Contenu du sommaire : Émigrés-Immigrés : vieillir ici et là-bas
Revue | Revue Européenne des Migrations Internationales |
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Numéro | Vol. 17, no 1, 2001 |
Titre du numéro | Émigrés-Immigrés : vieillir ici et là-bas |
Texte intégral en ligne | Accessible sur l'internet |
Émigrés-Immigrés : vieillir ici et là-bas
- Éditorial - Claudio Bolzman, Rosita Fibbi, Michelle Guillon p. 7-9
- La vacance comme pathologie de la condition d'immigré. Le cas de la retraite et de la pré-retraite - Claudio Bolzman, Rosita Fibbi, Michelle Guillon, Abdelmalek Sayad p. 11-36
- Vieillir en immigration - Claudio Bolzman, Rosita Fibbi, Emile Témime, Michelle Guillon p. 37-54 L'immigration est par nature, de caractère précaire, et l'expression même de « travail immigré » suppose que la présence de l'immigré est étroitement liée à son activité professionnelle. Que celle-ci vienne prendre fin, et l'absurdité même de la condition de l'immigré apparaît à l'évidence. Que l'on « se tue » au travail ou que l'on retourne dans son pays, il n'est assurément pas question de « vieillir en immigration ». Ou du moins s'agissait-il jusqu'ici de cas exceptionnels. C'est donc un phénomène nouveau et aberrant qui s'accentue depuis quelques années avec la transformation de la migration de travail en migration de peuplement, avec aussi, l'augmentation générale de l'espérance de vie, qui touche naturellement les travailleurs immigrés. Ces hommes savent qu'ils ne repartiront pas ; mais ils ont perdu leur « raison d'exister » en devenant des inactifs, suite à la maladie, au chômage de longue durée ou à la retraite. C'est un phénomène irréversible et surprenant, que l'on reste seul ou que l'on vive en famille. L'impréparation à ces nouvelles conditions de vie se traduit par un désarroi au quotidien, par l'accentuation d'un sentiment de solitude, qui s'exprime de manière différente pour l'individu isolé, qui prolonge son existence au-delà de la norme dans le foyer ou le meublé, ou pour le chef de famille, dont le statut social va se trouver radicalement, modifié par sa situation nouvelle. Les « vieux immigrés » forment alors une catégorie « à part », imprévue et longtemps oubliée, mais dont l'importance s'accroît et qu'il faut bien aujourd'hui prendre en compte.Immigration is by nature precarious situation and even the expression « immigrant worker » supposes that the immigrant's presence is closely linked to his professional activity. Should this activity come to an end, the condition of the immigrant appears absurd. If the immigrant literally « kills himself » at work or returns to his country of origin, there is assuredly no question of « growing old in immigration » or at least until recently, this proved to be the exception to the rule. It is therefore a new and aberrant phenomenon which has become more apparent with the transformation of work migration into settlement migration and with the general rise in life expectancy affecting immigrant workers. These men know that they will not leave the country, but in becoming inactive following an illness, long-term unemployment or retirement, they have lost their « reason to exist ». This phenomenon is irreversible and surprising, whether the immigrant lives alone or with family. The unpreparedness to handle this new life situation results in a day-to-day confusion and an intensified feeling of solitude, which is experienced differently by an individual living alone - with the prolongation of his presence in the place of residence (household or other accommodation), or for the head of the household - whose social status undergoes a radical shift in light of his new situation. These ageing immigrants therefore form a separate category, unforeseen and forgotten, but whose significance is increasing and which, today we must take into account.
