Contenu du sommaire : Acharnements législatifs
Revue | Plein droit |
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Numéro | no 59-60, mars 2004 |
Titre du numéro | Acharnements législatifs |
Texte intégral en ligne | Accessible sur l'internet |
Édito
- Au nom de l'insécurité... - p. 1-2
Acharnements législatifs
- Les prostitués, victimes de l'obsession sécuritaire - Johanne Vernier p. 31-34 Loin de renforcer les droits des personnes étrangères prostituées, la loi sur la sécurité intérieure opte pour une large répression de tous les acteurs de la prostitution. Appréhendées avant tout comme délinquantes et rarement comme victimes, elles se voient infliger des sanctions au nom de la lutte contre la criminalité organisée, notamment l'immigration irrégulière.
- L'intégration, alibi de la précarisation - Danièle Lochak p. 3-6 En précarisant encore un peu plus la situation de ceux qui, pourtant, ont vocation à s'établir et demeurer en France, la loi Sarkozy s'inscrit dans la continuité des textes précédents. Mais elle innove en ce qu'elle justifie cette précarisation, non seulement par la nécessité de lutter contre la fraude (voir article p. 7, « Un récurrent soupçon de fraude »), mais aussi et surtout par l'objectif d'intégration. L'intégration devient ainsi, paradoxalement, l'alibi de la précarité du séjour.
- Un récurrent soupçon de fraude - Nathalie Ferré p. 7 Toutes les réformes du statut des étrangers en France, intervenues à la suite de la fermeture des frontières à toute immigration nouvelle de main-d'œuvre, ont comporté un volet important au service de la lutte contre l'immigration clandestine. La loi du 26 novembre 2003 n'échappe pas à la règle : cette lutte est même devenue une obsession. Le législateur franchit un pas de plus en achevant le portrait de l'étranger fraudeur, usurpateur de qualité, presque vicieux dans sa détermination à rester sur le territoire où il n'est pas désiré.
- Naïma et Rachid au pays des maires - Christophe Daadouch p. 11-13 Ces dernières années Plein droit avait eu à relever de graves atteintes aux droits fondamentaux des étrangers émanant de municipalités de droite comme de gauche : atteinte au droit d'accueillir, à la liberté de mariage, au droit à l'école, etc... La loi Sarkozy, en décentralisant à l'excès la politique migratoire déploie un tapis rouge à ces pratiques sur lequel ne manqueront pas d'être piétinés les derniers droits fondamentaux des étrangers.
- Délit de solidarité - Violaine Carrère, Véronique Baudet p. 14-17 Institué initialement pour lutter contre les réseaux qui aident les étrangers à entrer ou se maintenir illégalement sur le territoire, le délit « d'aide à l'entrée, à la circulation et au séjour d'un étranger en situation irrégulière » a aujourd'hui un champ tellement large que les immunités protégeant les proches parents, et sous certaines conditions les associations, apparaissent bien illusoires. Face à l'aggravation, dans la réforme 2003, des sanctions punissant ce délit, des associations ont cherché à interpeller l'opinion sur l'incrimination de l'aide et du soutien aux étrangers, en inventant l'expression « délit de solidarité ».
- L'asile dans le pot commun de l'immigration - Jean-Pierre Alaux p. 18-22 Comment faire pour que l'asile demeure une des valeurs idéologiques de référence de la République française et pour que, dans le même temps, la plupart des victimes de persécutions ou d'atteintes à leurs droits fondamentaux ne puissent en bénéficier ? Telle est la question que s'est posée le gouvernement Raffarin à l'occasion de sa réforme du 10 décembre 20031. Il n'est pas le premier.
- Double peine : une réforme de dupes - Stéphane Maugendre p. 23-26 Pendant près de deux ans, un grand nombre d'associations regroupées autour de la Cimade et de la campagne « Une peine ./ », ont défendu une plate-forme demandant la suppression de l'interdiction du territoire français (ITF) et un encadrement très strict de l'expulsion. L'habileté du ministre de l'intérieur, Nicolas Sarkozy qui, à peine nommé, annonçait la suppression de la double peine a fait voler en éclats le consensus de cette campagne et surtout fait passer dans tous les esprits une idée fausse reprise très largement par les médias, le monde associatif et les étrangers eux-mêmes. Or, la double peine existe toujours et peu de choses ont fondamentalement changé.
- Quand le pénal envahit le droit des étrangers - Claire Saas p. 27-30 Au prétexte de lutter contre toutes les formes de délinquance, le législateur a adopté, avec la loi sur la sécurité quotidienne (LSQ), des mesures dont l'étendue dépasse tout entendement. On pouvait néanmoins reconnaître à la LSQ son absence de discrimination directe à l'égard des étrangers. La situation est tout autre avec la loi sur la sécurité intérieure (LSI). La présence, dans cette dernière, de dispositions qui concernent exclusivement le droit des étrangers en France est la preuve d'une tendance de plus en plus importante à recourir au droit pénal comme instrument de lutte contre l'immigration.
