Contenu du sommaire : L'expérience soviétique à son apogée. Culture et société des années Brežnev II
Revue | Cahiers du monde russe |
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Numéro | volume 54, no 2-3, avril-septembre 2013 |
Titre du numéro | L'expérience soviétique à son apogée. Culture et société des années Brežnev II |
Texte intégral en ligne | Accessible sur l'internet |
Idéologie et dissidence : négocier les frontières de l'admissible
- Back-office Михаила Суслова или кем и как производилась идеология Брежневского времени - Nikolaj Mitrohin p. 409-440 L'article analyse le fonctionnement du Département de la Propagande et de l'Agitation de masse du comité central du PCUS entre le milieu des années 1960 et la fin de la première moitié des années 1980. C'est la première fois que se trouvent dévoilées les particularités de fonctionnement du centre qui, œuvrant dans l'ombre, coordonnait tout l'appareil soviétique de propagande. Il décrit de façon détaillée les attributions des services en charge du travail de propagande sous toutes ses formes, depuis l'invention de slogans de contre-propagande et celle de mythes anti-dissidents jusqu'au contrôle des sphères religieuses et sportives en passant par l'élaboration de programmes de formation pour les propagandistes de base. La deuxième partie de l'article porte sur l'examen des différents concepts idéologiques présents dans les rangs du personnel du département. Les opinions couvraient un large spectre, du soutien à l'idée « du socialisme à visage humain » au nationalisme russe. Parallèlement, même les principes fondamentaux de la ligne idéologique de Suslov se traduisaient par une multiplicité d'approches, qui allaient du marxisme académique scholastique à l'étatisme (gosudarstvenničestvo). Dans la dernière partie, l'auteur analyse le processus de formation des stéréotypes culturels chez les collaborateurs du département dont il est dit qu'il tient à la spécificité de l'école de l'époque stalinienne dans laquelle était formée la majorité des futurs collaborateurs du comité central.Mikhail Suslov's back office: The who and how of ideological production during the Brezhnev era
The article examines how the CPSU Central Committee Department for Agitation and Propaganda operated between the mid-1960s and the first half of the 1980s. It explores, for the first time, the workings of the center that coordinated the whole Soviet propaganda machine in the shadows. The article starts with a detailed analysis of the duties of the services responsible for different forms of propaganda. These ranged from coming up with counter-propaganda slogans and anti-dissident myths to controlling religion and sports, and included formulating training principles for rank and file propagandists. The second part of the article deals with various ideological concepts shared by the Propaganda Department's staff. Their views ranged from support for ‘socialism with a human face' to Russian nationalism. At the same time, even the tenants of Mikhail Suslov's mainstream ideology had many different approaches, from scholastic academic Marxism to Statism (gosudarstvennichestvo). In the third part, the author analyzes the formation of cultural stereotypes among the employees of the Propaganda Department, which, it is argued, is ultimately traceable to the specific environment of Stalin-era educational institutions, where most of the staff of the Central Committee apparatus received their schooling. - Les frontières du dicible : Du dialogue au silence. Les relations d'Andrej Saharov avec Hruščev et Brežnev - Susanne Schattenberg, Geneviève Bégou p. 441-466 Cet article décrit le contexte historique qui fut décisif dans l'engagement de Saharov à avertir les chefs du parti des dangers de la bombe H et à les appeler au respect des droits de l'homme. Il tente aussi d'étudier les différentes façons qu'ont eues Hruščev et Brežnev d'aborder les critiques de Saharov. Il ne fait pas qu'examiner les trois étapes du modèle du KGB, à savoir éduquer, avertir et seulement en dernier lieu arrêter les renégats, il apporte aussi un éclairage aux appels répétés d'Andropov à Brežnev l'invitant à s'entretenir avec Saharov. Bien que Saharov fût très désireux, lui aussi, de discuter avec Brežnev, la rencontre entre les deux hommes n'eut jamais lieu. Finalement, c'est dans le contexte de la guerre froide que le Politbjuro décida du meilleur moment pour se débarrasser de Saharov, en causant le moins de dommages possible au prestige de l'Union soviétique, et en rétablissant ainsi les limites du dicible.The limits of the sayable
