Contenu du sommaire : Où va l'histoire des entreprises ?
Revue | Revue économique |
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Numéro | vol. 58, no 1, janvier 2007 |
Titre du numéro | Où va l'histoire des entreprises ? |
Texte intégral en ligne | Accessible sur l'internet |
Où va l'histoire des entreprises ?
- sous la direction de Dominique Barjot- Introduction - Dominique Barjot p. 5
- Foreword - Dominique Barjot p. 31
- Une grande diversité d'approches - Strategie and Structures of European Enterprise - Franco Amatori, Andrea Colli p. 39
- Methodological Approaches to the Study of British Banking History - A Select Illustration from Bank-Firm Relationships - Mae Baker, Michael Collins p. 59 L'article discute des différentes approches de l'histoire bancaire britannique. Est d'abord prise en considération, brièvement, l'approche par les études de cas, traditionnellement prédominante, avec les ouvrages consacrés à la Midland Bank par Holmes et Green, et la Barclays Bank par Ackrill et Hanna. Elles sont utilisées pour mettre en évidence un certain nombre de forces et de faiblesses associées à cette forme de méthologie historique. Cependant, les auteurs du présent article défendent l'idée qu'une étude d'histoire bancaire peut bénéficier d'un usage plus explicite des concepts théoriques et de la méthodologie empirique développés dans les sciences économiques, financières et du management. Mae Baker et Michael Collins fondent leur propre travail sur l'octroi de crédits aux entreprises par les banques commerciales britanniques avant 1914. Ils s'efforcent ainsi de démontrer que la théorie de l'agent principal peut aider à expliquer le comportement bancaire en situation de marché imparfait. Ils discutent des données et méthodes d'analyse utilisées pour établir la nature et l'effectivité du crédit bancaire fourni aux clients industriels. Ils offrent une explication pour ce comportement, basé sur des concepts de banque de transaction.The article discusses different approaches to the study of British banking history. There is a brief consideration of the case study approach which has traditionally been prominent; the studies of the Midland Bank, by Homes and Green, and of Barclays Bank, by Ackrill and Hannah, illustrate some of the strengths and weaknesses associated with this form of historical methodology. However, the authors argue that the study of banking history can benefit from the more explicit use of theoretical concepts and empirical methodology developed in Economics, Finance and Management Sciences. Baker and Collins draw on their own work on the provision of corporate finance by the British commercial banks before 1914 to demonstrate the application of concepts from principal-agent theory to help explain bank behaviour within an imperfect market. They discuss data and methods of analysis used to establish the nature and effectiveness of bank lending to industrial clients, and offer an explanation for that behaviour based on concepts of transaction banking.
- Lafarge (1993-2004) - Comment on devient firme mondiale - Dominique Barjot p. 79 À partir de 1993, le groupe Lafarge est devenu une firme mondiale. 1993 marque en effet le point de départ d'une croissance soutenue qui en a fait le numéro un mondial du ciment et des granulats. Grâce à une excellente maîtrise de ses coûts de production et à un taux élevé d'investissement, le groupe a pu maintenir un niveau élevé de rentabilité. D'importantes opérations de croissance externe, les acquisitions successives de Redland [1997] et de Blue Circle [2001] ont cependant contraint à un endettement croissant à long et moyen terme ainsi qu'à un appel grandissant à un actionnariat de plus en plus international. Soumis à la tyrannie des cours de bourse, le groupe a concilié néanmoins le versement de dividendes accrus avec le maintien d'un autofinancement substantiel. Cette réussite est due à une efficace stratégie de marché : prépondérant en Europe et en Amérique du Nord, Lafarge s'est imposé en Afrique, a conquis de bonnes positions en Amérique latine et a réussi une exemplaire percée en Extrême-Orient, notamment en Chine, en Corée du Sud et en Inde. Sa réussite doit aussi beaucoup à sa politique des ressources humaines, à sa stratégie cohérente de développement durable et surtout à un intense effort de recherche-développement. Il constitue la clé ultime de l'avance prise sur la concurrence.From 1993 the Lafarge group became a world firm. 1993 is indeed the starting point of a sustained growth which led the group to be the world leader for cement and aggregates. Thanks to an excellent control of production costs and to high rates of investment, the group was able to maintain a high level of profitability. Important operations of external growth, the acquisitions of Redland in 1997 and Blue Circle in 2001 compelled the group to a growing debt, and to an increasing appeal to an evermore international shareholding. Submitted to stock exchange prices tyranny, the group nevertheless conciliated increasing dividends and substantial self-financing. This success is due to an efficient market strategy: leader in Europe and North America, Lafarge compelled recognition in Africa, conquered good positions in Latin America, and made an outstanding breakthrough in the Far East, especially in China, South Korea and India. Its success is due to workforce policy, coherent strategy of sustained development and to an important effort of RD. It represents ultimate key for advance on competitors.
