Contenu du sommaire : Varia

Revue Raisons Politiques Mir@bel
Numéro no 55, novembre 2014
Titre du numéro Varia
Texte intégral en ligne Accessible sur l'internet
  • Un texte, un auteur

    • Transformations des langages et du travail critique des sciences sociales : Quelques propositions à partir de l'exemple des questions médicales - Nicolas Dodier p. 7-46 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
      L'article examine le travail critique que les sciences sociales accomplissent vis-à-vis du monde social. Il s'appuie pour cela sur l'examen d'un domaine spécifique : les recherches qui traitent, au sens large, de la médecine et des questions médicales. Il distingue deux niveaux d'analyse, celui classique des paradigmes, et un niveau plus transversal, celui des langages des sciences sociales. Chacun de ces langages est vu comme une manière de concevoir l'objet central des sciences sociales et de replacer le travail du chercheur dans des horizons d'attentes vis-à-vis du monde social. L'article montre que trois langages (ordre, force, pluralité) ont structuré les sciences sociales depuis les années 1950. À partir d'une discussion des apports et limites de chacun de ces langages, et au vu d'un retour sur certaines des recherches menées par l'auteur, l'article défend l'intérêt spécifique du langage de la pluralité et indique comment articuler aujourd'hui le travail descriptif et le travail critique à l'intérieur de celui-ci.
      Transformations of the langage and the critical work of social science. Some proposals from the example of medical issues The article examines the critical work that social sciences perform vis-à-vis the social world. It relies to the examination of a specific area: the social science research related to medicine and medical issues. The article distinguishes between two levels of analysis, the usual level of paradigms, and a more transverse one, the languages of social sciences. Each of these languages is seen as a way of conceiving the central focus of social sciences and to replace the work of the researcher in the horizons of expectations vis-à-vis the social world. The article shows that three languages (order, force, plurality) structured the social sciences since the 1950s. From a discussion of the contributions and limitations of each of these languages, and in the light of a return to some of the research conducted by the author, the article argues for the specific interests of the langage of plurality and indicates how to articulate today description an criticism.
    • Entretien critique avec Nicolas Dodier - Nicolas Dodier, David Smadja p. 47-59 accès libre
  • Varia

