Contenu du sommaire
Revue |
Revue de l'OFCE (Observations et diagnostics économiques) Titre à cette date : Observations et diagnostics économiques |
---|---|
Numéro | No 1, 1982 |
Texte intégral en ligne | Accessible sur l'internet |
- Présentation de la revue - Jean-Marcel Jeanneney p. 5-7
Chronique de conjoncture
- Après deux chocs pétroliers : diagnostics et perspectives - Philippe Sigogne, Monique Fouet p. 9-49 La phase de récession qui a suivi en Occident le second choc pétrolier aura duré plus de deux ans. Certes moins brutal que le premier, ce choc est advenu dans une situation conjoncturelle moins critique. Mais il a frappé des économies structurellement affaiblies et s'est trouvé amplifié par une concurrence internationale exacerbée, alors que la marge de manœuvre des politiques économiques s'était rétrécie. Cette phase paraît toucher à sa fin. Une baisse des taux d'intérêt aux Etats-Unis y permettra en effet une lente reprise de l'activité, mais risque de relancer l'inflation. La dépréciation probable du dollar vis-à-vis du deutschmark qui s'ensuivra desserrerait les contraintes pesant en Europe sur les politiques économiques. Elle permettrait à une reprise modérée de s'amorcer, bien qu'on ne puisse guère compter sur une forte croissance des importations mondiales, car la demande des pays non industrialisés fléchira. L'économie française a moins bien réagi que ses partenaires aux prélèvements externes. La baisse relative des profits intervenue à la suite du premier choc pétrolier s'est encore accentuée après le second. Jusqu'au printemps de 1981, les restrictions budgétaires ont accentué le freinage de l'activité, tandis qu'une contrainte monétaire moindre qu'à l'étranger permettait aux entreprises de recourir davantage à des financements externes. La nouvelle politique suivie depuis le milieu de 1981 a légèrement accru les ressources des particuliers et ainsi, les dépenses de consommation. Mais malgré l'amélioration de l'activité et des résultats d'exploitation, les entreprises ont réduit leurs investissements. En l'absence de perspectives de croissance mieux assurées, il est à craindre qu'elles en réalisent peu dans les mois à venir si les circonstances extérieures obligent à maintenir des taux d'intérêt élevés, alors que les différentiels de prix avec l'étranger s'aggraveraient.Western economies have been undergoing a recession over the past two years. Though in a more favourable cyclical phase when hit by a second oil shock, less severe than the first, they had been structurally weakened. Moreover, international competition was more fierce while there was less scope for adaptation in policy. The recession now seems to be bottoming out. A fall in interest rates will allow activity to pick up slowly in the United States, though it might rekindle inflation. The depreciation of the Dollar against the Deutschmark which will probably ensue, would loosen restrictions on European economic policies. Any resulting upturn in activity will however be moderate, strong growth in world imports being unlikely since demand from non-industrialised countries will fall off. French performance in reaction to the external shocks of the seventies compares poorly with that of partner countries. The squeeze on profits which had followed the first oil crisis was reinforced by the second. Up to spring 1981, tight fiscal policy accentuated the sluggishness of activity. Compared with other countries, a less restrictive monetary stance enabled firms to use a greater degree of external funding. The new policy, implemented from mid-1981 onwards, has slightly increased personal incomes and thereby consumer spending. However, despite improvements in activity and profitability, firms have reduced their investment levels. In the absence of better growth prospects, these are unlikely to rise in the coming months, particularly if external circumstances necessitate continued high interest rates while inflation remains higher than in other industrialised countries.
- Après deux chocs pétroliers : diagnostics et perspectives - Philippe Sigogne, Monique Fouet p. 9-49
- Relancer sans déraper - Jean-Marcel Jeanneney p. 51-60 Les politiques actuellement menées pour lutter contre le chômage et l'inflation s'inspirent de deux conceptions opposées: l'une ne fait confiance qu'aux mécanismes de la concurrence libérée de la plupart de ses entraves, l'autre affirme la nécessité d'en corriger les effets par de constantes interventions de l'État. La politique française actuelle, inspirée de cette seconde thèse, entend relancer l'investissement. Elle implique qu'on réduise des incertitudes paralysantes. Elle peut aussi utilement accroître le pouvoir d'achat des consommateurs et des entreprises dans la mesure où des capacités de production importantes sont inutilisées. Mais si les créations monétaires ne sont pas prudemment dosées, elles risquent d'accélérer la hausse des prix et de creuser le déficit de la balance des comptes. On ne peut desserrer cette contrainte extérieure qu'en accroissant, par une action de longue haleine, l'autonomie économique de la France et en persuadant les autres membres de la CEE de promouvoir des reprises simultanées de leur croissance économique. Quoique l'on fasse, la rapidité des progrès techniques imposera des mutations rapides. Il importe d'obtenir l'adhésion des Français aux changements inéluctables.Two opposing schools of thought underlie recent inflation and unemployment policies. One believes unhindered competition should be promoted, whereas for the other it has undesirable effects calling for continual government intervention. Current policy in France is of the second type and aims at stimulating investment. Reducing uncertainty has to be the first step in this direction. Meanwhile, the purchasing power of both households and businesses can safely be increased, given the low ratio of capacity utilisation. However, there is a risk of higher inflation and bigger current deficits if the money supply is not carefully controlled. To avoid these risks, France must, in the long run, achieve greater economic independence and, in the short term, promote a synchronised recovery of EEC economies. In any case, the speed of technical progress will impose rapid transformations. It is thus important to obtain popular support for the inevitable changes.
