Contenu du sommaire : Sociétés à l'épreuve du SIDA

Résumé. L'actualité dramatique de l'extension du SIDA n'est pas étrangère à la vogue que connaissent aujourd'hui les approches historiques des grandes épidémies. Cette forte demande s'exerce en dépit des différences flagrantes qui opposent les caractéristiques épidémiologiques et médicales des épidémies du passé à celles du SIDA. Le choc qu'à exercé sur nos esprits l'émergence d'une nouvelle et terrible contagion — alors que nos sociétés pensaient avoir surmonté l'ensemble des maladies infectieuses — a conduit à rechercher dans le passé les raisons de se rassurer. Ce sont surtout les réactions des populations et des gouvernements qui paraissent inscrites dans la longue durée : la peur conduit à la fuite, au repli et souvent à la désignation des groupes boucs émissaires. Ce fut la règle hier, n'est-ce-pas le danger aujourd'hui ?

Résumé. Un certain discours épidémiologique a trop fait de l'Afrique, la terre d'élection du SIDA. Tout, de la nature à la culture, en passant par la pauvreté et le sous-développement contemporain paraît faire sens pour donner de l'Afrique l'image d'un continent qui, après lui avoir donné naissance (l'Afrique comme berceau du SIDA), succomberait sous ses coups dévastateurs. Cet excès de sens et surtout de stéréotypes explique pour une part l'attitude des Etats africains qui ont refusé jusqu'à récemment de déclarer leurs cas de SIDA à l'OMS. Mais pour une part seulement car, au-delà des enjeux idéologiques et des réactions nationalistes (assez compréhensibles), le problème du SIDA constitue pour les Etats africains, qui ne sont ni des Etats- Providence ni des Etats démocratiques, une épreuve sanitaire doublée d'une importante épreuve socio-politique.

Résumé. Aucune maladie depuis le choléra ne semble présenter un danger aussi grave pour la population. Son mécanisme est diabolique tant au plan médical puisqu'elle engendre une faillite des défenses de l'organisme, qu'au plan sociologique puisqu'elle touche les individus dans leurs comportements les plus intimes. Curieusement, le législateur n'applique pas à cette maladie les mesures que l'impératif de santé publique impose habituellement à toutes les maladies épidémiques. L'exemplarité de l'approche juridique de la MVIH en France consiste en une recherche d'un équilibre dans le conflit engendré par la rencontre de deux logiques, celle de la pandémie et celle du groupe, que le droit français, pour l'instant, par une étrange démission, se refuse à arbitrer au risque de son inefficience.

Résumé. Les médecins ont souvent recours aux psychiatres et aux psychologues pour aborder les difficultés spécifiques que posent les maladies chroniques. Le SIDA, avec son mauvais pronostic, rend cette collaboration particulièrement utile. Le déroulement de cette maladie présente des particularités qui génèrent angoisse et dépression. La séropositivité peut durer un temps indéterminé sans qu'apparaissent de symptômes. Les pratiques sexuelles ou plus généralement la recherche de la jouissance sont impliquées dans la transmission du virus. Ces données remettent en question le mode de vie des patients. Face à ces bouleversements, ceux-ci mettent en œuvre des mécanismes de défense classiques : isolation, déni de la maladie, etc. En général, on observe un premier temps de réflexion sur les origines et les conséquences de la maladie. Dans un second temps, s'affirme une clinique de la séparation d'avec les autres, puis d'avec la vie même.

Résumé. À partir de la synthèse des principales études nord- américaines et européennes déjà réalisées, l'auteur présente les difficultés méthodologiques rencontrées dans l'évaluation économique des coûts liés à l'infection par le VIH. Certaines sont communes à toute étude économique en santé : absence d'une méthodologie standardisée d'estimation des coûts, obstacles à une mesure précise des ressources consommées, caractère discutable de la mesure des coûts indirects par les pertes de production dues à la maladie, manque de bases de données complètes. D'autres sont plus spécifiques du SIDA : incertitudes sur le rythme d'extension de l'épidémie et rapide évolution des traitements et moyens de prévention disponibles.

Résumé. À partir d'un sondage effectué en Ile-de-France, cet article dégage les différents systèmes de réaction au SIDA qu'on observe dans la population. Deux groupes reflètent de façon assez pure l'opposition entre une gestion délibérée, jouant sur le libre consentement des personnes et une gestion répressive du SIDA. Les autres réactions constituent des systèmes plus composites, des compromis mettant en balance les « pour » et les « contre ». Ce qui, en plus des facteurs sociodémographiques, différencie alors ceux qui sont « pour » de ceux qui sont « contre » plus de contraintes, est la confiance accordée aux autres (et surtout aux séropositifs), l'assurance de soi mesurée à la capacité de s'adapter individuellement au risque, le fait de se déterminer essentiellement en fonction de soi-même et non de ses proches et de ses enfants. Loin de se conformer au seul discours des experts, la représentation du risque et de la maladie se fonde sur une diversité d'informations et d'expériences, sur des habitudes, des traditions, des convictions éthiques et des conditions de vie. L'article analyse ensuite les difficultés inhérentes à la politique de prévention face à tant d'attentes et de demandes différentes.

Résumé. Depuis 1985, les campagnes de prévention du SIDA mises en place en Suisse au niveau national, font appel à des stratégies coordonnées multi-médias. Ces campagnes qui touchent la population générale et des milieux particuliers, font l'objet d'un programme continu d'évaluation. Le suivi d'une telle entreprise pose des problèmes de validité scientifique mais aussi de rapidité des analyses et d'intégration des conclusions dans l'orientation des campagnes. Les options retenues sont présentées ainsi que les principaux résultats.