Contenu du sommaire : La pénurie d'eau : donnée naturelle ou question sociale ?

Revue Géocarrefour Mir@bel
Numéro volume 80, no 4, 2005
Titre du numéro La pénurie d'eau : donnée naturelle ou question sociale ?
Texte intégral en ligne Accessible sur l'internet
  • La pénurie d'eau, donnée naturelle ou question sociale ? - Jean-Paul Bravard p. 257-260 accès libre
  • Quels indicateurs pertinents de la pénurie d'eau ? - Jean Margat p. 261-262 accès libre avec résumé
    Le ratio ressources en eau (naturelles et moyennes) par habitant, associé à un seuil convenu, est l'indicateur de pénurie d'eau (structurelle) le plus couramment utilisé, surtout pour des comparaisons entre pays et en prospective. Sa signification dépend cependant beaucoup de la définition du terme ressource et du choix du territoire de référence de la population comme de la ressource. L'extrême disparité des demandes en eau réelles par habitant, en fonction notamment du climat dans le monde, empêche un indicateur de pénurie d'eau rapporté à la population d'être universel.
  • Lorsque la pénurie fait ressource. Etude géographique de la notion de ressource. L'exemple de la politique de l'eau au Maroc - Olivier Alexandre p. 263-272 accès libre avec résumé
    L'intérêt accordé collectivement à la ressource en eau dépend de la manière d'appréhender le phénomène pénurie, construit dans le rapport de la demande à l'offre en eau. La notion de ressource renvoie ici à la pérennisation de l'eau pour son utilisation, notamment économique. L'histoire de l'aménagement hydraulique se constitue ainsi autour de la volonté de se dégager des contraintes naturelles, sécheresse ou crue, identifiées de manière conjoncturelle en termes de besoin et de vulnérabilité. De quelle manière la dimension exceptionnelle de la pénurie construit-elle et est-elle construite par la pérennité que sous-entend la ressource ? L'enjeu de cet article est de comprendre comment la pénurie, construit social, est l'objet d'intentions propres. Parce qu'elle donne sa valeur à la ressource et parce qu'elle permet de mobiliser l'ensemble des acteurs de l'eau.
  • Le commerce de l'eau virtuelle : du concept à la politique - Lysiane Roch, Corinne Gendron p. 273-284 accès libre avec résumé
    Alors qu'un nombre grandissant de pays fait face à un problème de pénurie d'eau, de nouveaux moyens d'augmenter l'offre ou de réduire la demande tendent à émerger. C'est ainsi qu'on a pu remarquer que dans certaines régions, les importations alimentaires augmentent au fur et à mesure que les ressources en eau s'épuisent. De ce constat est né le concept d'eau virtuelle, qui cherche à rendre compte du rôle que joue le commerce international dans un contexte de pénurie d'eau. L'eau virtuelle peut se définir comme l'eau qu'a nécessitée la production d'un bien. Lorsqu'un pays importe ce bien, des denrées agricoles par exemple, il n'a pas à utiliser l'eau qui aurait été nécessaire à sa production. Sachant que les ressources en eau sont très inégale-ment réparties sur la planète et que l'agriculture est le plus grand consommateur mondial d'eau, peut-on considérer le commerce de l'eau virtuelle comme un moyen potentiellement efficace de diminuer les pénuries et leurs consé-quences ? Notre analyse montre plutôt que, non seulement le commerce de l'eau virtuelle constitue une stratégie présentement peu appliquée, mais que son potentiel face aux défis de la rareté de l'eau est très faible lorsqu'on considère le contexte politico-économi-que dans lequel il prend place.
  • La goutte d'eau qui fait déborder? - Annabelle Houdret p. 285-295 accès libre avec résumé
    ?Les prochaines guerres seront conduites pour l'eau? déclara le président de la Banque Mondiale, Ismail Serageldin, en 1995, en prévoyant de potentielles opérations armées entre États. Il fut largement soutenu dans sa vision par le secrétaire général de l'ONU de l'époque, B. Boutros Ghali, ainsi que par de nombreux médias. Mais, face à la pénurie alarmante de l'eau, observe-t-on effectivement l'éclosion de conflits armés entre États ? Dans cet article, nous arguons du fait que la guerre de l'eau entre États n'a que très rarement lieu. Cependant, le danger de conflits à l'intérieur même des pays est beaucoup plus sérieux. Après un détour par la « géographie politique de la pénurie d'eau », les conditions de coopération et de conflit sont alors étudiées aux deux niveaux inter- et infra-étatiques.
