Contenu du sommaire : Violence et société dans le cinéma latino-américain contemporain
Revue |
L'Ordinaire des Amériques Titre à cette date : L'Ordinaire latino-américain |
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Numéro | no 213, 2010 |
Titre du numéro | Violence et société dans le cinéma latino-américain contemporain |
Texte intégral en ligne | Accessible sur l'internet |
- Présentation - Claude Murcia p. 5-7
- El amor que conduce a la muerte: Profundo carmesí - Román Gubern p. 9-12 L'article propose une analyse de Profundo carmesí, un film noir original, basé sur des faits réels, qui trace le portrait d'un couple asymétique d'assassins, formé par un séducteur précaire – caricature du « conquistador » espagnol – et sa complice obèse, représentante d'un matriarcat régressif. Ce film constitue aussi une parodie des trames kitsch des feuilletons radiophoniques et télévisés, si populaires au Mexique.
- La société mexicaine au miroir du cinéma : au-delà du mélodrame - Sylvain Dreyer p. 13-30 Cet article entend rendre compte de l'articulation entre les esthétiques qui ont marqué la cinématographie mexicaine et une réalité nationale marquée par de grandes tensions historiques et sociales : la violence qui apparaît à l'écran serait un témoin des violences économiques et politiques qui travaillent la société mexicaine. La production récente semble se définir par rapport au mélodrame, le genre dominant des années 40 et 50 centré sur les conflits entre hommes et femmes ou entre riches et pauvres. Alors que certains comme Arturo Ripstein en proposent une relecture postmoderne qui va dans le sens d'une exacerbation tragique, d'autres cinéastes recyclent le mélodrame pour en faire un révélateur des problèmes actuels, en particulier l'émigration, la domesticité et la religiosité. La génération de cinéastes apparue au cours des années 2000 rejette quant à elle le mélodrame pour développer une esthétique du constat qui enregistre l'absurdité de destins individuels broyés par une réalité inhumaine et sombrant dans une violence aveugle.
- Narcocine : la descente aux enfers du cinéma populaire mexicain - Emmanuel Vincenot p. 31-54 Cet article cherche à proposer, dans une perspective historique, une première approche du narcocine mexicain. Après avoir situé les origines du trafic de drogue au Mexique, il explique pourquoi la naissance du narcocinéma au milieu des années 1970 est indissociable de celle du narcocorrido, puis il souligne la perpétuation de ce genre dans le cadre du videohome, système de production apparu au début des années 1990. Pour finir, il s'intéresse à la question de l'implication des cartels dans l'industrie musicale et cinématographique mexicaine.
- Mémoire des luttes contre les dictatures du Cône Sud (Argentine, Chili et Uruguay) dans le cinéma documentaire contemporain - Olivier Hadouchi p. 55-76 Les dictatures militaires du Cône Sud (Argentine, Chili et Uruguay) ont profondément marqué les sociétés de ces pays en tentant de mettre fin à une décennie d'aspirations au changement social et à une autre manière de faire du cinéma en Amérique latine. Pourtant, depuis la transition démocratique, une nouvelle génération de documentaristes perpétue une mémoire des luttes en donnant la parole aux vaincus et en reconsidérant les films militants des années 60. Ainsi, une mémoire des luttes contre les dictatures se constitue sans cesse au présent, en s'ouvrant à la sphère intime et à l'actualité régionale et internationale.
- Le massacre d'Indiens en Colombie : étude des registres filmiques - Angélica María Mateus Mora p. 77-94 A partir de la décennie 1970, certains cinéastes tournent leur regard vers la réalité de la violence qui touche les populations indiennes de la Colombie. La présente étude propose, à travers la présentation de trois films (Planas testimonio de un etnocidio, El pecado de ser indio et Caloto… un año después), une première analyse de la production cinématographique qui a abordé le thème des massacres perpétrés contre les Indiens. En montrant la diversité des langages cinématographiques et des registres de sens qui sont mis en œuvre par les cinéastes pour tenter d'exprimer une souffrance inexprimable, l'étude dégage quatre fonctions sociales de cette production filmique et audiovisuelle : informative, éthique, politique et mémoriale.
- La violence dans le dernier cinéma argentin - Joaquín Manzi p. 95-109 A la charnière des XXe et XXIe siècles, l'Argentine a vécu une période sociale et politique très agitée qui, par ailleurs, a vu l'éclosion d'une nouvelle génération de cinéastes. Leur filmographie est ici décrite pour en dégager trois cycles de représentation de la violence (les fictions urbaines et rurales, et les documentaires sociaux). Une dernière question ouvre sur les empreintes filmiques relativement modestes laissées par les traumatismes dus au terrorisme d'Etat des deux décennies précédentes.