- Politique conjoncturelle et investissement dans les années 70 - Patrick Artus, Pierre-Alain Muet, Agnès Picard, Claude Peyroux p. 61-90 Cet article examine l'influence, sur les fluctuations conjoncturelles de la période 1973-1980, des politiques économiques ayant affecté directement ou indirectement l'investissement des entreprises. La première partie de l'article propose un bilan des études économétriques de l'investissement réalisées au cours de ces dernières années. Ces études ont fait apparaître le rôle prépondérant de l'évolution anticipée de la demande (ou effet d'accélération) dans les fluctuations conjoncturelles et la croissance de l'investissement privé. Celui-ci a été en outre stimulé à moyen terme par l'augmentation continue du salaire réel et freiné par les hausses brutales du prix de l'énergie. Les autres variables ont eu une influence plus conjoncturelle due soit à leurs propres fluctuations (taux d'intérêt réel), soit au caractère plus transitoire de leur influence (encadrement du crédit, profits réalisés). La deuxième partie est consacrée à une description des politiques fiscales, monétaires et budgétaires (investissement du secteur public) qui ont affecté l'investissement depuis la première crise pétrolière. La troisième partie évalue les effets de ces politiques sur l'ensemble des grandeurs macro-économiques, au moyen du modèle trimestriel METRIC élaboré à l'INSEE. La conclusion que l'on peut tirer de l'étude de la période 1973-1980 est que les politiques fiscales et monétaires affectant l'investissement n'ont pas, en raison principalement de leurs délais d'action, contribué à stabiliser les fluctuations conjoncturelles au cours de cette période. Bien qu'elles aient été prises généralement au moment où la conjoncture semblait les rendre nécessaires, elles ont souvent produit leurs effets à un moment inopportun. A contrario, la politique budgétaire (investissement public) lors de la récession de 1974-1975, et surtout la très forte croissance de l'investissement des grandes entreprises nationales sur l'ensemble de la période, ont contribué non seulement au soutien de l'activité économique, mais aussi par leurs effets induits, à celui de l'investissement privé.This paper concerns economic policies directly or indirectly affecting business' investment. Their contribution to movements in the trade cycle is examined for the period 1973-1980 The first part of the paper is an assessment of the econometric studies of investment made over recent years. These have revealed that the anticipation of changes in the level of aggregate demand played an essential role in cyclical movements of activity and private investment growth. The latter was stimulated, in the medium term by the continuous rise of real wage levels and slowed down by sudden energy price increases. Owing either to their own variations (e.g. real interest rates) or to the more transitory nature of their impact (e.g. credit restrictions, profits), other variables had a more short-lived influence. The second part is a description of the monetary and fiscal policies which have affected investment since the first oil crisis. The third part assesses the macroeconomic effects of these policies using the INSEE quarterly model « METRIC ». Looking at the period 1973- 1980, we can conclude that taxation and monetary policy did not have a counter-cyclical influence, mainly owing to time lags. Although stabilising measures were taken when they seemed necessary, they often produced their effects at unsuitable moments. By contrast, government spending policy seems to have been effective. Public investment during the 1974-1975 recession, together with very strong growth in the investment levels of nationalised industries, upheld activity in general and thereby the level of private investment.
