Contenu du sommaire : Faire l'école
Revue | Politique africaine |
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Numéro | no 139, 2015/3 |
Titre du numéro | Faire l'école |
Texte intégral en ligne | Accessible sur l'internet |
- Disparition de Stephen Ellis - Jean-François Bayart p. 3-4
Le Dossier : Faire l'école
- Penser la fabrique de l'école comme un objet politique - Hélène Charton p. 7-21
- Le mouvement musulman turc de Fethullah Gülen en Afrique subsaharienne : faire l'école au transnational - Gabrielle Angey-Sentuc p. 23-42 Cet article porte sur l'insertion d'un acteur religieux transnational originaire de Turquie dans les champs éducatifs d'Afrique subsaharienne. Le mouvement musulman de Fethullah Gülen est composé d'hommes d'affaires, d'intellectuels et d'enseignants turcs qui centrent leur action sur l'ouverture d'écoles dans le monde. L'insertion de ces écoles en Afrique subsaharienne, à partir de la deuxième moitié des années 1990, s'intègre dans le cadre d'une libéralisation des secteurs éducatifs du sous-continent. Nous examinerons comment le caractère transnational du mouvement conditionne la manière de « faire l'école » en Afrique subsaharienne, entre ouverture internationale, circulation des ressources (humaines et financières) et adaptation aux différentes offres et demandes éducatives africaines.This article focuses on the role of the Fethullah Gülen movement in the education sector in Sub-Saharan Africa. Fethullah Güllen is a transnational Muslim organisation, originating in Turkey, which focuses on the creation of schools worldwide. The insertion of these schools in Africa dates back to the second half of the 1990s, in the context of the liberalization of education. We examine how the transnational dimension of this movement impacts on the way it manufactures education, schooling and schools in Sub-Saharan Africa, through international alignment, (human and financial) resource flows and adaptation to the education market of specific African countries.
- D'une à plusieurs langues légitimes : langues d'enseignements et stratégies linguistiques en Éthiopie - Pierre Guidi p. 43-62 En 1994, le gouvernement éthiopien a instauré l'usage des langues locales dans l'éducation scolaire, après des décennies de domination de la langue amharique. Tandis que les élites locales sont favorables à la réforme, les paysans tendent à la rejeter car ils redoutent la déperdition de l'amharique, clé de la mobilité sociale. Cet article analyse les perceptions distinctes de ces groupes sociaux, à partir de leur position dans la distribution du pouvoir et du capital linguistique, tout en replaçant les enjeux locaux dans la politique nationale et les discours internationaux.In 1994, the Ethiopian government introduced the use of local languages in schools, after several decades of dominance of the Amharic language. While local elites are in favor of the reform, peasants question it because they suffer from the loss of Amharic, the key to social mobility. This article analyzes the distinct perceptions of these social groups, based on their positions in the distribution of power and of linguistic capital, while placing local issues in the national policy and international discourses.
- La micropolitique de l'école primaire au Bénin : Une ethnographie combinée des directeurs et inspecteurs - Sarah Fichtner, Pauline Jarroux p. 63-81 L'article se propose d'analyser conjointement les pratiques des directeurs d'école et des inspecteurs de l'enseignement, deux acteurs-clés de la scène scolaire locale au Bénin. À travers l'étude de leurs relations hiérarchiques au sein de leur administration ainsi que leurs interactions avec d'autres acteurs partenaires de l'école, il s'agit d'analyser comment leurs stratégies différenciées produisent le service scolaire et participent en même temps à la négociation des rapports d'autorité au sein de l'arène locale.The article proposes a joint analysis of headteachers' and school inspectors' practices, presenting two key actors of the local education scene in Benin. By studying their hierarchical relations within their administration, as well as their relationships with other school “partners”, we analyse how their different strategies produce the school service and participate at the same time in the negotiation of public authority within the local arena.
- Les sëriñ daara et la réforme des écoles coraniques au Sénégal : Analyse de la fabrique d'une politique publique - Clothilde Hugon p. 83-99 À travers une analyse historique des mutations de la profession de sëriñ daara (maîtres coraniques), il s'agit, dans cette contribution, d'étudier l'implication de ces acteurs religieux dans l'action publique des écoles coraniques (daara) au Sénégal. Depuis le lancement en 2002 d'un projet de « modernisation » des daara par l'État sénégalais, les sëriñ daara sont parvenus à se mobiliser. C'est en acteurs protestataires qu'ils se positionnent, en donnant une nouvelle définition à l'action publique sénégalaise en matière de réforme de l'éducation.By analyzing how the profession of Qur'anic teachers (sëriñ daara) has evolved over time, this article shows the involvement of these religious actors in the policy process of Qu'ranic schools (daara) in Senegal. Since the introduction of the « modernisation » program of the daara by the Senegalese State in 2002, the sëriñ daara have managed to become a mobilizing force in the policy process. They have become real protestors transforming the orientation of daara public policies.
