Contenu du sommaire : Asie : aménagement et environnement
Revue | Les Cahiers d'Outre-Mer |
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Numéro | no 244, octobre-décembre 2008 |
Titre du numéro | Asie : aménagement et environnement |
Texte intégral en ligne | Accessible sur l'internet |
- Quarante ans de politiques forestières en Indonésie, 1967-2007 : la tentation de la capture par les élites - Frédéric Durand, Romain Pirard p. 407-431 L'exploitation des forêts en Indonésie a connu un essor considérable à partir de 1967 avec l'arrivée au pouvoir du général Suharto. En quarante ans le pays a traversé trois grandes périodes, plus caractérisées par la recherche de profits immédiats ou la définition de politiques en réaction à des constats d'échecs, que par de véritables politiques d'aménagement à long terme : 1) exploitation du bois brut ; 2) essor de l'industrie du contreplaqué ; 3) essor de l'industrie papetière et soutien au reboisement à grande échelle. La gestion forestière, qui a également été influencée par la crise asiatique de 1997-1998 et par la mise en œuvre de la politique d'autonomie régionale en 1999, se trouve aujourd'hui face à de nouvelles options : revalorisation de la foresterie communautaire, écocertification, mécanismes de « déforestation évitée », des mécanismes prometteurs mais difficiles à mettre en œuvre. En même temps les pressions exercées sur les forêts denses ne cessent d'augmenter avec de vastes incendies pendant les sécheresses prolongées lors des épisodes intenses d'El Niño, et la tentation d'alimenter les usines de pâte à papier par des coupes rases de forêts naturelles ou de produire des agrocarburants avec l'huile de palme.Forty years of forest management policies in Indonesia, 1967-2007.
Forests in Indonesia have been managed increasingly since 1967 after Suharto took power and initiated development policies based on the country's abundant natural resources. During the past forty years three main periods can be identified regarding forest management in Indonesia: (i) roundwood production in primary natural forests, (ii) the development of an export-oriented plywood industry associated to large-scale forest concessions with selected logging systems, (iii) the extremely rapid expansion of the heavily subsidized pulp and paper industry combined with a strong but failed public support to the establishment of forest plantations mostly for pulpwood production. In the past decade forest management in Indonesia has been impacted by the financial crisis of the late 1990s and the abrupt decentralization policy that immediately followed Suharto's departure. Nowadays forest management thus faces new options for the future: the prioritization of community forestry in order to counterbalance industrial and illegal logging activities, eco-certification of timber companies, the implementation of a new “avoided deforestation” mechanism (REDD), which are all of them promising but difficult options to successfully implement. At the same time dense natural forests keep being pressured by several factors, such as repeated fires related to lengthy droughts, the temptation to allow mega pulp mills to get supplied through clear-cutting of natural forests, and the political will to support investments in the biofuel business. - Que sont devenus les transmigrants ? Vingt-cinq ans de transmigration dans le Centre-Kalimantan (Indonésie) - Olivier Sevin? p. 433-457 L'auteur, qui a participé à l'établissement des premiers villages de transmigration dans le centre de Kalimantan, dresse un bilan de l'opération 25 ans après l'installation des premiers colons. C'est l'occasion de s'interroger sur l'influence de ce programme de colonisation agricole assistée dans l'organisation régionale actuelle du centre de Kalimantan.Evaluation of transmigration settlements in Central Kalimantan 25 years ago (Indonesia).
