Contenu du sommaire : Variations américaines
Revue | Politique Américaine |
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Numéro | no 30, 2018/1 |
Titre du numéro | Variations américaines |
Texte intégral en ligne | Accessible sur l'internet |
- Éditorial - Alexandra de Hoop Scheffer, François Vergniolle de Chantal p. 5-9
- Saper la reconstruction du Hezbollah : la diplomatie publique américaine au Liban depuis 2006 - Julie Chapuis p. 11-29 Depuis la victoire auto-proclamée du Hezbollah sur l'armée israélienne en 2006, les États-Unis ont redoublé d'efforts dans leur tentative de discréditer l'organisation chiite. Étant donné la ressource politique que représente le dispositif social du Hezbollah et l'occasion qui s'offre à lui de le réactiver après la guerre, la stratégie américaine a largement visé à saper la projection de sa puissance dans la reconstruction matérielle du pays. Pour défaire son autorité verticale d'abord, les États-Unis ont contribué de manière inédite au financement de la reconstruction post -2006 et ont soutenu le gouvernement libanais dans sa construction discursive d'un Hezbollah comme « ennemi de l'intérieur » qui s'appuie sur la criminalisation de sa politique de reconstruction. Pour mettre à mal sa légitimité horizontale ensuite, les États-Unis ont multiplié les campagnes de lobbying à travers l'USAID qui a financé les campagnes médiatiques du gouvernement et démarché de nombreuses ONG locales pour concurrencer l'aide apportée par les ONG satellites du Hezbollah dont les avoirs ont été gelés par le Trésor américain. C'est à cette stratégie offensive et à ses mécanismes de sape, dans le contexte de la reconstruction post -2006, que s'intéresse cet article.Since Hezbollah's self-proclaimed victory over the Israeli army in 2006, the US has renewed its efforts in their attempt to discredit the Shiite organization. Given the political resource that represents the social apparatus of Hezbollah and its opportunity to reactivate it after the war, the US strategy has been largely dedicated to undermining the projection of its power in the physical reconstruction of the country. To undo its vertical authority first, the United States contributed in new ways to finance the post-2006 reconstruction and supported the Lebanese government in its discursive construction of a Hezbollah as “enemy within” that relies on criminalization of its policy of reconstruction. To undo its horizontal legitimacy then the United States have stepped through USAID lobbying campaigns which funded media campaigns Government and canvassed many local NGOs to compete with the assistance of Hezbollah satellites NGOs whose assets were frozen by the US Treasury. This article will focus on this offensive strategy and its mechanism of weakening in the context of post-2006 Recovery process.
- Circonvolutions numériques : lorsque la public diplomacy des États-Unis se mettait à l'heure des réseaux sociaux - Raphaël Ricaud p. 31-51 En 2011, Judith McHale présenta le « Printemps arabe » et l'accès à l'information que permettaient les réseaux sociaux comme un double électrochoc qui allait profondément modifier la diplomatie publique (public diplomacy) des États-Unis. Or, d'autres forces étaient à l'œuvre. Une communication diplomatique incorporant les réseaux sociaux fut théorisée, débattue, mise en avant et promue bien en amont de la « révolution de jasmin ». D'une part, le paradigme communicationnel qui sous-tendait le type de diplomatie publique pratiqué par le gouvernement Bush fils était en effet inadapté au Moyen-Orient. D'autre part, les réseaux sociaux étaient dans l'air du temps lors du premier mandat Obama. Facebook, Twitter et autres applications furent donc intégrées à la communication diplomatique américaine, mais de manière prudente. En définitive, à l'instar de la diplomatie, la diplomatie publique connue une évolution et non une révolution.In 2011, Judith Mc
Hale presented the “Arab Spring” and the advent of social networks as a double revolution that would profoundly transform US public diplomacy. Yet the potential role of social networks in diplomatic communication had been theorized, debated, publicized and sold well before the Tunisian uprisings. This was partly because the Bush-era public diplomacy, based on a communication paradigm, failed to produce any results in the Middle East, and partly because social networks were seen as the latest must-have during Obama's first term. Facebook, Twitter and other apps were integrated into the US Department of State's communication arsenal, albeit cautiously. Just as is the case in the world of diplomacy, public diplomacy planners and actors adapted to the tools without really adopting their full potential. - Le Premier Amendement, élément paradoxal de la diplomatie publique religieuse des États-Unis au Moyen-Orient - Marie Gayte p. 53-81 Le 11-Septembre et les guerres menées par les États-Unis par la suite ont suscité une prise de conscience chez les Américains des soupçons de mépris, voire de franche hostilité envers l'islam dont les États-Unis font l'objet dans nombre de pays du Moyen-Orient. Pour éviter que cette méfiance à connotation religieuse ne vienne alimenter l'extrémisme violent dans la région, la diplomatie américaine s'est tournée vers une diplomatie publique religieuse. En cela, elle s'est affranchie de la première clause religieuse du Premier Amendement à la Constitution, longtemps interprétée comme interdisant tout recours à la religion. La diplomatie américaine se prévaut au contraire de la seconde clause religieuse de l'amendement, celle qui garantit la liberté religieuse. L'objectif est de façonner un message qui consiste à promouvoir au Moyen-Orient l'image d'une Amérique