plutôt d'établir une continuité entre elles. D'autre part, les travaux de comparaison internationale menés depuis montrent que les dispositions culturelles comme les dispositifs institutionnels concourant à organiser cette phase de la vie restent extraordinairement divers d'un pays à l'autre.Olivier Galland : Adolescence, post-adolescence, youth : a re-appraisal on a number of interpretations. Adolescence, post-adolescence, youth are terms which are often used in similar ways to refer to the period of time between childhood and adulthood. However the exact choice of term can sometimes implicitly involve a distinct sociological interpretation, an aspect which this article will attempt to clarify. To initiate this reflection is an article by Parsons who, in 1942, put forward one of the first sociological analyses of « youth culture », defining adolescence as a one of irresponsibility. Later this idea was to be prolonged with the appearance of the post adolescence theme. Further work proposed, on the contrary, to differentiate clearly between adolescence and youth, the latter being defined as « a new age of life ». A critical reading of this particular thesis however leads to the reinterpreting of two important points : firstly, « youth », if clearly distinguished from adolescence, as defined by Parsons, does not represent, to the extent that was once imagined, a phase in life, clearly separate from those around it ; its main characteristic is rather to provide a continuity between the different phases. Secondly, comparative work carried out on an international basis has since shown that the cultural tendencies as well as the institutional setup which influence this phase of life show a very wide diversity among the different countries.
- L'impact des mouvements écologistes, antinucléaires et pacifistes sur les politiques publiques. Le cas des États-Unis, de l'Italie et de la Suisse, 1975-1995 - Marco Giugni p. 641-668 Après un regard rapide sur l'état actuel de la recherche sur les conséquences des mouvements écologistes, antinucléaires et pacifistes en nous centrant sur les travaux qui s'intéressent aux effets de la mobilisation sur les politiques publiques et mettant en évidence certaines variables explicatives majeures, nous donnons un aperçu des mobilisations sur ces thèmes aux États-Unis, en Italie et en Suisse. Pour conclure, nous proposons une approche comparative et longitudinale de l'impact des mouvements sociaux sur les politiques publiques. Selon cette approche, cet impact peut difficilement être autonome, mais découle de l'articulation de la contestation et de trois autres facteurs : la structure des opportunités politiques (notamment les alliances politiques), la position de l'opinion publique par rapport aux enjeux soulevés par ces mouvements et la proéminence de ces enjeux. Nous confrontons arguments théoriques et données empiriques concernant ces mobilisations dans les trois pays de 1975 à 1995. Notre analyse montre comment ces trois facteurs interviennent de manière décisive, mais différenciée selon les mouvements, pour modifier la relation entre contestation et politiques publiques.Marco Giugni : The impact of green, anti-nuclear and peace movements on public policy. The situation in the United States, Italy and Switzerland between 1975 and 1995. The main interest of this article is the political impact of the green, anti-nuclear and peace movements. After a rapid review of the current status of research on the consequences of social movements, more particularly on the works relating to the effects of various movements on state policy, and by putting forward some of the major variables to explain what must be taken into account when studying the impact of social movements on state policy, we take a quick look at the various movements on the themes of the environment, nuclear energy and peace in the United States, Italy and Switzerland. To conclude, we propose both a comparative and longitudinal study which systematically examines the impact of social movements on public policy. Following this approach, the impact can hardly be autonomous, but is often the result of a combination of protest with three other factors : the structure of political opportunity (in particular of political alliance), the position of public opinion in relation to the undertakings of these movements and the prominence of these undertakings. Our theoretical arguments are confronted with the empirical results obtained for green, anti-nuclear and peace movements in the three countries over the period 1975 to 1995. Our analysis shows the impact of these three factors in a decisive way, but differently, depending on the movement, so as to modify the relation between protest and public policy.
- Résistances à l'infériorisation sociale chez les personnes en situation d'illettrisme - Agnès Villechaise-Dupont, Joël Zaffran p. 669-694 Le discours dominant sur l'illettrisme est marqué par la souffrance et la « détresse linguistique globale », auxquelles s'ajoute parfois l'image d'un illettré plongé dans un « isolement social ». Doit-on accepter cette représentation de l'illettrisme ? Circonspecte, notre posture sociologique invite à renverser le problème en ne considérant plus la personne « illettrée » uniquement sous l'angle de son déficit mais aussi sous celui de ses capacités d'action et d'intégration sociales. L'objet de cet article sera de montrer que l'illettrisme n'est pas synonyme de violence ou d'exclusion. Il s'agit plutôt d'une situation mettant en jeu deux dimensions sociales : celle du handicap et des risques d'infériorisation ou d'indignité sociales d'une part, celle des ressources pratiques et des résistances à la stigmatisation développées par les personnes illettrées d'autre part. Pour étayer cette hypothèse, nous sommes allés à la rencontre des acteurs afin d'approcher les différentes façons de concevoir, penser, dire et vivre l'illettrisme, et avons mené une enquête par entretiens auprès de 69 personnes en situation d'illettrisme vivant dans la région bordelaise. Au terme de cet article, on constatera que l'illettrisme n'est pas forcément ressenti comme un handicap majeur par ceux qui sont désignés par cette étiquette, et que leur expérience ne se limite pas à de la honte mâtinée de culpabilité.Agnès Villechaise-Dupont, Joël Zaffran : Resisting feelings of social inferiority for people in situations of illiteracy. The principal remarks concerning illiteracy refer to the suffering and « global language distress » to which is sometimes added the image of an illiterate person in a world of « social isolation ». Must one accept this representation of illiteracy ? Circumspectly, our sociological position is to turn the problem around, no longer considering the « illiterate » person solely from the point of view of his/her deficit but also from that of his/her capacity to act and to integrate socially. Consequently, the aim of this article is to show that illiteracy is not synonymous with violence or exclusion, but a situation where two social elements are engaged : that of a handicap where there are risks of inferiority or social indignity, and that of practical resources where the illiterate person develops a resistance to this stigmatization. To support this hypothesis, we encountered those concerned in order to examine how illiteracy is conceived, thought and spoken about and experienced. During the study which took place in the Bordeaux region, 69 people in a situation of illiteracy were interviewed. As a conclusion to this article it can be observed that illiteracy is not always felt to be a major handicap by those identified as such and that their experience is not limited to a feeling of disgrace crossed with guilt.