The author who was in charge of the selection of suitable sites for transmigration settlements in Central Kalimantan 25 years ago, tries to evaluate the present condition of the villages, as well as the influence of the programme upon regional organization. - Entre marginalisation et démagogie : quelle place reste-t-il pour les communautés locales dans les aires protégées? ? - Manuel Boissière, Charles Doumenge p. 459-488 Depuis quelques années deux visions de la conservation de la biodiversité s'affrontent dans les débats internationaux et influencent les agendas politiques des décideurs. D'un côté, les « préservationnistes » prônent une protection forte des derniers lieux importants de la planète en termes de biodiversité. De l'autre, les « dévolutionistes » tentent d'attribuer un rôle clé aux communautés locales dans l'élaboration des stratégies de conservation et la gestion des aires protégées. Au-delà de ces discours, la réalité de terrain montre que les politiques de conservation font encore largement abstraction de la présence et des droits des communautés. Le concept même de conservation – bien public mondial à protéger – est imposé par la communauté internationale au détriment de toute implication des populations qui sont pourtant les premières touchées par les décisions. Dans cet article, nous montrons que les stratégies de conservation pourraient mieux prendre en compte les droits fonciers et d'usage des populations rurales, le respect des territoires sur lesquels elles vivent, et la reconnaissance de leur rôle dans la protection de ces espaces. Un équilibre est-il possible entre communautés locales et acteurs « forts » (états, ONG internationales, privés) quant aux prises de décision ? Faut-il partir des priorités des populations locales, de leur propre conception de ce qu'est une aire protégée, pour créer les zones de conservations et prendre des décisions à leur sujet ? À travers un certain nombre d'exemples pris en Asie-Pacifique (Papouasie Occidentale, Vietnam) et en Afrique (Gabon, Congo), nous montrons que la conservation de la biodiversité, même si elle est un problème global de la planète, reste d'abord une multitude de situations à gérer au cas par cas. Chaque exemple démontre que la solution est bien locale et ne peut faire l'économie de l'intégration dans ce processus des populations qui sont ou pourraient être, si les conditions de démocratie et de transparence sont réunies, un des meilleurs garants d'un usage durable des ressources naturelles.In this paper, we show how conservation strategies could better take into account local land rights and land uses, and acknowledge the role of local people in the management and preservation of their natural resources. Is a balance possible between local communities and “powerful” stakeholders (government, international NGO, private sector) in decision-making? Should local priorities and local conceptions of conservation be the starting point to create protected areas and to take decisions about them. We use some examples from our work in Asia-Pacific (Vietnam, West Papua) and in Africa (Gabon, Congo) to show that biodiversity conservation - even if it remains an international issue - is beforehand a number of situations to be managed locally. Each example underlines the fact that the solution is site specific, and cannot avoid the integration in this process of populations, which are, or could be, with adequate conditions of transparency and democracy, one of the best guarantee for natural resources long-term utilization.
- Ces îles qui disparaissent. Le cas particulier d'Okinotorijima (Japon, mer des Philippines) - Jean-rené Vanney p. 489-506 Okinotorijima (ou Parece Vela), l'île la plus méridionale et la plus tropicale du Japon, est un micro atoll désert (un récif annulaire et trois minuscules rochers), perdu en plein milieu de la mer des Philippines, par 20°24'N et 130°02' E, à plus de 1 700 km de Tokyo. Son problématique avenir fait actuellement l'objet d'un débat. La survie de cet avant-poste de la souveraineté territoriale japonaise dépend : de la subsidence ininterrompue de son substratum depuis la mort de l'arc insulaire qui le supporte ; de l'active érosion marine opérée par les agents physiques et biologiques ; du rehaussement accéléré du niveau moyen de l'océan ; et de la réussite des gros et coûteux travaux (digues, bétonnage) engagés pour lutter contre la récession insulaire. Situé sur la route maritime la plus fréquentée du monde, centre d'une zone économique exclusive (ZEE) revendiquée par le Japon, Okinotorijima présente un intérêt géostratégique considérable. Le débat actuel porte sur le double statut géographique et juridique des îles « artificialisées ».On the wrecking islands. The Okinotorijima special case (Japan, Philippine Sea).
