Contenu du sommaire
Revue | Etudes anglaises |
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Numéro | Volume 61, octobre-décembre 2008 |
Texte intégral en ligne | Accessible sur l'internet |
Articles
- Everyman and the bowels of tragedy - Claire Vial p. 387-399 La moralité Everyman ajoute à une économie de moyens, qui la démarque des moralités contemporaines, une formidable puissance évocatrice. Si la pièce correspond avant l'heure aux exigences formelles de la tragédie classique, elle est plus encore remarquable par sa capacité à mettre en œuvre en un même élan le mouvement fondamental propre à l'itinéraire tragique et la révélation de l'efficacité sacramentelle. Le personnage principal — et le spectateur avec lui — voit son monde intérieur de croyances et de fragiles prétextes extirpé, percé à jour puis mis à l'épreuve de l'horizon incertain du salut, selon un mouvement d'extériorisation qui tient autant du dramatique que du spirituel. Cette projection de l'intériorité conduit à une prise de conscience qui est mesure de soi et accession à la connaissance de Dieu. L'évolution du pouvoir démiurgique du personnage, le registre métaphorique de la pathologie physique et morale et les métamorphoses du langage parémiologique tressent un réseau dramatique qui fait remonter la pièce aux sources mêmes de la tragédie.Everyman is a play combining utmost sophistication and stark simplicity. Its ethics and aesthetics of deprivation are counterbalanced by a wide ranging power of evocation. On a surface level, the play meets the requirements of classical tragedy, but its main characteristic is to present at the same time the quintessential movement inherent to tragedy and the revelation of sacramental efficiency. On both planes—dramatic and spiritual—the central character, and potentially the audience, undergoes a process that brings to the fore the inner world of the individual, its beliefs and motivations and confronts them against the horizon of salvation and damnation. The outward projections of the character's interiority are exposed, explained and transformed by the virtue of a double acknowledgement: the access to self-knowledge and to the knowledge of God. The development and loss of Everyman's demiurgic power, the pathological imagery and the metamorphoses of the paremiological language are so many red threads linking the play with the fundamentals of tragedy.
- « Strange things toward » (3.3.18-19) : King Lear, ou la perspective démembrée - Pierre Iselin p. 400-414 La question du grotesque dans King Lear a fait l'objet de plusieurs études, où la notion reçoit des définitions divergentes, voire contradictoires. La pièce paradoxale de Shakespeare, rebelle à la classification générique, fait défiler des « peintures fantasques », images verbales et scéniques du renversement, de la déformation, du démembrement et de l'hybride, qui échappent à l'interprétation univoque. Le grotesque y prolifère en sparagmos de la perspective.The question of the grotesque in King Lear already has a long critical history, and the notion has received diverging, even contradictory, definitions. Shakespeare's paradoxical play, which is characterized by a deep distrust of attempt at generic classification, displays a pageant of “fantasticall pictures,” verbal and scenic images of inversion, distorsion, dismemberment and hybridity, which elude univocal interpretation. Operating as a sparagmos of fixed perspective, the grotesque is ubiquitous.
- Secret Passages in Jane Eyre - Catherine Lanone p. 415-426 Jane Eyre est le roman du secret — secret de l'auteur, d'abord, qui tout en souhaitant ardemment la publication opta pour le pseudonyme masculin de Currer Bell ; secret de l'intrigue ensuite, qui décline sa quête herméneutique, pour reprendre le terme de Barthes, de la chambre écarlate de Gateshead au trou obscur de la folle. Il s'agit ici d'adopter une perspective deleuzienne en analysant moins le connu du secret que la tension entre perception et imperceptible, la façon dont le secret est un contenu qui déborde toujours d'un contenant plus ou moins scellé (armoire, boîte, coffret, cellule) mais qui laisse filtrer le contenu et suinter le secret. Dans le cas de Jane Eyre, cette sécrétion se fait souvent par le biais du bruit parasitant la demeure, sème auditif égaré, rire à la fois sonore et éteint, sans joie, oxymorique. Le secret décline alors les profondeurs psychiques refoulées, tant l'indicible secret de l'autre qui vient s'encrypter (au sens d'Abraham et Torok) dans la psyché et opérer un véritable travail du fantôme dans la chambre rouge, que le premier mariage impur de Rochester. Mais la figure de la folle cristallise aussi tout un réseau d'interdits et de tabous liés à la société patriarcale du XIXe siècle, qu'il s'agisse de la crainte de la folie et de la sexualité féminine que du refus de l'autre issu des colonies. Enfin, Jane sait s'approprier le secret pour dissimuler partiellement son identité et se reconstruire. L'acte manqué qui rétablit sa signature à son insu participe d'un élan créateur qui libère le sujet et la parole autobiographique, libération que Brontë n'offrira plus à la narratrice homodiégétique de Villette.Secretly composed by a young woman using a masculine pen name, Jane Eyre is a novel that teems with secrets. Focusing on the function of sound, this paper seeks to analyse the layers of secrecy by combining a structural approach based on Barthes's hermeneutic quest, with a Deleuzian analysis less of the content of secrecy than on the way secrets become secretions. For Deleuze, secrecy is a dynamic process: something must ooze from the box, something will be perceived through the closed or partially opened container, whether room, closet, drawer, casket or box. From the red-room to the madwoman, Brontë dramatizes secrecy and secretion, unravelling mental conflict, dilemma or aporia (the crypt of the red-room or of the madwoman's den is enlightened by Abraham and Torok's theory of psychic concealment, as the crypt which entombs another's unspeakable, consummated desire); but secrecy for Deleuze is always a “collective assemblage,” determined by social pressure, and the secrets of Jane Eyre have crucial social and racial implications. Finally, in this feminine, not to say feminist novel before the word, Jane learns to subvert secrecy and use it to rebuild her own, stable self, before being allowed to retrieve her name and signature and voice her own story in her powerful autobiography.