This article describes the historical context that prompted Sakharov to warn party leaders of the dangers of the H-bomb and call for the respect of human rights. It also seeks to point out Khrushchev's and Brezhnev's different approaches toward Sakharov's criticism. In addition to discussing the threefold model of the KGB consisting in educating, warning and only finally arresting the renegades, it sheds light on Andropov's repeated appeals to Brezhnev to speak with Sakharov. Even though Sakharov himself was also eager to talk with Brezhnev, the two men never met. It was in the context of the Cold War that the politburo eventually decided when was the best moment to get rid of Sakharov, causing as less damage as possible to the Soviet Union's prestige and thus re-establishing the limits of the sayable. - From the big screen to the streets of Kaunas : Youth cultural practices and Communist Party discourse in Soviet Lithuania - Amanda Jeanne Swain p. 467-490 Le 18 mai 1972, environ 2 000 jeunes ont participé à une manifestation à Kaunas, en Lituanie soviétique. Cette protestation de masse faisait suite aux obsèques de Romas Kalanta, un jeune de 19 ans, qui s'était immolé le 14 mai. Les descriptions officielles des manifestations semblent présenter un discours stagnant sur les bonnes valeurs du communisme et une condamnation de l'influence des pratiques culturelles occidentales sur la jeunesse soviétique. Cet article avance, au contraire, qu'elles révèlent les failles des négociations entre les autorités et la jeunesse sur les limites acceptables des pratiques culturelles de la jeunesse soviétique et sur ses responsabilités sociales à la fin des années 1960 et au début des années 1970.On May 18, 1972, approximately 2,000 young people participated in a street demonstration in Kaunas, Soviet Lithuania. The mass protest followed the funeral of nineteen-year-old Romas Kalanta, who immolated himself on May 14. Official descriptions of the street demonstrations appear to present a stagnant discourse of proper communist values and a condemnation of the influence of Western cultural practices on Soviet youth. This article argues that, instead, they reveal the fault lines of negotiations between authorities and youth over the acceptable boundaries of Soviet youth's cultural practices and social responsibilities in the late 1960s and early 1970s.
- Back-office Михаила Суслова или кем и как производилась идеология Брежневского времени - Nikolaj Mitrohin p. 409-440
Essor des cultures de soi
- Devenir soviétique grâce aux échanges épistolaires ? : Préparer la réinsertion sociale des prisonniers du droit commun en URSS dans les années 1960-1970 - Larissa Zakharova p. 491-516 L'article analyse la correspondance et les engagements d'un membre de l'Union des écrivains de l'URSS, Natal'ja Četunova, dans la défense des criminels de droit commun, afin de nuancer une vision associant la période brejnévienne à une lutte renforcée contre la criminalité. Cette étude des échanges épistolaires entre l'écrivain et un détenu d'une colonie de régime spécial, Viktor Černyšev, permet d'apprécier le rôle de la correspondance dans la construction et l'évolution du lien social à distance entre deux personnes occupant des positions diamétralement opposées dans la hiérarchie sociale. L'une jouit du prestige social associé à sa profession d'écrivain. Elle prend au sérieux sa fonction d'« ingénieur des âmes » pour entreprendre le travail de rééducation d'un prisonnier et lui inculquer les normes de la société soviétique. L'autre, un être marginal et stigmatisé, exècre ce régime qui l'a condamné de nombreuses fois. Dans un lieu d'enfermement avec un régime restrictif de la correspondance, à une époque où les autorités abandonnent le discours optimiste sur les « criminels corrigibles », la lettre devient un instrument efficace de la réinsertion sociale et du remodelage des individus.Epistolary exchange as a means of becoming a Soviet citizen again?
