Contenu du sommaire : La Grande Terreur en URSS

Revue 20 & 21. Revue d'histoire Mir@bel
Titre à cette date : Vingtième siècle, revue d'histoire
Numéro no 107, juillet-septembre 2010
Titre du numéro La Grande Terreur en URSS
Texte intégral en ligne Accessible sur l'internet
  • Articles

    • La Grande Terreur des années 1937-1938. Un profond renouveau historiographique - Werth Nicolas, Blum Alain p. 3-19 accès libre
    • Police politique, magistrats, terreur. Justice et violence institutionnalisée en URSS - T. Rittersporn Gábor p. 21-37 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
      La politique pénale qui a précédé la Terreur de 1937 et de 1938 ne permet pas de conclure que cette dernière avait été planifiée de longue date. Durant quatre années les dirigeants ont encouragé le Parquet à contrôler les pratiques de la police politique dans des domaines aussi cruciaux qu'arrestations ou jugements. La pratique pénale reflétait les incertitudes du régime face à ses ennemis présumés. Le remarquable formalisme juridique alors dominant n'exclua pas la persécution de contre-révolutionnaires imaginaires et de gens jugés socialement dangereux sans qu'ils soient pour autant accusés d'avoir commis des crimes. À la veille même de la Grande Terreur les autorités insistèrent pour que ceux-ci soient poursuivis dans un cadre légalement défini. Ce formalisme fut balayé un temps par la terreur, devenue incontrôlable. Mais il fut rétabli en 1939, malgré l'opposition de la police secrète. Le nombre des affaires politiques et des éléments socialement dangereux baissa, les travailleurs indisciplinés devant la cible prioritaire de la répression.
      It is not possible to conclude that the penal policy that preceded the 1937 and 1938 Terror had been planned far in advance. For four years the leaders encouraged the procuracy to control political police practices in areas as crucial as arrests and sentencing. Penal practice reflected the uncertainty of the regime toward its presumed enemies. The notable judicial formalism was not beyond persecuting imaginary counter-revolutionaries and people judged socially dangerous, not that they were even accused of having committed crimes. At the eve of the Great Terror the leaders insisted that such people be tried in a legally defined framework. This formalism was swept away by the terror that had, for a time, become uncontrollable. But it was reestablished in 1939, in spite of the secret police's opposition. The number of political cases and socially dangerous elements diminished while unruly workers became the priority target of the repression.
    • La Iejovschina en Ukraine (1936-1938) - ?apoval Iouri p. 39-54 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
      Les étapes clés de la politique de la Grande Terreur en Ukraine en 1936-1938 font l'objet de cet article. Selon l'auteur, lorsque Nikolai Iejov devient commissaire du peuple de l'URSS à l'Intérieur, en septembre 1936, l'Ukraine avait cela de spécifique qu'elle avait déjà connu des opérations de terreur de masse et une purge de ses élites. À partir de 1935 avaient été menées en Ukraine des « opérations de masses » fondées sur des critères ethniques – la déportation des familles de Polonais et d'Allemands des zones frontières. Enfin, la direction stalinienne ayant fait de la famine un instrument de politique nationale, avait commencé une chasse frontale contre les « partisans de Petlioura », les « agents de Piłsudski » et les « nationalistes ukrainiens » latents, catégories dans lesquelles tombaient déjà certains représentants de l'intelligentsia procommuniste et des structures du parti et de l'État. Pour autant, l'arrivée de Iejov au pouvoir a signifié une nouvelle étape de purges et le début des « opérations de masses », qui ont pris en Ukraine une dimension toute particulière. Cet article analyse ces opérations ainsi que l'action de trois commissaires du peuple d'Ukraine à l'intérieur, ayant dirigé les répressions jusqu'à la chute de Iejov.
      This article deals with the Great Terror policy in Ukraine, 1936-1938. According to the author, when Nikolay Ezhov became the USSR's People's Commissary for the Interior in September 1936, Ukraine had already experienced “mass terror operations” and a purge of its elites. “Mass operations”, such as the deportation of Polish and German families from the borders, were carried out as of 1935. Moreover, the Stalinist leadership had already made famine a political instrument and had begun a direct fight against the “Petliura supporters”, the “Piłsudski agents”, and the “Ukrainian nationalists”, categories in which some representatives of the pro-communist intelligentsia and party and state structures had already entered. The arrival of Ezhov led to a new series of purges and the beginning of the “mass operations” which had a particular dimension in Ukraine. This article analyses these operations as well as that of three people's commissaries for the interior who organized the repressions until Ezhov's fall.