    • L'objectivité de l'art à l'épreuve du goût : Démocratisation culturelle, éclectisme et esthétique populaire - Emmanuelle Glon p. 61-83 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
      Le goût esthétique peut-il être réduit à une préférence culturelle incarnée ? Que la promotion d'un certain type de valeur esthétique dépende d'un contexte – qu'il soit social, économique, idéologique, générationnel, etc. – où s'actualisent des dispositions, a été largement popularisée par la sociologie de culture, d'inspiration bourdieusienne en particulier. Mais il reste à expliquer la façon dont elles s'actualisent. Sur le plan théorique, il faudrait notamment se demander si les propositions esthétiques utilisant des concepts d'évaluation, comme par exemple « original », « beau », « innovant », « complexe », etc., peuvent avoir une valeur de vérité. Il y a des valeurs épistémiques, comme la modération, le jugement, l'intelligence, le scrupule, etc. Qu'en est-il des valeurs esthétiques ? Même si les valeurs esthétiques ne sont pas applicables à tout le monde et dans n'importe quel contexte, nous défendons l'idée que nos jugements esthétiques peuvent être valides, autrement dit objectivement valables. L'article propose d'ouvrir le dialogue entre les sciences cognitives et de la sociologie de la culture. Dans la première partie, nous présentons un aperçu des approches existantes développées en sociologie des pratiques culturelles. Puis, après avoir exposé ces approches, nous proposons de les confronter à une analyse épistémologique plus large de la causalité sociale, entre réductionnisme et contextualisme. Dans la dernière partie, nous exposons brièvement « l'hypothèse de l'esthétique populaire », laquelle désigne comme d'autres types de connaissances implicites tels que « la physique populaire », nos interactions spontanées avec un certain type d'objet, à savoir les objets esthétiques.
      Objectivity of art and the challenge of taste: democratization of culture, eclecticism and folk aestheticsIs aesthetic taste just a matter of embodied cultural preference? It is commonplace that the promotion of a certain kind of aesthetic value depends on the context, be it social, economic, ideological, generational, etc., in which dispositions are actualised. This idea has been widely popularised by cultural sociology, Bourdieu's work especially. Now, how it matters is not clear. One theoretical topic is to ask whether aesthetic propositions using evaluative concepts, such like “original”, “beautiful”, “innovative”, “complex”, etc., can have a truth value. There are epistemic values, such as moderation, judgment, intelligence, scruple, etc. What about aesthetic values? Even though aesthetic values are not applicable to everyone everywhere, yet there is a sense in which our aesthetic judgments are valid. The article proposes to open the dialogue between cognitive science and cultural sociology. In the first section, I present an overview of the existing approaches developped in sociology about cultural practices. Then, after outlining these approaches, I engage them in a broader epistemological analysis of social causality, between reductionism and contextualism. In the final section, I briefly expose the “folk aesthetics hypothesis”, which, similar to other kind of implicit knowledge, such like “folk physics”, defins the spontaneous interaction with a certain kind of object – that is aesthetic objects.
    • La normativité démocratique, entre vérité et procédures : Pour une critique de la justification « épistémique » du principe de majorité de David Estlund - Carlo Invernizzi Accetti p. 85-102 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
      Résumé Cet article aborde la question du fondement philosophique de la normativité démocratique en la reliant à un débat qui a récemment suscité beaucoup d'intérêt à l'intérieur de la théorie politique : celui autour de la possibilité d'une justification « purement procédurale » du principe de majorité. Dans un livre de plus en plus influent, David Estlund a récemment soutenu qu'une telle justification est en fait impossible, et que la théorie de la démocratie doit donc nécessairement faire appel à un critère de légitimité « épistémique », c'est à dire à un principe de vérité normative indépendant des procédures par lesquelles les décisions politiques sont effectivement prises. À travers une analyse des travaux de Hans Kelsen sur le principe de majorité, nous montrons, dans un premier temps, qu'une justification purement procédurale du principe de majorité est en réalité possible, sans aller à l'encontre des objections soulevées par Estlund contre une telle entreprise. Dans un deuxième temps nous montrons ensuite qu'introduire un critère substantif de vérité normative dans le cadre de la théorie de la démocratie pose en réalité plus de problèmes qu'il ne résout, car c'est en contradiction avec les trois principes fondamentaux sur lesquels s'appuie la légitimité démocratique : une idée de liberté comme consentement, une idée d'égalité comme absence de discrimination entre les opinions individuelles et une idée de pluralisme comme reconnaissance de la légitimité propre au conflit politique.
      Democratic normativity, between proceduralism and truth. Towards a critique of David Estlund's “epistemic” justification of majority rule. This article addresses the question of the philosophical foundation for democratic normativity by tying it to a debate that has recently been attracting a lot of attention within the field of political theory: the debate concerning the possibility of a purely procedural justification of majority rule. In an increasingly influential book, David Estlund has recently argued that such a justification is in fact impossible, and therefore that democratic theory needs to rely on an “epistemic” criterion of legitimacy, by which he means a standard of normative truth that is independent from the procedures through which political decisions are actually taken. Through an analysis of the thought of Hans Kelsen on this topic I attempt to show, in a first part, that a purely procedural justification of majority rule is in reality possible, without running into the objections raised by Estlund against such a project. In the second part, I then seek to show that introducing a substantive criterion of normative truth within the framework of democratic theory ultimately raises more problems than it solves, because such a criterion proves to be in tension with three core democratic principles: an idea of freedom as consent, a notion of equality as the impossibility of discriminating between subjective viewpoints, and a notion of pluralism understood as referring to the inherent legitimacy of political conflict.
    • Normativité, interprétation et jugement en théorie politique - Aurélia Bardon p. 103-119 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
      Ce texte interroge le statut et le rôle de la théorie politique. L'argument défendu est que la théorie politique est différente des autres sous-disciplines de la science politique ainsi que de la science en général, à la fois du fait de son rapport à la normativité et du fait de son ambition qui est de l'ordre du jugement et de l'interprétation et non de l'ordre de la découverte de lois scientifiques de causalité. La théorie politique se distingue également de l'idéologie comme de la philosophie dans la mesure où sa normativité, bien qu'elle soit inévitable, est aussi inévitablement limitée.
      Normativity, interpretation and judgment in political theory
      This text questions the status and role of political theory. It is argued that political theory is different from other subfields of political science as well as from science in general, because of its relation with normativity and because it aims at judgment and interpretation and not at the discovery of scientific mechanisms of cause and effect. Political theory is also distinct from ideology as well as from philosophy to the extent that its normativity, although it is unavoidable, is also unavoidably limited in scope.