- La famille : une source de légitimité pour les immigrés après la retraite ? Le cas des Espagnols et des Italiens en Suisse - Claudio Bolzman, Rosita Fibbi, Marie Vial, Michelle Guillon p. 55-78 À partir du constat d'un phénomène nouveau en Europe, celui de l'arrivée à l'âge de la retraite des immigrés recrutés comme travailleurs dans les années 1950 et 1960, cet article s'interroge analyse les modalités que prend le processus de sédentarisation des immigrés, en particulier la place du réseau familial dans ce processus. En second lieu, il examine l'influence que peuvent avoir les liens familiaux sur les projets d'avenir des Espagnols et Italiens âgés de la première génération, concernant notamment leur lieu futur de résidence à l'approche de l'âge officiel de la retraite. Nous voulons en particulier savoir si la question du retour devient inévitable pour eux à partir du moment où ils cessent d'être des travailleurs, ou si au contraire la famille, par sa présence et son soutien, aide à atténuer le choc de la « vacance » en permettant aux retraités immigrés d'entrevoir une place dans la société de résidence. Nous tentons de répondre à ces questions en nous fondant sur trois enquêtes que nous avons menées récemment auprès des personnes d'origine italienne et espagnole en Suisse.At the present time a new phenomena is emerging in Europe : immigrant workers who came to different countries during the fifties and sixties are reaching retirement age. Starting from this fact, this paper deals with two issues : on the one hand, we analyse the process of settling down of immigrants in the residence country and the place of the family in this process ; on the other hand, we study the influence of the family upon the future projects of the first generation of Italian and Spaniards near retirement age, particularly with respect to their projected country of residence. We are especially interested in the issue of return migration : is it an inexorable consequence of retirement from labour market, or does family represent, through its presence and help, a resource for elderly migrants, allowing them to take their place in the resident society ? We try to answer to these questions using data form three surveys we have carried out about persons from Italian and Spanish origin in Switzerland.
- Migrants âgés, personnes âgées d'origine étrangère en Allemagne - Claudio Bolzman, Rosita Fibbi, Michelle Guillon, Maria Dietzel-Papakyriakou p. 79-99 Au cours de leurs années passées en migration, la décision de demeurer en Allemagne au cours du troisième âge s'est peu à peu imposée à de nombreux étrangers. Cependant, pour beaucoup d'entre eux, cette décision est contraire à leurs souhaits et ne signifie pas l'abandon du projet de retour au pays d'origine, mais simplement le report de celui-ci. Les familles de migrants de la première génération ont en général plus d'enfants que les Allemands des mêmes tranches âge ; de plus, bien souvent, ces migrants cohabitent avec leurs enfants. Dans certains cas pourtant, ceux-ci ont pas les moyens de subvenir aux besoin de leurs parents ; un recours à des institutions spécialisées, adaptées aux spécificités culturelles de ces migrants âgés, s'avère alors inévitable.To spend old age in Germany represents for many elderly foreigners a positive decision that has matured over the course of their extended time abroad. However, many stay contrary to their wishes. Rather than abandon their goal of returning to the homeland, they continuously postpone its fulfilment. Compared with elderly Germans, families of first generation migrants generally have more children and more often live with them. In cases when families' potential to assist is insufficient, institutionalization may be unavoidable. Accordingly, elderly migrants must also be assured placements in care giving institutions that are specifically oriented to their unique cultural needs.
- Retraite anticipée ou retraite différée ? Les immigrés âgés au Québec et leur sortie de la vie active - Claudio Bolzman, Rosita Fibbi, Michelle Guillon, Oscar Firbank p. 101-125 Cet article vise à analyser les attitudes face au travail à un âge avancé des immigrés résidant au Québec et leurs conditions de passage à l'inactivité et la retraite. La retraite des immigrés est un domaine encore peu exploré au Canada et au Québec ; ceci en dépit du fait que les immigrés forment une proportion appréciable de la population âgée de 65 ans ou plus résidant dans le pays et que, dans l'ensemble ils sont aussi plus âgés que la population native. L'article présente une synthèse des connaissances sur le sujet dont on dispose au Canada et à l'étranger, dresse un portrait global des travailleurs immigrés qui approchent ou ont dépassé l'âge normal de la retraite et analyse les stratégies de passage de l'activité à la retraite d'un échantillon de travailleurs âgés issus de quatre groupes d'immigrés (Italiens, Français, Haïtiens et Vietnamiens) résidant dans la région métropolitaine de Montréal. L'étude montre que le processus migratoire et la spécificité des parcours professionnels des immigrés contribuent à ce que leur retraite se différencie à plusieurs égards de celle des non- immigrés. Leur situation est cependant assez hétérogène, même si certaines franges la population âgée immigrée étant particulièrement vulnérables devant le passage à la retraite. À cet égard, parler des immigrés âgés comme d'une population qui dans son ensemble serait considérée comme un groupe vulnérable nous apparaît, sur la base des données disponibles, non conforme à leur réalité. La conclusion propose une série d'actions qu'il serait souhaitable d'entreprendre pour améliorer les conditions de départ à la retraite et la sécurité économique des immigrés qui avancent en âge au Canada.This paper analyses attitudes towards work of aged immigrants and the conditions of their transition to inactivity and retirement. The paper presents an overview on the knowledge available on this subject in Canada and abroad ; it establishes a global portray of immigrants workers approaching or already arrived at the normal retirement age and analyses the strategies of transition to retirement of a sample of older immigrant workers from four ethnic groups (Italians, French, Haitians, and Vietnamese) living in Montreal metropolitan area. The study shows the influence of migratory process and of immigrants professional life as factors that can explain that their retirement is, in many senses, different from that of the non-immigrants. The situation of immigrants is nevertheless far from being homogenous, although some groups of immigrants are particularly vulnerable in facing this transition to retirement. However, according to available data, it is not possible to speak of older immigrants as a whole as vulnerable population. The conclusion makes several proposals which could improve the conditions of the transition to retirement and the economical security of older immigrants in Canada.
