Contenu du sommaire : Addictions : entre scientisme et compassion

Il s'agit ici d'interroger le titre du colloque, « Entre scientisme et compassion », à partir de l'analyse des termes mis en opposition. Cela permet de suggérer que les activités de soin destinées à ceux qui sont aux prises avec des conduites addictives doivent plutôt conjuguer le recours à la science – bien comprise et bien pratiquée – et le souci respectueux du sujet, considéré comme actif.

La clinique des addictions conduit les praticiens à proposer des modèles plus ou moins opérants, mais toujours transitoires et épistémologiquement très fragiles, dans la mesure où ils relèvent à la fois d'approches scientifiques et d'approches de sens. Les chercheurs, eux, vont au contraire s'opposer, par méthode, à ce qui apparaît comme un éclectisme de mauvais aloi, et chaque approche « particulière », biologie, psychanalyse, psychologie cognitive, etc., va tenter de rendre compte de la totalité du problème addictif sans emprunts à des disciplines étrangères. Ce texte, en analysant quelques exemples de modélisations bien connues, historiques ou actuelles, tend à montrer qu'aucune ne parvient tout à fait à atteindre son objectif. L'auteur soutient qu'à titre au moins provisoire, un « dualisme méthodologique », empruntant des notions tant aux neurosciences qu'aux sciences humaines et sociales, est une position indispensable pour rendre compte d'une clinique des addictions. Ce « dualisme » concerne moins une opposition entre disciplines, sciences de la vie d'un côté, sciences sociales de l'autre, que la différence de regard entre des approches objectives, et une vision subjective de la problématique addictive.

Cet article est une réaction à l'écrit de Marc Valleur « La nature des addictions ». Le commentaire s'intéresse particulièrement à une position fréquemment émise par les chercheurs en sciences humaines et sociales, laquelle met en cause un modèle médical en psychiatrie et en addictologie. Il semble qu'à l'arrière plan, exprimée ou non, est à l'œuvre une approche dualiste des relations esprit-matière. La critique du dualisme doit être accompagnée d'une réfutation aussi nette du réductionnisme radical à l'œuvre dans les neurosciences contemporaines.

L'addiction est une maladie complexe du système nerveux central et sans aucun doute multifactorielle. Ceci peut expliquer en grande partie pourquoi la recherche translationnelle dans ce domaine est difficile. En effet, il n'existe pas de modèles expérimentaux parfaits, répliquant point par point cette pathologie. Néanmoins, les avancées récentes, non seulement en recherche cognitive, mais aussi en recherche clinique, permettent de mieux comprendre la neuropathologie, et d'avoir une meilleure compréhension des mécanismes moléculaires et neurobiologiques conduisant à la pharmacodépendance et aux addictions. Il semble que le rapprochement des deux recherches (cognitive et clinique) est essentiel pour développer dans l'avenir de nouvelles stratégies thérapeutiques.

Cet article propose de montrer l'importance d'une bonne santé bucco-dentaire pour lutter contre les addictions et aider à la pérennisation des sevrages. Le chirurgien-dentiste est un spécialiste qui, par sa relation à son patient, ressemble à un médecin de famille. Il occupe donc une position stratégique vis-à-vis des addictions. Le tabac, l'alcool, les drogues illicites ne favorisent pas un bon état de santé bucco-dentaire, et ont un effet négatif sur le bon déroulement des soins prodigués par le chirurgien-dentiste. Un mauvais état de santé bucco-dentaire a aussi un effet négatif sur la réussite des traitements des addictions. Il s'agit de mettre en œuvre des moyens appropriés pour favoriser la coopération entre addictologues et chirurgiens-dentistes, et mettre en place une coordination entre praticiens des diverses spécialités concernées par la lutte contre les addictions.

Aux États-Unis, la constitution d'un champ d'intervention dédié à la toxicomanie s'est accompagnée d'une reformulation de l'offre religieuse au sein de la pluralisation des modes de prise en charge reposant sur les communautés thérapeutiques et la nouvelle psychiatrie. Dans cette histoire contemporaine des drogues, le traitement de la toxicomanie s'éloigne d'un modèle moral-religieux et s'inscrit dans une approche de plus en plus médicale et/ou répressive. Dans ce processus, nous assistons à un inversement des forces historiquement en présence, c'est-à-dire un affaiblissement de l'une (religieuse) au profit de l'autre (séculière). Au sein de cette redistribution, nous traitons d'un exemple d'une recomposition du croire en modernité religieuse, celui du mouvement Teen Challenge, un mouvement qui réactualise le mode d'intervention de la tradition sociale des protestants pour répondre aux problématiques nouvelles des classes pauvres et discriminées.

Introduisant son propos par la logique de la raison et du sens commun, l'auteur expose le raisonnement sur lequel repose l'essentiel de nos solutions face aux problèmes humains. Cette logique s'avère cependant inefficace sinon inapte face aux toxicomanies et aux comportements addictifs. Fort de ce préalable, l'auteur articule son exposé sur d'autres éléments davantage pertinents selon lui, et qui sont l'écologie clinique, mais surtout la thérapie stratégique appliquée au champ des toxicomanies.