This article analyzes the correspondence and commitments of a member of the USSR Union of Writers, Natal'ia Chetunova, who defended common law criminals. It aims to qualify a vision associating the Brezhnev era with reinforced struggle against criminality. This study of epistolary exchanges between the writer and a prisoner held in a colony with special regime, Viktor Chernyshev, helps to appreciate the role played by correspondence in the building and evolution of a long-distance social relationship between two persons at both extremes of the social ladder. The former enjoyed social prestige related to her profession as a writer. She took her function as an “engineer of the human soul” seriously while re-educating a prisoner, teaching him Soviet society's norms. The latter was a marginal and stigmatized person hating the regime that condemned him to several terms. In a place of reclusion with restrictive rules regulating correspondence, during a period when the authorities gave up their optimistic discourse on “corrigible criminals,” the letter became an effective tool for the social reintegration and refashioning of individuals. - Making selves through making things : Soviet do-it-yourself culture and practices of late Soviet subjectivation - Alexey Golubev, Olga Smolyak p. 517-541 Cet article explore les pratiques soviétiques du « faire soi-même » en tant que domaine d'interaction entre des modèles et des pratiques de subjectivation dans lequel l'engagement à réaliser des choses par soi-même est devenu partie intégrante des processus constitutifs des sujets soviétiques. L'analyse des magazines féminins soviétiques montre qu'en dépit de l'aspect traditionnel attaché à cet acte, fabriquer des choses de ses propres mains était perçu comme une pratique moderne qui, avec le discours qui lui était associé, a plongé les femmes soviétiques dans un espace panoptique où elles pouvaient à tout moment être observées, évaluées, classées, selon leurs capacités à créer et réaliser par elles-mêmes ce qu'elles étaient censées produire. L'analyse du discours des revues techniques soviétiques permet de conclure à la mise en évidence d'une normalisation sociale d'une version particulière de la masculinité : technocratique, rationnelle et socialement extravertie. Dans l'ensemble, les pratiques soviétiques du faire soi-même ont établi un espace culturel extrêmement genré à la fin du socialisme. En outre, ces pratiques ont été un champ important de la décentralisation des pratiques de subjectivation, car elles étaient en résonnance avec le discours sur la personne soviétique en tant que sujet créatif, autre tendance discursive constitutive de la culture et de l'idéologie officielles soviétiques.This article explores Soviet do-it-yourself practices as a field of interplay between patterns and practices of subjectivation in which engagement in the making of things with one's own hands became an integral part of the processes constituting Soviet subjects. Our analysis of Soviet women's magazines shows that making things with one's own hands was, despite its traditional outlook, a modern practice that immersed, through associated discourse, Soviet women into a panoptic space where they could at any moment be observed, evaluated and classified according to their do-it-yourself skills. Analysis of Soviet technical journals allows for a conclusion that their discourse aimed at the social normalization of a particular version of masculinity: technocratic, rational and socially extroverted. On the whole, Soviet do-it-yourself practices established a highly gendered cultural space in late socialism. In addition, these practices were an important field for the decentralization of practices of subjectivation, because they resonated with another discursive trend constitutive for Soviet official culture and ideology: discourse on the Soviet person as a creative subject.
- The spirit of late socialism and the value of transformation : Brezhnevism through the lens of post-Soviet religious revival - Sonja Luehrmann p. 543-563 Cet article conteste la thèse d'un renouveau religieux durant l'époque brejnévienne et cherche d'autres explications à la façon dont cette période a façonné les consciences et les habitudes des activistes religieux postsoviétiques. En s'appuyant sur des recherches archivistiques portant sur le travail culturel de l'époque brejnévienne dans la région de la Moyenne Volga, ainsi que sur des entretiens avec des activistes religieux postsoviétiques, l'auteur avance que le renouveau religieux a davantage été un phénomène postérieur à la perestroïka. Cependant, il a été possible grâce à une contradiction centrale des années Brežnev : l'hommage rhétorique durable à la nouveauté et au changement social et personnel, sous un régime qui entravait drastiquement toute véritable initiative de changement. Professeurs, propagandistes, journalistes et autres représentants de professions de la sphère culturelle devaient constamment justifier leur utilisation de « nouvelles méthodes » et de « nouvelles approches ». Ils apprirent à décrire les effets de leur travail en termes de « spiritualité » et de « développement spirituel », ce qui, en pratique, signifiait à peine plus qu'être pourvu d'une éducation classique et faire preuve d'une bonne éthique de travail. Comme la pratique religieuse était devenue plus accessible durant la perestroïka et au début des années 1990, certains de ces professionnels y virent une voie vers une transformation plus radicale. La combinaison des preuves biographiques et documentaires repoussa les limites temporelles de l'ère brejnévienne : l'hommage krouchtchevien au changement survécut à la « stagnation » brejnévienne. Celle-ci, à son tour, favorisa l'éclosion d'un lexique de la spiritualité, plus communément associé à la perestroïka et à ses lendemains.This article challenges the thesis of a Brezhnev-era religious revival, and looks for alternative explanations for how this time period shaped the outlooks and habits of post-Soviet religious activists. Drawing on archival research on Brezhnev-era cultural work in the Middle Volga region, as well as biographical interviews with post-Soviet religious activists, the author argues that religious revival was largely a post-perestroika phenomenon. However, it was enabled by a central contradiction of the Brezhnev years: the enduring rhetorical homage to newness and social and personal change, under a regime that severely curtailed any real initiatives of change. Teachers, propagandists, journalists and other members of cultural professions constantly had to document their use of “new methods” and “new approaches,” and learned to describe the effects of their work in terms of “spirituality” and “spiritual development,” which in practice meant little more than classical education and good work ethics. As religious practice became more accessible during perestroika and in the early 1990s, some of these professionals found it to be a path toward more radical transformation. The combined biographical and archival evidence breaks open the temporal boundaries of the Brezhnev era: Khrushchevite homage to change survived under conditions of Brezhnevite “stagnation,” which in turn germinated the lexicon of spirituality that is more commonly associated with perestroika and its aftermath.
