Contenu du sommaire : Géopolitique et populations

Revue Espace Populations Sociétés Mir@bel
Numéro no 3, 2008
Titre du numéro Géopolitique et populations
Texte intégral en ligne Accessible sur l'internet
  • Éditorial - Christian Vandermotten p. 375-377 accès libre
  • Articles

    • Les violences faites aux peuples dans les logiques du système-monde - Christian Vandermotten, Stéphane Rosière p. 385-399 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
      Le but de cet article est de tenter de corréler, au-delà de leur hétérogénéité foisonnante, les violences faites aux populations – et notamment celles qui sont liées aux marqueurs ethniques — et les logiques du système-monde. Ce « système » global s'est fondé sur des bases économiques, mais reste politiquement marqué par une violence générique, celle de l'impérialisme ; par ailleurs, au-delà des rapports de force qui fondent le binôme centre-périphérie, les situations de domination et de subordination ne sont pas sans conséquence sur la nature des violences politiques d'une manière générale et les violences interethniques en particulier. L'enjeu de cet article est, précisément, de tenter de déterminer ce lien et de préciser les mécanismes qui sont alors en cause.
      This paper is an attempt to relate violence towards people — and especially ethnic- violence – to World-system's logics. The world-system is economically founded, but remains politically marked by the generic violence of the imperialism. Beyond the basic centre-periphery binomial, dominant and subordinate positions are not without consequences on the nature of the political violences in general and more particularly the inter-ethnical ones. This paper examines these links and the underlying mechanisms.  
    • Affiliation ethnique et pression sociale en Macédoine1 - Phalier Sardon p. 401-410 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
      Dans les pays issus de l'ancienne Fédération yougoslave existe une tradition ancienne de recueil de l'appartenance ethnique qui alimente des luttes de pouvoir entre les diverses communautés. De ce fait, chacun cherche à ce que sa communauté soit bien dénombrée, voire surestimée afin de lui permettre d'obtenir un maximum d'avantages. Cela entraîne tout un jeu de pressions et d'incitations dont les effets apparaissent dans les variations d'effectifs, d'un recensement à l'autre, impossibles à expliquer par la seule évolution démographique. Si la perméabilité d'un groupe à l'autre est rendue possible par le fait que, dans cette région, l'appartenance ethnique repose sur la déclaration personnelle, elle peut être renforcée par le fait que dans certains pays, en particulier en Macédoine depuis les accords d'Ohrid en 2001, la représentation politique des diverses communautés repose sur leur poids dans la population. Pour se faire une idée de ces changements dans la déclaration de l'affiliation ethnique au fil du temps, pour l'ensemble du pays, nous avons couplé, au niveau des municipalités, les réponses à la question sur l'affiliation ethnique des personnes ayant la même date de naissance. Cette procédure nous a ainsi permis de détecter les changements de déclaration. Plus de 700 000 couplages ont ainsi été réalisés. Sur l'ensemble de la Macédoine, 3% des personnes ont ainsi modifié leur déclaration d'affiliation ethnique entre 1994 et 2002, mais l'ampleur des changements varie largement selon la municipalité et le groupe ethnique. Il apparaît que la frontière la plus imperméable est celle de la religion.
      In countries of the former Yugoslav Federation there is a long-standing tradition of collection of ethnic affiliation, which sustains fights for leadership between communities. So, everybody tries to see his community very well numbered, even overestimated in order to maximalize advantages. This leads to a play of pressures and incitements whose effects can be seen in some population variations impossible to explain only with the demographic trend. Moves from one group to one another are authorized by the fact that, in this region, ethnic affiliation is only a personal statement. They can be reinforced in countries, especially in Macedonia since the 2001 Ohrid agreement, where political representations of communities are based on their weights in the total population. In order to get an idea on these moves in the ethnic affiliation declaration, answers to question about ethnic affiliation at the two consecutive censuses (1994 and 2002) of persons born the same day and living in the same municipality have been matched. This process permits to detect changes in declaration. More than 700 thousand matches had been done. On the whole Macedonia, 3% of persons have changed their ethnic affiliation declaration between 1994 and 2002, but extend of changes differs largely according to municipality and ethnic group. Religion seems to be the most impassable border.
    • The 'Demographic Rogue' and Borders in the Land of Israel - Ammon Kartin, Izhak Schnell p. 411-422 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
      Le modèle de Derrida explique comment « l'autre » est caractérisé en tant que menace à l'existence du « soi ». L'article propose une extension de ce modèle à la démographie, celle-ci jouant un rôle important dans les conflits internationaux quand elle est mobilisée comme une menace. Dès les années 1930, le facteur démographique a joué un rôle majeur dans les conflits de délimitation entre les mouvements nationaux juif et arabe dans la Palestine sous mandat britannique et a alimenté les craintes, haines et hostilités entre ces deux mouvements. L'instrumentalisation de la démographie au service des objectifs politiques s'est renforcée avec la création de l'État d'Israël et le sentiment de menace s'est encore accru lorsque Israël a franchi les lignes d'armistice et a occupé les territoires palestiniens en juin 1967. La forte croissance de la population palestinienne, sa rébellion contre l'occupant israélien et l'implantation de centaines de milliers de Juifs autour des villes et des villages palestiniens dans les territoires occupés ont entraîné le renforcement des controverses à l'intérieur de la société israélienne elle-même quant à la question de la nécessité ou non de séparer les populations arabes et juives et éventuellement d'établir une frontière fermée entre elles. L'appel des leaders des citoyens arabes israéliens à abandonner la caractère sioniste de l'État d'Israël a encore accentué la tendance à développer un discours démographique appelant à cette séparation.
