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Revue | Revue historique |
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Numéro | no 636, octobre 2005 |
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Renseigner et surveiller en France au XIXe siècle
- Les fonds secrets ou la méfiance légitime. L'invention paradoxale d'une "tradition républicaine" sous la Restauration et la monarchie de Juillet - P. Karilla-Cohen p. 731 Un État démocratique, ou au moins libéral, peut-il légitimement espionner ses citoyens ? Cette question, qui reste d'actualité, a été posée pour la première fois, en France, sous la Restauration et la monarchie de Juillet, régimes qui affirmaient vouloir rompre avec les pratiques de la police de Fouché. La tension entre la recherche de l'efficacité de la surveillance et les droits des individus est visible dans les débats parlementaires sur les fonds secrets, qui ont lieu tous les ans à partir de 1818. Il s'agit ici d'observer comment s'invente le débat annuel sur les fonds de police et comment, à l'issue de deux à trois décennies de luttes parlementaires, l'usage de l'espionnage a finalement été considéré comme légitime.Is a democratic – or at least liberal – state allowed to spy its own citizens ? In France, this topical question appeared for the first time during the Restoration and the July Monarchy, political systems that officially wanted to break with the practices of the political police invented by Fouché. The strained relations between an effective surveillance and the rights of the citizens can be observed by reading the parliamentary debates that took place each year from 1818 to 1848 about the police secret founds. This article deals with the origins of that annual parliamentary debate and shows how, after two or three decades of political struggles, the use of spies has finally been considered as absolutely justified.
- Aux origines de la "guerre des polices". Militaires et policiers du renseignement dans la République (1870-1914) - S. Laurent p. 767 Les rares études sur les services de renseignement ont eu tendance à privilégier soit l'activité des organes militaires lors de crises, soit à mener des analyses purement institutionnelles. Dans le cas français, une telle attitude amène à oublier le fait que l'appareil de renseignement a été bâti au cours du XIXe siècle sur des bases d'abord policières et fait négliger l'étude cruciale des relations entre services de renseignement militaires et policiers. L'étude de ces liens permet de déplacer la perspective et d'envisager l'étude du renseignement d'un point de vue global – en l'occurrence, celui de l'organisation (ou celui de la non-organisation) par l'État de son appareil d'information et de renseignement. Confrontation de l'action de deux administrations du renseignement, l'histoire des relations entre services de renseignement militaires et policiers dans un contexte juridique et réglementaire ne délimitant pas strictement leurs domaines d'intervention respectifs amène aussi à une étude de deux corps, celui des officiers de renseignement et celui de la police spéciale. Cet article a pour objet de montrer la nécessité de croiser l'histoire des institutions, des corps professionnels et des individus afin de présenter l'objet dans sa pleine dimension historique.The sparse studies on intelligence services are inclined to privilege either the activities of the military organizations during crises, or to only analyse the institutions. This trend leads, for the French side, to forget that the intelligence service have been in fact built during the XIXth century on a major police-oriented background and bring the historians to neglect the necessary in-depth study of the relationship between army and police information and intelligence networks. A study focused on these relationships would modify the prospect of the field and would allow to consider the research on intelligence from a global point of view, that is to say organization (or non-organization) by the State of its information and intelligence services. By confronting the activities of both structures, the historical analysis of their respective and mutual roles should integrate the legal and statutory contexts – which do not demarcate precisely their proper field of interventions –, leads also to a detailed study of both professional corps, i.e. intelligence officers and specialized police ones. The aim of this paper is to emphasize the necessity of confronting the history of the institutions, of professional corps and of individuals so to build a global image of the subject in its full historical dimension.
- De la vérité en amitié. Une phénoménologie médiévale du sentiment dans les commentaires de l'Ethique à Nicomaque (XIIIe-XVe siècle) - B. Sère p. 793 Au fondement de la réflexion éthique des médiévaux sur l'amitié et le lien social se tient l'assertion aristotélicienne : l'amitié est une bienveillance qui se dit comme telle. Elle exige une visibilité et ne souffre pas de demeurer cachée. L?amitié se dit donc par un ensemble de signes visibles, véritable grammaire de gestes qui la signifie publiquement à la face de la société. Pourtant, nul n?est dupe : le comportement amical ne correspond pas nécessairement à l'intention d?amitié dans la société du paraître qu?est la société médiévale. Mieux : parce que l'amitié vraie ne pourra jamais être vérifiée ni expertisée, Walter Burley suggère de fonder le lien social sur la confiance et le crédit, voire la charité et la foi, là où Buridan renverse la proposition en l'enracinant plus horizontalement dans la bonne foi et l'altruisme.At the basis of the ethic reflexion of the medieval thinkers about friendship et social relation is the aristotelian assertion : friendship is a goodwill which must be mutually recognized. It needs visibility and doesn?t suffer to stay hidden. Friendship is also to be claimed by visible signs, sort of gestual grammar which is significant at the visual level of the society. However, no doubt that there is no adequation between friendly behaviour and friendly intention in the social system of appearances of the medieval society. Moreover, true friendship can never be prooved, that why Walter Burley suggests to root the social relation in the truth and even in charity and faith, when Buridan suggests to root it more horizontally in the altruism.
- Un songe pour triompher. La décoration de la galère royale de don Juan d'Autriche à Lépante (1571) - S. Edouard p. 821 En 1568, durant les négociations pour la constitution d'une Sainte Ligue, Philippe II ordonna la construction d'une galère royale pour son jeune frère, don Juan d'Autriche, qu'il venait de nommer capitaine général de la mer. L'année suivante, l'humaniste sévillan Juan de Mal Lara élabora le programme iconographique pour la décoration des poupes extérieure et intérieure de la galère. Les décorations renvoyaient au discours messianique des Habsbourg, avec, entre autres, des représentations de la quête de la Toison d'or par Jason. Les tableaux et les statues de la poupe servaient à légitimer l'ambition hégémonique de Philippe II. Toutefois, l'essentiel du programme était destiné au capitaine don Juan pour le guider sur le chemin des vertus, à travers la représentation d'un combat intérieur pour le triomphe des vertus chrétiennes, les seules pouvant vaincre le Turc infidèle.In 1568, as negociations were taking place to form the Holy League, King Philip II of Spain ordered the construction of a royal galley for his young brother don John of Austria he had just named captain general. During the following year, the Sevillian humanist Juan de Mal Lara elaborated the iconographic program to decorate the inner and outer parts of the galley's stern. These decorations, among which were images of Jason's quest for the golden fleece, referred to the Hapsburg's messianic discourse. The paintings and statues placed on the stern of the boat were meant to legitimate Philip II's hegemonic ambition. Nevertheless, the program representing a spiritual battle, was mainly intended to guide don John of Austria on the path to victorious christian virtues. Only such virtues could insure a final victory over the unfaithful Turks.
- Les fonds secrets ou la méfiance légitime. L'invention paradoxale d'une "tradition républicaine" sous la Restauration et la monarchie de Juillet - P. Karilla-Cohen p. 731
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