- À l'écoute des femmes immigrées : témoignages et mémoire - Claudio Bolzman, Rosita Fibbi, Marie Vial, Michelle Guillon p. 127-150 Au moment où la première génération des immigrés de l'après guerre en Suisse s'apprête à passer le témoin, il devient urgent de récolter la mémoire de ceux qui ont connu la migration et un long parcours de confrontation avec leur nouveaux pays. Les témoignages réunis dans cet article retracent ces parcours caractérisés par la lutte individuelle contre la mise à distance infériorisante qu'elles subissent en tant que femmes du peuple et en tant que femmes étrangères. L'article se veut une contribution et une illustration du travail de construction de références partagées susceptibles d'être partagées par tous, autochtones et immigrés, qui retravaillent les appartenances anciennes pour en reconstruire des autres, inédites.The first generation of immigrants to Switzerland is now growing older ; it is therefore necessary to gather the memories of those who directly experienced migration and the long process of confrontation with the new country. The stories of this article relate lives characterised by the individual struggle against discriminations based on their social as well as their foreign origins. This text is a contribution to the construction of history and meanings shared both by migrants and local population ; it shows how old identities are revisited so as to lead to new, original ones.
- Le vieux, le fou et l'Autre, qui habite encore dans les foyers ? - Claudio Bolzman, Rosita Fibbi, Michelle Guillon, Marc Bernardot p. 151-164 Les travailleurs migrants célibataires venus en France dans les années soixante-dix ont vieilli mais certains entre eux vivent toujours dans les foyers de travailleurs migrants. Selon qu'ils bénéficient d'une retraite ou pas, ils connaissent des situations très différentes. Et depuis une vingtaine d'années, l'entrée dans les foyers de populations d' « exclus » a modifié la morphologie sociale de cet habitat. Les comportements d'entraide existent entre les habitants, mais les conflits sont très fréquents.Ces nouvelles interactions concernent aussi les gestionnaires dont le métier a changé et les travailleurs sociaux qui orientent ces nouveaux publics vers cet habitat en dessous des normes. Objet de représentations et de fantasmes, le foyer de travailleur migrants devient un laboratoire inédit d'une mixité sociale entre populations défavorisées.The single guest workers coming in France during the 70's are now elder but some one of them keep on living in specials hostels. Their economic situation differs according on whether they receive a retirement pension or not. In the last twenty years, new marginalized social groups have been arriving in such hostels transforming social morphology of this type of housing, below usual standards. Such a mixed resident population developed support attitudes but conflicts as well. These changes affect not only the resident populations but also staff in charge of hostels and the social workers who steer these new public towards this type of housing. Object of negatives representations and fantasy, guest workers hostels are thus becoming a laboratory of intergenerational and interethnic contact among disadvantaged people.
Notes de recherche
- Mythe du retour et réalité de l'entre-deux. La retraite en France, ou au Maroc ? - Fanny Schaeffer p. 165-176
- Anciens combattants marocains, construction d'une nouvelle catégorie de migrants - Djemila Zeneidi-Henry p. 177-188
Note documentaire
- Les migrants âgés dans les publications scientifiques francophones - Gilles Dubus, Françoise Braud p. 189-197
Notes de lecture
- Témime Émile et Deguigné Nathalie, Le camp du Grand Arénas Marseille - Missaoui Lamia, Bertheleu Hélène p. 199-202
- Juteau Danielle, L'ethnicité et ses frontières - Missaoui Lamia, Bertheleu Hélène p. 202-205
- Livres reçus - p. 207-210
- Notes aux auteurs - p. 211