- Entreprises, cheminements technologiques et innovation - Laurent Tissot p. 113 La business history a clairement souligné l'importance de l'innovation, de la connaissance et de l'histoire dans la détermination de la stratégie de développement des firmes. Le présent article montre que ces aspects, d'un point de vue méthodologique, ne peuvent être séparés. L'innovation se nourrit de la connaissance accumulée au cours d'un processus à long terme. En ce sens, l'innovation constitue une part de la structure des firmes. Les ruptures technologiques, qui sont considérées, à l'origine, comme dues à des firmes marginales, se trouvent néanmoins reliées aux formes existantes des connaissances intégrées dans le nouveau processus innovateur.Business history has clearly pointed out the importance of innovation, knowledge and history in the ways firms have defined their development strategies. This articles shows that these aspects, from a methodological point of view, cannot be understood separately. Innovation uses knowledge involved in a long run process. In that sense, innovation is a part of the firms' structure. The technological breakthroughs which are, at the start, considered as the impact of marginal firms are nonetheless related to existing forms of knowledge integrated in the new innovative process.
- District industriels : du concept à l'histoire - Les termes du débat - Jean-Claude Daumas p. 131 Durant les années 1970, la découverte de la Troisième Italie conduit à une réhabilitation du concept marshallien de district industriel et à un grand nombre d'études sur le système productif, dont le développement peut le mieux s'expliquer par la concentration géographique des activités. En premier lieu d'une problématique concernant exclusivement sociologues et économistes, la question des districts industriels est devenue un sujet de préoccupation des autres sciences sociales, parmi lesquelles l'Histoire. Cependant, en dépit du caractère prometteur et stimulant que cette approche peut avoir, elle demeure incomplète et floue. L'Histoire n'a pas été capable de jouer son rôle à part entière parce que l'application du concept à l'histoire soulève nombre de questions théoriques, méthodologiques et empiriques. Il est nécessaire de clarifier les contenus du concept, de décrire comment il a été élaboré, comment il s'est diffusé, et de mesurer son utilité pour la recherche historique.During the 70's, the outstanding achievement of the “Third Italy” led to the rehabilitation of the Marshallian concept of industrial district and to a growing number of studies on the productive system whose development can be mostly explained by the geographical concentration of activities. At first an exclusive sociologists' and economists' concern, it gradually became the concern of other social sciences, among which History. However promising and stimulating this approach may be, it remains sketchy and blurred, and History hasn't been able to play its part fully yet because the shift from concept to history raises a number of theoretical, methodological and empirical issues. This article aims at clarifying the contents of the concept, depicting how it was elaborated and how it expanded, and to ponder on its usefulness to historical research. Classification JEL : L, R1, L6, D8, K3, J4, D2, J5, J3, L1
- Histoire des entreprises et approches globales. Quelles convergences ? - Jean-Charles Asselain p. 153 L'histoire des entreprises permet d'éclairer les grands mouvements de l'économie, d'en préciser l'origine. Les apports de ce type d'histoire sont multiples : rôle des économies d'échelle et de diversification, et, plus encore, du progrès technique. La vision du progrès technique par les historiens alimente ainsi nombre de modèles de croissance endogène. Une démarche purement microéconomique pose cependant le problème de la représentativité de l'objet d'étude. Deux distorsions peuvent biaiser l'analyse : la focalisation sur l'histoire des succès et sur celle de la grande entreprise. Une prise en compte de la dimension macroéconomique demeure donc nécessaire pour établir les faits majeurs. Néanmoins, pour fournir les explications ultimes, la dimension microéconomique est souvent d'une grande utilité. Les discordances sont fréquentes entre les deux dimensions, mais les convergences l'emportent, comme le montrent et l'œuvre d'Alfred Chandler et celle de Michael Porter. S'ils se rejoignent sur l'importance déterminante de la dynamique de l'innovation, le second a su écarter, au contraire du premier, le postulat de la supériorité de la grande entreprise au profit de l'effet d'entraînement engendré par la création d'entreprises nouvelles. L'histoire d'entreprises en effet a trop longtemps sous-estimé le rôle économique des petites et moyennes entreprises.Business history allows throwing light on great movements of economy and their origin. The contributions of this sort of history are numerous: the part of scale saving, diversification, scale progress. The vision of technical progress by historians nourishes also a lot of models of endogenous growth. A pure microeconomic process can bring forward a representativity problem, the focus being put generally on success stories and big firm stories. A macroeconomic dimension is necessary for establishing major facts. If distortions between two dimensions are frequent, convergences take on, as the works of Alfred Chandler an Michael Porter show it. They both agree on determining part of innovation dynamics, but the second, unlike the first, rejects the superiority of the big firm to the advantage of the impulsion effect of the creation of new firms. Business history underestimated for a long time the place of small and middle firms.