ouverte et tolérante envers l'islam. Ce recours à l'outil religieux montre néanmoins ses limites dans la mesure où il est difficile de dépasser l'approche à sens unique ainsi que celle visant à favoriser l'émergence dans la région d'un islam « américano-compatible ».9/11 and the wars waged in its wake by the United States led to the realization that Washington is often suspected of scorn, if not outright hostility, vis-a-vis Islam in many Middle Eastern countries. To stop this religiously-connoted suspicion from fuelling violent extremism, US diplomats started developing a religious public diplomacy. In doing so, they moved beyond a reading of the first religious clause of the First Amendment to the Constitution, hitherto seen as banning such a resort to religion. At the same time, they used the second clause guaranteeing religious freedom to shape a message destined to promote in the Middle East the image of an America that welcomes and embraces Islam. This use of the religious dimension has shown however a number of limitations, as it is proving difficult to go beyond the traditional one-way approach, as well as that consisting in fostering the emergence of a “US-compatible” Islam.
- Un bilan synthétique de l'évolution de la protection sociale aux États-Unis sous la présidence Obama - Daniel Béland, Alex Waddan p. 83-103 Cet article offre un bilan synthétique de l'évolution de la protection sociale aux États-Unis sous la présidence Obama (2009-2017) axée sur quatre grands enjeux soulevés par l'analyse du changement dans les politiques publiques. Premièrement, l'article montre comment la réforme de la santé de 2010 fut adoptée dans le contexte de l'avènement d'une éphémère « ouverture politique ». Deuxièmement, l'article utilise l'exemple de cette réforme pour souligner le rôle de la mise en œuvre dans l'analyse du changement dans les politiques publiques. Troisièmement, au lieu de se concentrer uniquement sur le long terme, l'analyse du changement dans les politiques publiques devrait également prendre le temps d'analyser les modifications temporaires aux systèmes de protection sociale, ce qui est le cas dans la présente contribution, qui discute la signification des mesures d'urgence adoptées en réaction à la récession durant les premières années de la présidence Obama. Finalement, l'article considère l'impact à long terme de l'inactivité législative relative qui se manifesta après les élections de mi-mandat de 2010, qui privèrent les Démocrates de leur double majorité au Congrès.This article provides a synthetic assessment of the evolution of social protection in the United States during the Obama Presidency (2009-2017), focusing on four major issues raised by the analysis of policy change. First, the article shows how the 2010 health care reform was adopted in the context of the opening of an ephemeral “policy window.” Second, the article uses the example of this reform to highlight the role of implementation in the analysis of policy change. Third, instead of focusing exclusively on the long-term, the analysis of policy change should also explore the temporary changes to social protection systems, which, in the context of this paper, points to the significance of the emergency measures adopted in response to the Great Recession in the early years of the Obama presidency. Finally, the article considers the long-term impact of the relative legislative inactivity that followed the 2010 midterm elections, which deprived the Democrats of their double majority in Congress.
- Un « modèle Biden » ? L'influence du vice-président au sein de l'administration Obama - Karine Prémont p. 105-136 La vice-présidence singulière de Richard Cheney (sous George W. Bush, 2001-2009) a soulevé maintes inquiétudes quant à l'émergence d'une « vice-présidence impériale », d'autant plus que les candidats à la présidence n'ont pas toujours de l'expérience en politique fédérale et que les précédents établis par les vice-présidents sont habituellement permanents. Cependant, le choix de Joe Biden par Barack Obama, en 2008, a rassuré ceux qui craignaient les excès de la vice-présidence, en particulier parce que le colistier a affirmé d'emblée qu'il tenterait de ressembler davantage à Lyndon B. Johnson (vice-président de John F. Kennedy, 1961-1963) et à Walter Mondale (vice-président de Jimmy Carter, 1977-1981) qu'à Cheney. En dressant le bilan de la vice-présidence de Biden, le but de cet article est double : d'abord, démontrer que son rôle a largement dépassé celui de Johnson, mais également le cadre fixé par Mondale et le modèle créé par Cheney ; ensuite, identifier les caractéristiques propres à la vice-présidence de Biden et, par le fait même, définir le « modèle Biden ».The peculiar vice presidency of Richard Cheney (under George W. Bush, 2001-2009) raised concerns about the emergence of an “imperial vice presidency”, especially as the presidential candidates do not always have experience in federal politics, and as the precedents established by the vice presidents are usually permanent. However, the selection of Joe Biden by Barack Obama, in 2008, reassured those who feared the excesses of the vice presidency, in large part because the running-mate said from the start that he would try to be more like Lyndon B. Johnson (John F. Kennedy's vice president, 1961-1963) and Walter Mondale (Jimmy Carter's vice president, 1977-1981) than Cheney. Taking stock of the Biden's vice presidency, the goal of this paper is twofold : first, to show that his role has far exceeded that of Johnson, but also the framework set by Mondale and even the model created by Cheney ; then, to identify the specific features of Biden's vice presidency and therefore, to define the ‘Biden model'.