Okinotorijima (or Parece Vela) is the southernmost and the most tropical Japanese island. This uninhabited micro-atoll (a submersible annular reef, three tiny rocks), isolated some 1 700 km from Tokyo, in the Philippine Sea (20°24'N, 130°02'E), is the subject of a multifaceted problem and debate relative to its near future. The surface persistance of this Japanese territorial sovereignty outpost depends upon : (1) the permanent subsidence of its remnant insular arc basement ; (2) the active denudation by physical-biological marine processes ; (3) the submergence by the mean sea-level rising ; and (4) the success of heavy and expensive protection works (sea walls, concrete revetments, etc.) against the insular recession. Situated on the centre of a Japan claim on a very extensive EEZ (exclusive economic zone), heavyest maritime route in the world, Okinotorijima presents a major geostrategic interest. The present-day debate is focused on the geographic and legal statutes of oceanic islands in artificial survivance. - Déforestation et érosion des sols dans les montagnes karstiques du Guizhou, Chine - Nathalie Vanara, Richard Maire p. 507-532 La Chine est confrontée à une catastrophe écologique majeure liée à son développement économique accéléré. Le Sud-Ouest karstique de la Chine était le domaine de la forêt sempervirente sclérophylle, bien adaptée au milieu de moyenne montagne calcaire subtropicale. Mais la destruction des forêts primaires ne permet pas d'observer fréquemment la végétation climacique. Dans le Guizhou, les chiffres officiels attribuent une superficie de 30 % pour les forêts. Or les observations de terrain montrent que les forêts vraies représentent nettement moins de 10 % de la superficie. Les causes de la déforestation sont multiples. L'exploitation du milieu s'est développée dès le XIIIe siècle en raison de la croissance de la population, des progrès de l'agriculture et des techniques d'aménagement. Mais la tendance s'est accentuée au XXe siècle durant trois périodes : la réforme agraire de la République Populaire dans les années 1950, l'industrialisation des campagnes durant le « Grand Bond en Avant » de 1958-1961 et les réformes de Deng Xio Ping à partir des années 1978-80. Les indicateurs de la déstabilisation des milieux sont la turbidité des rivières, la dégradation des couvertures pédologiques et la constitution de jeunes stone forests et les épaisses séries détritiques piégées dans l'endokarst.Deforestation and soil erosion in the karstic mountains of Guizhou, China.
China is confronted with a major ecological disaster at the time of its quickest economic expansion. The karstic south western China was covered by subtropical evergreen sclerophylle forest fitting its calcareous substratum. But this climacic vegetation is almost no more existing because of a ravenous and lasting destruction. Official data credit 30 % of the total surface to forest. But according to direct and satellite observations, the forest cover in fact less than 10 % of the area. There are varied causes of deforestation which was already observed since the XIII century with an increasing population, the development of farming and the technic progress. But this tendancy drastically accelarated in the XXth with the rural reform of the Popular Republic in 1950, the country industrialization of the Great Forward Leap (1958-61) and the land Deng Xiao Ping policy (1978-80). The main indicators of the destabilization are rivers turbidity, recent erosion, new stone forests and thick endokarstic detritic series. - La zone de marché de Divisoria (Manille) : sa transformation par les nouveaux migrants de Chine continentale - Catherine Guéguen? p. 533-554 Les nouveaux flux de migrants de Chine continentale suscitent beaucoup d'interrogations. L'ouverture progressive de la Chine et l'augmentation du niveau de vie d'une partie restreinte de sa population lui permettent de voyager mais aussi par la simplification des procédures administratives de s'implanter de manière permanente ou temporaire à l'étranger. Les pays d'Asie du Sud-est qui abritent en leur sein des populations d'origine chinoise qui pour la plupart ont la nationalité du pays, sont confrontés à l'arrivée de populations de Chine continentale. L'impact de ces nouveaux migrants à l'échelle du quartier de Divisoria à Manille est significatif des multiples relations entre les populations chinoises implantées de longue date voire nées sur place et les nouveaux migrants de Chine continentale. Malgré l'opacité des données statistiques concernant les migrants de Chine continentale, l'étude de cet espace urbain relativement restreint contribue à révéler l'investissement des différents acteurs locaux dans leur implantation, qui sont souvent extérieurs à la communauté chinoise dans le cas des Philippines.The Divisoria market area (Manila) transformed by new migrants from continental China.
The new waves of Continental Chinese migrants involve many questions. The progressive opening of Continental China combined with the increase of financial capacity of a small portion of the global Chinese population let them free to travel. It's also possible with the less restrictive visa procedure through South East Asia and particularly in the Philippines which encourage continental Chinese migrants from Fujian to settle temporally or permanently in the country. The arrival of those Continental Chinese migrants disturbs in many ways the local Chinese communities settled and who embraced the citizenship of the country in which they lived. The area of the Divisoria market in the heart of Manila city is the place to study to analyze the multiple impacts of those migrants in term of human links with Chinese-Philipinos communities and local authorities. The Divisoria urban landscape translated those relations in spite of the unaccurate statistical datas concerning the continental Chinese migrants in the Philippines. - OLIVEAU Sébastien, 2005 ? Periurbanisation in Tamil Nadu a quantitative approach. CSH occasional Paper, Delhi, n° 15, 90 p. - Anthony Goreau p. 555-562