Contenu du sommaire : Enfants et relations internationales au XXe siècle

L'étude de l'action caritative pour les enfants affamés pendant et après la Première Guerre mondiale permet de décrypter les dynamiques à l'origine de l'humanitaire contemporain et la cristallisation de l'enfance en tant que cause internationale. À partir de 1914, l'engagement des États-Unis provoque un changement d'échelle des interventions humanitaires. L'enfant, figure victimaire de la violence militaire, favorise un compromis qui permet l'investissement des acteurs neutres sur le terrain humanitaire, mais aussi la création de nouveaux liens entre la communauté des donateurs et les bénéficiaires des programmes de secours. Des enfants des « malheureux » Belges aux enfants victimes des conséquences « né­fastes du bolchevisme », les interventions pour l'enfance affamée apparaissent dès lors comme un moyen d'intervention politique et un instrument pour convaincre les sociétés européennes de la supériorité du modèle libéral pour préparer un avenir de prospérité et de paix.

Cet article examine les actions de l'Unicef (United Nations Children's Emergency Fund) en faveur des enfants de l'Amérique centrale. Il analyse plus particulièrement les relations avec les autres organismes internationaux présents dans la région. En tant que successeur de l'UNRRA (United Nations Relief and Rehabilitation Administration), le Fonds continue à utiliser du personnel euro-américain et à appliquer des procédures appropriées à l'aide humanitaire. Dans le domaine de la nutrition, l'Unicef offre des prestations standard à court terme – pour l'essentiel la distribution du lait en poudre – même si la perpétuation de ces pratiques n'est pas viable en Amérique centrale. Au début des années 1960, sous la pression d'autres organismes internationaux ainsi qu'après les expériences du personnel sur le terrain, l'Unicef se transforme lentement en une agence qui se consacre à des plans de développement à long terme.

À la fin de juin 1931, douze hommes et femmes noirs venus de trois continents se rendirent à Genève pour une Conférence sur l'enfance africaine conviée par l'Union internationale de secours aux enfants. Les antécédents, les motivations et les termes des engagements respectifs de la douzaine de sujets des colonies ainsi que plus de 200 Occidentaux sont étudiés pour découvrir des sujets débouchant sur des impasses, des ententes, des différences reconnues, et de dresser le portrait des possibilités d'action que l'universalisme de l'entre-deux-guerres a pu offrir aux sujets coloniaux. En examinant les biographies ultérieures de ces participants, cet article tente d'évaluer l'impact qu'eut le nouveau discours des droits des enfants sur les pratiques et les identités du continent africain.

En 1959, les Nations Unies adoptent une Déclaration des droits de l'enfant. Il s'agit d'un traité controversé. En effet, travaillant à partir d'un texte des années 1920 et pris dans les tensions caractéristiques de la Guerre froide, ses auteurs successifs ne parviennent pas à harmoniser leurs objectifs. À partir de données archivistiques nouvelles et dans une perspective transnationale, cette contribution étudie les processus de genèse et d'institutionnalisation de cette Déclaration. Elle montre que l'instabilité du contexte post-1945 de même que les agendas parfois contraires des organisations internationales induisent l'adoption d'un traité fait de compromis controversés. Elle vise à illustrer l'idée que le consensus apparent autour des droits de l'enfant n'en est pas toujours un.

Cet article examine l'action humanitaire de l'association lausannoise Terre des hommes à ses débuts, durant les guerres d'Algérie et du Vietnam, de 1960 à 1969. Il porte sur son activité phare, l'adoption de fait et de droit d'enfants étrangers en Suisse. Il s'agit d'appréhender, d'une part, les relations de Terre des hommes avec le Comité international de la Croix-Rouge et l'État fédéral suisse, et d'autre part, le processus de modernisation du droit de l'adoption suisse.

En 1990, après le choc de la révolution roumaine vécue « en direct », le monde découvre avec stupeur la situation des enfants roumains institutionnalisés. Cette étude se propose de questionner la manière dont les médias occidentaux abordent la question des enfants roumains abandonnés. Il s'agit d'analyser comment se construit, en France et aux États-Unis, la cause des enfants roumains en danger. L'analyse de la couverture médiatique permettra de montrer que le processus de construction de l'image des enfants roumains et de la Roumanie subit l'influence de divers facteurs : politique intérieure, représentations autour de l'enfant, etc. Dans un autre registre, cette étude veut démontrer que le traitement accordé à cette question en France et aux États-Unis est similaire.