- Devenir soviétique grâce aux échanges épistolaires ? : Préparer la réinsertion sociale des prisonniers du droit commun en URSS dans les années 1960-1970 - Larissa Zakharova p. 491-516
Les médias et les arts en quête d'audience et de marché
- Friends in low places : Russian amateur theaters and their sponsors, 1970-1983 - Susan Costanzo p. 565-588 Cet article étudie les relations des théâtres amateurs novateurs dans les villes de la République russe avec les sponsors locaux dans les clubs, les départements culturels et au Komsomol. Les organisations au niveau du rajon, de la ville ou de l'oblast' jouissaient d'une grande liberté en matière culturelle et recouraient aux services des amateurs pour atteindre les objectifs annuels. Le théâtre amateur a constitué une importante composante des activités culturelles là où il n'y avait pas ou peu de théâtres professionnels. C'est dans ce climat que les amateurs populaires ont forgé des relations symbiotiques avec ces amis « du bas de l'échelle ». Leur soutien mutuel a engendré des productions novatrices qui ont renforcé la vie culturelle locale et parfois même défié les priorités centrales. La pièce d'Aleksandr Volodin, Dve strely, produite au Maneken de Čeljabinsk et celle d'Evgenij Švarc, Drakon, à Moscou et à Leningrad constituent quelques exemples spécifiques de ces productions.This study of innovative amateur theaters in cities of the Russian Republic examines their relationships with local sponsors in clubs, the Komsomol, and culture departments. Organizations at the raion, city, or oblast' level had discretion in cultural matters and needed amateurs' services in order to meet annual goals. Amateur theater provided an important component of cultural activities especially in places with few or no professional drama theaters. In this environment, popular amateurs forged symbiotic relationships with these friends in low places. Their mutual support led to innovative productions that enhanced local cultural life but sometimes defied central priorities. Specific examples of these productions include Aleksandr Volodin's play Two Shots at the Maneken Theater in Cheliabinsk, and Evgenii Shvarts's The Dragon in Moscow and Leningrad.
- Imiter le marché, une recette pour le cinéma soviétique ? : L'histoire du Studio artistique expérimental (1965-1976) - Irina Tcherneva p. 589-621 L'histoire du Studio expérimental def cinéma (1965-1976) a fait l'objet de nombreuses interprétations politiques. La cohabitation du système d'économie planifiée avec celui d'économie de marché incite en effet à de multiples analyses de la réforme Kosygin au sein de laquelle elle s'inscrit. Avant d'en mettre en lumière les répercussions artistiques, l'article situe précisément les propositions économiques des expérimentateurs. Elle décrit ensuite les liens qu'entretenaient les fondateurs du Studio avec le Conseil des ministres et l'administration du cinéma, qui étaient loin d'être opposés au projet. Enfin, elle montre comment l'alternative économique devint un outil de pression et réduisit l'autonomie des réalisateurs comparativement aux studios classiques.Was the adoption of the market model a viable choice for Soviet film?