- Tony Manero (2008) ou la violence high density - Emmanuel Larraz p. 111-122 Dans Tony Manero, Pablo Larraín a voulu dénoncer la violence de la misère, à la fois culturelle et matérielle, dans laquelle vivaient à l'époque de la dictature de Pinochet un grand nombre de ses concitoyens. Ne se contentant pas de montrer la dureté de la répression par la police politique et la pauvreté extrême des quartiers populaires, il s'attache à analyser également l'importance des mécanismes de manipulation qui aboutissent à l'aliénation de la population, à la fois par la télévision nationale et par les films que Hollywood qui contrôle les salles de cinéma impose dans toute l'Amérique latine. C'est ainsi que l'inquiétant héros du film, Raúl Peralta que joue l'excellent acteur Alfredo Castro, fasciné par le film Saturday Night Fever, sorti sur les écrans en 1978, ne rêve que de devenir le meilleur sosie chilien de Tony Manero, le personnage qu'interprète John Travolta. Raúl Peralta est prêt à tout pour atteindre ce but dérisoire.
- La desaparición forzada de personas y los límites de la representación cinematográfica en Los rubios - Ezequiel Yanco p. 123-139 Los rubios est le premier film à avoir abordé de façon cinématographique la crise de représentation socio-historique des disparus. L'indétermination de la condition de disparu et la fracture du récit social qu'elle porte en elle s'inscrivent dans la mise en scène avec une narration dédoublée entre corps et modes de représentation. A cela se rajoute un jeu constant d'oppositions – entre la fiction et le documentaire, entre mettre et retirer le corps, entre le privé et le public – qui renvoient aux limites de la représentation réaliste comme forme privilégiée de visualisation des corps qui ont été brutalement arrachés à la vie.
- La violence à l'épreuve de l'hybridation générique : El laberinto del fauno, de G. del Toro - Claude Murcia p. 141-150 Dans El Laberinto del Fauno, Guillermo del Toro met en scène un des épisodes du conflit meurtrier qui divisa durablement la société espagnole, les vainqueurs imposant pendant les 40 ans de la dictature une idéologie totalitaire et fascisante. Mêlant étroitement le drame historique et les codes génériques du conte, le film construit une représentation de la violence et des mécanismes de défense qu'elle génère lorsque l'être humain doit affronter les monstres du réel, acquérant de ce fait une valeur anthropologique.
Territoires & Sociétés
- L'organisation territoriale de la zone orientale des Chimalapas : du conflit à l'intervention d'acteurs dans une expérience participative - Mario Bolaños Mendez, Yanga Villagómez Velázquez p. 153-174 Dans cet article, nous présentons un projet de recherche développé à San Miguel Chimalapa, une commune de l'état de Oaxaca, situé au sud du Mexique, où il existe encore beaucoup de ressources naturelles qui représentent un défi pour toutes les populations indigènes qui y habitent. En collaboration avec une ONG mexicaine, des ateliers communautaires participatifs ont pu être développés afin d'organiser la cartographie territoriale dans le but de délimiter les zones destinées à l'exploitation du bois et de production agricole et de les différencier des zones de conservation et de réhabilitation. Pour comprendre les problématiques locales d'environnement, il faut connaître les relations autour des processus complexes liés aux conflits pour la possession de la terre et aux mouvements démographiques qui ont eu lieu, depuis plusieurs décennies, dans cette région.
- Construcción de la confianza en la certificación del Comercio Justo - Flurina Doppler, Alma Amalia González p. 175-197 L'article dresse un bref état des lieux de l'évolution du commerce équitable à partir de la situation de la caféiculture indienne au Chiapas. Les auteurs proposent une analyse du processus d'institutionnalisation comme stratégie centrale de construction de la confiance dans des mécanismes de certification qui s'appuient sur les valeurs et principes du commerce équitable. La distanciation entre les intérêts des organismes de certification et les intérêts des organisations paysannes que génèrent ces processus d'institutionnalisation est analysée. Au-delà des aspects négatifs qui sont relevés, l'article propose une évaluation spécifique du commerce équitable en tant qu'initiative portant implicitement une proposition de développement local.
- La problemática del sistema educativo en Chiapas - Teresa Pacheco Méndez p. 199-211 La prestation des services éducatifs au Mexique et, en particulier, dans les régions socialement et culturellement défavorisées comme le Chiapas, est confrontée à de sérieux problèmes dans la conjoncture que traversent actuellement les sociétés en développement. Ce travail s'intéresse à la problématique du système éducatif du Chiapas, avec l'objectif d'explorer les possibilités que la recherche en sciences sociales offre tant pour l'identification et l'interprétation de la situation éducative dans la région que pour définir les grandes lignes de la prise en charge sociale des problèmes identifiés.
- L'organisation territoriale de la zone orientale des Chimalapas : du conflit à l'intervention d'acteurs dans une expérience participative - Mario Bolaños Mendez, Yanga Villagómez Velázquez p. 153-174