Contenu du sommaire : Vivre et faire vivre à crédit
Revue | Sociétés contemporaines |
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Numéro | no 76, 2009 |
Titre du numéro | Vivre et faire vivre à crédit |
Texte intégral en ligne | Accessible sur l'internet |
- Vivre et faire vivre à crédit : agents économiques ordinaires et institutions financières dans les situations d'endettement - Lacan Laure, Lazarus Jeanne, Perrin-Heredia Ana, Plot Sébastien p. 5-15
- L'épreuve du crédit - Lazarus Jeanne p. 17-39 Comment les banques prêtent-elles ? Cet article suit le déroulement des entretiens entre les clients et les conseillers financiers consacrés aux crédits à la consommation. Il montre que la plupart des prêts sont accordés ou refusés en fonction de contraintes économiques, techniques et juridiques dont tiennent compte les conseillers bancaires. Ces contraintes dessinent le client idéal comme stable et intégré professionnellement. Toutefois, dans certains cas les jugements individuels des conseillers bancaires entrent en jeu, les clients ont alors à justifier de leurs « projets » en même temps qu'ils doivent réussir à inspirer une confiance personnelle au conseiller qui les reçoit.
- Le crédit revolving, un succès populaire. Ou l'invention de l'endetté permanent ? - Ducourant Hélène p. 41-65 Comment le crédit revolving est-il devenu en France un crédit « populaire », au double sens du terme, à la fois un crédit qui rencontre un certain succès, et un type de crédit particulièrement utilisé par les catégories populaires ? En reconstituant rapidement la genèse du marché du crédit à la consommation français, nous éclairons la façon dont le fonctionnement du marché a transformé le crédit revolving en crédit des ménages modestes. Nous proposons des hypothèses sur les ressorts de l'écho rencontré par le produit auprès de ces ménages en mettant en évidence les causes de l'attrait exercé par les relations marchandes socialement « désencastrées ». Enfin, nous montrons que c'est précisément la transformation du crédit revolving, de « crédit des commerçants » qu'il était à l'origine en « crédit des classes populaires », qui en a fait un produit extrêmement rentable, ce qu'il n'était pas initialement.
- Du flambeur à la victime ? Vers une problématisation consensuelle du surendettement - Plot Sébastien p. 67-93 L'article expose les processus de construction et d'interprétation du terme de « surendettement » à partir de la loi Neiertz de 1989, qui fait entrer cette question dans le champ d'intervention politique. Il invite à réfléchir à la façon dont les différents acteurs déclinent, en s'appuyant sur plusieurs types de scènes et « espaces de problématisation » (opposition local/national), la catégorie du « surendetté » (de la stigmatisation de la cigale à la victimisation du consommateur aliéné). L'évacuation du problème en termes de faute rend ainsi les imputations plus diffuses et permet la mise en place d'une rhétorique du risque. Ce n'est donc pas le problème du surendettement qui est analysé en tant que tel, ni les situations des surendettés, ni même les modalités du traitement de ces situations, mais les opérations de classement auxquelles elles sont soumises, et la mobilisation de catégories, en particulier la figure de surendetté passif, envisagées comme autant de balises argumentatives.
- Les logiques sociales de l'endettement : gestion des comptes domestiques en milieux populaires - Perrin-Heredia Ana p. 95-119 À partir du cas d'une famille ouvrière, cet article cherche à revenir sur ce que les statistiques ne peuvent que difficilement montrer en restituant la complexité du processus de surendettement. Selon la Banque de France, 75 % des cas de surendettement feraient suite à un « accident de la vie » (séparation, maladie, licenciement...). Il s'agit ici de ne pas prendre pour acquis les effets de ces « accidents de la vie » sur la structure comptable des ménages, en interrogeant le passage critique qui des transformations familiales mène à un déséquilibre comptable. Resituer ensuite ce moment dans la trajectoire économique des surendettés permet alors de mieux comprendre en quoi ces « accidents » s'inscrivent bien plutôt dans des « carrières » économiques qui les rendent hautement probables.
- L'ethnicisation des rapports sociaux à l'école. Ethnographie d'un lycée de banlieue - Sanselme Franck p. 121-147 Produit d'une recherche ethnographique, ce texte s'attache à saisir les formes d'ethnicité telles qu'elles peuvent se construire au quotidien dans un lycée d'une banlieue parisienne. Une fabrication qui, selon nous, doit moins à un environnement extérieur qu'en partie au « déclin du programme institutionnel » de l'école. C'est lui, en effet, qui commande chez certains enseignants et surveillants « issus de l'immigration » le recours pédagogique, pas toujours heureux, au répertoire des origines communes face à leurs « homologues » lycéens. Ressource manipulable et manipulée, l'ethnicité l'est encore par ceux, professeurs et élèves « allochtones » relégués au sein des filières professionnelles, qui l'utilisent ici comme un moyen de contestation oblique et de subversion d'un ordre institutionnel qui leur est défavorable.