The history of the Experimental Film Studio (1965-1976) has been the subject of numerous political readings. Indeed, the cohabitation of planned and market economies encourages analysis of the Kosygin reform, whose scope included the studio. Before focusing on the artistic consequences of that choice, the article characterizes the studio's specific economic purpose. It then moves on to describing the relationships between the studio, the Council of ministers and the film administration, which were far from being set against the project. Last, it shows how the economic option of the studio became a tool of pressure to such an extent that filmmakers did not have as much autonomy as they did in the classic studios. - In search of the Soviet reader : The Kosygin reforms, sociology, and changing concepts of Soviet society, 1964-1970 - Simon Huxtable p. 623-642 Après la chute de Hruščev et la mise en œuvre des réformes de Kosygin, les journaux soviétiques passèrent d'un système d'exploitation centralisé à un système d'économie de marché. Afin d'optimiser les ventes, les journalistes avaient besoin d'informations plus précises sur les lecteurs et firent appel aux services de sociologues. Cet article, qui s'appuie essentiellement sur le journal de la jeunesse Komsomol'skaja pravda, examine les conséquences du bref échange des journalistes avec les sociologues, tant pour savoir comment les journalistes comprenaient les lecteurs que pour déterminer l'impact de cette perception sur leur représentation de la société soviétique. Alors que certains journalistes voyaient la nécessité de modifier les orientations du journal, d'autres résistaient aux conclusions des sociologues, soit par suite d'une confusion sur l'identité du « lecteur de masse », soit parce que d'aucuns considéraient plus important d'éduquer le lecteur et de transformer ses goûts et ses opinions.Néanmoins, la sociologie eut un effet durable. L'article met en avant la mise en place d'une « esthétique » sociologique devant beaucoup à l'idée qu'une ère de « socialisme développé » requérait de procéder à un examen réaliste d'une société en mutation, plutôt que d'insister sur des héros romantiques. En se concentrant sur la rubrique « Portrait social » du journal, qui recourait à des données sociologiques pour trouver le travailleur le plus « ordinaire » dans différentes professions, l'article conclut que, si cette nouvelle esthétique a pu décrire les valeurs du nouveau « mode de vie soviétique », elle a échoué à résoudre la question de savoir comment le pays pouvait progresser dans une période post-héroïque.After the fall of Khrushchev and the introduction of the Kosygin reforms, Soviet newspapers, which had previously had their print runs set centrally, were placed on a commercial footing. To maximise sales, journalists needed more accurate information about readers and enlisted the services of sociologists to help them. This article, which focuses on the youth newspaper Komsomol'skaia pravda, looks at the consequences of journalists' brief flirtation with the social sciences, both in terms of how journalists understood readers, and how it affected their representation of Soviet society. While some journalists saw a need to reorient the paper, others resisted the sociologists' findings, either because of confusion over the identity of the “mass reader,” or because some considered it more important to educate and transform readers' tastes and opinions. Nevertheless, sociology did have a more lasting effect. The article argues that a sociological “aesthetic” took hold, owing much to the idea that an era of “developed socialism” required a sober examination of a changing society, rather than a fixation on romantic heroes. Focusing on the paper's “Social Portrait” series, which used sociological data to find the most “ordinary” Soviet worker in various professions, the article argues that this new aesthetic may have succeeded in describing the values of the new “Soviet way of life,” but it failed to resolve the question of how the country was to move forward in a post-heroic age.
- Le théâtre Ilhom à Taškent : Retour sur les premières années d'un théâtre devenu légendaire - Lucille Lisack p. 643-668 Le théâtre Ilhom est actuellement présenté comme l'un des premiers théâtres non étatiques d'URSS. Fondé en 1976 sous l'égide du Komsomol et de la Société de théâtre d'Ouzbékistan, il jouit d'un statut administratif plus souple que les théâtres d'État rattachés au ministère de la Culture et devient un lieu important pour les milieux intellectuels et artistiques de la capitale ouzbèke. L'étude de ce cas permet d'analyser la vitalité du petit cercle qui se forme peu à peu autour de ce théâtre et sa position par rapport aux autorités, à la censure et aux théâtres de Russie. Au cours de son histoire, le théâtre Ilhom a acquis l'aura d'un théâtre d'opposition et ses premières années d'activité sont racontées comme une véritable légende. Cet article revient sur la vie du théâtre pendant la fin des années Brežnev, entre sa création en 1976 et sa première tournée à Moscou en 1982, pour tenter de comprendre à partir de quels éléments institutionnels, esthétiques et politiques s'est formée cette légende ; nous verrons comment son histoire témoigne d'une grande vitalité des recherches esthétiques dans ce cercle restreint.Ilkhom Theater in Tashkent
The Ilkhom Theater in Tashkent is currently presented as one of the first Soviet non-state drama theaters. Founded in 1976 under the aegis of the Komsomol and the Theater Society of Uzbekistan, it had a more flexible administrative status than other state theaters attached to the Ministry of Culture and became an important venue for Tashkent's intellectuals and artists. Studying its history allows one to analyze the vitality of the small circle that gradually formed around it and its position vis-à-vis the authorities, censorship, and other theaters in Russia. Throughout its history, the Ilkhom Theater has acquired an aura of opposition, and its early years of activity have come out as a legend. This article traces the life of the theater in the late Brezhnev era, from its creation in 1976 to its first tour in Moscow in 1982, and tries to ascertain what sort of institutional, esthetic, and political elements were at the source of that legend. It also shows how the history of the theater demonstrates the great vitality of the small group's esthetic research.
- Friends in low places : Russian amateur theaters and their sponsors, 1970-1983 - Susan Costanzo p. 565-588