- Chantiers en cours : trois thèmes majeurs - Global Electrification - Multinational Enterprise and International Finance in the History of Light and Power, 1880s-1914 - William J. Hausman, Mira Wilkins, John L. Neufeld p. 175
- Contrasting Styles of Foreign Investment - A Comparison of the Entrepreneurship, Technology and Finance of German and Canadian Enterprises in Barcelona Electrification - Peter Hertner, H. Viv Nelles p. 191 Avant la première guerre mondiale, à Barcelone, se sont combinés deux « styles » différents d'investissement étranger parmi ceux qui ont émergé dans l'économie globale à la fin du XIXe siècle. Des industriels allemands du secteur de l‘électrotechnique, en association avec des banquiers d'investissement spécialisés, commencèrent le processus d'électrification dans les années 1890 et 1900 en constituant des compagnies filiales opérationnelles, qui fournissaient des équipements à des clients captifs. Après 1911, un style différent d'investissement étranger direct, originaire du Canada et déployant différentes stratégies technologiques, financières et d'affaires, créa un monopole hydroélectrique régional intégré. Cet article compare les réalisations et les échecs des deux styles, d'une part l'Unternehmergeschäft, de l'autre le venture capitalism canadien.Two different “styles” of foreign direct investment that emerged in the global economy at the end of the nineteenth century combined to electrify Barcelona before WWI. German electrical equipment manufacturers, in association with specialized investment bankers, began the process of electrification in the 1890s and 1900s by setting up subsidiary operating companies in Barcelona as captive customers for their equipment. After 1911a different style of foreign direct investment, originating from Canada, deploying different technological, financial and business strategies, created an integrated, regional, hydroelectric monopoly in the region. This paper compares the achievements and the failures of the two styles, German “Unternehmergeschäft” and Canadian “Venture Capitalism.”
- Economic Culture and its Transfer Americanization and European Enterprise, 1900-2005 - Harm G. Schröter p. 215 L'américanisation consiste en un transfert de valeurs dans l'économie depuis les États-Unis. L'Europe en a expérimenté trois vagues : dans les années 1920, durant la phase de boom de 1949 à 1973 et depuis 1985. En considérant l'américanisation comme un concept culturel, nous ne pouvons pas seulement décrire ces vagues, mais aussi expliquer pourquoi elles sont survenues. Les Européens étaient impatients d'apprendre comment rendre meilleures leur économie et leurs firmes durant ces phases où les États-Unis excellaient non seulement dans le champ de l'économie, mais aussi dans d'autres (politique, force militaire, etc.). Ainsi nous pouvons comprendre comment et pourquoi la rationalisation balaie l'Europe dans les années 1920, et pourquoi l'industrie américaine du film l'emporte, pourquoi, durant la phase de boom, les pays européens créent des business schools et interdisent les cartels, pourquoi les firmes changent leurs systèmes de gouvernement de production et distribution, et, en fin de compte, pourquoi depuis 1985 les Européens se sont embarqués dans la privatisation, la dérégulation, révolutionnant leurs services financiers. La tendance était de devenir moins coopératif et plus compétitif à tout point de vue. JEL Classification: A13, F02, F2, F4, M, N14, N83, O11Americanization is the transfer of values in the economy from the usa. Europe experienced three waves: in the 1920s, during the boom-phase 1949-1973, and since 1985. By using Americanization as a cultural concept, we cannot only describe the waves but explain why they occurred: The Europeans were eager to learn how to improve their economy and firms during phases in which the usa excelled not only in the economic field but in others (politics, military strength, etc.). Thus we understand how and why rationalization swept over Europe as a wave in the 1920s, and why the us-film industry became superior. Why during the boom European countries set up business schools and interdicted cartels, why firms changed their systems of government, production and distribution; and finally why since about 1985 Europeans embarked on privatization, deregulation, revolutionized their financial services. The trend was to become less co-operative and more competitive in all aspects.
