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Revue | Sciences Sociales et Santé |
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Numéro | vol. 17, no 2, juin 1999 |
Texte intégral en ligne | Accessible sur l'internet |
- La taxinomie des malades en anthropologie : aperçu historique et critique - Doris Bonnet p. 5-21 Résumé. Cet article vise à retracer un courant méthodologique et théorique de l'anthropologie de la maladie qui a débuté aux États-Unis à la fin des années soixante. Cette approche avait pour but la mise en forme classificatoire ou taxinomique des termes relatifs à la maladie dans les sociétés à tradition orale. Ce courant ethnolinguistique — appelé par des anthropologues américains « ethnosémantique » — a permis de faire valoir la grande richesse des termes vernaculaires utilisés pour désigner la douleur et décrire les maladies. Il a enrichi nos connaissances sur les représentations de la maladie des populations des pays en développement. Il a aussi été utilisé par le milieu médical pour mieux comprendre les plaintes des malades ainsi que les « ethno-théories » construites par les individus pour donner un sens à leur souffrance. À partir des années quatre-vingt, des critiques ont été formulées à l'égard de cette approche qui ne prenait pas suffisamment en compte, pour certains, le contexte « clinique » des pathologies décrites, ainsi que la variation des discours d'énonciation selon les milieux sociaux. Pourtant, ceux qui ont été à l'origine de ces critiques sont souvent les mêmes que ceux qui ont contribué à enrichir ce courant : apparaissent ainsi les notions de « réseaux sémantiques de la maladie », de « chaînes de représentations complexes », de « modèles explicatifs ». D'autres critiques, plus virulentes, concernaient la dépolitisation et la « déshistorisation » de ces recherches. Aujourd'hui, certains ethnologues se réclament d'une approche dite « émique » de la maladie (c'est-à-dire qui émane du discours de l'interlocuteur) et peuvent être considérés comme les représentants actuels de ce courant, à cela près qu'ils prennent en compte la variation contextuelle des situations d'énonciation et qu'ils font valoir une pluralité de logiques de pensée.Illnesses taxinomy in the fîeld of anthropology: historical and critical general survey This paper is aimed at tracing a methodological and theoretical trend of illness anthropology which appeared around the late 60' s. This approach was meant to classify or give a taxinomie form to terms relating to illness in societies with an oral tradition. This ethnolinguistic trend — which some north-american anthropologists called « ethnosemantic » — allowed to put forward the vast richness of vernacular terms used to refer to pain and describe illnesses. This trend has enriched our corpus of knowledge about representations of illness of populations in developing countries. It has also been used by the medical community in order to better understand patients' complaints as well as « ethno-theories » made up by individuals in order to give meaning to their suffering. As of the 80' s, this approach was critieized since it did not take sufficiently into consideration, according to some persons, the « clinical » background of the described pathologies as well as the variation of the way things were stated according to the social circles. However, those who launched these criticisms are often the very same persons who enriched this trend: this is why the notions of « semantic networks of illness », « chains of complex representations », « explanatory models » do appear. Other more virulent criticisms related to depolitization and « dehistorization » of these researches. At the present time, some ethnologists claim to adhere to an « emic » approach of illness (that is to say which arises from the interlocutor's speech) and they can be considered as the current representatives, apart from the fact that they take into account the contextual variation of statement situations and that they highlight the plurality of thinking logics.
- Catégories de médecins, catégories de malades (Commentaire) - Christiane Sinding p. 23-29
- La construction d'une rationalité : les médecins et la prescription de psychotropes aux personnes âgées - Johanne Collin, Nicole Damestoy, Raymond Lalande p. 31-52 Résumé. Une proportion importante de personnes âgées consomme des médicaments psychotropes et beaucoup d'entre elles le font pendant plusieurs années. Nombre d'études épidémiologiques démontrent pourtant que des risques accrus de troubles cognitifs, de chutes et d'hospitalisation sont associés à cette consommation. Aussi, il n'est pas étonnant de constater l'intérêt croissant pour ce phénomène et la multiplication des études axées sur « l'utilisation rationnelle des médicaments », c'est-à-dire l'utilisation définie par les autorités de santé publique selon les indications pour lesquelles les médicaments sont mis sur le marché. Cette démarche se fonde cependant sur l'a priori d'un comportement scientifique et standardisé de la part des médecins, les déviations aux normes cliniques étant d'emblée considérées comme irrationnelles. Or, c'est compter sans les facteurs dits « subjectifs » qui sous-tendent la relation thérapeutique, tels que le poids de la demande exprimée par le patient, la forte symbolique du médicament et de l'acte de prescrire. À partir d'une enquête portant sur les représentations des médecins concernant la prescription de psychotropes aux personnes âgées, cet article vise à cerner les étapes de la construction d'une rationalité face à la décision de prescrire.The perception of physicians about psychotropic drug prescribing to the elderly Recently, inappropriate use of medications has become a public health concern for the elderly population because of its widespread use and potential consequences on autonomy. Psychotropic medications are in and of themselves a category for which there are proven associations with negative health consequences in the elderly population (falls, confusion and associated morbidity and mortality). However, if the decision-making process leading to prescription or re-prescription depends on many other variables than the available pharmacological information, few studies exist on the social determinants, and especially on the « non- scientific » aspects, of psychotropic drug prescribing. This article presents the results of a study on the perception of physicians about psychotropic drug prescribing to the elderly and analyses the decision-making process surrounding the prescription.
- D'une rationalité à l'autre : ce que masque parfois la prescription de psychotropes (Commentaire) - Claudie Haxaire p. 53-57
- L'usage de l'alcool au sein de groupes de sans-abri - Emmanuel Roquet p. 59-75 Résumé. Cet article présente une étude des discours développés par les sans-abri sur les causes de leur alcoolisation. Il tente de montrer la prédominance d'un discours normalisant leur pratique du boire au sein de notre société. Une typologie des effets recherchés complète cette approche. Leur étude montre qu'ils ont tous un objectif commun : la modification de l'image du corps du sans-abri afin de devenir un être socialisable. Pour le sans-abri, l'alcool a valeur de drogue d'intégration.The use of alcohol within groups of homeless This article tries to study homeless discourses about the causes of their alcoholisation. It attempts to show the predominance of representation of their way of drinking as common as any body else's in our society. The study of researched effects completes this article. It shows that these effects have the same purpose: to change his attitude in order to become a socializable being. According to homeless people, alcohol is an integration drug.
- Bière et mise en bière : un point de vue ethnologique sur la mort des SDF (Commentaire) - Daniel Terrolle p. 77-81
Notes de lecture
- Joël Colin, L'enfant endormi dans le ventre de sa mère, Étude anthropologique et juridique d'une croyance au Maghreb, (préface de Camille Lacoste-Dujardin) - Anne-Marie Moulin p. 83-85
- Yankel Fijalkow, La construction des îlots insalubres, Paris 1850-1945 - Lion Murard p. 86-88
- Martine Bungener, Anne-Sylvie Poisson-Salomon, Travailler et soigner en réseau, Exemple des réseaux ville-hôpital pour la prise en charge de l'infection à VI H en région parisienne - Pierre Huard p. 89-90
- La rédaction a reçu - p. 91-97