    • Les fonctionnaires régionaux du NKVD face aux purges de 1937-1938 - Leibovitch Oleg p. 55-67 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
      Cet article propose l'une des premières études détaillées du milieu des fonctionnaires du NKVD dans une région précise (celle de Perm, dans l'Oural) avant et pendant la Grande Terreur de 1937-1938. Il analyse la place du NKVD dans la nomenklatura régionale, les rapports entre le NKVD et le parti au niveau local, le « quotidien » de l'activité, devenue quelque peu routinière, des fonctionnaires du NKVD. Puis survient la « grande secousse » du printemps 1937, au cours de laquelle la plupart des dirigeants régionaux du parti sont arrêtés sous prétexte de « comploter » contre Staline. À partir de ce moment-là, le NKVD est profondément remanié : nouveaux cadres, nouvelles méthodes, nouvelle hiérarchie. On ne peut pas comprendre l'implication du NKVD dans les « opérations secrètes de masse » sans tenir compte des changements profonds et des purges qui affectent, au même moment, le NKVD lui-même.
      This article gives one of the first detailed studies of civil servants of the NKVD in a specific region (Perm, in the Urals) before and after the Great Terror of 1937-1938. It analyzes the place of the NKVD in the regional nomenclature, the relations between the NKVD and the party at the local level, and the ordinary activity of the NKVD civil servants that became somewhat routine. Then, in spring 1937, was the “Great shock” during which most of the party's regional leaders were arrested with the pretext of “plotting” against Stalin. From then on, the NKVD was completely overhauled: new directors, new methods, new hierarchy. It is not possible to understand the NKVD's involvement in the “secret mass operations” without taking into account the deep changes and purges that affected the NKVD itself at the same time.
    • L'action populaire pendant la Grande Terreur (1937-1938) - Nérard François-Xavier p. 69-82 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
      La Grande Terreur stalinienne est d'abord une terreur d'État, pensée à son sommet et mis en œuvre par ses agents. Cette terreur a pourtant une dimension populaire que cet article cherche à étudier. Largement secrète, la violence stalinienne est néanmoins parfois mise en scène lors de réunions publiques qui contraignent les Soviétiques à en être spectateurs, sinon acteurs. Vote, prise de parole ou dénonciation, écrite ou orale : les moyens de faire participer les Soviétiques sont divers. Pourtant les citoyens sont loin d'être uniquement passifs face à la Terreur. Cet article s'attache plus particulièrement aux lettres envoyées pendant ces mois de violences extrêmes : pour se protéger, pour démentir, pour défendre, mais aussi pour attaquer, pour salir, pour nuire, les Soviétiques ne cessent de s'adresser au pouvoir. Il s'agit ainsi d'étudier l'action populaire dans toute sa diversité.
      Stalin's Great Terror was primarily a State terror: conceived at its top, it was implemented by its agents. There was, however, a popular dimension of the terror that this paper seeks to study. Mostly secret, Stalinist violence was sometimes staged in public at meetings where Soviet citizens were forced to be spectators, if not actors. Soviet people took part in these meetings in different ways: by voting, speaking or denouncing. But people were far from being simply passive against the Terror. This paper focuses more particularly on the letters sent to the authorities during these months of extreme violence: Soviet people wrote continuously to protect themselves, to deny, to defend relatives but also to attack, to smear, to harm others. The aim is to study how the people acted in all the various ways.
    • Journal intime, identité et espaces communicationnels pendant la Grande Terreur - Griesse Malte p. 83-100 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
      Dans les journaux intimes de l'époque stalinienne les manifestations d'isolement et de déprime sont légion. Les diaristes de l'époque ont souvent tendance à culpabiliser et à chercher la faute dans leur for intérieur. Le fait de critiquer le régime et de mettre en cause sa légitimité contribue à les isoler, surtout s'ils ne partagent pas leurs pensées. Cet article examine d'abord la fragilisation du moi par le non-dit et l'impact de l'isolement sur une identification sans bornes avec le pouvoir en place. Il présente ensuite les espaces communicationnels informels, amicaux, voire intimes, qui se dessinent dans les journaux, leur ambiguïté et leurs limites, ainsi que l'impact qu'ils ont sur une prise de distance par rapport au discours officiel. Sont enfin émises des hypothèses sur le point de vue du régime et sur les stratégies qui en découlent dans les interactions concrètes de celui-ci avec les individus.