- Écoles secondaires communautaires en Tanzanie : la bataille des notables dans le district de Lushoto - Sonia Languille p. 101-121 L'article questionne le modèle tanzanien de massification de l'enseignement secondaire, initié au milieu des années 2000 et basé sur une mobilisation sociale de grande ampleur. À partir du cas du district de Lushoto, il dévoile les luttes de pouvoir provoquées, dans l'espace local, par la mise en œuvre de la politique des écoles secondaires communautaires. Il illustre la manière dont les élites mobilisent la question éducative comme ressource politique et électorale, tout en obscurcissant le caractère inégalitaire des conditions de financement de leurs choix éducatifs.The article questions the Tanzanian model of mass secondary education, implemented as of the mid-2000s through a large-scale process of social mobilisation. Based on the case study of Lushoto district, the article unveils the power struggles unleashed by the implementation of the community secondary schools policy in the local arena. It sheds light on the ways by which elites mobilise education as a political and electoral resource, whilst obscuring the unequal nature of the funding mechanisms that underpin their education policy choices.
Conjoncture
- Premières leçons d'une « drôle » de transition en République centrafricaine - Roland Marchal p. 123-146 Alors que la situation intérieure en République centrafricaine peine à se stabiliser, il est important de revenir sur la nature de la crise que la communauté internationale essaie de résoudre en allant aux élections le plus rapidement possible. En mettant entre parenthèses son ancrage historique et la radicalité des déchirures du tissu social, les acteurs internationaux évitent de questionner la perpétuation au pouvoir d'une élite banguissoise prédatrice et d'une situation régionale dans l'impasse depuis trop longtemps.Despite nearly two years of international military presence the situation in CAR is hardly stabilized. The international community seems unable or unwilling to grasp the very nature of the crisis and underplays its deep historical roots as well as the intense destruction of the CAR social fabric. By getting to elections as early as possible, it also avoids questioning the status of a predatory elite that has been challenged by the crisis and a complex regional web of conflicts that allow armed groups to proliferate in CAR.
- Premières leçons d'une « drôle » de transition en République centrafricaine - Roland Marchal p. 123-146
Documents
- Putsch et politique de la rue au Burkina Faso : Quand les étudiants débattent du Régiment de sécurité présidentielle - Richard Banegas p. 147-170 En septembre 20151, un putsch perpétré par les soldats du Régiment de sécurité présidentielle, bras armé de l'ancien régime, interrompt brutalement la transition engagée onze mois plus tôt après la chute de Blaise Compaoré. Une vague de mobilisations citoyennes se lève alors dans le pays pour exiger leur départ et le respect de la « souveraineté du peuple » qui s'exprime dans la rue. En moins d'une semaine, la conjugaison des pressions externes et internes – notamment de l'armée loyaliste – fait échouer ce que les manifestants qualifient de « coup d'État le plus bête du monde ». Quelques mois plus tôt, sur le campus de l'université de Ouagadougou, les étudiants organisaient un débat en plein air sur ce RSP qui menaçait le processus démocratique. Leurs propos sont restitués ici, verbatim. Ces prises de parole publiques ne sont pas seulement prémonitoires ; elles expriment aussi une forme de vigilantisme civique qui s'affirme de pair avec une herméneutique subalterne de l'Histoire.In September 2015, the transition in Burkina Faso which had started after the fall of Blaise Compaoré eleven months earlier was brutally interrupted by a putsch led by soldiers of the Régiment de sécurité présidentielle (RSP), the armed wing of the old regime. The whole country was hit by wave of civic mobilisation demanding their ousting as well as respect for the “sovereignty of the people” expressed on the street. Within less than a week, external and internal pressures – especially from the loyalist army – brought down what demonstrators called the “world's most stupid coup”. A few months earlier, on the campus of the University of Ouagadougou, students organised an open air debate about the very same RSP which threatened the democratic process. What follows is the verbatim reproduction of part of these debates. These public speaking are not just premonitory. They also express a form of civic vigilantism which is being voiced together with a subaltern hermeneutics of History.
- Putsch et politique de la rue au Burkina Faso : Quand les étudiants débattent du Régiment de sécurité présidentielle - Richard Banegas p. 147-170
Lectures
- Autour d'un livre : Ricardo Soares de Oliveira, Magnificent and Beggar Land. Angola Since the Civil War, Londres, Hurst & Co, 2015, 291 pages - Didier Péclard p. 171-194
- Revue des livres - p. 195-205