- Sans-papiers : la fin des soins ? - Adeline Toullier p. 35-38 Depuis que la loi Pasqua, en 1993, a subordonné l'accès à une protection maladie à la régularité de séjour, la couverture sociale des sans-papiers n'a cessé de se dégrader. La création de la CMU, si elle a eu des effets positifs indéniables, a renforcé leur mise à l'écart en les cantonnant à l'aide médicale État. Aujourd'hui, c'est cet ultime dispositif qui est sévèrement menacé.
- Pénalisation des travailleurs : partie remise ? - Alain Morice p. 39-44 A l'occasion de l'examen du projet de loi Sarkozy à l'Assemblée nationale, les députés ont tenté de sanctionner pénalement les étrangers exerçant une activité salariée sans autorisation. Si elle avait abouti, cette tentative aurait ouvert une brèche dans le dispositif actuel de lutte contre l'emploi illégal, en instituant une culpabilité conjointe de l'employeur et de l'employé.
- L'harmonisation communautaire : objectif ou alibi ? - p. 45
- L'asile menacé par l'harmonisation - Pierre Monforte p. 46-49 Le processus européen lancé en octobre 1999 à Tampere s'inscrivait dans une optique de long terme en fixant comme objectif la mise en place d'une véritable politique commune en matière d'asile. Aujourd'hui, la loi Sarkozy-Villepin modifiant la législation française relative à l'asile montre à quel point le processus communautaire n'est plus perçu par les États membres de l'UE que comme un moyen de justifier l'adoption de normes et de mesures opérationnelles mettant en danger le droit d'asile.
- L'Europe contre le regroupement familial - Claire Rodier p. 50-53 Après trois années de discussions, la directive relative au droit au regroupement familial a été adoptée par le Conseil de l'Union européenne le 22 septembre 2003. Cette « loi européenne » représente une étape importante dans la construction d'une politique commune d'immigration. C'est en effet le premier texte législatif qui traite de l'intégration des étrangers en situation régulière. Cette directive est par conséquent dotée d'une forte charge symbolique, qui accentue d'autant le décalage entre les attentes qu'elle a suscitées et le contenu de sa version définitive. Car, chez certains observateurs, c'est de la déception, voire de l'indignation qu'a suscitée l'annonce de son adoption.
- Consensus sur les charters - Claudia Cortes-Diaz p. 54-58 L'exercice, par l'Italie, de la présidence de l'Union européenne au cours du deuxième semestre de l'année 2003 n'a pas toujours suscité l'enthousiasme de ses partenaires, du fait notamment de plusieurs déclarations jugées intempestives et déplacées du chef de gouvernement, Silvio Berlusconi. Les initiatives italiennes ont cependant rencontré un large consensus dans le domaine de l'asile et de l'immigration lors de la présentation, à la table de négociations, de deux textes relatifs au retour des ressortissants des pays tiers en séjour irrégulier sur le territoire de l'Union européenne, thème cher à l'ensemble des pays membres.
- Les prostitués, victimes de l'obsession sécuritaire - Johanne Vernier p. 31-34
Jurisprudence [Cahier central]
Hors Dossier
- L'asile et l'intime conviction du juge - Jean-Michel Belorgey p. 59-61 Quels sont les éléments sur lesquels se fonde le juge pour se forger une intime conviction en matière de contentieux du droit d'asile ? L'essentiel repose sur la plausibilité du récit et la pertinence des pièces produites par le demandeur d'asile mais la suspicion de fraude qui pèse sur chaque requérant et la fragilité de certains témoignages font souvent peser un doute qui rend ce contentieux étrange et incertain.
- Collectivement, contre les discriminations - Christian Saout p. 62-65 Quand, à la fin de l'année 2002, le gouvernement décide la mise en place d'une autorité indépendante de lutte contre les discriminations, le terrain n'est pas vierge et de nombreuses associations mènent un combat sur ce sujet depuis plusieurs années. Le travail accompli depuis, visant à élargir le cercle des partenaires et la prise en compte du plus grand nombre possible de discriminations a abouti à préciser les contours de cette autorité indépendante, ses compétences et ses moyens d'action.
- Une nouvelle convention pour les migrants - p. 66-68 Un nouveau texte conclu sous l'égide de l'ONU est entré en vigueur le 1er juillet 2003. Bien que l'utilitarisme migratoire ait davantage guidé son contenu que la promotion de l'état de droit, il n'en reste pas moins que cette convention réaffirme et protége les droits fondamentaux des travailleurs migrants tout au long du processus de migration et sans exigence systématique de la régularité d'entrée et de séjour. Un outil précieux si s'ajoutaient quelques ratifications d'États d'immigration, notamment de pays d'Europe.
- L'asile et l'intime conviction du juge - Jean-Michel Belorgey p. 59-61