      In the personal diaries of the Stalinist period, there are very many cases of loneliness and depression. The diarists of that time tend to feel guilty and think they are at fault deep down inside. The very fact of criticizing the regime and questioning its legitimacy contributes to their isolation, especially if they do not or cannot share their ideas with anybody. This article examines first of all the fragilization of the sense of self by silence and taboo, and the impact of isolation on an excessive identification with reigning ideological power. Then it retraces informal, amicable and even intimate communicational spaces in diaries and shows their ambiguity and limits, but also their potential to operate and encourage dissociation from the premises of official discourse. Lastly, it shifts in perspective to the regime's point of view, whose strategies are explored on the basis of concrete interactions with particular individuals.
    • Ce que réhabiliter veut dire. Khrouchtchev et Gorbatchev aux prises avec l'héritage répressif stalinien - Elie Marc p. 101-113 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
      Comment les successeurs de Staline ont-ils géré l'inconfortable legs des années de terreur ? Comment s'est posée la question de la réparation des torts infligés à des millions de personnes et quelles réponses les héritiers du dictateur ont-ils tenté d'y apporter ? À deux reprises, sous la direction d'abord de Nikita Khrouchtchev (1953-1964) puis de Mikhail Gorbatchev (1985-1991), le passé stalinien fut l'objet d'intenses débats dans la société et la sphère politique soviétiques. C'est la posture critique face à l'époque stalinienne que désigne le mot d'ordre « réhabilitation », caractéristique à la fois du Dégel et de la perestroïka. Les procédures socio-juridiques de rétablissement dans leurs droits des victimes de Staline restèrent pour leur part à l'état embryonnaire jusqu'à la fin de l'ère soviétique. Cet article retrace l'histoire de l'inachèvement de la politique de réhabilitation, marqué par l'impossibilité de mettre radicalement à distance le passé soviétique pour le livrer à l'analyse critique.
      How did Stalin's successors handle the uncomfortable legacy of the years of terror? How did the question arise of how to redress the harm done to millions of people and what were the answers given by the heirs of the dictator? On two occasions, under the leadership of Nikita Khrushchev (1953-1964) and Mikhail Gorbachev (1985-1991), the Stalinist past and the victims of mass repressions were the subject of intense debate in the Soviet society and political sphere. “Rehabilitation”, a central motto of both the thaw and perestroika periods, designates merely a critical stance toward Stalin's rule. The concrete socio-legal procedures to restore the rights and dignity of Stalin's victims remained for their part in an embryonic state until the very end of the Soviet era. This article addresses the persistent failure to meet the requirements of a comprehensive rehabilitation policy, characterized by the inability to engage in a critical analysis of the Stalinist past.
    • L'Australie, le Japon et l'héritage de la Seconde Guerre mondiale. Conciliation politique et doute public - Curran James p. 115-129 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
      Cet article explore le legs de la Seconde Guerre mondiale sur la culture populaire et politique dans l'Australie de l'après-guerre, notamment en ce qu'il affecte les relations que le pays entretient avec le Japon. Alors que les dirigeants politiques et les décideurs furent relativement rapides à trouver une nouvelle base aux relations avec le Japon, des doutes persistèrent dans l'opinion publique. Ainsi, une histoire sur le pouvoir salvateur du commerce et sur une convergence croissante des intérêts régionaux s'est retrouvée à côté d'une mémoire moins encline à mettre de côté les héritages de l'expérience de la guerre. Ces doutes persistèrent jusque dans les années 1990 et de nouvelles impulsions furent données avec les commémorations marquant le 50e anniversaire de la fin de la guerre. Les dirigeants australiens, désireux de trouver un nouveau discours et une nouvelle histoire qui les lieraient à l'Asie, commencèrent à placer l'expérience des prisonniers de guerre australiens sous une lumière différente. En vain. L'article montre que, malgré les liens stratégiques, économiques et culturels croissants, l'ombre de la guerre ne pouvait être entièrement surmontée.
