Contenu du sommaire : Religion et pouvoir légitime
Revue |
Rives méditerranéennes Titre à cette date : Rives nord-méditerranéennes |
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Numéro | no 19, 2004/3 |
Titre du numéro | Religion et pouvoir légitime |
Texte intégral en ligne | Accessible sur l'internet |
- Religion et pouvoir légitime : Christianisme, islam - p. 1
- Reges sunt vassali Ecclesie : Le pouvoir temporel selon Thomas d'Aquin - Jean-Paul Boyer p. 2 L'auteur de cet article s'interroge sur la cohérence du projet politique de Thomas d'Aquin, derrière les oppositions d'apparence. Elles ont conduit à des conclusions opposées sur l'opinion du docteur angélique, surtout quant aux rapports entre le temporel et le spirituel. Le nombre restreint d'écrits sur les pouvoirs laïques et leur éparpillement favorisent cette divergence des interprètes. Assurément, la valeur morale de la cité terrestre est abondamment célébrée, dans la continuité de l'aristotélisme. Toutefois, la clef du raisonnement thomiste réside dans la certitude que la grâce ne supprime pas la nature, mais l'accomplit. Même l'enseignement du Philosophe sert, donc, des conclusions théocratiques. La hiérarchie des fins leur donne une fermeté singulière. Une vision théologique totale gouverne les conceptions du Docteur commun.The purpose of our paper is to question the consistency of Thomas Aquinas' political plan, beyond the appearance of oppositions, which have produced diverging conclusions on the opinion of the Doctor angelicus, especially about the temporal-spiritual relationship. The scarcity of written documents on secular powers and their dispersal tend to favour discrepancies between interpreters. The moral value of the terrestrial city gets very good praise indeed, in keeping with the Aristotelian tradition. However, a basis of the Thomistic thought is the certainty that grace doesn't eliminate nature, but brings it to completion. Consequently the Philosopher's very teachings serve theocratic views. The hierarchy of the ends gives them a remarkable stability. A globalizing theological vision rules the conceptions of the Doctor communis.
- Le luthéranisme et le débat de la résistance 1529-1530 à 1546-1547 - p. 3 Le bilan, qu'on peut finalement tirer de cet exposé, est ambigu : selon le point de repère, celui des territoires et des villes autonomes ou celui de l'empire et aussi selon la partie du débat, théologique ou juridique, que l'on considère. En résumé, on peut retenir que l'extension du pouvoir légitime dans le milieu religieux de l'état territorial, qui était justifié de façon théologique, se trouve face à la limitation juridique et politique du pouvoir légitime de l'empereur qui déclare les actions unilatérales des autorités aussi et justement dans le milieu religieux radicalement inadmissibles. La lutte au sujet de la question de l'exercice du pouvoir légitime dans le milieu religieux dans l'empire à l'époque de la Réforme n'aida pas seulement à former les traditions autoritaires mais aussi les traditions libérales de l'histoire allemande.To sum up in a short way, let us point out this: on the one hand theological thinking allows at the level of territorial states and independent towns to extend legitimate power; on the other hand juridical-political arguments limit the legitimate power of the Emperor, especially (but not only) in the field of religious politics. They argue that decisions concerning religious questions have to been made in consensual ways.
- Qu'est-ce qu'un pouvoir légitime pour Calvin ? - p. 4 Si tout pouvoir est de Dieu, tout pouvoir est légitime, et, dès lors, la légitimité ne peut se penser dans les termes qui sont les nôtres aujourd'hui : aucune résistance ne paraît pouvoir être justifiée. Mais c'est peut-être mal penser le droit de résistance que de le fonder sur des revendications qui restent particulières, de telle sorte qu'il se ramènerait à des prérogatives individuelles opposables aux autorités politiques instituées. Ce n'est pas ainsi que nous pouvons fonder un tel droit. C'est ce que nous apprend la lecture attentive de quelques passages clefs de la réflexion politique de Calvin : en traduisant l'obéissance dans les termes de l'obligation, Calvin envisage la désobéissance légitime. C'est cette dernière que ses héritiers immédiats réinvestissent après la décision prise par Charles IX d'assumer l'élimination de ses sujets au motif qu'ils appartiennent à la religion prétendue réformée.If all powers originate from God, then any power is legitimate, and therefore legitimacy cannot be defined in our own contemporary terms: it seems that no resistance whatsoever could be justified. But aren't we giving the right of resistance a bad name if we base it on claims that are to remain special, that is to say if we equate it with individual prerogatives opposable to the established political powers. A right cannot be establish that way, can it? A close reading of some key passages of Calvin's political thought are to teach us just that. By presenting obedience in terms of obligation, Calvin considered that disobedience could be legitimate. Calvin's immediate successors were to resort precisely to that reasoning, after Charles IX of France had decided to eliminate subjects on the grounds that they belonged to the ‘so-called Reformed Religion'.
- Al-Mâwardî (m. 450/1058), le Qâdî Abû Ya?lâ (m. 458/1066) et les statuts du gouvernement (al-ahkâm al-sultâniyya) - p. 5
- Les contours d'une théorie islamique de la séparation de la religion et de l'État - p. 6 Cet article est centré sur la réflexion critique engagée par le cheikh azhariste égyptien Ali abd el Raziq dans les années vingt à propos de l'existence par lui contestée d'un modèle d'organisation de la cité censé découler de la lettre même de la religion musulmane. La thèse centrale qu'il défend consiste à démontrer, en prenant appui sur les textes fondateurs de la religion islamique (Coran, Sunna) et sur l'histoire de la civilisation islamique, que la séparation du spirituel et du temporel, de l'ordre religieux et de l'ordre politique, loin d'être contraire à l'enseignement général de l'islam, peut parfaitement se justifier d'un point de vue islamique. En d'autres termes, ce dignitaire religieux entend réfuter catégoriquement l'existence d'un supposé modèle islamique de gouvernement et en appelle en fait à la réaffirmation de la primauté du message spirituel sur les considérations politiques contingentes relatives à l'organisation de la cité, laissée à la libre détermination des hommes.Our present article revolves on the critical reflection initiated by Egyptian al-Azhar professor Sheik ‘Ali ‘abd al-Raziq in the twenties of the 20th century about a model of the city supposedly issued from the muslim religion, a concept he refused to endorse. His key reasoning was to demonstrate, basing himself on fundamental texts of Islam (the Koran and the Sunna) and on the history of Islamic civilization, that a separation of the spiritual and the temporal, of the religious and the political, far from being contrary to the teachings of Islam in general, could be justified from an Islamic standpoint. In other words, this religious dignitary had in mind to refute the existence of a so-called Islamic model of government and reasserted the prime role of the spiritual message well beyond contingent political considerations about the city organization to be left to the free decision of men.