  • Conflits et coopération liés à l'eau du fleuve Sénégal - Martin Kipping p. 335-347 accès libre avec résumé
    La recherche sur ?l'hydropolitique? - c'est-à-dire les conflits et la coopération liés à l'eau douce - a pu montrer que jamais une guerre internationale n'a été menée à cause de l'eau au cours de notre ère. Néanmoins, le discours ?néo-malthusien? dominant continue à faire croire que des pénuries d'eau provoquent nécessairement des conflits et nuisent à la coopération entre les riverains de fleuves partagés. Le cas du fleuve Sénégal en Afrique de l'Ouest permet de mettre en question cette perspective : d'un côté, trois des Etats riverains - le Mali, la Mauritanie et le Sénégal - ont intensifié leur coopération au sein de l'Organisation pour la Mise en Valeur du Fleuve Sénégal (OMVS) en mettant en ?uvre un programme d'infrastructure commun (deux barrages) après le début de la grande sécheresse de 1968-1973. De l'autre côté, la Mauritanie a connu l'expulsion sanglante de groupes de sa population vivant dans la vallée du fleuve en 1989-1990, après que leurs terres aient pris de la valeur suite à l'accroissement de l'eau d'irrigation disponible grâce aux barrages. Ainsi, une corrélation ?anti-malthusienne? existe entre l'offre d'eau disponible et le degré de conflit ou de coopération dans ces deux cas. L'article explore les causes derrière cette corrélation. Il montre que la sécheresse a augmenté l'intérêt des États riverains pour le développement commun du fleuve et leur a permis d'obtenir les finances nécessaires de la part des bailleurs de fonds. C'est la raison pour laquelle la pénurie grandissante d'eau a été une condition nécessaire à la coopération intensifiée autour du fleuve Sénégal. Concernant le conflit mauritanien, l'auteur montre que l'augmentation de la quantité d'eau d'irrigation a motivé en grande partie la ?saisie de terres? par l'élite maure, conduisant à l'expulsion de la population non maure de la vallée du fleuve. Ainsi, n'étant pas forcément une condition nécessaire, l'offre grandissante d'eau a néanmoins contribué de manière significative à ce conflit violent. En conclusion, l'auteur suggère que soit développée une recherche plus complexe sur les liens entre les pénuries d'eau et les conflits, qui devrait prendre en considération les intérêts précis des riverains. Sur le plan politique, il semble opportun de consacrer plus d'attention aux possibles conséquences non voulues de la coopération internationale liée à l'eau au sein même des pays concernés.
  • Gestion de la qualité de l'eau, conflits et risques dans la ville de Bangui (République centrafricaine) - Cyriaque-Rufin Nguimalet, Diana Alisson Balikouzou-Hinna, Silla Semballa p. 325-334 accès libre avec résumé
    La ville de Bangui, capitale de la République centrafricaine, souffre d'une insuffisance qualitative de la ressource hydrique pour les besoins de la population. Le manque d'eau propre et en suffisance rend nécessaire la sécurisation de l'eau potable. L'insécurité se caractérise par la vétusté du réseau d'eau, à l'origine de l'altération de la qualité de l'eau potable et de relations conflictuelles dont fait partie le ?doute? exprimé par les citadins quant à la qualité de la ressource. Une analyse de la qualité de l'eau potable isolée dans une canalisation à deux pas de temps (séjour de 6 jours et 2 mois) met en évidence une dégradation de la qualité de l'eau recueillie au robinet. Ces résultats, couplés à d'autres informations, renforcent l'incertitude planant sur cette ?eau? et permettent de définir trois niveaux imbriqués de conflits, impliquant les risques sanitaires. Ils rendent compte du comportement des acteurs qui hypothèque la gestion de la qualité de l'eau. Ainsi, l'usage combiné d'eau souillée et d'eau de robinet par les citadins pour combler les besoins amplifie les contraintes. Des esquisses de solutions sont proposées dans le but de réduire les contraintes posées par la qualité de l'eau et de pallier cette pénurie qualitative, ? conflictuelle? dans la ville de Bangui. La prise en compte d'un seuil de qualité garantirait une production d'eau propre à Bangui.
  • Une pénurie d'eau gérée par l'inégalité : le cas de la ville de Djibouti - Hassan-Omar Rayaleh p. 319-323 accès libre avec résumé
    La ville de Djibouti est confrontée depuis sa création à un déficit structurel de production d'eau par rapport aux besoins de sa population. Face à cette situation, l'Office National des Eaux de Djibouti a mis en place une stratégie de gestion de la pénurie qui se traduit par un certain nombre d'inégalités. Inégalité d'alimentation entre les espaces centraux de la ville, considérés comme prioritaires, et les périphéries urbaines qui reçoivent moins d'eau. Inégalité d'accès à l'eau entre les usagers solvables qui peuvent se raccorder au réseau et ceux qui ont recours au secteur informel pour leur alimentation. Inégalité enfin entre les consommateurs approvisionnés gratuitement en raison de leur statut socio-politique ou socio-ethnique et les autres qui paient leur consommation.
  • La « réhabilitation » du lac Karla (Grèce). Le développement durable en tant que réponse à la pénurie d'eau : discours et réalités - Christèle Allès p. 309-318 accès libre avec résumé
    L'assèchement du lac Karla en 1962 et l'explosion des cultures cotonnières dans les années 1980 ont engendré une situation de pénurie en eau dans la plaine orientale de Thessalie. La solution imaginée est la construction d'un réservoir, projet présenté comme la réhabilitation de tout un écosystème et prolongé d'un plan de réforme de la plaine sur le mode du développement durable. Cependant, le développement durable est utilisé comme une stratégie destinée à obtenir des financements de l'Union Européenne. L'application de ses principes est par conséquent incertaine. Malgré la prise en charge du projet par un petit groupe d'acteurs à l'échelon local, l'absence de débat public autour de l'aménagement nuit à l'appropriation du projet par les populations concernées.
  • Aspects de la pénurie hydrique et de sa gestion dans la Cévenne vivaraise (I : le XIXe siècle) - Nicolas Jacob-Rousseau p. 297-308 accès libre avec résumé
    Dans le domaine péri-méditerranéen, les besoins en eau ont souvent dépassé les ressources disponibles pendant la saison estivale comme l'atteste l'ancienneté de nombreux aménagements hydrauliques visant à atténuer ces situations de pénurie. Mais il reste encore très difficile de quantifier la pénurie et très malaisé de connaître l'action de la société locale et ses logiques de gestion avant une époque récente. En adoptant dans cet article un point de vue historique, on cherche à montrer que les archives léguées par le XIXe s. sont d'un grand intérêt pour comprendre à la fois les ressorts de la pénurie et les réponses apportées par la société. Le choix a été fait de présenter ici un espace de moyenne montagne péri-méditerranéenne : la Cévenne vivaraise, soit les hauts bassins de l'Ardèche et de ses deux principaux affluents, la Beaume et le Chassezac.
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