      This article explores the legacy of World War II on popular and political culture in post-war Australia, especially as it affected the country's relationship with Japan. It contends that while political leaders and policymakers were relatively quick to put relations with Japan on a new footing, doubts lingered in the public imagination. Thus on the one hand a story about the healing power of trade and a growing convergence of regional interests sat uneasily alongside a public memory that was less inclined to put aside the legacies of the war experience. These doubts continued until well into the 1990s and were given new impetus with the commemorations to mark the 50th anniversary of the end of the war. Australian leaders, eager to find a new language and a new history that would connect them to Asia, began to cast the Australian prisoner of war experience in a different light. But it was to no avail. The article shows that despite the growing strategic, economic and cultural ties, the war's shadow could not be overcome entirely.
    • Protection de la nation et construction de la nature. Une histoire des parcs nationaux français depuis 1960 (Cévennes, Pyrénées et Vanoise) - Blanc Guillaume p. 131-144 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
      Cet article s'intéresse aux trois parcs nationaux français des Cévennes, Pyrénées et Vanoise. Il propose d'étudier la façon dont ces parcs entretiennent et valorisent un paysage qui symbolise la perpétuation d'une identité française traditionnelle. S'efforçant en premier lieu d'associer au milieu naturel divers éléments représentatifs d'une culture nationale atemporelle, les gestionnaires des parcs agissent ensuite de façon à ce que celle-ci apparaisse comme une donnée aussi naturelle que le dit milieu. Une fois façonné dans sa matérialité, ses pratiques et ses représentations, l'espace lui-même prolonge alors les termes d'un discours visant à susciter un sentiment d'appropriation et d'appartenance au territoire national. Des années 1960 au temps présent, ce processus de patrimonialisation de la nature participe ainsi à l'édification de la nation-mémoire française, autant qu'il nous en révèle sa crise actuelle.
      This article focuses on the three French national parks of Cévennes, Pyrénées and Vanoise. The case study deals with the way those parks maintain and promote a landscape symbolizing the perpetuation of a traditional French nationhood. First trying to link representative elements of a timeless national culture to the natural environment, park managers then treat it as a given as natural as this environment. Once the space has been shaped in its materiality, practices and representations, the space itself extends a discourse whose purpose is to generate a feeling of propriety of and belonging to the national territory. From the 1960s to present times, this heritage policy concerning nature participates in French nation-memory building, as much as it reveals its current crisis.
    • Jean Delumeau, historien de la peur et du péché. Historiographie, religion et société dans le dernier tiers du 20e siècle - Cuchet Guillaume p. 145-155 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
      Jean Delumeau, qui a occupé pendant vingt ans la chaire d'histoire des mentalités religieuses de l'Occident moderne au Collège de France, était dans les années 1970-1980 un des représentants les plus en vue de l'« histoire des mentalités ». Ses thèses sur le péché et la peur ont rencontré un vaste écho. Rançon du succès : cette image d'historien de la peur lui est souvent restée, bien que son œuvre ait depuis emprunté de multiples chemins et qu'il se soit attaché à étudier, en contrepoint, les remèdes à la peur, notamment le sentiment de sécurité et les espérances du ciel. Cet article revient sur cet aspect de l'œuvre de Jean Delumeau, en rappelant ses thèses principales, la façon dont elles ont été reçues, les questions qu'elles posent aux historiens de la période contemporaine et sa réception dans le milieu chrétien des années 1970-1980.
      Jean Delumeau, who held the chair of history of religious mentalities in the modern West in the Collège de France for twenty years, was in the 1970-1980's one of the most prominent representatives of the so-called history of mentalities. His theses on fear and sin had a great resonance. The counterpart of this success was that this reputation of historian of fear has stuck to him, in spite of the fact that his work has developed in many directions and that he studied, in counterpoint, remedies to fear, notably the feeling of safety and Heavenly expectations. This article brings attention to this aspect of his work by exposing his main theses, the way they were received, the questions they raise for historians of the contemporary period and their reception in Christian circles in the 1970-1980s.
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