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Titre Genre et lieux. Du neutre conceptuel à un nouvel ordre spatial urbain ?
Auteur Martine Rey
Mir@bel Revue Espace Populations Sociétés
Numéro no 3, 2002 Questions de genre
Rubrique / Thématique
Articles
Page 347-359
Résumé Le concept d'espace est une catégorie fondamentale de la pensée, mais ni la psychologie cognitive ni la géographie sociale n'envisagent sa construction dans une relation au genre. Une hypothèse de différenciation selon le genre dans la maîtrise conceptuelle de l'espace abstrait mathématique est réfutée. La conception de l'espace est ainsi confirmée dans une neutralité universelle. La géographie comme science de l'organisation de l'espace social décrit les discriminations socio-spatiales et s'intéresse aux relations qu'entretiennent hommes et femmes avec les lieux. L'histoire nous apprend la partition sexuée originelle de la cité qui est issue de la domination du genre masculin sur les espaces de la vie socio-politique. Ainsi le positionnement scientifique de la question du genre et de l'espace reposerait en grande partie sur la valeur « politique/symbolique » attribuée au genre dominant et donc aux lieux qui lui sont liés, à son territoire. Soumis à la loi comme individu neutre dans le civiquement et juridiquement correct, le genre féminin reste symboliquement assigné aux lieux du privé, de la famille. Or la caractérisation du positionnement social, dans la ville, des ménages unipersonnels des deux genres pose avec acuité la question politique de la place des femmes dans l'espace et la société. En effet, par leur entrée dans le monde du travail et de la mobilité associée, les femmes ont accédé à l'espace public, déstabilisant l'ordre spatial urbain. À l'échelle européenne, dans les centres des métropoles, la présence des petits ménages ne cesse de s'accentuer et dans le cas de Toulouse et Bristol, ils sont associés aux catégories de cadres et professions intellectuelles supérieures. L'exemple de la technopole toulousaine montre qu'ils peuvent aussi être jeunes, aisés et féminins, répondant à deux au moins des critères de la gentrification. Le retour au centre est le fait d'une fraction de décideurs qui intègrent l'espace du pouvoir. Une recherche menée à Toulouse sous-tend l'hypothèse que les femmes libres de fortes contraintes familiales et financières exerceraient par leurs choix résidentiels le pouvoir sur l'espace. Elles affirment en effet leur présence dans les quartiers centraux élus comme lieu de leur vie privée, elles qui ne partagent pas l'espace de leur intimité. Les rapports sociaux de genre ont subi des bouleversements qui se lisent dans la déstabilisation des systèmes urbains et rendent visible, avec des nuances, la montée en puissance des femmes en des lieux de plus en plus proches des espaces symboliques du pouvoir. Vers un nouvel ordre spatial urbain ?
Source : Éditeur (via Persée)
Résumé anglais Gender and Places. From a Conceptual Neuter to a New Urban Spatial Order ? The concept of space is a fundamental category of the thought, but neither cognitive psychology nor social geography consider its construction in relation to its gender. An hypothesis of gender differentiation in the conceptual mastery of the abstract mathematical space is usually refuted. The conception of the space is thus confirmed in a universal and neutral one. Geography as the science of social space organization describes socio-spatial discriminations and is interested in the relations that men and women maintain with places. History teaches us the original sexual partition of the town which arises from the male domination on the spaces of the socio-political life. So the scientific affirmations on gender and space questions would be based mainly on the "political-symbolic" value given to the dominant gender and thus to the places bound to him, as well as to its territory. Subjected to the law as neutral individual in the civic and lawfully correctness female gender remains symbolically assigned to the places of the private and family life. However, to specify the one person households' localisation, puts with acuteness the political question of women's place in the space and the society. In fact, by their coming into the working world and by the mobility associated to it, women have risen to the public space, destabilizing the urban spatial order. At the European level, in the centres of big cities the number of small households keeps on increasing and in the case of Toulouse and Bristol, they are associated to the categories of executives and superior intellectual occupations. The example of Toulouse technopole shows that they can also be young, comfortably off and female, answering so at two of the features of the gentrifi- cation. To be back in the centre is the fact of part of the decision-makers who integrate the space power. A research led in Toulouse sub-tends the hypothesis that women free now from strong domestic and financial constraints would exercise by their residential choices the space power. They indeed assert their being in the central districts, elected as the place of their private life, them who do not share their privacy. The gender social relations underwent changes which are read in the destabilization of the urban systems and make visible, with nuances, the rising of women in places more and more close to the symbolic spaces of the power. Towards a new urban spatial order ?
Source : Éditeur (via Persée)
Article en ligne http://www.persee.fr/doc/espos_0755-7809_2002_num_20_3_2044