- Vers la fin de la prohibition ? Convergences et disparités des initiatives de régulation du cannabis aux États-Unis - Ivana Obradovic p. 137-165 Pendant plusieurs décennies, les États-Unis ont compté parmi les garde-fous de la prohibition posée par les conventions de l'ONU sur les stupéfiants en se posant comme l'un des pays les plus sévères en matière de « guerre à la drogue ». Pourtant, en cinq ans, huit États sur cinquante ont franchi une étape inédite dans la régulation du cannabis en légalisant sa culture, sa vente, sa détention et sa consommation à des fins récréatives pour les adultes âgés d'au moins 21 ans, en dépit de l'interdit fédéral. Aujourd'hui, dans le troisième pays le plus peuplé du monde, un habitant sur cinq expérimente ainsi un nouveau système de régulation du cannabis par le marché légal, en dépit de l'interdit fédéral. La légalisation du cannabis « récréatif » vient complexifier une situation contrastée où 29 États fédérés sur 50 (et Washington DC) autorisent déjà l'usage thérapeutique de cannabis.Cette contribution décrit les processus engagés dans les États qui ont, depuis 2012, légalisé la détention et la vente de cannabis à des fins récréatives, afin d'identifier les propriétés et les conditions de possibilité d'une telle réforme. Elle souligne que ce changement peut être rapporté à plusieurs éléments de contexte, en premier lieu l'élection de Barack Obama à la présidence des États-Unis en 2008. L'analyse se prolonge avec un état des lieux des modèles de régulation mis en œuvre, soulignant leurs convergences et leurs disparités.For decades, the United States of America was seen as the post powerful supporter of the prohibitionist interpretation of the UN drug conventions and one strong promoter of the ‘‘war on drugs''. Yet, in five years, eight states out of fifty have taken a step in the regulation of cannabis – legalizing cultivation, sale, possession and recreational use of marijuana for adults aged 21 or older under state law, despite the federal ban. Today, in the third most populous country in the world, 20 of the US population lives in a jurisdiction experiencing a new system of marijuana legal regulation. The legalization of ‘‘recreational'' cannabis adds complexity to a contrasting situation where 29 out of 50 states (as well as Washington DC) already authorize the therapeutic use of cannabis. This paper examines the ongoing process in the states that have legalized the possession and sale of cannabis for recreational purposes since 2012, in order to identify the conditions for marijuana reform. It outlines the major background factors that may explain such legal evolutions, firstly the election of Barack Obama to the presidency of the United States in 2008. The analysis compares what we know about regulatory regimes now being introduced with significant disparities.
- Point de vue. Ukraine : un nouveau plan - Hall Gardner p. 167-185 Ce texte d'opinion plaide pour un règlement géopolitique commun entre les Etats-Unis, l'Union Européenne et la Russie sur le conflit en cours en Ukraine orientale et sur les conséquences de l'annexion de la Crimée. Il est absolument essentiel de considérer un règlement général avec Moscou qui se traduirait par une Ukraine décentralisée et formellement neutre pour plusieurs raisons : 1- empêcher une nouvelle partition de l'Ukraine, sinon de l'Europe dans son ensemble ; 2- empêcher la dissolution de l'OTAN et une tension toujours accrue en Europe ; 3- éviter progressivement une alliance militaire plus étroite de la Russie avec la Chine, l'Iran, la Turquie, et certains autres Etats ; 4- empêcher la possibilité réelle d'une nouvelle course aux armements très onéreuse qui, cette fois, mènerait à une guerre mondiale.This opinion piece advocates a geopolitical settlement of the Ukrainian conflict between the US, the European Union and Russia. It emphasizes the need for a neutral and decentralized Ukraine for the following reasons : 1 - prevent a partition of Ukraine and maybe of Europe itself 2 - prevent a dismantling of NATO and an increase of tensions in Europe 3 - prevent a growing military alliance between Russia and China, Iran, Turkey and other states 4 - prevent a costly new arms race that could eventually end up in a world war.
- Compte-rendu d'ouvrages - p. 187-194