      Derrida's rogue model explains how the 'other' is characterized to form a threat on the existence of the 'self'. Demography plays a critical role in international conflicts, by creating these feelings of threat. As early as the 1930's, the demographic factor has become a central component in determining the borderline between national movements in Palestine, under the British mandate governments. The following research shows how the feelings of threat increased since Israel broke through the armistice lines and occupied Palestinian populated territories in June 1967. A rapid demographic growth of Palestinian population, the outburst of Palestinian rebellion against Israeli rule, and settlement of hundreds thousands of Jewish people amongst Palestinian villages and towns in the occupied territories, increased controversy within Israeli society, regarding the issue of separating the populations and the need to determine a clear closed border between them. The call of Arab leaders, citizens of Israel, to change the state's Zionist character, even further increased the trend of forming a demographic discourse which calls for separation
    • The immigration Issues in the Post-Apartheid South Africa: Discourses, Policies and Social Repercussions - Gabriel Tati p. 423-440 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
      L'article présente une évaluation critique des traits majeurs qui ont marqué les discours politiques sur l'immigration en Afrique du Sud depuis les élections de 1994. Cette évaluation tente aussi de fournir des éléments d'appréciation sur les rapports entre ces discours et la montée de l'intolérance sociale envers les immigrés en provenance d'autres pays africains. Durant l'apartheid, la politique d'immigration, bien que très contrôlée, était en quelque sorte ouverte à la main-d'oeuvre non qualifiée venant de l'intérieur de l'Afrique australe. Depuis la chute de l'apartheid en 1994, la nécessité de reconstruire socialement le pays et, avec celle-ci, l'universalité dans l'accès aux services de base ont imposé un tournant dans la tonalité du discours sur l'immigration. Celle-ci est beaucoup plus marquée sur l'exclusion et la sélection des migrants du fait que le pays est de plus en plus confronté à une forte immigration et à un manque de main-d'œuvre qualifiée. Quelques répercussions politiques et sociales de ce tournant sont visibles à travers les rapatriements forcés, une opinion publique très négative sur l'immigration et des violences corporelles envers les immigrés africains dans le pays. Le climat de xénophobie, d'intolérance et de violence trouve ses racines dans les représentations sociales produites, d'une part, localement par le nouveau contrat de politique sociale de l'après-apartheid et d'autre part, au niveau international, dans la reconfiguration géopolitique de l'Afrique du Sud dans le contexte de la mondialisation des mouvements migratoires.
      The paper provides a critical appraisal of changes that have marked the political discourses on immigration from within and outside the Southern Africa region in the aftermath of the 1994 elections in the Republic of South Africa. It also provides insights into the connections of these changing discourses with the rise of social intolerance of immigration from other African countries. The immigration policy in the apartheid period was highly controlled and somewhat in favour of immigration of foreign labour within the Southern Africa region. In the post-apartheid period, the imperative of social reconstruction and with it that of universalism in service delivery have induced a shift in the discourse on immigration, making it markedly exclusionary and selective, since the country has had concurrently to deal with increased immigration flows (refugees, irregular and regular) and shortage of skills. This has had some social repercussions reflected in the negative public perception of immigration, especially that of African origin. The prevailing climate of xenophobia and other forms of social harassment towards African foreigners, accompanying the immigration discourses, finds its roots in the social representations brought, locally, about by the new dispensation of the post-apartheid regime and, internationally, by the redefinition of the strategic positioning of South Africa in the context of globalization.
    • La géographie de l'Extrême Droite peut-elle s'expliquer par l'« ethnocentrisme » des territoires ? Une analyse multiscalaire en Europe occidentale - Gilles Van Hamme p. 441-452 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
      Le vote d'Extrême Droite en Europe est associé à des positionnements individuels sur les questions de l'immigration, de la sécurité ou encore de la mondialisation. Cet article s'interroge sur la relation écologique entre le vote d'Extrême Droite et des attitudes comme l'intolérance vis-à-vis des étrangers. Nous montrerons que la géographie de l'« ethnocentrisme » est marquée par l'importance des oppositions entre les zones urbaines et métropolitaines et les zones plus périphériques ou d'industrialisation ancienne. Mais nous montrerons surtout que cette géographie des attitudes politiques typiques de l'Extrême Droite n'est pas corrélée à celle du vote en faveur des partis d'Extrême droite. Se pose alors la question centrale de la capacité – différenciée spatialement – des partis à mobiliser un électorat potentiel plus ou moins important. À travers une analyse multiscalaire qualitative, plusieurs pistes seront évoquées : les systèmes politiques nationaux, le contexte socio-économique ou l'importance d'un clivage urbain/périurbain.
      Extreme right voting in Europe is related to individual political attitudes such as intolerance toward the immigrants or fear of globalization. In this article, we raise the question of the ecological correlation between extreme right voting and political attitudes such as intolerance toward foreigners. We will show that the geography of “ethnocentrism” opposes urban and metropolitan areas with more peripheral or old industrial areas. But we will mainly show that the geography of political attitudes which are specific of the extreme right is not correlated with the geography of extreme right voting. It raises the question of the spatially differentiated capacity of these parties to rally their potential electorate. Through a multiscalar qualitative analysis, several responses will be explored: the political national systems, the socio-economic context or the importance of the urban/suburban cleavage.
  • Note méthodologique