- Religion et économie. Mauss, Simiand et le programme durkheimien - Philippe Steiner p. 695-718 Le propos de cet article est de montrer que l'œuvre de Durkheim contient deux programmes de recherche en matière de sociologie de l'économie. Le premier met l'accent sur la critique des catégories économiques ainsi que sur les institutions grâce auxquelles fonctionne le système de marchés ; le second, à peine esquissé dans "Les formes élémentaires de la vie religieuse", suggère qu'il existe une relation entre la religion et l'économie. Chacun de ces deux programmes sera développé par les durkheimiens, Simiand (et Halbwachs) pour le premier, Mauss pour le second ; néanmoins, il est important de noter que, dans les années trente, ces deux programmes convergent dans les travaux consacrés au don et à la monnaie. Finalement, l'article suggère que la perspective durkheimienne peut servir à prolonger le questionnement wébérien quant à la relation entre l'éthique religieuse et le monde économique moderne.Philippe Steiner : Religion and the economy. Mauss, Simiand and the Durkheim programme. The aim of this article is to show that the works of Durkheim contain two research programmes on sociology and the economy. The first programme is concerned by the appreciation of economic categories and by the institutions which allow the market system to function. The second programme, barely outlined in "Les formes élémentaires de la vie religieuse" suggests there is a relation between religion and the economy. Both programmes were developed by other Durkheimians : Simiand (and Halbwachs) for the first, and Mauss for the second. It is however important to observe that in the 1930s, both programmes came together to work on donation and currency issues. To finish, the article puts forward the idea that the Durkheim perspective could serve to prolong Weberian questioning on the relation between religious ethics and the modern economy.
- Échange marchand, échange non marchand - Alain Testart p. 719-748 À la suite de quelques travaux, l'article commence par proposer un critère de démarcation non ambigu pour différencier le don de l'échange. Nous soutenons ensuite que l'anthropologie a très généralement conçu comme « don » des phénomènes qui relevaient de la catégorie de l'échange. Mais l'échange prend en Mélanésie et dans certaines sociétés traditionnelles d'Afrique et d'Amérique des formes très différentes de celles qui sont connues dans nos sociétés. C'est ce que nous appelons un « échange non marchand ».Alain Testart : Exchange of commodities and others forms of exchange. Following previous works, the present paper starts by offering a clear definition of the category of gift as opposed to that of exchange. It is argued that social anthropology has generally confused the two categories, describing as « gift » what is in reality exchange. But in Melanesia as in some traditional societies of Africa or America, the exchanges take specific forms, different from those known in modern societies. The particular aim of this article is to define this kind of exchange which is neither an exchange of gifts nor an exchange of commodities.
- Tirer les enseignements de l'affaire Teissier - Claude Dubar, Daniel Filâtre, Jean-Yves Trépos p. 749-751
Les livres
- Boudon Raymond, Études sur les sociologues classiques. - Guy Rocher p. 753-755
- Goldthorpe John H., On sociology. Numbers, narratives and the integration of research and theory. - Nathalie Bulle p. 755-760
- Kaufmann Jean-Claude, Ego. Pour une sociologie de l'individu. Une autre vision de l'homme et de la construction du sujet. - Marc Loriol p. 760-762
- Gruson Pascale, Dulong Renaud (dir.), L'expérience du déni : Bernard Mottez et le monde des sourds en débats. - Jean-René Tréanton p. 762-764
- Godechot Olivier, Les traders. Essai de sociologie des marchés financiers. - Philippe Steiner p. 764-766
- Terssac Gilbert de, Tremblay Diane-Gabrielle (dir.), Où va le temps de travail ? - Marie Buscatto p. 766-769
- Durand Claude, Pichon Alain (coord.), Temps de travail et temps libre. - Norbert Amsellem p. 769-772
- Poujol Geneviève (dir.), Education populaire : le tournant des années soixante-dix. - Monique Segré p. 772-774
- Gasparini Rachel, Ordres et désordres scolaires. La discipline à l'école primaire. - Cédric Frétigné p. 774-776
- Robert Philippe, Le citoyen, le crime et l'État. - Renaud Fillieule p. 776-778
- Marchetti Anne-Marie, Perpétuités. Le temps infini des longues peines. - Gilles Chantraine p. 778-781
- Perrot Martyne, Ethnologie de Noël. Une fête paradoxale. - Monique Pinçon-Charlot p. 781-782
- Caplow Theodore, Vennesson Pascal, Sociologie militaire. Armée, guerre et paix. - François Gresle p. 782-784
- Résumés (anglais, allemand, espagnol) - p. 785-790
- Tables 2001 - p. 791-795