Titre | Pour une ethno-épidémiologie critique de la détresse psychologique à la Martinique | |
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Auteur | Raymond Massé | |
Revue | Sciences Sociales et Santé | |
Numéro | vol. 19, no 1, mars 2001 | |
Page | 45-74 | |
Résumé |
Résumé. S'appuyant sur la conjugaison d'une économie politique de la santé et d'une phénoménologie critique de la souffrance, l'anthropologie médicale anglo-saxonne propose de resituer les contributions de l'anthropologie à l'épidémiologie au niveau de l'étude des causes structurelles, politiques et économiques, de la maladie. Le défi majeur posé à l'anthropologie, pour demeurer utile et crédible, devient alors celui d'un arrimage constructif d'une approche interprétativiste du sens local de la maladie à une analyse des causes structurelles sociétales de la souffrance. À partir des résultats d'une recherche portant sur les causes de la détresse psychologique à la Martinique, nous proposerons qu'une ethno-épidémiologie critique de la détresse est en mesure de relever un tel défi. Pour ce faire, elle se devra d'analyser les lieux d'articulation entre trois paliers de déterminants : celui des structures macrosociétales postcoloniales qui consacrent la sujétion politique et la dépendance économique de la société martiniquaise ; à un niveau intermédiaire, social et local, celui des conditions concrètes d'existence et des modalités de l'organisation sociale (exemple : chômage, difficulté d'intégration du migrant de retour, tensions conjugales et intrafamiliales) induites par les macrostructures ; enfin, au niveau culturel, celui tout autant des stigmates laissés par le colonialisme dans les structures profondes des identités collectives que des anxiétés alimentées par les croyances magico-religieuses associées au quimbois. Redéfinir l'anthropologie comme entreprise d'analyse des modalités d'articulation du microsocial au macrosociétal, du politique au social et au culturel, nous apparaît être la seule avenue qui permettra de contrer les risques appréhendés d'une « médicalisation » de l'anthropologie de la santé. Source : Éditeur (via Persée) |
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Résumé anglais |
Towards a critical ethnoepidemiology of social suffering in postcolonial Martinique Based on a conjugation of a political economy of health services approach and a critical phenomenology of suffering, American critical medical anthropology suggests to set the contributions of anthropology to epidemiology in the arena of the study of structural, political and economic, causes of illness. In order to keep its credibility, anthropology must take up the challenge of a creative linkage between an interpretativist analysis of illness local meanings and a critical analysis of the asymmetric social and economic relationships that partly explain variations in its prevalence and incidence. Based on data from a research project on the causes of psychological distress and social suffering in Martinique, this paper suggests that a critical ethnoepidemiology of distress should be able to face such a challenge. It means that it will have to study the articulation between three levels of determinants: a) the postcolonial macrosocietal structures that reinforces the political and economical dependency of Martinique; b) at an intermediate level, the daily living conditions (Le. underemployment, intrafamilial conflicts) and c) at the cultural level, the collective identity stigmata caused by colonialism and the anxieties generated by witcheraft practices and « quimbois ». This redefinition of the anthropological endeavour at the crossroads of microsocial and macrosocietal level of analysis is proposed as a means to coun- ter the risk of medicalisation of medical anthropology. Source : Éditeur (via Persée) |
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Article en ligne | http://www.persee.fr/doc/sosan_0294-0337_2001_num_19_1_1512 |