    • De la difficulté de cartographier les itinéraires migratoires clandestins - Romain Liagre p. 453-461 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
      Les productions scientifiques concernant les migrations clandestines se multiplient, notamment sur la question des itinéraires empruntés. Le plus souvent, ils sont agrémentés de cartes censées retracer ces routes migratoires. Utilisées pour illustrer, rendre visible les itinéraires, la conception de ces cartes est rarement interrogée. C'est au processus même de construction de ces cartes, à ce qu'elles peuvent apporter à la compréhension des migrations clandestines mais aussi passer sous silence ou tout du moins tronquer que cet article est consacré.
      Scientific papers about clandestine migrations increase, especially on the subject of the question of their routes. They often are accompanied with maps supposed to redraw these routes. Used to illustrate, to throw light on the routes, the conception of the map is rarely asked. The aim of this article is precisely to wonder about the method of construction of this type of maps, and about the keys of explanation they can provide us, and sometimes suppress or truncate reality.
  • Dossier thématique

    • Faire figure d'immigré-E1 - Frédérique Cornuau, Xavier Dunezat p. 463-481 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
      En adoptant une démarche critique, cet article revisite plusieurs évidences qui parsèment les débats sur l'immigration en France. D'abord, tout en confirmant la féminisation du fait migratoire depuis les années 1960, il en relativise l'importance en prenant en compte les évolutions de longue période, l'invisibilité des migrations féminines passées et l'immigration dite irrégulière. Ensuite, tout en confirmant là encore la moindre présence des Européens parmi les immigrés, il propose l'hypothèse d'une « dé-européanisation » en partie administrée, sous l'effet des politiques facilitant la migration des Européens. Enfin, en combinant une approche diachronique et une approche synchronique, il atténue l'évidence que la France est une terre d'immigration majeure. La démonstration s'appuie sur les données du recensement de la population française depuis 1968 tout en recourant à une démarche pluridisciplinaire (démographie, sociologie).
      In this paper, we present a critical approach of several assumptions commonly made in the debates on immigration in France. First, while we confirm the feminization of the migration phenomenon since the 1960s, we put it into perspective by considering long-term evolutions, the invisibility of past migrations of women and so-called irregular immigration. Then, while we also confirm that there are less Europeans among migrants, we posit the hypothesis of a ‘de-Europeanization' partly resulting from policies favouring European migration. Lastly, combining diachronic and synchronic approaches, we question the assumption that France is a major country of immigration. Our demonstration is based on data from French censuses since 1968, with a multidisciplinary agenda (demography, sociology).
  • Compte rendu d'ouvrage

  • Comptes rendus d'articles