- Présences linguistiques, absences critiques dans In Custody d'Anita Desai - Émilienne Baneth-Nouailhetas p. 427-439 In Custody, roman ostensiblement centré sur la pratique des langues et de leur transmission, est traversé par les absences poétiques et textuelles des langues concernées, le hindi et l'ourdou. Cet article tente d'examiner les causes poétiques, et les conséquences politiques, de ces silences linguistiques.In Custody is a novel ostensibly centred on the practice and transmission of languages, yet the languages it targets, Hindi and Urdu, are poetically and textually absent from it. This article attempts to examine the poetic reasons for these core absences, and the political consequences of these linguistic silences.
- « Of a Negro, a Butler and a Grocer » (Jekyll 7)?Ignatius Sancho's epistolary contribution to the abolition campaign (1766-1780) - Françoise Le Jeune p. 440-454 Cet article analyse la correspondance d'Ignatius Sancho, publiée par deux éditeurs blancs après la mort de cet ancien esclave ayant vécu toute sa vie sur le territoire britannique. Durant une dizaine d'années, de 1773 lorsque Sancho s'installa comme épicier à Londres jusqu'à 1780, année de son décès, l'ancien esclave devenu commerçant correspondit avec de nombreux clients de la meilleure société londienne rencontrés alors qu'il était le majordome du duc de Montagu. Pour les deux éditeurs de Sancho, la publication de sa correspondance mettait en accusation les thèses de l'époque selon lesquelles l'homme noir était inférieur intellectuellement à l'homme blanc, voire dénué d'intelligence. Une grande partie de ses échanges épistolaires est destinée à des fins commerciales. Il est essentiel pour l'épicier de Westminster de rester en bons termes avec ses prestigieux clients. Cependant, certaines lettres échangées avec des correspondants vivant à l'étranger ou avec l'un de ses jeunes protégés noirs, portent sur l'inhumanité de l'esclavage dont ses parents et lui-même ont souffert. L'analyse de ces quelques lettres qui contrastent avec le ton respectueux des missives commerciales va révéler les difficultés qu'éprouve cet homme à s'intégrer dans la société blanche et huppée de Londres à laquelle il veut s'identifier. Pourtant son souhait d'aider ses frères africains le taraude. Il s'en ouvre à Laurence Sterne en 1766, sans grand résultat. Il ne souhaitera plus poursuivre cette cause trop militante par la suite, par crainte de compromettre son commerce, la bonne société londonienne ne s'intéressant nullement à l'esclavage en 1780.This article will examine the letters of Ignatius Sancho, the first former slave to have his correspondence published in England by two white editors. These letters were written in the course of several years from the moment he established himself as a grocer in London in 1773, with the financial support of his master the Duke of Montagu, to the time he died in 1780. He greatly admired Laurence Sterne to whom he wrote for the first time in 1766 to ask him to write in favour of the abolition of slavery. Apart from this militant letter, Sancho rarely adopted a radical tone in his letters to prominent members of the society. But at times, when writing to a foreigner or someone residing outside of England or one of his black protégés, he expressed his views on the status of black people in Britain, as well as on the fate of his African brothers transported to the West Indies. The analysis of the letters evoking slavery will enable us to examine the uncomfortable position of this former black slave, whose commercial and epistolary connections within London's fashionable society led him to evade any unpalatable topics which might impair his business and his integration in those social circles, for whom the question of slavery and slave trade was far remote from their everyday concerns.
- Subordination and the English Infinitive - Pierre Cotte p. 455-468 Cet article étudie la proposition infinitive en to de l'anglais dans le cadre de la subordination. Ce type d'organisation syntaxique est d'abord rapporté à la coordination, puis à la structure de la proposition. L'hypothèse est faite que les hiérarchies syntaxiques et sémantiques de la proposition traduisent une conceptualisation implicite des procès comme entités dépendant de référents nominaux. La contribution à la phrase complexe d'une proposition subordonnée est alors plus importante qu'il n'est admis. L'analyse des phrases complexes de jugement montre que certaines propositions en to sont mieux intégrées aux propositions supérieures que ne le sont d'autres subordonnées. On propose aussi que, dans de telles phrases, to est modal et apparaît dans des contextes impliquant une visée.This paper examines the English “To-Infinitive” in the context of subordination. This type of syntactic organization is first compared with coordination, and is then related to the structure of the clause. It is hypothesized that the syntactic and semantic hierarchies to be observed in the clause reflect our conceptualization of situations as entities which are essentially based on nominal referents. In this perspective the contribution of a lower clause with a nominal function to the sentence in which it occurs is perhaps more essential than is generally admitted. The analysis of complex sentences expressing judgements shows that to-infinitive clauses are sometimes more narrowly integrated into their higher clauses than other subordinate clauses may be. It is also shown that in those sentences to has a modal signification and is used in contexts which involve the representation of a polarity.
- Everyman and the bowels of tragedy - Claire Vial p. 387-399
Comptes rendus
- Comptes rendus - p. 469-496
Notes de lecture
- Notes de lecture - p. 497-500
In Memoriam
- In Memoriam Derek Brewer : (13 juillet 1923-23 octobre 2008) - André Crépin p. 501-502
Revue des revues
- Revue des revues - p. 503-507