- Mondialisation et avantage concurrentiel - La percée internationale de Samsung (1953-1986) - Rang-Ri Park-Barjot p. 231 Le groupe Samsung constitue l'archétype du chaebol. Son succès ne date pas d'aujourd'hui. Depuis la fin de la guerre de Corée, il a connu une vigoureuse expansion, portée à la fois par les exportations et le marché intérieur. En dépit de la progression des charges d'exploitation, il en a endigué la progression. Tout en créant un nombre grandissant d'emplois, il a investi massivement, mais en privilégiant toujours la croissance interne et en autofinançant à plus de 50 % ses investissements. Grâce à l'explosion entre autres de sa recherche-développement, il est passé d'une logique d'imitation à une stratégie d'innovation. Il a connu une vigoureuse progression de ses profits grâce à laquelle il a pu préserver son équilibre financier et enrayer la dégradation de son indépendance financière. La vive progression de la marge brute a permis ainsi une augmentation rapide des bénéfices distribués sans que, pour autant, l'autofinancement s'en trouve sacrifié. En 1986, un taux de marge élevé et un taux satisfaisant de rentabilité de l'ensemble des capitaux attestent du haut degré de compétitivité atteint par le groupe.The Samsung group represents the Chaebol archetype. Its success dates back to the end of the Korean War, it has known since a vigorous expansion, brought by both exports and the national market. The progress of exploitation charges was checked, while creating a growing number of jobs and investing massively. Internal growth was always preferred, with 50 % of self-financed invests. Thanks to the explosion of R&D, to an imitation logic an innovation strategy was substituted. The firm knew a vigorous progress of benefits, what allowed preserving financial balance and independence. Increasing margins allowed a quick growth of distributed benefits without sacrificing self-financing. In 1986 a high margin rate and a high profitability rate show the high degree of competitivity of the group.
- La concession des services maritimes postaux au XIXe siècle - Le cas exemplaire des Messageries Maritimes - Marie-Françoise Berneron-Couvenhes p. 259 La création, au XIXe siècle, de services publics maritimes postaux réguliers, effectués au moyen de navires à vapeur, pose la question de savoir quel mode de gestion adopter, de la régie ou de la concession. En 1837, à la création du service en Méditerranée, la première formule est retenue : c'est une réussite technique, mais un désastre financier. Le désengagement de l'État s'effectue de manière progressive : sous l'influence du modèle anglais, le gouvernement concède, dès 1850, à une entreprise privée le trafic postal entre la France et la Corse. Un an plus tard, il fait de même, pour l'ensemble des services postaux de Méditerranée, en faveur de la Compagnie des Messageries Maritimes. En contrepartie d'obligations de service public, le concessionnaire bénéficie d'une exclusivité et d'une subvention. Dans un premier temps, c'est un succès, marqué par l'extension des concessions (Atlantique sud, Pacifique, océan Indien). Au fil des ans, cependant, le système se transforme en carcan pour les deux partenaires. Ce renouvellement de la concession en 1911 instaure un régime aménagé (contrôle financier accru de l'État, participation de ce dernier aux bénéfices et révisabilité de la subvention). Mais la réforme n'est pas suffisante, d'où le renforcement de l'emprise publique après la première guerre mondiale.Creation, in XIXe century France, of regular maritime postal public services by steamships led to make a choice between two way of management, state control or concession. In 1837 the service was created in the Mediterranean, with the first formula: it was a technical success, but a financial disaster. The disengagement of the state was progressive: according to the English model, the government grants as soon as 1850 postal relation between France and Corsica to a private firm, and in 1851 for all postal services in the Mediterranean, in favour of the Compagnie des Messageries Maritimes. Against public service obligations the concessionaire enjoyed exclusivity and subventions. It was first a success that results in an extension of concession (South Atlantic, Pacific, Indian Ocean), but the system turned to a yoke for both parties. The renewal of the concession in 1911 instituted an adjusted system (financial control of the State, participation of the State to the benefits, revisability of subvention). But reform was not sufficient and the state control is reinforced after the First Word War.
- Nationalisation and Privationsation - Ownership, Markets and the Scope for Introducing Competition into the Electricity Suppoly Industry - Martin Chick, H. Viv. Nelles p. 277 Dans une approche plus générale d'examen de la nationalisation et de la privatisation, de l'industrie offreuse d'électricité, il convient de se focaliser sur la question de l'introduction de la concurrence au sein de cette même industrie. Cela produit une analyse comparative des différentes approches des modes de restructuration, que ce soit en Angleterre ou au Pays de Galles, en Californie ou en Europe, ici en réponse au défi de la directive européenne. Les différentes invitations à encourager l'investissement futur sont analysées en prenant en compte les efforts en vue de construire des arrangements concertés qui encouragent les producteurs habituels à optimiser leur efficacité et à transmettre ces gains d'efficacité aux consommateurs.In the context of examining the nationalisation and privatisation of the electricity supply industry, this paper examines the scope for introducing competition into the industry. It makes an internationally comparative analysis of the differing approaches to the issue of restructuring, whether in England and Wales, California or in a Europe challenged by the European Directive. The complex issues of providing sufficient incentives to encourage future investment are examined alongside efforts to construct Pool arrangements which encourage current producers to optimise efficiency and pass those benefits on to consumers.