- Politique monétaire passive ou politique économique? - Jean-Paul Fitoussi p. 91-103 Dans les années récentes, la politique économique dans la plupart des pays de l'OCDE semble avoir modifié à la fois ses objectifs et les moyens utilisés pour les atteindre. L'inflation est considérée comme le déséquilibre majeur et une politique monétaire restrictive comme le seul instrument qui permette de la réduire. Dans cet article, on s'interroge sur le bien-fondé d'une telle position, sur les hypothèses théoriques et les faits d'expérience qui servent à la justifier. La seule explication des unes et des autres permet d'en mesurer la fragilité. La rationalité des anticipations des agents économiques occupe une place importante dans l'analyse, mais elle ne constitue pas, comme le soutiennent les tenants du conservatisme monétaire, une raison suffisante pour renoncer à une politique active. Un programme alternatif est alors proposé, fondé sur une double action, concernant la croissance et le coût de production. Il existe en effet des raisons fondamentales, liées au comportement d'investissement des entreprises, et à la nature des rendements, qui permettent de penser qu'une telle politique aurait des effets favorables sur les prix et l'emploi. Une politique monétariste restrictive se révélerait alors contre-productive, aggravant dans le court ou moyen terme le problème qu'elle cherche à résoudre (l'inflation), sans bien sûr résoudre le problème dont elle nie l'existence ou la pertinence sociale (le chômage).In recent years, most OECD countries have altered the aims of economic policy and the means used to attain them. Inflation is considered to be the main source of déstabilisation and tight monetary policy the only suitable instrument for dealing with it. This paper questions the theoretical and factual evidence brought in support of this position. Merely setting out the arguments reveals their weakness. The rationality of expectations plays an important role in the analysis. However, this does not, as those upholding monetary conservatism would have it, justify giving up a policy of active intervention. There follows an alternative programme concerning growth and production costs. There are fundamental reasons, based on investment behaviour and yields, for thinking that such a policy would have a favourable effect on prices and employment. Tight monetary policy would then be seen to be counter-productive. It would aggravate the problem it is trying to deal with (inflation), without of course resolving the problem whose existence or social relevance it ignores (viz. unemployment).
- Les Français redécouvrent les vertus du micro-social - Michel Forsé p. 105-114 Plusieurs signes permettent de penser qu'aujourd'hui les Français valorisent les univers sociaux de petite dimension. La dé-syndicalisation, une certaine dépolitisation à l'école et, en sens inverse, une croissance sans précédent de la création d'associations destinées à gérer des pans entiers de la vie sociale, participent certainement à ce mouvement. De même on observe que la famille fait preuve d'une extraordinaire vitalité ; non seulement les individus (jeunes ou vieux) continuent de valoriser l'univers familial, mais ils semblent s'y réfugier de plus en plus. La croyance en un progrès technologique toujours plus intense soutenant une économie de croissance a fait long feu. Aujourd'hui, les individus se replient davantage sur des groupes, des lieux, des organisations qu'ils peuvent mieux maîtriser parce que moins énormes. La société devient plus diverse à mesure que les besoins d'autonomie, d'expression de soi et de sa différence croissent mais aussi plus complexe puisqu'il n'est plus possible d'identifier un individu par son appartenance à un macro-groupe. Les conséquences de ce phénomène sont multiples. Par exemple, le développement des associations a permis dans les villes de tisser de nouveaux réseaux notabiliaires d'où sont issus et sur lesquels s'appuient beaucoup des nouveaux députés élus en juin 1981. Sur le plan économique, on assiste à l'émergence de nouvelles consommations, plus «personnalisées» que les précédentes ou devant évoquer une certaine idée de la convivialité ou de la rusticité. On peut aussi remarquer que le développement de l'économie informelle est tout à fait lié à ce mouvement de repli sur le micro-social qui implique un développement des réseaux de relations indispensables à sa mise en œuvre et mieux adaptés aux nouveaux besoins d'autonomie, de différence ou de sociabilité immédiate.Small-scale social groups are increasingly finding favour in France. Trade unions are losing members and students their interest in politics. Meanwhile, associations concerning whole segments of social life are being formed at an unprecedented rate. The family is as strong as ever. Both young and old appreciate family life, though security seems increasingly to be the motive. People are losing faith in the idea of everlasting technological progress sustaining economic growth. Nowadays, the individual tends to prefer groups, places and organisations to be smaller and therefore more manageable. Society is getting more diverse in response to the growing need for individual fulfilment and self-expression. It is also becoming more complex since an individual can no longer be identified by his belonging to a macro-group. This phenomenon has many consequences. For instance, in towns and cities, the development of associations has given rise to new networks of local notables. Many of the «Députés» elected in June 1981 have such a background. The movement towards smaller groups is linked with the growing strength of the underground economy. There are also changes in consumer habits, the tendency being to exploit certain ideas of conviviality and authenticity.
- Summaries in english - p. 115-118
- Chronologie - p. 119-146
- Cahier de graphiques - p. 146